Je crois qu'après le retrait, les Américains auront encore quelques centaines de milliards à dépenser pour un dédommagement. 
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L’accord de sécurité qui devrait régir la présence américaine en Irak jusqu’à la fin de 2011 sera demain au centre du débat à Baghdad. Tout tend vers une adoption du texte en question âprement discuté durant des mois. Les voix réfractaires restent marginales. Seul Moqtada Sadr, viscéralement contre un accord considéré comme «dangereux pour l’avenir de l’Irak», fait parti des opposant déclarés. Autre position faisant partie du bémol : les politiciens irakiens sunnites préconisent d’avoir l’avis de la population. Le peuple d’Irak justement qui a payé le lourd tribut d’une occupation qui ne dit pas son nom et qui dure depuis cinq années après la chute du régime de Saddam Hussein. Sur le plan légal, cet accord sécuritaire remplacera le mandat de l’ONU. Il accordera aux troupes américaines ce qui leur manquait : une présence légale aux pays des deux fleuves et ce, à partir de 2009. L’Irak officiel et les Etats-Unis ont peiné pour signer l’accord en raison de mésententes soulevées par Baghdad ayant trait à la souveraineté de l’Irak. Un pays qui frise la désintégration territoriale avec l’exacerbation des tentions ethniques. Après de vifs débats, les Etats-Unis ont accepté le principe : retirer leurs troupes des villes irakiennes d’ici le milieu de l’année 2009. Et, enfin, quitter l’Irak d’ici la fin de l’année 2011. Cette dernière option représente un immense défi logistique. Une entreprise qui pourrait tourner à la mission impossible si le nouveau président des Etats-Unis Barack Obama décidait d’accélérer le mouvement. En plus des 150 000 soldats déployés sur place, des dizaines de milliers de pièces d’équipement militaires et logistiques devront être rapatriées en trois ans. L’armada est impressionnante.
L’armée de terre américaine possède en Irak près de 20 000 camions humvees, véhicules blindés résistant aux mines et véhicules de combat Bradley et Stryker, ainsi que 470 hélicoptères. Sans oublier les stocks de munitions, les dépôts de nourriture et les hôpitaux militaires. Le retrait des troupes américaines après la guerre du Golfe en 1991 avait bien pris près d’un an, rappellent les analystes. Mais bien que l’armée américaine se dise désormais capable de déployer une brigade de 3 500 hommes en Irak en un mois, tout en en retirant une autre quasi simultanément, l’opération reste compliquée.
Pratiquement, l’opération est déjà aménagée. «Les troupes quittent le pays par voie aérienne, tandis que les équipements sont envoyés par la route au Koweït, lavés et décontaminés en conformité avec les règles strictes de l’Agence américaine de protection de l’environnement, avant d’être embarqués à bord de porte-conteneurs.» Alors qu’il fallait auparavant six mois pour renvoyer les équipements vers les dépôts de maintenance aux Etats-Unis, il en faut seulement deux aujourd’hui, selon l’armée américaine. Mais la tâche colossale risque surtout de se compliquer dans le cas où le futur occupant de la Maison-Blanche déciderait un retrait d’Irak en 16 mois, conformément à ses promesses ayant jalonné sa longue campagne pour la présidentielle. Barack Obama confirmerait une promesse maintes fois répétée : une fois à Washington, il mettra tout en œuvre pour retirer les troupes américaines d’Irak. Mais, pour les spécialistes militaires, un retrait en moins de deux ans et demi est purement impossible. Barack Obama serait-il obligé de s’en tenir à l’échéance de 2011 ?
Inconciliable Moqtada Sadr
Une éventualité qui conforterait les troupes américaines, lesquelles auraient alors un an et demi d’avance sur le calendrier prévu par le pacte bilatéral conclu entre les Etats-Unis et l’Irak. Un accord dont les responsables irakiens refusent l’échec. Le ministre des Affaires étrangères Hochiar Zebari a estimé que «le pacte bilatéral fixant à la fin 2011 le terme de la présence militaire américaine en Irak» ne pouvait en aucune manière être désapprouvé par les parlementaires irakiens. Ce pacte, déjà paraphé par Zebari et l’ambassadeur américain Ryan Crocker, se caractérise par l’échelonnement de la fin du conflit de manière précise. Qu’en sera-t-il dans le cas de son adoption ? Les soldats américains seront placés, pour la première fois, sous le contrôle des autorités irakiennes. L’armée américaine restituera ses bases à l’Etat irakien. Il lui faudra obtenir l’ordre d’un magistrat du pays ou l’autorisation du gouvernement avant de pouvoir mener le moindre raid contre des habitations. Autre effet tout aussi visible que symbolique : les troupes américaines ne seront plus amenées à patrouiller dans les rues des villes et des villages dès la deuxième moitié de 2009. Le projet en question fait l’unanimité au sein des forces dirigeantes en Irak. Seulement, les partisans du très médiatisé imam chiite Moqtada Sadr y sont hostiles. Sadr a toujours été un opposant à la présence de l’armée américaine sur le sol irakien. A maintes reprises, de sanglants accrochages ont éclaté entre l’armée américaine et celle du Mahdi. Pour le très respecté ayatollah Ali Sistani, c’est une position neutre. Il a fait savoir qu’il n’interviendrait pas dans le processus de ratification. D’autres voix s’élèvent également pour réclamer des «ajustements». A l’image du Front de l’accord, le plus important bloc sunnite du Parlement qui réclame un référendum populaire.
Perspicace lord Bingham
La présence américaine en Irak reste néanmoins depuis cinq ans très controversée. L’un des anciens juges les plus élevés dans la hiérarchie judiciaire britannique a qualifié de totalement «faussés» les arguments juridiques qui avaient été présentés, avant l’intervention en Irak en 2003, à Tony Blair, alors Premier Ministre. Dans un discours prononcé à Londres, au British Institut of International and Comparative Law (BIICL), lord Thomas Bingham a déclaré que le communiqué produit juste avant l’invasion de l’Irak en 2003 par lord Peter Goldsmith, responsable à l’époque du service juridique du gouvernement britannique, était «faussé sur deux points fondamentaux». Le texte omettait d’admettre l’absence de preuves concrètes, selon lesquelles l’Irak ne se soumettait pas aux résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU, argumentaire qui avait entraîné contre ce pays une intervention militaire britannique et américaine.
«Il n’est pas évident que l’Irak ait manqué de se soumettre aux résolutions du Conseil de sécurité pour justifier le recours à la force», a estimé lord Bingham. La guerre ayant visé l’Irak était donc illégale. Pour lord Bingham, «Hans Blix [chef des inspecteurs de l’ONU en Irak] et son équipe d’inspecteurs de l’ONU n’ayant pas trouvé des armes de destruction massive, progressaient dans leurs recherches et prévoyaient encore quelques mois pour terminer leur travail.» Un tel avis juridique émanant d’une autorité aussi respectée vient conforter les détracteurs des tenants du pouvoir à Baghdad considéré comme illégitime puisque ayant vu le jour dans une période exceptionnelle. Les Irakiens pourraient même utiliser l’avis juridique du lord britannique comme base pour juger l’administration de George W. Bush et le gouvernement de Tony Blair pour crime de guerre et demander des dédommagements pour l’apocalypse qui s’est abattue sur l’Irak depuis 2003.
Par Moumene Belghoul
La Tribune

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L’accord de sécurité qui devrait régir la présence américaine en Irak jusqu’à la fin de 2011 sera demain au centre du débat à Baghdad. Tout tend vers une adoption du texte en question âprement discuté durant des mois. Les voix réfractaires restent marginales. Seul Moqtada Sadr, viscéralement contre un accord considéré comme «dangereux pour l’avenir de l’Irak», fait parti des opposant déclarés. Autre position faisant partie du bémol : les politiciens irakiens sunnites préconisent d’avoir l’avis de la population. Le peuple d’Irak justement qui a payé le lourd tribut d’une occupation qui ne dit pas son nom et qui dure depuis cinq années après la chute du régime de Saddam Hussein. Sur le plan légal, cet accord sécuritaire remplacera le mandat de l’ONU. Il accordera aux troupes américaines ce qui leur manquait : une présence légale aux pays des deux fleuves et ce, à partir de 2009. L’Irak officiel et les Etats-Unis ont peiné pour signer l’accord en raison de mésententes soulevées par Baghdad ayant trait à la souveraineté de l’Irak. Un pays qui frise la désintégration territoriale avec l’exacerbation des tentions ethniques. Après de vifs débats, les Etats-Unis ont accepté le principe : retirer leurs troupes des villes irakiennes d’ici le milieu de l’année 2009. Et, enfin, quitter l’Irak d’ici la fin de l’année 2011. Cette dernière option représente un immense défi logistique. Une entreprise qui pourrait tourner à la mission impossible si le nouveau président des Etats-Unis Barack Obama décidait d’accélérer le mouvement. En plus des 150 000 soldats déployés sur place, des dizaines de milliers de pièces d’équipement militaires et logistiques devront être rapatriées en trois ans. L’armada est impressionnante.
L’armée de terre américaine possède en Irak près de 20 000 camions humvees, véhicules blindés résistant aux mines et véhicules de combat Bradley et Stryker, ainsi que 470 hélicoptères. Sans oublier les stocks de munitions, les dépôts de nourriture et les hôpitaux militaires. Le retrait des troupes américaines après la guerre du Golfe en 1991 avait bien pris près d’un an, rappellent les analystes. Mais bien que l’armée américaine se dise désormais capable de déployer une brigade de 3 500 hommes en Irak en un mois, tout en en retirant une autre quasi simultanément, l’opération reste compliquée.
Pratiquement, l’opération est déjà aménagée. «Les troupes quittent le pays par voie aérienne, tandis que les équipements sont envoyés par la route au Koweït, lavés et décontaminés en conformité avec les règles strictes de l’Agence américaine de protection de l’environnement, avant d’être embarqués à bord de porte-conteneurs.» Alors qu’il fallait auparavant six mois pour renvoyer les équipements vers les dépôts de maintenance aux Etats-Unis, il en faut seulement deux aujourd’hui, selon l’armée américaine. Mais la tâche colossale risque surtout de se compliquer dans le cas où le futur occupant de la Maison-Blanche déciderait un retrait d’Irak en 16 mois, conformément à ses promesses ayant jalonné sa longue campagne pour la présidentielle. Barack Obama confirmerait une promesse maintes fois répétée : une fois à Washington, il mettra tout en œuvre pour retirer les troupes américaines d’Irak. Mais, pour les spécialistes militaires, un retrait en moins de deux ans et demi est purement impossible. Barack Obama serait-il obligé de s’en tenir à l’échéance de 2011 ?
Inconciliable Moqtada Sadr
Une éventualité qui conforterait les troupes américaines, lesquelles auraient alors un an et demi d’avance sur le calendrier prévu par le pacte bilatéral conclu entre les Etats-Unis et l’Irak. Un accord dont les responsables irakiens refusent l’échec. Le ministre des Affaires étrangères Hochiar Zebari a estimé que «le pacte bilatéral fixant à la fin 2011 le terme de la présence militaire américaine en Irak» ne pouvait en aucune manière être désapprouvé par les parlementaires irakiens. Ce pacte, déjà paraphé par Zebari et l’ambassadeur américain Ryan Crocker, se caractérise par l’échelonnement de la fin du conflit de manière précise. Qu’en sera-t-il dans le cas de son adoption ? Les soldats américains seront placés, pour la première fois, sous le contrôle des autorités irakiennes. L’armée américaine restituera ses bases à l’Etat irakien. Il lui faudra obtenir l’ordre d’un magistrat du pays ou l’autorisation du gouvernement avant de pouvoir mener le moindre raid contre des habitations. Autre effet tout aussi visible que symbolique : les troupes américaines ne seront plus amenées à patrouiller dans les rues des villes et des villages dès la deuxième moitié de 2009. Le projet en question fait l’unanimité au sein des forces dirigeantes en Irak. Seulement, les partisans du très médiatisé imam chiite Moqtada Sadr y sont hostiles. Sadr a toujours été un opposant à la présence de l’armée américaine sur le sol irakien. A maintes reprises, de sanglants accrochages ont éclaté entre l’armée américaine et celle du Mahdi. Pour le très respecté ayatollah Ali Sistani, c’est une position neutre. Il a fait savoir qu’il n’interviendrait pas dans le processus de ratification. D’autres voix s’élèvent également pour réclamer des «ajustements». A l’image du Front de l’accord, le plus important bloc sunnite du Parlement qui réclame un référendum populaire.
Perspicace lord Bingham
La présence américaine en Irak reste néanmoins depuis cinq ans très controversée. L’un des anciens juges les plus élevés dans la hiérarchie judiciaire britannique a qualifié de totalement «faussés» les arguments juridiques qui avaient été présentés, avant l’intervention en Irak en 2003, à Tony Blair, alors Premier Ministre. Dans un discours prononcé à Londres, au British Institut of International and Comparative Law (BIICL), lord Thomas Bingham a déclaré que le communiqué produit juste avant l’invasion de l’Irak en 2003 par lord Peter Goldsmith, responsable à l’époque du service juridique du gouvernement britannique, était «faussé sur deux points fondamentaux». Le texte omettait d’admettre l’absence de preuves concrètes, selon lesquelles l’Irak ne se soumettait pas aux résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU, argumentaire qui avait entraîné contre ce pays une intervention militaire britannique et américaine.
«Il n’est pas évident que l’Irak ait manqué de se soumettre aux résolutions du Conseil de sécurité pour justifier le recours à la force», a estimé lord Bingham. La guerre ayant visé l’Irak était donc illégale. Pour lord Bingham, «Hans Blix [chef des inspecteurs de l’ONU en Irak] et son équipe d’inspecteurs de l’ONU n’ayant pas trouvé des armes de destruction massive, progressaient dans leurs recherches et prévoyaient encore quelques mois pour terminer leur travail.» Un tel avis juridique émanant d’une autorité aussi respectée vient conforter les détracteurs des tenants du pouvoir à Baghdad considéré comme illégitime puisque ayant vu le jour dans une période exceptionnelle. Les Irakiens pourraient même utiliser l’avis juridique du lord britannique comme base pour juger l’administration de George W. Bush et le gouvernement de Tony Blair pour crime de guerre et demander des dédommagements pour l’apocalypse qui s’est abattue sur l’Irak depuis 2003.
Par Moumene Belghoul
La Tribune