L'inflation, ce danger qui nous menace
Hausse vertigineuse des prix des produits alimentaires, des hydrocarbures, du logement...
"Circulez, il n’y a rien à signaler”, c’est le message du gouvernement. L’inflation des prix, dit-on, est générale, mondiale. Soit. Si la comparaison a lieu d’être, autant comparer si notre gouvernement met en place les mêmes mesures urgentes adoptées par les pays sujets de la comparaison pour préserver le pouvoir d’achat des citoyens.
Un grand malaise social s’installe au Maroc. Il est né de la cherté de la vie dans un pays où le Smig net est d’environ 2.500 dirhams et où les salaires, en général, ne bougent pas. La hausse des prix des produits alimentaires, des hydrocarbures (principale source d’inflation), des médicaments, du transport… est à la fois insoutenable et irréversible depuis quelques mois. Pour le gouvernement Akhannouch, il n’y a toujours pas péril en la demeure. «La hausse des prix de certaines matières premières est due à la flambée des cours internationaux», c’est le même leitmotiv répété par le porte-parole du gouvernement, Mustapha Baitas, ou encore la ministre des Finances, Nadia Fettah.
«Circulez, il n’y a rien à signaler», c’est le message du gouvernement. De toute façon, dit-on, l’inflation des prix est générale, mondiale. Soit. Si la comparaison a lieu d’être, autant comparer si notre gouvernement met en place les mêmes mesures urgentes adoptées par les pays sujets de la comparaison pour juguler cette inflation et préserver, ainsi, le pouvoir d’achat des citoyens, en érosion continue. Or, sous nos cieux, rien de cela n’est fait.
On compare juste pour comparer et faire oublier le malheur de millions de familles marocaines. Entre les chiffres officiels liés à l’inflation et à l’indice des prix à la consommation et la réalité sur le terrain, il y a un écart monumental. Les derniers chiffres publiés dans un rapport de Bank al-Maghrib de janvier 2022 montrent que l’inflation s’est accélérée à 3,2% en décembre 2021 après 2,6% en novembre de la même année. «Cette dynamique reflète principalement la hausse de 3,1% au lieu d’une baisse de 0,9% des prix des produits alimentaires volatils», explique en substance la banque centrale. Voilà, au moins, une reconnaissance timide d’une augmentation vertigineuse des produits alimentaires volatils (légumes, fruits, viandes…).
Quotidien des ménages
Pour sa part, le Haut-Commissariat au Plan (HCP) parle d’une hausse de 1,4 point de l’indice des prix à la consommation. Le taux a doublé et pourtant, personne n’en parle. On traite les chiffres comme s’ils étaient dissociés du quotidien des ménages et n’ont aucun impact sur leur pouvoir d’achat. Cerise sur gâteau, on ne subventionne pas des produits de première nécessité, des légumineuses… mais on continue à exonérer partiellement ou totalement les promoteurs immobiliers et les industriels (les exonérations équivalent à plusieurs dizaines de milliards de dirhams). Le comble, c’est que les prix ne connaissent pas de régulation. Chacun décide du prix du jour. Personne ne le contrôle.
Institution de régulation
A l’issue de son conseil trimestriel tenu le 21 décembre 2021 à Rabat, la banque centrale a révélé son rapport dans lequel l’un des indicateurs importants est celui de l’inflation. L’institution de régulation monétaire reconnait explicitement une hausse conséquente de certains produits alimentaires et des carburants et lubrifiants. Cette évolution résulte essentiellement des pressions externes liées à la flambée de leurs cours sur les marchés internationaux, explique Bank al-Maghrib.
Elle s’est traduite par une nette accélération de la composante sous-jacente de l’inflation, qui est passée de 0,7% en moyenne au cours du premier semestre à 2% au troisième trimestre et à 3,3% en novembre et à 3,6% en décembre 2021. Cette tendance à la hausse ne peut cacher un malaise social né de l’incapacité pour la majorité des ménages marocains à préserver leur pouvoir d’achat avec la hausse vertigineuse des prix. Si c’est lié aux cours internationaux, le gouvernement doit restituer la compensation de ces matières premières et des produits de première nécessité. C’est l’unique moyen qui permet une redistribution des richesses.
Frais de santé
Les chiffres officiels tentent de cacher une réalité amère qui touche la classe moyenne. On ne peut pas parler de l’inflation au Maroc si l’on n’évoque pas, en toute franchise et sans détours, le coût du logement dont les ficelles sont tirées par des spéculateurs et des promoteurs puissants; de la scolarisation dans les écoles privées (un lobby grandissant); et du coût de l’hospitalisation dans les cliniques et les frais de santé en général sur lesquels l’Etat n’a aucun droit de regard. En les prenant en compte, l’inflation devrait être aux alentours des deux chiffres, près de 10%.
Cette situation interpelle la classe politique. Sauf que si la majorité gouvernementale rechigne à reconnaitre cette inflation des prix suffocante, qui peut la dénoncer? L’opposition? Où est l’opposition? Numériquement parlant, les formations politiques, censées représenter l’opposition, ont 125 sièges au Parlement: 34 sièges pour l’USFP, 28 pour le MP (Mouvement populaire), 22 pour le PPS (Parti du progrès et du socialisme), 18 pour l’UC (Union constitutionnelle), 13 pour le PJD (Parti de la justice et du développement), 5 pour le MDS (Mouvement démocratique et social), 3 pour le FFD (Front des forces démocratiques) et 1 siège respectivement pour la FGD (Alliance de la fédération de gauche) et le PSU (Parti socialiste unifié).
Même si elles unissent leurs efforts et énergies, ces formations n’arriveront pas à avoir le quorum (le tiers des sièges) qui permet, par exemple, de demander au Chef du gouvernement de présenter devant le Parlement un bilan d’étape de l’action gouvernementale, la création de commissions d’enquête… C’est dire que le front de l’opposition est plus que jamais fragile et impuissant. A cette faiblesse numérique handicapante se greffe une divergence peu ou prou idéologique. A l’inertie de l’opposition s’ajoute l’indifférence des syndicats. Comme si ces derniers n’étaient pas concernés. En tout cas, on n’entend pas parler d’une nouvelle demande de hausse des salaires.
Et quand l’opposition se révèle faible, la voix de la société civile (associations et fédérations de défense du droit des consommateurs) reste inaudible. Qui jouera donc le rôle de contre-pouvoir ou de garde-fou et fera entendre une autre voix que celle du gouvernement qui s’obstine toujours à accepter que la liberté des prix, sans garde-fous, sauvage, dévore sur son chemin les citoyens à revenus limités?.
Maroc Hebdo
Hausse vertigineuse des prix des produits alimentaires, des hydrocarbures, du logement...
"Circulez, il n’y a rien à signaler”, c’est le message du gouvernement. L’inflation des prix, dit-on, est générale, mondiale. Soit. Si la comparaison a lieu d’être, autant comparer si notre gouvernement met en place les mêmes mesures urgentes adoptées par les pays sujets de la comparaison pour préserver le pouvoir d’achat des citoyens.
Un grand malaise social s’installe au Maroc. Il est né de la cherté de la vie dans un pays où le Smig net est d’environ 2.500 dirhams et où les salaires, en général, ne bougent pas. La hausse des prix des produits alimentaires, des hydrocarbures (principale source d’inflation), des médicaments, du transport… est à la fois insoutenable et irréversible depuis quelques mois. Pour le gouvernement Akhannouch, il n’y a toujours pas péril en la demeure. «La hausse des prix de certaines matières premières est due à la flambée des cours internationaux», c’est le même leitmotiv répété par le porte-parole du gouvernement, Mustapha Baitas, ou encore la ministre des Finances, Nadia Fettah.
«Circulez, il n’y a rien à signaler», c’est le message du gouvernement. De toute façon, dit-on, l’inflation des prix est générale, mondiale. Soit. Si la comparaison a lieu d’être, autant comparer si notre gouvernement met en place les mêmes mesures urgentes adoptées par les pays sujets de la comparaison pour juguler cette inflation et préserver, ainsi, le pouvoir d’achat des citoyens, en érosion continue. Or, sous nos cieux, rien de cela n’est fait.
On compare juste pour comparer et faire oublier le malheur de millions de familles marocaines. Entre les chiffres officiels liés à l’inflation et à l’indice des prix à la consommation et la réalité sur le terrain, il y a un écart monumental. Les derniers chiffres publiés dans un rapport de Bank al-Maghrib de janvier 2022 montrent que l’inflation s’est accélérée à 3,2% en décembre 2021 après 2,6% en novembre de la même année. «Cette dynamique reflète principalement la hausse de 3,1% au lieu d’une baisse de 0,9% des prix des produits alimentaires volatils», explique en substance la banque centrale. Voilà, au moins, une reconnaissance timide d’une augmentation vertigineuse des produits alimentaires volatils (légumes, fruits, viandes…).
Quotidien des ménages
Pour sa part, le Haut-Commissariat au Plan (HCP) parle d’une hausse de 1,4 point de l’indice des prix à la consommation. Le taux a doublé et pourtant, personne n’en parle. On traite les chiffres comme s’ils étaient dissociés du quotidien des ménages et n’ont aucun impact sur leur pouvoir d’achat. Cerise sur gâteau, on ne subventionne pas des produits de première nécessité, des légumineuses… mais on continue à exonérer partiellement ou totalement les promoteurs immobiliers et les industriels (les exonérations équivalent à plusieurs dizaines de milliards de dirhams). Le comble, c’est que les prix ne connaissent pas de régulation. Chacun décide du prix du jour. Personne ne le contrôle.
Institution de régulation
A l’issue de son conseil trimestriel tenu le 21 décembre 2021 à Rabat, la banque centrale a révélé son rapport dans lequel l’un des indicateurs importants est celui de l’inflation. L’institution de régulation monétaire reconnait explicitement une hausse conséquente de certains produits alimentaires et des carburants et lubrifiants. Cette évolution résulte essentiellement des pressions externes liées à la flambée de leurs cours sur les marchés internationaux, explique Bank al-Maghrib.
Elle s’est traduite par une nette accélération de la composante sous-jacente de l’inflation, qui est passée de 0,7% en moyenne au cours du premier semestre à 2% au troisième trimestre et à 3,3% en novembre et à 3,6% en décembre 2021. Cette tendance à la hausse ne peut cacher un malaise social né de l’incapacité pour la majorité des ménages marocains à préserver leur pouvoir d’achat avec la hausse vertigineuse des prix. Si c’est lié aux cours internationaux, le gouvernement doit restituer la compensation de ces matières premières et des produits de première nécessité. C’est l’unique moyen qui permet une redistribution des richesses.
Frais de santé
Les chiffres officiels tentent de cacher une réalité amère qui touche la classe moyenne. On ne peut pas parler de l’inflation au Maroc si l’on n’évoque pas, en toute franchise et sans détours, le coût du logement dont les ficelles sont tirées par des spéculateurs et des promoteurs puissants; de la scolarisation dans les écoles privées (un lobby grandissant); et du coût de l’hospitalisation dans les cliniques et les frais de santé en général sur lesquels l’Etat n’a aucun droit de regard. En les prenant en compte, l’inflation devrait être aux alentours des deux chiffres, près de 10%.
Cette situation interpelle la classe politique. Sauf que si la majorité gouvernementale rechigne à reconnaitre cette inflation des prix suffocante, qui peut la dénoncer? L’opposition? Où est l’opposition? Numériquement parlant, les formations politiques, censées représenter l’opposition, ont 125 sièges au Parlement: 34 sièges pour l’USFP, 28 pour le MP (Mouvement populaire), 22 pour le PPS (Parti du progrès et du socialisme), 18 pour l’UC (Union constitutionnelle), 13 pour le PJD (Parti de la justice et du développement), 5 pour le MDS (Mouvement démocratique et social), 3 pour le FFD (Front des forces démocratiques) et 1 siège respectivement pour la FGD (Alliance de la fédération de gauche) et le PSU (Parti socialiste unifié).
Même si elles unissent leurs efforts et énergies, ces formations n’arriveront pas à avoir le quorum (le tiers des sièges) qui permet, par exemple, de demander au Chef du gouvernement de présenter devant le Parlement un bilan d’étape de l’action gouvernementale, la création de commissions d’enquête… C’est dire que le front de l’opposition est plus que jamais fragile et impuissant. A cette faiblesse numérique handicapante se greffe une divergence peu ou prou idéologique. A l’inertie de l’opposition s’ajoute l’indifférence des syndicats. Comme si ces derniers n’étaient pas concernés. En tout cas, on n’entend pas parler d’une nouvelle demande de hausse des salaires.
Et quand l’opposition se révèle faible, la voix de la société civile (associations et fédérations de défense du droit des consommateurs) reste inaudible. Qui jouera donc le rôle de contre-pouvoir ou de garde-fou et fera entendre une autre voix que celle du gouvernement qui s’obstine toujours à accepter que la liberté des prix, sans garde-fous, sauvage, dévore sur son chemin les citoyens à revenus limités?.
Maroc Hebdo
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