Les premiers articles fraîchement adoptés de la nouvelle Constitution tunisienne font de la religion une question individuelle. Une première dans le monde arabe.
Une révolution qui ne dit pas son nom se joue en Tunisie. Avec un an et trois mois de retard, l'Assemblée nationale, où les députés du parti islamiste Ennahda sont majoritaires, a commencé à adopter, le 4 janvier, les premiers articles de la nouvelle Constitution, dont celui garantissant "la liberté de conscience".
La Constitution tunisienne est ainsi la première du monde arabe à reconnaître la liberté de conscience dans un de ses articles. Concrètement, les Tunisiens pourront se déclarer "a-religieux" et, mieux encore, ils pourront décider de changer de religion. Chose impensable - officiellement - pour un musulman puisqu'il risque d'être considéré comme apostat et, à ce titre, menacé de mort par des islamistes radicaux. Et si la majorité des pays arabes - à l'exception des pays du Golfe et du Maroc, où le statut de commandeur des croyants du roi implique que les Marocains, sauf s'ils sont juifs, sont ipso facto musulmans - ont tous des citoyens à la fois arabes et chrétiens de naissance, les conversions ne sont officiellement pas possibles.
La société tunisienne est, comme dans la quasi-totalité des pays arabes et musulmans, divisée entre "un pôle moderne et séculier et un pôle conservateur et religieux", selon les termes de Séverine Labat, chercheur au CRNS*, et ce grand pas vers la liberté et la modernité ne s'est pas fait sans mal. Il explique le retard pris dans l'adoption de la nouvelle Constitution de l'après-Printemps arabe. Vendredi et samedi, les débats sur le préambule de la nouvelle loi fondamentale ont été plus houleux, obligeant à plusieurs interruptions de séance.
Pas de référence à la charia
Non seulement les députés ont adopté l'article sur la "liberté de conscience", mais, en plus, le parti islamiste Ennahda, au pouvoir depuis octobre 2011 et très contesté par l'opposition moderniste et séculière, a accepté, dès le printemps 2012, de ne pas introduire de référence à la charia (la loi islamique) dans la nouvelle Constitution.
Il avait donné son accord à la reprise des deux premiers articles de la Constitution de 1959 :
l'article 1 qui précise que "La Tunisie est un État libre, indépendant et souverain. L'islam est sa religion, l'arabe sa langue et la République son régime." Les députés ont tous voté (à trois exceptions près) en faveur de cet article qui précise "qu'il ne peut être amendé " ;
l'article 2, non amendable aussi, qui prévoit l'instauration d'"un État à caractère civil, basé sur la citoyenneté, la volonté du peuple et la primauté du droit".
Par Mireille Duteil
Le Point
Une révolution qui ne dit pas son nom se joue en Tunisie. Avec un an et trois mois de retard, l'Assemblée nationale, où les députés du parti islamiste Ennahda sont majoritaires, a commencé à adopter, le 4 janvier, les premiers articles de la nouvelle Constitution, dont celui garantissant "la liberté de conscience".
La Constitution tunisienne est ainsi la première du monde arabe à reconnaître la liberté de conscience dans un de ses articles. Concrètement, les Tunisiens pourront se déclarer "a-religieux" et, mieux encore, ils pourront décider de changer de religion. Chose impensable - officiellement - pour un musulman puisqu'il risque d'être considéré comme apostat et, à ce titre, menacé de mort par des islamistes radicaux. Et si la majorité des pays arabes - à l'exception des pays du Golfe et du Maroc, où le statut de commandeur des croyants du roi implique que les Marocains, sauf s'ils sont juifs, sont ipso facto musulmans - ont tous des citoyens à la fois arabes et chrétiens de naissance, les conversions ne sont officiellement pas possibles.
La société tunisienne est, comme dans la quasi-totalité des pays arabes et musulmans, divisée entre "un pôle moderne et séculier et un pôle conservateur et religieux", selon les termes de Séverine Labat, chercheur au CRNS*, et ce grand pas vers la liberté et la modernité ne s'est pas fait sans mal. Il explique le retard pris dans l'adoption de la nouvelle Constitution de l'après-Printemps arabe. Vendredi et samedi, les débats sur le préambule de la nouvelle loi fondamentale ont été plus houleux, obligeant à plusieurs interruptions de séance.
Pas de référence à la charia
Non seulement les députés ont adopté l'article sur la "liberté de conscience", mais, en plus, le parti islamiste Ennahda, au pouvoir depuis octobre 2011 et très contesté par l'opposition moderniste et séculière, a accepté, dès le printemps 2012, de ne pas introduire de référence à la charia (la loi islamique) dans la nouvelle Constitution.
Il avait donné son accord à la reprise des deux premiers articles de la Constitution de 1959 :
l'article 1 qui précise que "La Tunisie est un État libre, indépendant et souverain. L'islam est sa religion, l'arabe sa langue et la République son régime." Les députés ont tous voté (à trois exceptions près) en faveur de cet article qui précise "qu'il ne peut être amendé " ;
l'article 2, non amendable aussi, qui prévoit l'instauration d'"un État à caractère civil, basé sur la citoyenneté, la volonté du peuple et la primauté du droit".
Par Mireille Duteil
Le Point
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