Le Royal Mansour, premier palace griffé M6
Avec l’autorisation des auteurs, le Quotidien d’Oran – Maghreb Emergent, publient un extrait du livre du livre « Paris Marrakech, Sexe, fric et réseaux ». L’extrait pris dans un chapitre « Joyeux Noël, Majesté » rend compte du climat particulier qui régnait en cette période de l’année où Marrakech a fait le « plein de beau monde » et de VIP venus de Paris.
Le rite ne change pas. Que la France se mette en congés et voilà Marrakech saisie par la fièvre. « Vacances » rime alors avec « effervescence » pour la cité presque millénaire. À l’aéroport international Marrakech-Menara, l’agitation est palpable. Le hall d’arrivée ressemble à un souk. On s’y bouscule gentiment sous l’œil goguenard des policiers de service. Les douaniers aussi sont à leur poste, près de la sortie. S’ils auscultent, palpent, fouillent les valises des Marocains de retour au pays, ils délaissent les bagages des touristes français. Bienvenue « dans le plus beau pays du monde », comme l’assure la publicité de l’office du tourisme. À deux pas des guichets des passagers « normaux », la file réservée aux diplomates et aux équipages s’écoule en bon ordre. Qui aurait imaginé qu’autant d’ambassadeurs, actifs ou à la retraite, fréquentent Marrakech ? Peu de têtes connues parmi ceux qui, passeport à la main, valise à roulettes dans l’autre, patientent devant les policiers plantés derrière leur comptoir comme les caissières dans un supermarché. Ni ministre, ni dirigeant politique, ni parrain du CAC 40. La raison en est simple. À peine débarqués, quelques-uns de ces happy few se sont engouffrés dans une limousine qui les attendait au pied de la passerelle de l’avion ; les autres se sont dirigés tout naturellement vers les salons pour VIP installés un peu à l’écart. Les formalités y sont douces. Traitement de faveur identique pour les clients de la Mamounia et d’une poignée de palaces pris en main et choyés dès leur arrivée. Un salon particulier les accueille avec boissons fraîches et serviteurs en gants blancs.
Sarkozy et Carla à Jnan Kébir
En ce Noël 2010, Marrakech a fait le plein de beau monde. C’est une fin d’année hors du commun. Un cru exceptionnel. Jamais jusqu’alors Kech n’a réuni autant de membres de la France d’en haut. Jamais autant de VIP n’ont débarqué de Paris. Premier de cordée, Nicolas Sarkozy a donné le ton. Au départ, le président français et son épouse Carla avaient d’autres projets : changer d’hémisphère, aller en Afrique du Sud pour oublier la France et ses frimas. Marrakech, ils y étaient pour le réveillon 2009. Pourquoi ne pas aller voir ailleurs ? Mais une offre royale, de celles qu’il est délicat de rejeter, les a contraints à changer de destination. Comme l’année précédente, le monarque mettait à la disposition du couple présidentiel, flanqué d’un des enfants de Carla, Jnan Kébir (le « Grand Jardin »), le dernier-né de ses palais, mélange d’architecture mauresque et de décoration africaine. Caché dans la palmeraie, Jnan Kébir est réputé enchanteur même si l’atmosphère, selon des confidences chuchotées, se révèle un brin ennuyeuse lorsqu’on n’est pas un contemplatif. Dans le sillage du président, c’est le noyau dur du Sarkoland qui a débarqué à Kech. (…)
Tout dégoulinant de luxe qu’il est, le Es Saadi n’est pas ce qui se fait de mieux à Marrakech, loin s’en faut. Le summum, c’est le Royal Mansour, dans le quartier huppé de l’Hivernage, un palace plus discret que la Mamounia et le seul, au fond, qui sait faire la différence entre un millionnaire et un milliardaire. À l’automne 2010, Jacques et Bernadette Chirac y ont passé quelques jours dans des conditions identiques. Hasard de la toute petite histoire, le jour où les Chirac ont quitté le Royal Mansour et son pavillon luxueux, ils auraient pu croiser Nicolas Sarkozy et Carla Bruni, qui y arrivaient, invités eux aussi par Mohammed VI. Le temps de changer la literie et le nouveau président et madame occupaient sans le savoir la chambre de son meilleur adversaire politique.
(…)
Le Royal Mansour, premier palace griffé M6
Le Royal Mansour mérite que l’on s’y attarde. Classé en 2011 parmi les hôtels « les plus extraordinaires du monde » par le Conde Nast Traveler, la bible des voyageurs fortunés, il est d’une certaine façon le fruit d’un règlement de comptes posthume. Entre un fils et son père, entre deux rois, Mohammed VI et Hassan II. Ce dernier, à l’image d’un sultan oriental, avait fait construire au fil de ses trente-huit années de règne maints palais par ses architectes français fétiches Michel Pinseau et André Paccard, sans compter les résidences royales, les villas d’été, les villas d’hiver dans lesquelles il séjournait au rythme des saisons et de son humeur, traînant derrière lui un harem et une armée de serviteurs. Mohammed VI s’est détaché de ce patrimoine immobilier. Il ne l’a pas rendu au propriétaire officiel, l’État, comme la rumeur l’a propagé un temps ; il n’est pas devenu le « roi des pauvres » – une formule vendue par l’entourage du souverain au début du règne et prise pour argent comptant par la presse occidentale. Simplement, le nouveau monarque entend lui aussi être un bâtisseur comme son père. Il veut avoir ses propres palais et, dans le même temps, à coups de millions, transformer en hôtels de luxe certains des biens dont il a hérité. Le Royal Mansour est le premier palace griffé Mohammed VI. Le résultat est là, stupéfiant, dissimulé derrière la porte d’entrée. Faite de cuivre et de bois de cèdre de l’Atlas, commandée par un système électronique, elle est monumentale, et très lourde. Elle pèse la bagatelle de quatre tonnes. Ainsi l’a voulue Mohammed VI.
Maghreb Emergent
Avec l’autorisation des auteurs, le Quotidien d’Oran – Maghreb Emergent, publient un extrait du livre du livre « Paris Marrakech, Sexe, fric et réseaux ». L’extrait pris dans un chapitre « Joyeux Noël, Majesté » rend compte du climat particulier qui régnait en cette période de l’année où Marrakech a fait le « plein de beau monde » et de VIP venus de Paris.
Le rite ne change pas. Que la France se mette en congés et voilà Marrakech saisie par la fièvre. « Vacances » rime alors avec « effervescence » pour la cité presque millénaire. À l’aéroport international Marrakech-Menara, l’agitation est palpable. Le hall d’arrivée ressemble à un souk. On s’y bouscule gentiment sous l’œil goguenard des policiers de service. Les douaniers aussi sont à leur poste, près de la sortie. S’ils auscultent, palpent, fouillent les valises des Marocains de retour au pays, ils délaissent les bagages des touristes français. Bienvenue « dans le plus beau pays du monde », comme l’assure la publicité de l’office du tourisme. À deux pas des guichets des passagers « normaux », la file réservée aux diplomates et aux équipages s’écoule en bon ordre. Qui aurait imaginé qu’autant d’ambassadeurs, actifs ou à la retraite, fréquentent Marrakech ? Peu de têtes connues parmi ceux qui, passeport à la main, valise à roulettes dans l’autre, patientent devant les policiers plantés derrière leur comptoir comme les caissières dans un supermarché. Ni ministre, ni dirigeant politique, ni parrain du CAC 40. La raison en est simple. À peine débarqués, quelques-uns de ces happy few se sont engouffrés dans une limousine qui les attendait au pied de la passerelle de l’avion ; les autres se sont dirigés tout naturellement vers les salons pour VIP installés un peu à l’écart. Les formalités y sont douces. Traitement de faveur identique pour les clients de la Mamounia et d’une poignée de palaces pris en main et choyés dès leur arrivée. Un salon particulier les accueille avec boissons fraîches et serviteurs en gants blancs.
Sarkozy et Carla à Jnan Kébir
En ce Noël 2010, Marrakech a fait le plein de beau monde. C’est une fin d’année hors du commun. Un cru exceptionnel. Jamais jusqu’alors Kech n’a réuni autant de membres de la France d’en haut. Jamais autant de VIP n’ont débarqué de Paris. Premier de cordée, Nicolas Sarkozy a donné le ton. Au départ, le président français et son épouse Carla avaient d’autres projets : changer d’hémisphère, aller en Afrique du Sud pour oublier la France et ses frimas. Marrakech, ils y étaient pour le réveillon 2009. Pourquoi ne pas aller voir ailleurs ? Mais une offre royale, de celles qu’il est délicat de rejeter, les a contraints à changer de destination. Comme l’année précédente, le monarque mettait à la disposition du couple présidentiel, flanqué d’un des enfants de Carla, Jnan Kébir (le « Grand Jardin »), le dernier-né de ses palais, mélange d’architecture mauresque et de décoration africaine. Caché dans la palmeraie, Jnan Kébir est réputé enchanteur même si l’atmosphère, selon des confidences chuchotées, se révèle un brin ennuyeuse lorsqu’on n’est pas un contemplatif. Dans le sillage du président, c’est le noyau dur du Sarkoland qui a débarqué à Kech. (…)
Tout dégoulinant de luxe qu’il est, le Es Saadi n’est pas ce qui se fait de mieux à Marrakech, loin s’en faut. Le summum, c’est le Royal Mansour, dans le quartier huppé de l’Hivernage, un palace plus discret que la Mamounia et le seul, au fond, qui sait faire la différence entre un millionnaire et un milliardaire. À l’automne 2010, Jacques et Bernadette Chirac y ont passé quelques jours dans des conditions identiques. Hasard de la toute petite histoire, le jour où les Chirac ont quitté le Royal Mansour et son pavillon luxueux, ils auraient pu croiser Nicolas Sarkozy et Carla Bruni, qui y arrivaient, invités eux aussi par Mohammed VI. Le temps de changer la literie et le nouveau président et madame occupaient sans le savoir la chambre de son meilleur adversaire politique.
(…)
Le Royal Mansour, premier palace griffé M6
Le Royal Mansour mérite que l’on s’y attarde. Classé en 2011 parmi les hôtels « les plus extraordinaires du monde » par le Conde Nast Traveler, la bible des voyageurs fortunés, il est d’une certaine façon le fruit d’un règlement de comptes posthume. Entre un fils et son père, entre deux rois, Mohammed VI et Hassan II. Ce dernier, à l’image d’un sultan oriental, avait fait construire au fil de ses trente-huit années de règne maints palais par ses architectes français fétiches Michel Pinseau et André Paccard, sans compter les résidences royales, les villas d’été, les villas d’hiver dans lesquelles il séjournait au rythme des saisons et de son humeur, traînant derrière lui un harem et une armée de serviteurs. Mohammed VI s’est détaché de ce patrimoine immobilier. Il ne l’a pas rendu au propriétaire officiel, l’État, comme la rumeur l’a propagé un temps ; il n’est pas devenu le « roi des pauvres » – une formule vendue par l’entourage du souverain au début du règne et prise pour argent comptant par la presse occidentale. Simplement, le nouveau monarque entend lui aussi être un bâtisseur comme son père. Il veut avoir ses propres palais et, dans le même temps, à coups de millions, transformer en hôtels de luxe certains des biens dont il a hérité. Le Royal Mansour est le premier palace griffé Mohammed VI. Le résultat est là, stupéfiant, dissimulé derrière la porte d’entrée. Faite de cuivre et de bois de cèdre de l’Atlas, commandée par un système électronique, elle est monumentale, et très lourde. Elle pèse la bagatelle de quatre tonnes. Ainsi l’a voulue Mohammed VI.
Maghreb Emergent
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