Ce n'est que le début malheureusement . Macron ,depuis 2017 tel un ouragan, a saccagé complètement la maison France .
Retards de salaire, impossibilité de toucher le chômage et de signer un nouveau contrat de travail… L’effondrement de l’entreprise de distribution de prospectus entraîne des difficultés sans fin pour ses ex-employés. « Une boucherie sociale et humaine », estiment les syndicats.
Yannis Angles
Le quotidien des ex-salarié·es de Milee depuis plusieurs semaines est un jour sans fin, plein d’incertitudes et d’inquiétude. « J’ai dû faire un crédit à la consommation à 8 % pour faire vivre ma famille le temps que je touche tout ce qu’ils me doivent », explique François*, manageur durant vingt ans au sein de cette entreprise (baptisée Adrexo jusqu’en 2021) spécialisée dans la distribution de prospectus et de courriers publicitaires, qui a été liquidée le 9 septembre. Parmi les 10 000 personnes laissées sur le carreau, François est loin d’être un cas isolé.
Depuis des semaines, le versement du salaire du mois d’août était attendu avec impatience. Les ancien·nes de Milee ont enfin commencé à le recevoir durant la dernière semaine de septembre, avec plus de vingt jours de retard. Une bouffée d’oxygène de courte durée, puisque les salarié·es ont appris que le salaire de septembre ne devrait pas être versé avant décembre, en même temps que le solde tout compte – le document par lequel une entreprise atteste qu’elle a réglé tout ce qu’elle doit à un·e salarié·e à la fin du contrat de travail. Un vrai choc pour l’ancien manageur : « Attendre trois ou quatre mois sans salaire et ne rien toucher, c’est juste impossible. Les gens n’ont pas la trésorerie pour attendre aussi longtemps », constate-t-il.

Pour le mandataire judiciaire désormais responsable de la gestion administrative, ce délai s’explique par l’ampleur du plan de licenciements : 10 000 personnes qui se retrouvent sans emploi d’un coup, c’est un chiffre inédit en France depuis de très nombreuses années.
D’autant qu’elles étaient déjà bien souvent dans des situations précaires. Deux tiers des salarié·es de Milee y complétaient leur faible revenu ou leur petite retraite, et le dernier tiers était constitué de personnes qui n’exerçaient pas d’autre travail, par exemple des mères de famille isolées. Tout est réuni, selon José Miranda, syndicaliste CFE-CGC, pour qu’on assiste « à une boucherie sociale et humaine comme on n’en a jamais vu en France ».
« On me remonte des situations dramatiques avec des couples qui travaillaient tous les deux à Milee et qui du jour au lendemain se retrouvent avec plus rien », raconte François. Il livre sa plus grande crainte : « Que d’anciens collègues dans des situations catastrophiques ne trouvent pas d’autre solution que de se buter. » Une crainte partagée par José Miranda de la CFE-CGC : « J’appréhende qu’on m’appelle pour me dire quelqu’un s’est mis une balle ou s’est pendu, il faut prendre conscience qu’il y a des situations qui sont dramatiques. »
Les étapes de la chute de Milee-Adrexo sont connues. Le grand public a découvert l’entreprise suite au fiasco de la distribution de la propagande électorale des élections départementales et régionales de 2021. Surtout, le secteur de la distribution de prospectus est en perte de vitesse depuis plusieurs années, et l’entreprise n’a pas su passer de façon massive à la distribution de courriers publicitaires. Les choix stratégiques discutables des actionnaires qui ont repris Adrexo en 2017 ont fait le reste. Une histoire qui se conclut aujourd’hui par des difficultés en cascade pour ses ex-employé·es qui attendent de percevoir leur dû.
Des salariés à bout
Depuis l’annonce de la liquidation, c’est le grand flou, « on n’a aucune information, on ne sait pas où on va », explique Sébastien Bernard, délégué syndical CGT Milee. Si les syndicats ont constaté des avancées sur le versement des salaires par l’AGS, l’organisme financé par les cotisations patronales qui permet aux salarié·es de toucher les sommes qui leur sont dues en cas de procédure de liquidation, la paye d’août n’est toujours pas arrivée pour certain·es.
« 26 septembre, 18 h 20 toujours pas de salaire d’août sur mon compte BNP, il faut faire quoi, se pendre en attendant ? », écrit un ex-salarié sur le forum de discussion du syndicat CAT. Selon les informations des syndicats, cette situation s’explique par de multiples problèmes de données des ressources humaines (RH), sans que le syndicat ait pu obtenir plus d’informations de la part du mandataire judiciaire – qui n’a pas répondu à nos demandes d’information.
Tout aussi préoccupant : selon nos informations, le mandataire ne s’estime pas en capacité de produire avant décembre les 10 000 attestations qu’il doit distribuer aux licencié·es pour signifier la fin de leur contrat de travail. Or, sans cette attestation, impossible de s’inscrire à France Travail pour toucher le chômage. Et impossible également de signer un nouveau contrat de travail avec un éventuel nouvel employeur. « J’ai fait pas mal d’entretiens lors desquels on m’a demandé quand je pouvais commencer. Je suis incapable de répondre, car je n’ai toujours pas ce foutu bout de papier qui me permettrait de me projeter », témoigne François.
La double peine
La situation est alarmante pour Sébastien Bernard, de la CGT, scandalisé qu’on puisse « laisser les gens comme ça, sans salaire ni chômage pendant quatre mois ». Alors même que la loi prévoit normalement que les attestations soient délivrées dès la rupture ou fin du contrat de travail. Il propose une solution au mandataire pour obtenir un délai décent :« Il n’a qu’à recruter du monde dans son pôle RH pour avancer plus vite. »Une avis partagée par l’ensemble des syndicats, « pour éviter le pire, il faut mettre des moyens exceptionnels »,ajoute José Miranda.
Les représentant·es des salarié·es ont encore constaté d’autres difficultés découlant de la liquidation. Notamment la disparition de la mutuelle à la fin de l’année. L’assureur Axa a décidé de mettre fin au contrat à partir du 31 décembre 2024. Une mesure qui s’explique, selon Sébastien Bernard, «par la liquidation judiciaire de l’entreprise, mais aussi parce que l’employeur ne payait plus les cotisations à la mutuelle ».
Par conséquent, les salarié·es ne pourront pas faire valoir leur droit de portabilité après le 31 décembre, alors que la loi Évin permet aux salarié·es de garder un temps sa mutuelle après la fin de son contrat de travail. « C’est vraimentla double peine, non seulement ils perdent un revenu mais en plus ils auront une mutuelle personnelle à payer qui sera moins avantageuse ou extrêmement chère », déplore Philipe Viroulet, le délégué syndical de la CAT.