Des coupures aideraient à la reprise des cours et à rendre à nouveau rentable l’huile de schiste américaine.
Certains pensaient que l’Arabie Saoudite allait infléchir sa stratégie. La déclaration du ministre du pétrole Ali Al-Naïmi le 23 février est claire : il n’y aura pas de coupures de production ! Des coupures aideraient en effet à la reprise des cours et du coup permettraient aux producteurs américains d’huile de schiste de redevenir rentables. Ali Al-Naïmi vient de confirmer que c’était le royaume saoudien qui décidait de l’avenir du pétrole.
On ne change pas une stratégie en pleine bataille
Tel pourrait être le message, selon le Financial Times, délivré par Ali Al-Naïmi à la conférence CERA à Houston. L’Arabie Saoudite aura une politique de gel de production plutôt que de baisse, car le royaume ne croit pas aux promesses des principaux producteurs de pétrole.
Difficile de croire aux promesses
En effet, comme dit le proverbe : les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent
Ainsi le ministre du pétrole saoudien a déclaré :
« Il y a moins de confiance que d’habitude… Peu de pays tiendront leurs promesses. Même s’ils disent qu’ils couperont leur production, ils ne le feront pas … »
Il y a eu une rencontre entre l’Arabie Saoudite, le Qatar et le Venezuela (membres de l’OPEP) et la Russie (deuxième plus grand producteur mondial de pétrole) le 16 février avec gel de leur production aux niveaux actuels, mais comment croire aux effets d’un tel accord ?
Le passé explique les doutes d’Ali Al-Naïmi. Comme nous l’écrivions à propos de la Russie, passager clandestin de l’OPEP :
« Alors que l’Arabie a régulièrement coupé sa production lorsque la demande ralentissait, ainsi que le demandait l’OPEP, force est de constater que cela n’a pas été le cas de la part de la Russie. Et pourtant au niveau des exportations de brut, la Russie est après l’Arabie le plus grand exportateur de pétrole. L’Arabie Saoudite a déjà essayé par le passé à ce que la Russie participe à l’effort de coupures. D’ailleurs en 2002, cette dernière s’était engagée à couper ses exportations de 150 kb/j pendant que l’OPEP coupait sa production de 1,5 Mb/j. De fait ni l’État ni les entreprises privées russes ne coupèrent leurs exportations … »
Pas en guerre avec l’huile de schiste américaine mais…
… même si Ali Al-Naïmi a indiqué que son pays n’était pas en guerre contre les États-Unis, il n’en demeure pas moins vrai qu’il ne désirait pas faire remonter les prix dans le but de permettre aux producteurs d’huile de schiste américains de devenir profitables. « C’est à eux de s’adapter au marché : ils produisent moins cher ou ils meurent … »
Où sont les prix ?
Au 20 janvier 2016, à 26,01 $/b, après une chute des cours du Brent depuis le début d’année de plus de 28%, les cours étaient à un niveau largement inférieur au plus bas atteint lors de la dernière chute du baril, consécutive à la crise financière de 2008 (33,76$ le 26 décembre 2008).
À ce jour, 23 février (à 33,27$), malgré le rebond de ces derniers jours, il est encore inférieur aux plus bas de la dernière crise
Le retour aux années 2000, avant le boom des prix, conséquence de l’essor de la demande chinoise
Ainsi à 28-33$, le Brent est revenu en ce début d’année 2016, à un niveau qui était le sien dans les années 2000-2005. À cette époque, même si la hausse de la demande chinoise était forte, la demande en elle-même ne représentait « que » 5 à 6 % de la demande mondiale, contre 25 % pour les États-Unis.
À partir de 2004, c’est le poids de plus en plus important pris par la Chine, qui fut la véritable source de la hausse du baril.
Que se passe-t-il du côté américain ?
Les forages aux États-Unis baissent de plus en plus
Et l’évolution des forages aux États-Unis, qui en début d’année avait montré une forte chute, indique de nouveau un recul marqué alors que sa stabilité avait semblé indiquer que l’huile de schiste avait trouvé son point d’équilibre :
Le graphe ci-après montre bien que la baisse du nombre de rigs s’est arrêtée mi-juin avant une petite progression et de nouveau un fort déclin :
À 413 forages au 19 février, le chiffre est au plus bas.
Cela incite à penser qu’aux niveaux de baril actuels, seuls sont mis en forage, des puits « profitables » et que la formidable hausse de production américaine relève dorénavant du passé.
Une production 2016 (vs 2015) déjà en recul de 150 kb/j à mi-février
La baisse des forages aux États-Unis a entraîné depuis le milieu de l’été 2015 une baisse très nette de la production américaine et on constate de plus en plus une accélération de cette chute.
Détaillée dans le tableau ci-dessus, on voit que la production recule maintenant de 150 kb/j (les derniers chiffres disponibles sont ceux du 12 février).
Et des projections d’accentuation du recul en 2016 et 2017 avant un rebond en 2018 car les prix auront remonté
Ainsi l’AIE attend maintenant un recul de 600 kb/j en 2016 et une nouvelle baisse de 200 kb/j en 2017.
Si l’AIE prévoit un nouveau rebond à partir de 2018, la raison en incombe à ce que, les marchés s’étant équilibrés, les cours du brut auront rebondi permettant de nouveau la rentabilité de l’huile de schiste et donc son redémarrage.
Cela démontre une nouvelle fois la recherche du prix d’équilibre chère à Ali Al-Naïmi, qui ne veut pas faire remonter les prix pour le plaisir des producteurs d’huile de schiste américains : « Soit ils produisent moins cher, soit ils disparaissent »
Conclusion
Depuis l’automne 2014, l’Arabie est entrée en guerre avec l’huile de schiste américaine et les conséquences que nous connaissons :
1) Effondrement des prix du brut
2) Asphyxie de nombreux pays pétroliers
3) Arrêt de la croissance de la production de brut américain et début d’un déclin
4) Baisse des investissements pétroliers :
t ce n’est pas parce que la production américaine commence à fléchir que l’Arabie va arrêter cette politique car :
1) L’Iran doit revenir sur le marché et avoir des prix bas (et surtout des perspectives de maintien à des prix bas) limitera l’ampleur de ce retour et en repoussera la date
2) Forte des leçons du passé, l’Arabie ne veut plus de passagers clandestins de l’OPEP
Avant de penser à une forte remontée des cours, l’Arabie se doit de « casser » l’huile de schiste américaine et limiter la croissance iranienne.
contrepoints
Certains pensaient que l’Arabie Saoudite allait infléchir sa stratégie. La déclaration du ministre du pétrole Ali Al-Naïmi le 23 février est claire : il n’y aura pas de coupures de production ! Des coupures aideraient en effet à la reprise des cours et du coup permettraient aux producteurs américains d’huile de schiste de redevenir rentables. Ali Al-Naïmi vient de confirmer que c’était le royaume saoudien qui décidait de l’avenir du pétrole.
On ne change pas une stratégie en pleine bataille
Tel pourrait être le message, selon le Financial Times, délivré par Ali Al-Naïmi à la conférence CERA à Houston. L’Arabie Saoudite aura une politique de gel de production plutôt que de baisse, car le royaume ne croit pas aux promesses des principaux producteurs de pétrole.
Difficile de croire aux promesses
En effet, comme dit le proverbe : les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent
Ainsi le ministre du pétrole saoudien a déclaré :
« Il y a moins de confiance que d’habitude… Peu de pays tiendront leurs promesses. Même s’ils disent qu’ils couperont leur production, ils ne le feront pas … »
Il y a eu une rencontre entre l’Arabie Saoudite, le Qatar et le Venezuela (membres de l’OPEP) et la Russie (deuxième plus grand producteur mondial de pétrole) le 16 février avec gel de leur production aux niveaux actuels, mais comment croire aux effets d’un tel accord ?
Le passé explique les doutes d’Ali Al-Naïmi. Comme nous l’écrivions à propos de la Russie, passager clandestin de l’OPEP :
« Alors que l’Arabie a régulièrement coupé sa production lorsque la demande ralentissait, ainsi que le demandait l’OPEP, force est de constater que cela n’a pas été le cas de la part de la Russie. Et pourtant au niveau des exportations de brut, la Russie est après l’Arabie le plus grand exportateur de pétrole. L’Arabie Saoudite a déjà essayé par le passé à ce que la Russie participe à l’effort de coupures. D’ailleurs en 2002, cette dernière s’était engagée à couper ses exportations de 150 kb/j pendant que l’OPEP coupait sa production de 1,5 Mb/j. De fait ni l’État ni les entreprises privées russes ne coupèrent leurs exportations … »
Pas en guerre avec l’huile de schiste américaine mais…
… même si Ali Al-Naïmi a indiqué que son pays n’était pas en guerre contre les États-Unis, il n’en demeure pas moins vrai qu’il ne désirait pas faire remonter les prix dans le but de permettre aux producteurs d’huile de schiste américains de devenir profitables. « C’est à eux de s’adapter au marché : ils produisent moins cher ou ils meurent … »
Où sont les prix ?
Au 20 janvier 2016, à 26,01 $/b, après une chute des cours du Brent depuis le début d’année de plus de 28%, les cours étaient à un niveau largement inférieur au plus bas atteint lors de la dernière chute du baril, consécutive à la crise financière de 2008 (33,76$ le 26 décembre 2008).
À ce jour, 23 février (à 33,27$), malgré le rebond de ces derniers jours, il est encore inférieur aux plus bas de la dernière crise
Le retour aux années 2000, avant le boom des prix, conséquence de l’essor de la demande chinoise
Ainsi à 28-33$, le Brent est revenu en ce début d’année 2016, à un niveau qui était le sien dans les années 2000-2005. À cette époque, même si la hausse de la demande chinoise était forte, la demande en elle-même ne représentait « que » 5 à 6 % de la demande mondiale, contre 25 % pour les États-Unis.
À partir de 2004, c’est le poids de plus en plus important pris par la Chine, qui fut la véritable source de la hausse du baril.
Que se passe-t-il du côté américain ?
Les forages aux États-Unis baissent de plus en plus
Et l’évolution des forages aux États-Unis, qui en début d’année avait montré une forte chute, indique de nouveau un recul marqué alors que sa stabilité avait semblé indiquer que l’huile de schiste avait trouvé son point d’équilibre :
Le graphe ci-après montre bien que la baisse du nombre de rigs s’est arrêtée mi-juin avant une petite progression et de nouveau un fort déclin :
À 413 forages au 19 février, le chiffre est au plus bas.
Cela incite à penser qu’aux niveaux de baril actuels, seuls sont mis en forage, des puits « profitables » et que la formidable hausse de production américaine relève dorénavant du passé.
Une production 2016 (vs 2015) déjà en recul de 150 kb/j à mi-février
La baisse des forages aux États-Unis a entraîné depuis le milieu de l’été 2015 une baisse très nette de la production américaine et on constate de plus en plus une accélération de cette chute.
Détaillée dans le tableau ci-dessus, on voit que la production recule maintenant de 150 kb/j (les derniers chiffres disponibles sont ceux du 12 février).
Et des projections d’accentuation du recul en 2016 et 2017 avant un rebond en 2018 car les prix auront remonté
Ainsi l’AIE attend maintenant un recul de 600 kb/j en 2016 et une nouvelle baisse de 200 kb/j en 2017.
Si l’AIE prévoit un nouveau rebond à partir de 2018, la raison en incombe à ce que, les marchés s’étant équilibrés, les cours du brut auront rebondi permettant de nouveau la rentabilité de l’huile de schiste et donc son redémarrage.
Cela démontre une nouvelle fois la recherche du prix d’équilibre chère à Ali Al-Naïmi, qui ne veut pas faire remonter les prix pour le plaisir des producteurs d’huile de schiste américains : « Soit ils produisent moins cher, soit ils disparaissent »
Conclusion
Depuis l’automne 2014, l’Arabie est entrée en guerre avec l’huile de schiste américaine et les conséquences que nous connaissons :
1) Effondrement des prix du brut
2) Asphyxie de nombreux pays pétroliers
3) Arrêt de la croissance de la production de brut américain et début d’un déclin
4) Baisse des investissements pétroliers :
t ce n’est pas parce que la production américaine commence à fléchir que l’Arabie va arrêter cette politique car :
1) L’Iran doit revenir sur le marché et avoir des prix bas (et surtout des perspectives de maintien à des prix bas) limitera l’ampleur de ce retour et en repoussera la date
2) Forte des leçons du passé, l’Arabie ne veut plus de passagers clandestins de l’OPEP
Avant de penser à une forte remontée des cours, l’Arabie se doit de « casser » l’huile de schiste américaine et limiter la croissance iranienne.
contrepoints
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