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« La France est dans une situation inflammable », Pierre Boyer (économiste à Polytechnique)

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  • « La France est dans une situation inflammable », Pierre Boyer (économiste à Polytechnique)

    ENTRETIEN - La flambée des prix des carburants et la stagnation des salaires risquent de raviver la contestation sociale en France. Pressés par l'inflation, de nombreux Français et syndicats vont battre le pavé ce vendredi pour réclamer des hausses de salaires. Spécialiste du consentement à l'impôt, l'économiste Pierre Boyer (Polytechnique) pointe le risque d'un embrasement à l'approche de l'hiver alors que les prix du carburant restent élevés.

    LA TRIBUNE - Au moment de la présentation du budget 2024 fin septembre, le gouvernement a répété son mantra d'éviter toute hausse de la fiscalité. Pourtant, l'Etat s'apprête à augmenter les taxes sur le gazole non routier des agriculteurs, des entreprises du BTP. Les taxes sur le gaz devraient également augmenter l'année prochaine. Existe-t-il un risque d'embrasement social ?

    PIERRE BOYER- La France est dans une situation inflammable. Les décideurs publics ont en tête ce risque d'embrasement. Ils prennent des mesures court-termistes pour permettre de passer ces moments difficiles. L'indexation du barème de l'impôt sur le revenu va clairement dans ce sens. Beaucoup de contribuables des classes moyennes peuvent potentiellement basculer dans l'impôt sur le revenu sans cette indexation. Ce qui pourrait générer du mécontentement. La dernière enquête du Conseil des prélèvements obligatoires montre que trois Français sur quatre pensent que le niveau général des impôts est trop élevé en France. Avec l'inflation, l'Etat doit prendre des mesures pour limiter ce choc sur les plus modestes.



    Sur le budget, il y a un enjeu clair sur la qualité de la dépense. La lutte contre le gaspillage de l'argent public peut avoir un effet vertueux sur les marges de manœuvre budgétaires et dans le même temps assurer aux Français que chaque euro collecté est utilisé à bon escient. Cela permet de mieux expliquer le niveau élevé des prélèvements obligatoires qui correspond à des besoins dans la santé, l'éducation, la défense, la transition écologique et à la fin il est possible que cela favorise le consentement à l'impôt des citoyens.



    Le thème du ras-le-bol fiscal est régulièrement évoqué dans les débats. Dans le cadre vos missions au Conseil des prélèvements obligatoires, vous travaillez sur le baromètre de la perception des impôts. Beaucoup de Français expriment parfois leur mécontentement à l'égard des prélèvements. Pourtant, les citoyens dans leur immense majorité acceptent de payer leurs impôts. Comment expliquez-vous ce paradoxe ?

    L'observation des révoltes fiscales récentes et débats houleux autour des questions fiscales suggèrent que les Français sont fâchés avec leurs impôts. Ce n'est cependant pas aussi simple. Il y a une acceptation de payer des impôts dans une société démocratique. C'est ce que l'on appelle le civisme fiscal et les Français pensent très majoritairement que payer ses impôts est un acte citoyen.

    Les gens sont donc d'accord avec le principe de l'impôt mais ne sont pas forcément satisfaits du système fiscal actuel. Un citoyen peut par exemple penser que le système fiscal est profondément injuste car il ne redistribue pas assez des plus aisés vers les plus modestes. Et inversement, certains contribuables vont penser qu'il est trop redistributif. Aujourd'hui les Français payent donc leurs impôts même s'ils sont mécontents du système actuel.

    La résistance à l'impôt s'explique-t-elle par une méfiance à l'égard des institutions ?

    Dans la littérature académique, les déterminants du consentement à l'impôt reposent sur la perception de justice du système, la confiance dans les institutions qui dépensent l'argent public et le bon usage de la dépense publique. La connaissance du système et les caractères socio-démographiques (âge, revenu, géographie) sont également des déterminants. Si les gens ont plus de confiance dans les institutions qui dépensent l'argent public, le consentement sera plus élevé.

    Comment faire pour améliorer le consentement à l'impôt ?

    Il est difficile d'apporter à ce stade une réponse précise. D'après nos premiers résultats, il semble que l'Etat peut améliorer le consentement à l'impôt en expliquant les contrôles rigoureux qui sont appliqués sur les dépenses d'argent public. C'est une question importante pour les finances publiques et les décideurs. En cas de crise budgétaire, le ministre des Finances peut être amené à devoir demander à ses équipes quelles sont les options possibles pour que des hausses nécessaires soient acceptées. Pour l'instant, on n'a pas de réponse claire à ces questions.

    Plusieurs commentateurs ont expliqué que la révolte des gilets jaunes était partie d'une hausse de la taxe sur les carburants. A l'époque, beaucoup ont été surpris par l'ampleur de la contestation. Avec le recul, comment expliquez-vous un tel mécontentement alors que les prix des carburants ces deux dernières années ont sans doute plus augmenté qu'à l'hiver 2018 ?

    La hausse des prix des carburants a joué un rôle dans la mobilisation des gilets jaunes. Mais la baisse de la limitation de vitesse sur les routes secondaires décidée a pu également contribuer à ce mouvement. Un de mes articles avec des collègues de l'École polytechnique a montré que les questions de mobilité étaient très importantes pour comprendre ce mouvement. Ce qui est moins évoqué est que les prix à la pompe changent au cours d'une même journée. Il est donc difficile de déterminer précisément le prix payé par un individu lorsqu'il est passé à la pompe et faire le lien avec son mécontentement.



    Avec la guerre en Ukraine et le retour de l'inflation, le sentiment d'injustice fiscale chez les Français est particulièrement sensible. Ce sentiment d'injustice est-il justifié selon vous ? Pour quelles raisons ?

    On connaît les déterminants de l'opinion des gens sur ce qui est juste ou injuste en matière d'impôt. Le contexte peut également jouer un rôle. Les résultats à venir de la nouvelle vague du baromètre réalisé par le Conseil des prélèvements obligatoires pourront nous éclairer sur l'évolution du sentiment d'injustice.

    Propos recueillis par Grégoire Normand

    Grégoire Normand
    وألعن من لم يماشي الزمان ،و يقنع بالعيش عيش الحجر

  • #2
    l'Angleterre est dans une situation encore pire que la France. Les Anglais sont malnouris selon the British nutrition foundation. Cela à cause de leur Brexit et les stupides conservateurs qui ont mené leur pays dans plusieurs impasses.

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