Géostratégie au Proche-Orient
Sans le pétrole et Israël, cette région n'intéresserait qu'archéologues, touristes et pèlerins. Ces deux centres d'intérêt se traduisent par des conflits potentiels ou déclarés qui impliquent une stratégie militaire.
Le pétrole
Sans pétrole, pas de camion, de voiture et de bateau : il est donc devenu vital au sens propre car, sans ravitaillement, des millions de gens mourraient de faim dans les grandes villes.
Jusqu'à la fin du XIXe siècle, il ne servait guère qu'à l'éclairage ; ce n'est qu'avec le développement du moteur à explosion qu'il prit de l'importance (la construction de la Ford T date de 1908)
Mais c'est au cours de la Première guerre mondiale que son intérêt stratégique apparut avec son utilisation dans les chars, la marine, l'aviation et les transports de troupe (voir l'exemple des célèbres taxis de la Marne ).
À la fin de la guerre, alors que les Français étaient occupés à défendre les minorités chrétiennes et druzes dans la zone Syrie-Liban – s'attirant ainsi la haine de la majorité sunnite syrienne jusqu'à l'indépendance du pays –, les Anglais s'intéressaient au pétrole : ils avaient déjà fondé la Turkish Petroleum Company en 1912. En 1914, ils contrôlaient l'Anglo-Persian Oil Company. Les découvertes ultérieures, dans les années 1930, allaient attirer les Américains ; avec les Britanniques, ils s'installèrent comme protecteurs des nouveaux pays qui voyaient le jour, situation qui dure jusqu'à nos jours.
Le Premier ministre iranien Mossadegh, qui voulait des royalties plus importantes pour son pays, fut promptement éliminé par un coup d'état fomenté par les Américains et Britanniques. L'installation du trop occidentalisé et autoritaire Shah d'Iran allait provoquer une réaction violente qui se traduisit par la Révolution iranienne et l'arrivée des mollahs au pouvoir.
Le quart de la production mondiale (et 17 % des importations françaises) provient de cette région.
Répartition géographique
Au Proche-Orient, les ressources se concentrent essentiellement autour du Golfe persique – région majoritairement chiite – et dans la partie kurde de l'Irak.

Une carte plus détaillée est visible ici.
• Importations israéliennes
«L'essentiel du pétrole raffiné à Haïfa et Ashdod vient des anciens pays soviétiques, principalement d'Azerbaïdjan. Le pétrole est acheminé par l'oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan (BTC), qui s'étend de la capitale azérie de Bakou au port méditerranéen turc de Ceyhan, via la capitale géorgienne de Tbilissi. Le reste du pétrole arrive en Israël par des pétroliers traversant la mer Noire, le Bosphore contrôlé par les Turcs, et la Méditerranée. »
À peine Saddam Hussein était-il renversé que «des plans pour la construction d'un pipeline entre l'Irak nouvellement conquis et Israël [étaient] en cours de discussion entre Washington, Tel-Aviv et des personnalités susceptibles de faire partie du nouveau gouvernement à Bagdad. »
La découverte récente de réserves de pétrole au large d'Israël est susceptible de changer la situation :
« Israël pourrait détenir la troisième plus grande réserve mondiale de pétrole de schiste. »
• Importations américaines
Le graphique suivant montre que les importations américaines en provenance du Golfe sont restées sensiblement constantes depuis une dizaine d'années.

Sur cette autre carte, la courbe en bleu représente le pétrole en provenance des pays de l'Opec, la courbe marron celui importé du Canada ; la dépendance américaine dans cette région devrait diminuer après la découverte de très grandes réserves de pétrole de schiste au Canada, dans le nord des USA et au Brésil.

Coalition israëlo-américaine
Les mauvaises relations entre Juifs puis Israéliens et leurs voisins arabes se sont développées pratiquement en même temps que l'intérêt anglo-américain pour le pétrole.
De la Déclaration Balfour jusqu'à nos jours, des massacres d'avant 1948 jusqu'aux guerres entre Israël et certains de ses voisins, la rivalité entre musulmans et juifs n'a jamais cessé.
En dehors de la guerre du Liban, terminée en 1990, il n'y a cependant pas eu de conflit armé entre pays depuis une trentaine d'années.
Les envolées lyriques de certains dirigeants arabes permettaient au quotidien israélien Ha'aretz d'écrire encore le 29 mars 2011 :
« De tous les dictateurs arabes, Assad est le préféré d'Israël », poursuivant ironiquement :
« Les deux Assad, senior et junior, ont plaidé la résistance à Israël. Ce slogan était creux, et servait simplement de police d'assurance au régime contre toute revendication de liberté et de démocratie. Ce gouvernement syrien “résistant” n'a pas jeté un seul coup d'œil sur le front du Golan depuis 1973. Au lieu de cela, ce régime de “résistance” était et reste toujours prêt à combattre Israël jusqu'au dernier Libanais et, si cela ne suffit pas, jusqu'au dernier Palestinien. »
Israël se sentait menacé par certains pays riches et relativement armés qui soutenaient les Palestiniens : la Libye (devenue cependant très modérée au cours de ces dernières années), l'Irak et l'Iran.
Solution : renverser ces régimes, puis les remplacer par des gouvernements supposés amis.
Profitant d'une importante diaspora aux USA (voir son influence électorale dans l'étonnant article de Ha'aretz :Ramallah reforms,Alabama election ), de puissants groupes de pression, d'influents think tanks et d'un soutien très large dans les médias, Israël s'est efforcé avec succès d'impliquer ce puissant pays dans ses guerres en le persuadant que les intérêts américains coïncidaient avec les siens.
L'Aipac est le groupe de pression le plus important : variante américaine du Crif, en beaucoup plus important, cette organisation attire chaque année à son dîner une quantité impressionnante d'hommes politiques des deux partis principaux.

L'institut juif pour les affaires de sécurité nationale (Jinsa) est tout aussi actif.
Parmi les innombrables think tanks encourageant les USA à des actions militaires, le Council on Foreign Relations (CFR) joue un rôle important ; à l'occasion de la création d'un bureau à Washington, Hillary Clinton déclarait candidement :
« Je suis ravie d’être ici dans ce nouveau siège. Je suis souvent allée à la maison-mère de New York, mais il est bon d’avoir désormais un avant-poste du Conseil juste ici, en bas de la rue, tout près du Département d’Etat. Nous recevons beaucoup d’avis du Conseil, ce qui signifie que je n’aurai pas à aller très loin pour qu’on me dise ce que nous devrions faire et la façon dont nous devrions penser à l’avenir. »
(Texte visible sur le site du Département d'État)
L'Etat-major du CFR est majoritairement constitué d'amis aussi « inconditionnels » d'Israël que Bernard-Henri Lévy.
Les projets stratégiques ont été clairement définis dans un certain nombre de documents rédigés en grande partie par des supporters américains de la diaspora.
Le Projet pour un Nouveau Siècle Américain (PNAC) fut par exemple créé par William Kristol et Robert Kagan. Son idée conductrice consiste à augmenter et utiliser la force militaire la plus puissante du monde (l'US Army) pour imposer une paix mondiale à la manière d'une Pax Romana.
Dans le document intitulé « Rebuilding America’s defenses », on peut lire :
« D'après la CIA, un certain nombre de régimes profondément hostiles à l'Amérique – Corée du Nord, Irak, Iran, Libye et Syrie – ont déjà, ou sont sur le point d'avoir des missiles balistiques qui pourraient menacer les forces U.S et alliées à l'étranger. »
En 1996, Richard Perle, alors Secrétaire adjoint de la Défense américaine, rédigea une étude destinée à Benjamin Netanyahu, le Premier ministre d'Israël : A clean Break : A New Strategy for Securing the Realm (Un changement net : nouvelle stratégie pour sécuriser la région).
« La Syrie défie Israel sur le sol libanais. Une approche efficace, avec laquelle américains pourraient sympathiser, serait qu'Israël prenne l'initiative stratégique le long de ses frontières du Nord en combattant le Hezbollah, la Syrie et l'Iran, les principaux agents de l'agression au Liban. »
Sans le pétrole et Israël, cette région n'intéresserait qu'archéologues, touristes et pèlerins. Ces deux centres d'intérêt se traduisent par des conflits potentiels ou déclarés qui impliquent une stratégie militaire.
Le pétrole
Sans pétrole, pas de camion, de voiture et de bateau : il est donc devenu vital au sens propre car, sans ravitaillement, des millions de gens mourraient de faim dans les grandes villes.
Jusqu'à la fin du XIXe siècle, il ne servait guère qu'à l'éclairage ; ce n'est qu'avec le développement du moteur à explosion qu'il prit de l'importance (la construction de la Ford T date de 1908)
Mais c'est au cours de la Première guerre mondiale que son intérêt stratégique apparut avec son utilisation dans les chars, la marine, l'aviation et les transports de troupe (voir l'exemple des célèbres taxis de la Marne ).
À la fin de la guerre, alors que les Français étaient occupés à défendre les minorités chrétiennes et druzes dans la zone Syrie-Liban – s'attirant ainsi la haine de la majorité sunnite syrienne jusqu'à l'indépendance du pays –, les Anglais s'intéressaient au pétrole : ils avaient déjà fondé la Turkish Petroleum Company en 1912. En 1914, ils contrôlaient l'Anglo-Persian Oil Company. Les découvertes ultérieures, dans les années 1930, allaient attirer les Américains ; avec les Britanniques, ils s'installèrent comme protecteurs des nouveaux pays qui voyaient le jour, situation qui dure jusqu'à nos jours.
Le Premier ministre iranien Mossadegh, qui voulait des royalties plus importantes pour son pays, fut promptement éliminé par un coup d'état fomenté par les Américains et Britanniques. L'installation du trop occidentalisé et autoritaire Shah d'Iran allait provoquer une réaction violente qui se traduisit par la Révolution iranienne et l'arrivée des mollahs au pouvoir.
Le quart de la production mondiale (et 17 % des importations françaises) provient de cette région.
Répartition géographique
Au Proche-Orient, les ressources se concentrent essentiellement autour du Golfe persique – région majoritairement chiite – et dans la partie kurde de l'Irak.

Une carte plus détaillée est visible ici.
• Importations israéliennes
«L'essentiel du pétrole raffiné à Haïfa et Ashdod vient des anciens pays soviétiques, principalement d'Azerbaïdjan. Le pétrole est acheminé par l'oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan (BTC), qui s'étend de la capitale azérie de Bakou au port méditerranéen turc de Ceyhan, via la capitale géorgienne de Tbilissi. Le reste du pétrole arrive en Israël par des pétroliers traversant la mer Noire, le Bosphore contrôlé par les Turcs, et la Méditerranée. »
À peine Saddam Hussein était-il renversé que «des plans pour la construction d'un pipeline entre l'Irak nouvellement conquis et Israël [étaient] en cours de discussion entre Washington, Tel-Aviv et des personnalités susceptibles de faire partie du nouveau gouvernement à Bagdad. »
La découverte récente de réserves de pétrole au large d'Israël est susceptible de changer la situation :
« Israël pourrait détenir la troisième plus grande réserve mondiale de pétrole de schiste. »
• Importations américaines
Le graphique suivant montre que les importations américaines en provenance du Golfe sont restées sensiblement constantes depuis une dizaine d'années.

Sur cette autre carte, la courbe en bleu représente le pétrole en provenance des pays de l'Opec, la courbe marron celui importé du Canada ; la dépendance américaine dans cette région devrait diminuer après la découverte de très grandes réserves de pétrole de schiste au Canada, dans le nord des USA et au Brésil.

Coalition israëlo-américaine
Les mauvaises relations entre Juifs puis Israéliens et leurs voisins arabes se sont développées pratiquement en même temps que l'intérêt anglo-américain pour le pétrole.
De la Déclaration Balfour jusqu'à nos jours, des massacres d'avant 1948 jusqu'aux guerres entre Israël et certains de ses voisins, la rivalité entre musulmans et juifs n'a jamais cessé.
En dehors de la guerre du Liban, terminée en 1990, il n'y a cependant pas eu de conflit armé entre pays depuis une trentaine d'années.
Les envolées lyriques de certains dirigeants arabes permettaient au quotidien israélien Ha'aretz d'écrire encore le 29 mars 2011 :
« De tous les dictateurs arabes, Assad est le préféré d'Israël », poursuivant ironiquement :
« Les deux Assad, senior et junior, ont plaidé la résistance à Israël. Ce slogan était creux, et servait simplement de police d'assurance au régime contre toute revendication de liberté et de démocratie. Ce gouvernement syrien “résistant” n'a pas jeté un seul coup d'œil sur le front du Golan depuis 1973. Au lieu de cela, ce régime de “résistance” était et reste toujours prêt à combattre Israël jusqu'au dernier Libanais et, si cela ne suffit pas, jusqu'au dernier Palestinien. »
Israël se sentait menacé par certains pays riches et relativement armés qui soutenaient les Palestiniens : la Libye (devenue cependant très modérée au cours de ces dernières années), l'Irak et l'Iran.
Solution : renverser ces régimes, puis les remplacer par des gouvernements supposés amis.
Profitant d'une importante diaspora aux USA (voir son influence électorale dans l'étonnant article de Ha'aretz :Ramallah reforms,Alabama election ), de puissants groupes de pression, d'influents think tanks et d'un soutien très large dans les médias, Israël s'est efforcé avec succès d'impliquer ce puissant pays dans ses guerres en le persuadant que les intérêts américains coïncidaient avec les siens.
L'Aipac est le groupe de pression le plus important : variante américaine du Crif, en beaucoup plus important, cette organisation attire chaque année à son dîner une quantité impressionnante d'hommes politiques des deux partis principaux.

L'institut juif pour les affaires de sécurité nationale (Jinsa) est tout aussi actif.
Parmi les innombrables think tanks encourageant les USA à des actions militaires, le Council on Foreign Relations (CFR) joue un rôle important ; à l'occasion de la création d'un bureau à Washington, Hillary Clinton déclarait candidement :
« Je suis ravie d’être ici dans ce nouveau siège. Je suis souvent allée à la maison-mère de New York, mais il est bon d’avoir désormais un avant-poste du Conseil juste ici, en bas de la rue, tout près du Département d’Etat. Nous recevons beaucoup d’avis du Conseil, ce qui signifie que je n’aurai pas à aller très loin pour qu’on me dise ce que nous devrions faire et la façon dont nous devrions penser à l’avenir. »
(Texte visible sur le site du Département d'État)
L'Etat-major du CFR est majoritairement constitué d'amis aussi « inconditionnels » d'Israël que Bernard-Henri Lévy.
Les projets stratégiques ont été clairement définis dans un certain nombre de documents rédigés en grande partie par des supporters américains de la diaspora.
Le Projet pour un Nouveau Siècle Américain (PNAC) fut par exemple créé par William Kristol et Robert Kagan. Son idée conductrice consiste à augmenter et utiliser la force militaire la plus puissante du monde (l'US Army) pour imposer une paix mondiale à la manière d'une Pax Romana.
Dans le document intitulé « Rebuilding America’s defenses », on peut lire :
« D'après la CIA, un certain nombre de régimes profondément hostiles à l'Amérique – Corée du Nord, Irak, Iran, Libye et Syrie – ont déjà, ou sont sur le point d'avoir des missiles balistiques qui pourraient menacer les forces U.S et alliées à l'étranger. »
En 1996, Richard Perle, alors Secrétaire adjoint de la Défense américaine, rédigea une étude destinée à Benjamin Netanyahu, le Premier ministre d'Israël : A clean Break : A New Strategy for Securing the Realm (Un changement net : nouvelle stratégie pour sécuriser la région).
« La Syrie défie Israel sur le sol libanais. Une approche efficace, avec laquelle américains pourraient sympathiser, serait qu'Israël prenne l'initiative stratégique le long de ses frontières du Nord en combattant le Hezbollah, la Syrie et l'Iran, les principaux agents de l'agression au Liban. »
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