La directrice du FMI accusée d'avoir exercé des pressions pour favoriser la Chine
La directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, aurait fait pression en 2017 pour modifier un rapport de la Banque mondiale, où elle était en poste à l'époque, afin de ménager la Chine, affirme une enquête indépendante commandée par l'institution internationale.

Par Les Echos
Publié le 17 sept. 2021 à 8:13Mis à jour le 17 sept. 2021 à 9:12
Pression à la tête du FMI. Une enquête indépendante commandée par la Banque mondiale et rendue publique ce jeudi, met en cause la directrice du FMI (Fonds monétaire international), Kristalina Georgieva, accusée de pressions pour ménager Pékin.
L'actuelle directrice de l'institution internationale était alors à la tête de la Banque mondiale en 2017 et aurait fait pression pour modifier un rapport de la Banque mondiale en faveur de la Chine. L'ancienne commissaire européenne bulgare, s'est dite « en désaccord » avec les conclusions de cette investigation, dont les auteurs ont interrogé plusieurs dizaines d'employés, actuels et anciens, et passé au crible 80.000 documents.
Selon l'enquête du cabinet d'avocats WilmerHale, des « pressions - directes et indirectes » ont été exercées par de hauts responsables du bureau du président Jim Yong Kim - « vraisemblablement à la demande » de ce dernier - pour modifier le classement de la Chine au classement de son rapport annuel « Doing Business ».
Changement de méthodologie
La Chine avait, en 2017, assez peu apprécié sa 78e place dans le rapport « Doing Business » de la Banque. Pour lui éviter de dégringoler encore dans le classement de l'année suivante, et obtenir sa signature dans des négociations sensibles, l'institution basée à Washington aurait employé les grands moyens, selon cette enquête, demandée par le comité d'éthique de la Banque mondiale.
Et peu avant la publication de l'édition 2018, Kristalina Georgieva, à l'époque directrice générale de la Banque mondiale , a selon l'enquête demandé l'adaptation de la méthodologie et la modification des critères.
L'actuelle directrice du FMI aurait réprimandé un haut responsable de l'institution pour « avoir mal géré les relations de la Banque avec la Chine et ne pas avoir apprécié l'importance du rapport Doing Business pour le pays », selon l'enquête.
Sous la pression, ses équipes auraient alors modifié certaines données, et permis à la Chine de conserver sa 78e place au lieu de chuter à la 85e. Le responsable initialement réprimandé, lui, a été félicité pour avoir « fait sa part du travail pour le multilatéralisme ».
Arrêt de la publication du rapport annuel « Doing Business »
Face à ces révélations, la Banque mondiale a annoncé qu'elle arrêtait la publication de son rapport annuel « Doing Business » - c'est celui pour 2018 qui est ici incriminé. Elle a dit travailler sur une « nouvelle approche pour évaluer le climat des affaires et des investissements ».
« Le rapport parle de lui-même », s'est borné à réagir un porte-parole de la Banque. Kristalina Georgieva, qui a pris la tête du FMI en octobre 2019, a dit jeudi être « foncièrement en désaccord avec les conclusions et les interprétations » de cette enquête « en ce qui concerne (son) rôle dans le rapport » de 2018.
L'arrêt du rapport « Doing Business » a été salué par Nadia Daar, responsable d'Oxfam International à Washington, estimant que ce classement « encourage (ait) les gouvernements à adopter des politiques destructrices qui aggravent les inégalités ».
Les changements dans la méthodologie du classement avaient, en janvier 2018, poussé à la démission l'ancien chef économiste de la Banque mondiale, Paul Romer, nobélisé quelques mois plus tard. La Banque mondiale avait à l'époque nié toute influence politique dans ce classement.
Source AFP, Bloomberg
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