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Un parfum de corruption en Israël

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    Un parfum de corruption en Israël, par Michel Bôle-Richard
    LE MONDE | 25.10.06 | 14h43 • Mis à jour le 25.10.06 | 14h43

    A tous ceux qui croient que le gouvernement va au-devant de sérieuses difficultés, je leur dis : "Restez calmes. Le gouvernement est là pour durer"", a déclaré, le 10 octobre, le premier ministre israélien Ehoud Olmert aux membres de son parti, Kadima (En avant). Confiant, il a ajouté : "Il n'y aura pas d'élections dans un avenir proche." Pourtant, moins de sept mois après avoir gagné les élections du 28 mars et formé une coalition gouvernementale, notamment avec les travaillistes, le successeur d'Ariel Sharon songe déjà à la modifier pour asseoir "la stabilité politique du pays", comme il l'a déclaré. La popularité du premier ministre est en chute libre dans tous les sondages après la périlleuse aventure libanaise de l'été. Si des élections avaient lieu aujourd'hui, Kadima perdrait pratiquement la moitié de ses sièges.

    Quant à Ehoud Olmert, il n'obtient que 18 % d'opinions favorables, loin derrière son concurrent direct, Benyamin Nétanyahou, qui est crédité de 29 %. On est loin des 78 % sur lesquels le premier ministre surfait au début de l'offensive contre le Hezbollah à la mi-juillet.

    Certes, il n'est pas question de procéder à de nouvelles élections, ni de faire chuter le gouvernement. Notons toutefois que depuis la création de l'Etat d'Israël, il y a cinquante-huit ans, 31 gouvernements se sont succédé et que leur durée de vie moyenne a été de vingt-deux mois. Néanmoins, Ehoud Olmert cherche des assurances du côté du héraut de l'extrême droite, Avigdor Lieberman. La série de scandales survenus cet automne a en effet considérablement alourdi le climat, d'autant que le projet politique sur lequel s'était appuyé Kadima pour les élections n'est plus qu'un chiffon de papier. A savoir, notamment, le retrait unilatéral de certaines colonies de Cisjordanie, aujourd'hui totalement abandonné.

    C'est dans cette ambiance quelque peu délétère qu'est survenue la dernière affaire : celle du chef de l'Etat, Moshe Katsav, soupçonné de viols et de harcèlement sexuel. Certes, le président de la République n'est pas inculpé, et ses pouvoirs ne sont qu'honorifiques. Toutefois, cette affaire de viols assortie d'écoutes illicites, de prévarication, d'obstruction au bon fonctionnement de la justice - si toutes ces accusations pesant sur le plus haut personnage de l'Etat sont corroborées par la justice et donnent lieu à une mise en examen - ne devrait pas avoir de conséquences véritablement politiques. Elle jette malgré tout un sérieux discrédit sur les institutions.

    Vladimir Poutine peut, en recevant Ehoud Olmert à Moscou, plaisanter sur "la virilité" de Moshe Katsav, les frasques présumées du président de la République ne font guère sourire en Israël. D'autant que ce scandale n'est que le dernier en date d'une longue série. Actuellement, un proche du premier ministre, Tzahi Hanegbi, est jugé pour prévarication, corruption, fraude, abus de confiance et nominations abusives lorsqu'il était ministre de l'environnement, de 1999 à 2003. Président de la commission parlementaire des affaires étrangères et de la défense, il est accusé d'avoir procédé à 69 nominations de membres du Likoud ou de personnes de sa famille.

    Moins grave, mais il s'agit encore d'un proche d'Ehoud Olmert, le ministre de la justice, Haïm Ramon, a été contraint de démissionner après avoir été accusé d'embrasser de force une jeune soldate. Le premier ministre lui-même est soupçonné de s'être procuré des fonds pour sa campagne électorale en vendant à un prix nettement supérieur à celui du marché l'une de ses propriétés à Jérusalem. Le contrôleur de l'Etat, Micha Lindenstrauss a également demandé l'ouverture d'une enquête criminelle à l'encontre d'Ehoud Olmert à propos de nominations politiques abusives à l'époque où il était ministre du commerce et de l'industrie. Pour compléter le tableau, à la mi-août, le chef d'état-major de l'armée, Dan Haloutz, a été accusé d'avoir vendu son portefeuille d'actions trois heures après l'enlèvement des deux soldats à la frontière du Liban et juste avant le déclenchement de l'offensive qui allait provoquer une chute des cours.

    15 % DES PARLEMENTAIRES CORROMPUS

    Une enquête a été ouverte. Le mouvement pour la probité du pouvoir estime que 15 % des 120 membres de la Knesset (Parlement) sont impliqués dans des affaires de corruption. Ce n'est pas la première fois qu'un président de la République est mis en cause. Le prédécesseur de Moshe Katsav, Ezer Weizman, avait été contraint de démissionner en juillet 2000 en raison d'une affaire d'évasion fiscale et de corruption. Prudemment, Ehoud Olmert a suggéré que le prochain président de la République, qui doit être désigné en juillet, ne soit pas un homme politique afin d'éviter les retombées désagréables. C'est pourquoi le nom d'Elie Wiesel a été avancé, mais l'écrivain a refusé.

    S'il faut donner encore quelques exemples de la longue liste des scandales, on pourrait citer celui de l'ancien ministre de la défense, le général Yitzhak Mordehaï, condamné à dix-huit mois de prison avec sursis pour agression sexuelle contre l'une de ses employées. Ou encore celui du leader du parti séfarade Shass, Arié Déri, condamné, en 2001, à trois ans de prison ferme pour corruption et abus de confiance.

    Benyamin Nétanyahou avait échappé de justesse à des poursuites, en 1999, après avoir été accusé de faire payer par le contribuable des travaux effectués à son domicile et s'être approprié des cadeaux reçus en tant que chef du gouvernement. Ariel Sharon a lui-même été inquiété dans trois dossiers, et son fils Omri a été condamné à neuf mois de prison pour faux et usage de faux dans le cadre d'une affaire de financement frauduleux de la campagne électorale de son père en 1999. Pour le moment, il doit d'être resté en liberté au coma dans lequel est plongé Ariel Sharon depuis le 4 janvier.

    On pourrait multiplier les exemples de ces affaires qui, le plus souvent, tournent autour du sexe et de l'argent. Faut-il penser, comme l'écrivain Amos Oz, que les poursuites engagées et les condamnations prononcées sont un signe de bonne santé démocratique ? Ou faut-il déplorer la multiplication des affaires, signe d'un pourrissement de la société et plus particulièrement de la classe politique ? Chacun jugera. Toujours est-il que ces déballages sur la place publique témoignent d'une certaine transparence mais provoquent un rejet de la politique et de ses leaders considérés comme des "combinards", des hommes qui utilisent leur fonction pour s'enrichir et leur autorité pour harceler les femmes. Selon Transparency International, association qui établit la liste des pays les moins corrompus, Israël est passé de la 16e place en 2001 à la 28e aujourd'hui.
    Dernière modification par Altair, 26 octobre 2006, 20h41.
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