Devant le Roi, Jouahri appelle à des ruptures
dans les politiques économiques
Devant le Roi, Jouahri appelle à des ruptures dans les politiques
économiques
(Photo MAP)
*Le Roi Mohammed VI, a reçu, vendredi 29 juillet au palais royal à
Tétouan, Abdellatif Jouahri, wali de Bank Al-Maghrib, qui a présenté au
Souverain le rapport annuel de la Banque centrale sur la situation
économique, monétaire et financière au titre de l'exercice 2015.*
La présentation du rapport annuel de Bank Al-Maghrib
était très attendue cette année. Abdellatif Jouahri, gouverneur de la
Banque centrale, avait été en plusieurs occasion extrêmement critique à
l'égard des politiques économiques suivies et on se demandait jusqu'où
il irait en présence du Souverain.
En fait, il est resté dans la tonalité habituelle, c'est-à-dire critique
certes, mais mesuré. Ses messages principaux concernent les limites de
la politique économique lancée en 2008 et basée sur la demande
intérieure, la nécessité d'un nouveau modèle économique basé sur
l'industrialisation, les exportations et la création d'emplois; et enfin
placer les orientations stratégiques du pays à l'abri des aléas et des
rivalités politiques.
Voici de larges extraits de cette présentation de Abdellatif Jouahri:
"Notre pays aura réalisé des avancées importantes, avec notamment un
redressement sensible des équilibres macroéconomiques et une
amélioration de son attractivité et de son rayonnement. Ces progrès lui
sont reconnus par les institutions et les investisseurs internationaux,
comme en témoignent les flux importants d’investissements dont il
bénéficie, le renouvellement de son accord au titre de la ligne de
précaution et de liquidité avec le FMI et les appréciations positives
des agences de notation.
"Grâce aux grands chantiers économiques, sociaux et institutionnels
lancés depuis le début des années 2000, notre pays dispose aujourd’hui
d’une infrastructure institutionnelle et économique conséquente. Cet
environnement favorable lui a permis une nette accélération de la
croissance et des avancées notables sur le plan du développement humain.
"Ces réalisations sont certes des acquis précieux qui gagneraient à être
consolidés, mais force est de constater cependant que *le rythme du
progrès s’est inscrit ces dernières années dans une tendance baissière*.
"En effet, malgré la conjonction de plusieurs facteurs favorables aussi
bien internes qu’externes,*l’atonie des activités non agricoles et de
l’emploi se poursuit*, notre tissu productif se fragilise et les progrès
sur le plan du développement humain restent en deçà des attentes et
faibles en comparaison internationale.
"Une telle situation nous amène à *nous interroger sur nos politiques et
nos stratégies* et nous interpelle sur la capacité de notre *modèle de
développement* à continuer à répondre aux attentes et aspirations de nos
concitoyens.
"C’est ce questionnement qui a été au centre du discours du Trône de
juillet 2014, appelant à une nouvelle approche dans l’élaboration des
politiques publiques plaçant le capital immatériel au centre des priorités.
"Le modèle basé sur la *demande intérieure comme moteur de la
croissance* qui a prévalu jusqu’à présent *a montré ses limites.* Outre
la faiblesse de la croissance et de la création d’emplois, la sensible
détérioration ces dernières années des déficits jumeaux, l’aggravation
du niveau d’endettement et la persistance d’un faible niveau de
compétitivité de notre tissu productif sont autant de signes de
fragilité qui reflèteraient son essoufflement.
"Aujourd’hui, *notre pays a besoin d’initier une véritable refonte de ce
modèle et une série de ruptures *au niveau de la conception et de la
mise en oeuvre des politiques publiques.
*"L’industrialisation*créatrice de valeur ajoutée et d’emplois de
qualité devrait être au centre de ces mutations à côté des autres
stratégies sectorielles lancées ces dernières années mais dont les
résultats jusqu’à présent restent contrastés.
"La dynamique à l’export du secteur automobile et, dans une moindre
mesure, de certains autres métiers mondiaux se poursuit, mais les effets
d’entraînement sur l’économie demeurent encore limités. A cet égard, la
mise en place *d’écosystèmes* est une orientation prometteuse qui
devrait, si les objectifs qui leur sont assignés se matérialisent dans
des délais raisonnables, améliorer les résultats de ces stratégies et
renforcer les petites et moyennes entreprises, épine dorsale du tissu
industriel.
"Ce constat rappelle encore une fois la nécessité *d’évaluer le
rendement de ces plans sectoriels*, leur phasage et leur *cohérence*
d’ensemble. Cette évaluation devrait être systématique et revêtir un
caractère institutionnel à travers la mise en place de dispositifs ou
d’entités dédiées, permettant une analyse ex-ante, un suivi régulier et
rapproché pour opérer les ajustements éventuels dans des délais appropriés.
"Plus globalement, nous estimons que pour un meilleur encadrement du
développement économique et social de notre pays, la mise en place d’une
*planification stratégique* serait appropriée. Celle-ci permettrait de
mieux répondre aux exigences d’une vision globalisée et cohérente, avec
une priorisation des objectifs et une optimisation dans l’utilisation
des ressources.
"Sur le plan de notre politique d’ouverture, les difficultés économiques
persistantes auxquelles fait face la zone euro, notre partenaire
traditionnel, et l’inertie de l’intégration maghrébine confortent
l’orientation vers la diversification des partenariats en particulier en
direction de l’Afrique et des pays du CCG ainsi que vers les pays
influents sur la scène économique et politique internationale.
"Elle permet aussi bien à notre système bancaire qu’à nos entreprises de
s’appuyer sur de *nouveaux relais de croissance* et de consolider la
position du Maroc en tant que plateforme de transition entre l’Afrique
et le reste du monde. La réussite de ces partenariats nécessite
cependant un suivi rapproché des autorités et une mobilisation par les
opérateurs de moyens à la hauteur des engagements pour que notre pays
préserve son statut de partenaire crédible.
"Le choix de l’ouverture fait par notre pays nous a amené à initier ces
dernières années une réflexion sur l’opportunité d’opérer une
*transition graduelle vers la flexibilité de notre régime de change.*
"L’objectif visé est l’amélioration de la capacité de notre économie à
absorber les chocs extérieurs, tout en donnant un signal de confiance
aux partenaires extérieurs. Une telle approche est de nature à permettre
aux opérateurs de disposer de délais suffisants pour s’adapter
progressivement à un environnement plus exigeant et pour développer la
capacité et le savoir-faire nécessaires.
"Ce choix permettra par ailleurs de renforcer l’autonomie de la
politique monétaire et d’améliorer la transmission des décisions de la
Banque centrale à l’économie réelle.
"Bank Al Maghrib pourra ainsi opérer le passage au ciblage d’inflation,
ce qui lui permettra de mieux ancrer les anticipations et de rehausser
sa contribution au développement économique.
"S’il est vrai que de nombreux pays émergents ou en développement ont
déjà opéré cette transition par le passé, il n’en demeure pas moins que
*le Maroc est l’un des rares pays à l’entamer sur une base volontaire et
ordonnée et non sous la contrainte de crises de change*.
"Le timing retenu et la préparation préalable de ce chantier lui
assureront de meilleures chances de succès.
"Bank Al-Maghrib et le Département en charge des finances s’attèlent
actuellement à définir le phasage adéquat en tenant compte aussi bien
des spécificités de notre tissu économique que des enseignements des
expériences internationales. La réussite de ce projet reste toutefois
tributaire de la conjugaison des efforts de l’ensemble des autorités et
opérateurs concernés et du respect permanent des prérequis à ce passage.
"Pour pallier l’attitude d’hésitation et d’attentisme qui freine la
dynamique économique ces dernières années, il convient également
*d’accélérer les chantiers en cours*.
"L’élan qu’a connu la *réforme de la justice* mérite d’être réenclenché.
Il s’agit d’un chantier fondamental pour les droits humains et sociaux
mais également pour l’amélioration de l’environnement des affaires, de
l’investissement et de l’entreprenariat. L’aboutissement de ce projet
dans des délais raisonnables permettra de faire évoluer la perception
négative de la justice par l’investisseur et le citoyen en général.
dans les politiques économiques
Devant le Roi, Jouahri appelle à des ruptures dans les politiques
économiques
(Photo MAP)
*Le Roi Mohammed VI, a reçu, vendredi 29 juillet au palais royal à
Tétouan, Abdellatif Jouahri, wali de Bank Al-Maghrib, qui a présenté au
Souverain le rapport annuel de la Banque centrale sur la situation
économique, monétaire et financière au titre de l'exercice 2015.*
La présentation du rapport annuel de Bank Al-Maghrib
était très attendue cette année. Abdellatif Jouahri, gouverneur de la
Banque centrale, avait été en plusieurs occasion extrêmement critique à
l'égard des politiques économiques suivies et on se demandait jusqu'où
il irait en présence du Souverain.
En fait, il est resté dans la tonalité habituelle, c'est-à-dire critique
certes, mais mesuré. Ses messages principaux concernent les limites de
la politique économique lancée en 2008 et basée sur la demande
intérieure, la nécessité d'un nouveau modèle économique basé sur
l'industrialisation, les exportations et la création d'emplois; et enfin
placer les orientations stratégiques du pays à l'abri des aléas et des
rivalités politiques.
Voici de larges extraits de cette présentation de Abdellatif Jouahri:
"Notre pays aura réalisé des avancées importantes, avec notamment un
redressement sensible des équilibres macroéconomiques et une
amélioration de son attractivité et de son rayonnement. Ces progrès lui
sont reconnus par les institutions et les investisseurs internationaux,
comme en témoignent les flux importants d’investissements dont il
bénéficie, le renouvellement de son accord au titre de la ligne de
précaution et de liquidité avec le FMI et les appréciations positives
des agences de notation.
"Grâce aux grands chantiers économiques, sociaux et institutionnels
lancés depuis le début des années 2000, notre pays dispose aujourd’hui
d’une infrastructure institutionnelle et économique conséquente. Cet
environnement favorable lui a permis une nette accélération de la
croissance et des avancées notables sur le plan du développement humain.
"Ces réalisations sont certes des acquis précieux qui gagneraient à être
consolidés, mais force est de constater cependant que *le rythme du
progrès s’est inscrit ces dernières années dans une tendance baissière*.
"En effet, malgré la conjonction de plusieurs facteurs favorables aussi
bien internes qu’externes,*l’atonie des activités non agricoles et de
l’emploi se poursuit*, notre tissu productif se fragilise et les progrès
sur le plan du développement humain restent en deçà des attentes et
faibles en comparaison internationale.
"Une telle situation nous amène à *nous interroger sur nos politiques et
nos stratégies* et nous interpelle sur la capacité de notre *modèle de
développement* à continuer à répondre aux attentes et aspirations de nos
concitoyens.
"C’est ce questionnement qui a été au centre du discours du Trône de
juillet 2014, appelant à une nouvelle approche dans l’élaboration des
politiques publiques plaçant le capital immatériel au centre des priorités.
"Le modèle basé sur la *demande intérieure comme moteur de la
croissance* qui a prévalu jusqu’à présent *a montré ses limites.* Outre
la faiblesse de la croissance et de la création d’emplois, la sensible
détérioration ces dernières années des déficits jumeaux, l’aggravation
du niveau d’endettement et la persistance d’un faible niveau de
compétitivité de notre tissu productif sont autant de signes de
fragilité qui reflèteraient son essoufflement.
"Aujourd’hui, *notre pays a besoin d’initier une véritable refonte de ce
modèle et une série de ruptures *au niveau de la conception et de la
mise en oeuvre des politiques publiques.
*"L’industrialisation*créatrice de valeur ajoutée et d’emplois de
qualité devrait être au centre de ces mutations à côté des autres
stratégies sectorielles lancées ces dernières années mais dont les
résultats jusqu’à présent restent contrastés.
"La dynamique à l’export du secteur automobile et, dans une moindre
mesure, de certains autres métiers mondiaux se poursuit, mais les effets
d’entraînement sur l’économie demeurent encore limités. A cet égard, la
mise en place *d’écosystèmes* est une orientation prometteuse qui
devrait, si les objectifs qui leur sont assignés se matérialisent dans
des délais raisonnables, améliorer les résultats de ces stratégies et
renforcer les petites et moyennes entreprises, épine dorsale du tissu
industriel.
"Ce constat rappelle encore une fois la nécessité *d’évaluer le
rendement de ces plans sectoriels*, leur phasage et leur *cohérence*
d’ensemble. Cette évaluation devrait être systématique et revêtir un
caractère institutionnel à travers la mise en place de dispositifs ou
d’entités dédiées, permettant une analyse ex-ante, un suivi régulier et
rapproché pour opérer les ajustements éventuels dans des délais appropriés.
"Plus globalement, nous estimons que pour un meilleur encadrement du
développement économique et social de notre pays, la mise en place d’une
*planification stratégique* serait appropriée. Celle-ci permettrait de
mieux répondre aux exigences d’une vision globalisée et cohérente, avec
une priorisation des objectifs et une optimisation dans l’utilisation
des ressources.
"Sur le plan de notre politique d’ouverture, les difficultés économiques
persistantes auxquelles fait face la zone euro, notre partenaire
traditionnel, et l’inertie de l’intégration maghrébine confortent
l’orientation vers la diversification des partenariats en particulier en
direction de l’Afrique et des pays du CCG ainsi que vers les pays
influents sur la scène économique et politique internationale.
"Elle permet aussi bien à notre système bancaire qu’à nos entreprises de
s’appuyer sur de *nouveaux relais de croissance* et de consolider la
position du Maroc en tant que plateforme de transition entre l’Afrique
et le reste du monde. La réussite de ces partenariats nécessite
cependant un suivi rapproché des autorités et une mobilisation par les
opérateurs de moyens à la hauteur des engagements pour que notre pays
préserve son statut de partenaire crédible.
"Le choix de l’ouverture fait par notre pays nous a amené à initier ces
dernières années une réflexion sur l’opportunité d’opérer une
*transition graduelle vers la flexibilité de notre régime de change.*
"L’objectif visé est l’amélioration de la capacité de notre économie à
absorber les chocs extérieurs, tout en donnant un signal de confiance
aux partenaires extérieurs. Une telle approche est de nature à permettre
aux opérateurs de disposer de délais suffisants pour s’adapter
progressivement à un environnement plus exigeant et pour développer la
capacité et le savoir-faire nécessaires.
"Ce choix permettra par ailleurs de renforcer l’autonomie de la
politique monétaire et d’améliorer la transmission des décisions de la
Banque centrale à l’économie réelle.
"Bank Al Maghrib pourra ainsi opérer le passage au ciblage d’inflation,
ce qui lui permettra de mieux ancrer les anticipations et de rehausser
sa contribution au développement économique.
"S’il est vrai que de nombreux pays émergents ou en développement ont
déjà opéré cette transition par le passé, il n’en demeure pas moins que
*le Maroc est l’un des rares pays à l’entamer sur une base volontaire et
ordonnée et non sous la contrainte de crises de change*.
"Le timing retenu et la préparation préalable de ce chantier lui
assureront de meilleures chances de succès.
"Bank Al-Maghrib et le Département en charge des finances s’attèlent
actuellement à définir le phasage adéquat en tenant compte aussi bien
des spécificités de notre tissu économique que des enseignements des
expériences internationales. La réussite de ce projet reste toutefois
tributaire de la conjugaison des efforts de l’ensemble des autorités et
opérateurs concernés et du respect permanent des prérequis à ce passage.
"Pour pallier l’attitude d’hésitation et d’attentisme qui freine la
dynamique économique ces dernières années, il convient également
*d’accélérer les chantiers en cours*.
"L’élan qu’a connu la *réforme de la justice* mérite d’être réenclenché.
Il s’agit d’un chantier fondamental pour les droits humains et sociaux
mais également pour l’amélioration de l’environnement des affaires, de
l’investissement et de l’entreprenariat. L’aboutissement de ce projet
dans des délais raisonnables permettra de faire évoluer la perception
négative de la justice par l’investisseur et le citoyen en général.
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