Succès contestable de Bouteflika aux élections., succès incontesté des djihadistes au Nord-Mali.
Depuis plus d'un mois, Jean Ping, ancien ministre gabonais et président de la Commission de l'Union africaine, veut convaincre plusieurs Etats du Sahel d'intervenir militairement au Mali. Cette initiative, que l'Union européenne accepte de financer, est approuvée « sans la moindre réserve », dit-on au Quai d'Orsay, par les Etats-Unis, la France ou la Grande-Bretagne. Et le but poursuivi serait de rétablir l'unité de cet immense pays, en chassant du Nord-Mali les groupes armés qui en ont pris le contrôle. A savoir le mouvement indépendantiste touareg du MNLA, les commandos d'Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) et leurs divers « associés », comme les fanatiques d'Ansar Dine ou ceux de Boko Haram, venus, eux, du Nigeria.
Connu pour son habileté diploma¬tique, Jean Ping est allé plaider sa cause auprès de Bouteflika, et, le 2 mai, il s'en est ainsi expliqué à la télévision algérienne : « L'Union africaine ne peut traiter le problème du Sahel sans une participation directe de l'Algérie. » Ce n'était pas là manière de flatter Bouteflika et ses généraux. Leur armée est la seule capable de mener une intervention efficace contre « cette concentration d'ennemis islamistes à leur frontière déplus de 1 000 kilomètres avec le Mali », selon un membre de l'état-major français.
Internationale verte
Mais la proposition de Jean Ping n'a pas fait un triomphe. Celui-ci s'est en¬tendu répondre, en substance : vous allez « afghaniser » le problème du Sahel, et c'est le piège qui nous est tendu à tous aujourd'hui. A Paris, on doute devoir les dirigeants algériens revenir à de meilleures intentions, mais, sans le déclarer publiquement, leurs services barbouzards seraient ravis, dit-on, de pratiquer quelques « assassinats ciblés » de chefs islamistes. A l'instar de leurs collègues américains ou israéliens, précurseurs en la matière sur d'autres terrains.
Au fil des semaines, cette « poudrière africaine » aux portes de l'Algérie, que l'on observe avec inquiétude à Paris, est devenue le centre d'accueil des salafistes, partisans du djihad en Afrique ou ailleurs. Des volontaires ou des réfugiés en provenance, selon l'état-major et les services français, d'Algérie, de Mauritanie, de Libye, du Niger, du Nigeria, de Somalie, du Soudan, du Yémen, et, parmi les derniers arrivés, quelques dizaines d'« instructeurs » pakistanais qui n'en sont pas à leur baptême du feu. Tous bien armés, parfois avec des missiles sol-air récupérés dans les arsenaux de Kadhafi, et armés aussi de principes religieux, comme ces gens d'Aqmi qui ont créé plusieurs écoles coraniques pour les enfants touareg.
"Alliance verte" de rage
Après la déstabilisation du Mali et la « capture » d'une partie de ce pays, la question se pose, à Alger comme à Paris : à qui le tour ? Au Niger ? Quant aux élections législatives algériennes, à en croire le porte-parole du FLN, parti qui vient de les remporter largement avec son petit allié, le RND, cette victoire est bien naturelle : « Les événe¬ments de Libye et du Sahel ont rappelé aux Algériens des choses vues dans le passé. » Façon d'évoquer, sans en parler, la guerre civile (1988-1998, etc.) et son atroce bilan : quelque 150 000 morts et disparus algériens.
Cette explication est un peu courte. Venus sur place « observer » les élec¬tions (42,3 % de votants seulement), les membres de la délégation européenne ont aimablement déclaré qu'elles s'étaient déroulées dans des « conditions assez satisfaisantes ». Assez ? Ce n'est pas l'opinion qui prévaut à Paris, au Quai d'Orsay ou à l'état-major, où l'on sait, par expérience, que la « centralisation » des résultats d'un scrutin peut contredire le contenu des urnes. « Les dirigeants algériens ont, bien sûr, "arrangé" les chiffres. Ils ne pouvaient laisser les islamistes se multiplier à l'Assemblée », affirme un diplomate qui en a vu d'autres, à Alger et ailleurs. Selon lui, les trois partis islamistes, réunis sous le label « Alliance verte », sont les « cocus » de l'histoire, même s'ils sont arrivés en tête dans la capitale.
Moralité : l'ordre règne en Algérie, le président Bouteflika est en poste jus¬qu'en 2014, et, comme l'admettent diplomates et militaires français, « les généraux d'Alger n'ont pas encore choisi son successeur ». C'est leur règle du jeu électoral ?
Le Carnard Enchaîné - Claude Angeli
Depuis plus d'un mois, Jean Ping, ancien ministre gabonais et président de la Commission de l'Union africaine, veut convaincre plusieurs Etats du Sahel d'intervenir militairement au Mali. Cette initiative, que l'Union européenne accepte de financer, est approuvée « sans la moindre réserve », dit-on au Quai d'Orsay, par les Etats-Unis, la France ou la Grande-Bretagne. Et le but poursuivi serait de rétablir l'unité de cet immense pays, en chassant du Nord-Mali les groupes armés qui en ont pris le contrôle. A savoir le mouvement indépendantiste touareg du MNLA, les commandos d'Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) et leurs divers « associés », comme les fanatiques d'Ansar Dine ou ceux de Boko Haram, venus, eux, du Nigeria.
Connu pour son habileté diploma¬tique, Jean Ping est allé plaider sa cause auprès de Bouteflika, et, le 2 mai, il s'en est ainsi expliqué à la télévision algérienne : « L'Union africaine ne peut traiter le problème du Sahel sans une participation directe de l'Algérie. » Ce n'était pas là manière de flatter Bouteflika et ses généraux. Leur armée est la seule capable de mener une intervention efficace contre « cette concentration d'ennemis islamistes à leur frontière déplus de 1 000 kilomètres avec le Mali », selon un membre de l'état-major français.
Internationale verte
Mais la proposition de Jean Ping n'a pas fait un triomphe. Celui-ci s'est en¬tendu répondre, en substance : vous allez « afghaniser » le problème du Sahel, et c'est le piège qui nous est tendu à tous aujourd'hui. A Paris, on doute devoir les dirigeants algériens revenir à de meilleures intentions, mais, sans le déclarer publiquement, leurs services barbouzards seraient ravis, dit-on, de pratiquer quelques « assassinats ciblés » de chefs islamistes. A l'instar de leurs collègues américains ou israéliens, précurseurs en la matière sur d'autres terrains.
Au fil des semaines, cette « poudrière africaine » aux portes de l'Algérie, que l'on observe avec inquiétude à Paris, est devenue le centre d'accueil des salafistes, partisans du djihad en Afrique ou ailleurs. Des volontaires ou des réfugiés en provenance, selon l'état-major et les services français, d'Algérie, de Mauritanie, de Libye, du Niger, du Nigeria, de Somalie, du Soudan, du Yémen, et, parmi les derniers arrivés, quelques dizaines d'« instructeurs » pakistanais qui n'en sont pas à leur baptême du feu. Tous bien armés, parfois avec des missiles sol-air récupérés dans les arsenaux de Kadhafi, et armés aussi de principes religieux, comme ces gens d'Aqmi qui ont créé plusieurs écoles coraniques pour les enfants touareg.
"Alliance verte" de rage
Après la déstabilisation du Mali et la « capture » d'une partie de ce pays, la question se pose, à Alger comme à Paris : à qui le tour ? Au Niger ? Quant aux élections législatives algériennes, à en croire le porte-parole du FLN, parti qui vient de les remporter largement avec son petit allié, le RND, cette victoire est bien naturelle : « Les événe¬ments de Libye et du Sahel ont rappelé aux Algériens des choses vues dans le passé. » Façon d'évoquer, sans en parler, la guerre civile (1988-1998, etc.) et son atroce bilan : quelque 150 000 morts et disparus algériens.
Cette explication est un peu courte. Venus sur place « observer » les élec¬tions (42,3 % de votants seulement), les membres de la délégation européenne ont aimablement déclaré qu'elles s'étaient déroulées dans des « conditions assez satisfaisantes ». Assez ? Ce n'est pas l'opinion qui prévaut à Paris, au Quai d'Orsay ou à l'état-major, où l'on sait, par expérience, que la « centralisation » des résultats d'un scrutin peut contredire le contenu des urnes. « Les dirigeants algériens ont, bien sûr, "arrangé" les chiffres. Ils ne pouvaient laisser les islamistes se multiplier à l'Assemblée », affirme un diplomate qui en a vu d'autres, à Alger et ailleurs. Selon lui, les trois partis islamistes, réunis sous le label « Alliance verte », sont les « cocus » de l'histoire, même s'ils sont arrivés en tête dans la capitale.
Moralité : l'ordre règne en Algérie, le président Bouteflika est en poste jus¬qu'en 2014, et, comme l'admettent diplomates et militaires français, « les généraux d'Alger n'ont pas encore choisi son successeur ». C'est leur règle du jeu électoral ?
Le Carnard Enchaîné - Claude Angeli
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