ORIENT XXI > MAGAZINE > NAZEEHA SAID > 5 JUIN 2018
Selon plusieurs sources diplomatiques, l’Arabie saoudite a prévenu qu’elle interviendrait militairement si le Qatar achetait des missiles russes S-400. Pour sa part, le cheikh Saïf Ben Ahmed Al-Thani, directeur du Bureau de la communication du Qatar a déclaré que si son pays s’était plié aux exigences de ses voisins, cela aurait nui à la lutte contre le terrorisme et qu’il n’y aurait plus de médias libres dans la région. Un an après avoir éclaté, la crise autour du Qatar n’est pas près d’être résolue.
À la fin du mois de mai 2018, les autorités du Qatar ont pris la décision d’interdire les importations de produits alimentaires et de marchandises en provenance des quatre pays (Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Bahreïn et Égypte) qui imposent un blocus contre Doha depuis un an. Tous les magasins et commerces du pays se sont trouvés contraints d’enlever les marchandises et produits fabriqués dans ces pays. D’autant que les autorités ont averti que les inspecteurs des administrations en charge des consommateurs au ministère du commerce allaient s’assurer que tous les points de vente et les centres commerciaux du pays ont procédé à l’enlèvement de ces marchandises.
Cette mesure intervient au lendemain d’un rapport du Fonds monétaire international (FMI) publié au mois de mars, qui confirme l’érosion de l’impact financier et économique de la crise diplomatique sur le Qatar. Selon ce rapport, « si l’activité économique a été affectée, elle a été essentiellement transitoire et de nouvelles routes commerciales ont été rapidement établies. Le système bancaire s’est également adapté. »
LA FERMETURE D’AL-JAZIRA
Le FMI relève également que le financement extérieur a chuté de 40 milliards de dollars (34,2 milliards d’euros) après la crise, mais que le problème a été traité par une injection de liquidités par la Banque centrale du Qatar et les fonds souverains, en particulier par la Qatar Investment Authority.
La décision du Qatar intervient à l’approche du premier anniversaire de la rupture brutale, à l’aube du 5 juin 2017, des relations de l’Arabie saoudite, des Émirats arabes unis, du Bahreïn et de l’Égypte avec Doha, et de sa mise sous quarantaine avec fermeture des frontières terrestres, aériennes et maritimes. La mesure avait été suivie par une campagne virulente contre le régime qatari, accusé de soutenir le terrorisme et de comploter contre ses voisins. Les quatre pays avaient rappelé leurs ambassadeurs tout en demandant à leurs citoyens de quitter le Qatar. Ils avaient également enjoint aux ressortissants qataris de quitter leurs territoires et interdit tous les médias qataris.
Les trois États du Golfe qui ont accusé le Qatar de se jeter dans les bras des « ennemis » — l’Iran et la Turquie — ont formulé avec l’Égypte 13 exigences pour une levée du blocus et un retour du pays dans l’espace du Golfe. Parmi elles, la fermeture de la chaîne Al Jazira, d’une base militaire turque, la rupture des relations avec l’Iran et l’arrêt de tout contact avec les « organisations terroristes », comme les Frères musulmans, ainsi que le paiement de compensations à d’autres pays du Golfe pour des « pertes en vies humaines » et « autres pertes financières » découlant des politiques du Qatar.
Ces injonctions ont eu un effet contraire et le Qatar a ouvert les écrans d’Al Jazira et ses différents journaux aux opposants émiratis, saoudiens et bahreïnis comme il ne l’avait jamais fait auparavant. Ces médias ont mis en exergue les affaires de corruption, d’atteintes aux droits humains et la répression dans chacun de ces pays.
Sur le plan politique et diplomatique, la situation n’a pas bougé entre les trois États du Golfe et le Qatar. Les premiers ont réaffirmé leur attachement à leurs exigences envers le Qatar, lequel semble résister au blocus tout en haussant le ton au plan diplomatique et médiatique à l’égard des pays boycotteurs.
INTERVENTION DE DONALD TRUMP
Le ministre saoudien des affaires étrangères Adel Al-Joubeir a qualifié, dans une de ses déclarations, la crise qatarie de « très mineure . Ce n’est pas une question importante, nous avons des questions plus graves qui nous préoccupent plus, comme la stabilité en Irak, la Syrie, la Libye, l’Iran ainsi que l’élimination de l’extrémisme et du terrorisme. »
Ces déclarations ont été faites après que Reuters, citant des responsables américains, a rapporté que le président américain Donald Trump ait demandé, dans un entretien téléphonique avec le roi Salman Al-Saoud, que le royaume et ses partenaires arabes mettent fin rapidement au différend qui dure depuis près d’une année avec le Qatar et qui a entraîné une division entre les alliés des États-Unis dans la région.
Le ministre bahreïni des affaires étrangères, Khaled Ben Ahmad Al-Khalifa qui attaque en permanence le Qatar dans ses déclarations officielles ou à travers les réseaux sociaux a estimé qu’il « n’y a actuellement aucune lueur d’espoir de solution de la crise. » Il a affirmé que les « opérations terroristes » ont régressé depuis le boycott du Qatar, et assuré dans un entretien publié récemment dans la presse que « la communication avec les terroristes à Bahreïn a cessé, car ils ne viennent plus directement. S’ils ont des relations avec l’extérieur, cela se passe via l’Iran à travers des moyens divers comme le financement, la mise à disposition de tribunes médiatiques et d’autres. Ils approchent des citoyens du Bahreïn et les attirent. Il y a de nombreux problèmes entre nous et eux qui n’ont pas cessé depuis des décennies. Nous sommes parmi les États du Golfe qui ont eu le plus de différends historiques avec le Qatar. Nous avons toujours essayé de convaincre nos frères de l’ampleur des problèmes que nous rencontrons. Maintenant, un an est passé depuis le début du boycott ; ce que nous avons fait, c’est de faire face par nous-même aux dommages. »
Al-Khalifa a par ailleurs assuré que les quatre pays qui boycottent le Qatar n’ont pas été affectés par cette mesure et ne le seront pas, car ils n’ont pas besoin du Qatar. Mais ils espèrent que Doha reviendra dans le giron golfien, car il y va de son intérêt de revenir vers ses frères « naturels ». Selon lui, Doha est le seul perdant et « s’il persiste dans son mauvais comportement, le boycott durera. »
Bien que les États boycotteurs aient annoncé par les biais de leurs médias officiels et officieux qu’ils œuvreront à faciliter la vie de leurs citoyens résidant au Qatar et traiteront les problèmes avec humanité, Human Rights Watch a estimé dans un communiqué que le boycott du Qatar par les pays du Golfe « a entraîné des atteintes graves aux droits humains (…). Il a empiété sur le droit à la liberté d’expression et provoqué une séparation de familles (…), l’interruption de la scolarité et laissé les travailleurs migrants sans eau ni nourriture. » Ce même communiquérapporte les propos de Sarah Leah Whitson, directrice de la division Proche-Orient et Afrique du Nord à Human Rights : « Les conflits politiques entre les autocrates du Golfe portent atteinte aux droits des habitants de la région qui vivent en paix et s’occupent de leurs familles. Des centaines de Saoudiens, Bahreïnis et Émiratis ont été contraints de choisir entre obéir aux ordres de leurs pays ou abandonner leurs familles et leurs emplois. »
Selon plusieurs sources diplomatiques, l’Arabie saoudite a prévenu qu’elle interviendrait militairement si le Qatar achetait des missiles russes S-400. Pour sa part, le cheikh Saïf Ben Ahmed Al-Thani, directeur du Bureau de la communication du Qatar a déclaré que si son pays s’était plié aux exigences de ses voisins, cela aurait nui à la lutte contre le terrorisme et qu’il n’y aurait plus de médias libres dans la région. Un an après avoir éclaté, la crise autour du Qatar n’est pas près d’être résolue.
À la fin du mois de mai 2018, les autorités du Qatar ont pris la décision d’interdire les importations de produits alimentaires et de marchandises en provenance des quatre pays (Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Bahreïn et Égypte) qui imposent un blocus contre Doha depuis un an. Tous les magasins et commerces du pays se sont trouvés contraints d’enlever les marchandises et produits fabriqués dans ces pays. D’autant que les autorités ont averti que les inspecteurs des administrations en charge des consommateurs au ministère du commerce allaient s’assurer que tous les points de vente et les centres commerciaux du pays ont procédé à l’enlèvement de ces marchandises.
Cette mesure intervient au lendemain d’un rapport du Fonds monétaire international (FMI) publié au mois de mars, qui confirme l’érosion de l’impact financier et économique de la crise diplomatique sur le Qatar. Selon ce rapport, « si l’activité économique a été affectée, elle a été essentiellement transitoire et de nouvelles routes commerciales ont été rapidement établies. Le système bancaire s’est également adapté. »
LA FERMETURE D’AL-JAZIRA
Le FMI relève également que le financement extérieur a chuté de 40 milliards de dollars (34,2 milliards d’euros) après la crise, mais que le problème a été traité par une injection de liquidités par la Banque centrale du Qatar et les fonds souverains, en particulier par la Qatar Investment Authority.
La décision du Qatar intervient à l’approche du premier anniversaire de la rupture brutale, à l’aube du 5 juin 2017, des relations de l’Arabie saoudite, des Émirats arabes unis, du Bahreïn et de l’Égypte avec Doha, et de sa mise sous quarantaine avec fermeture des frontières terrestres, aériennes et maritimes. La mesure avait été suivie par une campagne virulente contre le régime qatari, accusé de soutenir le terrorisme et de comploter contre ses voisins. Les quatre pays avaient rappelé leurs ambassadeurs tout en demandant à leurs citoyens de quitter le Qatar. Ils avaient également enjoint aux ressortissants qataris de quitter leurs territoires et interdit tous les médias qataris.
Les trois États du Golfe qui ont accusé le Qatar de se jeter dans les bras des « ennemis » — l’Iran et la Turquie — ont formulé avec l’Égypte 13 exigences pour une levée du blocus et un retour du pays dans l’espace du Golfe. Parmi elles, la fermeture de la chaîne Al Jazira, d’une base militaire turque, la rupture des relations avec l’Iran et l’arrêt de tout contact avec les « organisations terroristes », comme les Frères musulmans, ainsi que le paiement de compensations à d’autres pays du Golfe pour des « pertes en vies humaines » et « autres pertes financières » découlant des politiques du Qatar.
Ces injonctions ont eu un effet contraire et le Qatar a ouvert les écrans d’Al Jazira et ses différents journaux aux opposants émiratis, saoudiens et bahreïnis comme il ne l’avait jamais fait auparavant. Ces médias ont mis en exergue les affaires de corruption, d’atteintes aux droits humains et la répression dans chacun de ces pays.
Sur le plan politique et diplomatique, la situation n’a pas bougé entre les trois États du Golfe et le Qatar. Les premiers ont réaffirmé leur attachement à leurs exigences envers le Qatar, lequel semble résister au blocus tout en haussant le ton au plan diplomatique et médiatique à l’égard des pays boycotteurs.
INTERVENTION DE DONALD TRUMP
Le ministre saoudien des affaires étrangères Adel Al-Joubeir a qualifié, dans une de ses déclarations, la crise qatarie de « très mineure . Ce n’est pas une question importante, nous avons des questions plus graves qui nous préoccupent plus, comme la stabilité en Irak, la Syrie, la Libye, l’Iran ainsi que l’élimination de l’extrémisme et du terrorisme. »
Ces déclarations ont été faites après que Reuters, citant des responsables américains, a rapporté que le président américain Donald Trump ait demandé, dans un entretien téléphonique avec le roi Salman Al-Saoud, que le royaume et ses partenaires arabes mettent fin rapidement au différend qui dure depuis près d’une année avec le Qatar et qui a entraîné une division entre les alliés des États-Unis dans la région.
Le ministre bahreïni des affaires étrangères, Khaled Ben Ahmad Al-Khalifa qui attaque en permanence le Qatar dans ses déclarations officielles ou à travers les réseaux sociaux a estimé qu’il « n’y a actuellement aucune lueur d’espoir de solution de la crise. » Il a affirmé que les « opérations terroristes » ont régressé depuis le boycott du Qatar, et assuré dans un entretien publié récemment dans la presse que « la communication avec les terroristes à Bahreïn a cessé, car ils ne viennent plus directement. S’ils ont des relations avec l’extérieur, cela se passe via l’Iran à travers des moyens divers comme le financement, la mise à disposition de tribunes médiatiques et d’autres. Ils approchent des citoyens du Bahreïn et les attirent. Il y a de nombreux problèmes entre nous et eux qui n’ont pas cessé depuis des décennies. Nous sommes parmi les États du Golfe qui ont eu le plus de différends historiques avec le Qatar. Nous avons toujours essayé de convaincre nos frères de l’ampleur des problèmes que nous rencontrons. Maintenant, un an est passé depuis le début du boycott ; ce que nous avons fait, c’est de faire face par nous-même aux dommages. »
Al-Khalifa a par ailleurs assuré que les quatre pays qui boycottent le Qatar n’ont pas été affectés par cette mesure et ne le seront pas, car ils n’ont pas besoin du Qatar. Mais ils espèrent que Doha reviendra dans le giron golfien, car il y va de son intérêt de revenir vers ses frères « naturels ». Selon lui, Doha est le seul perdant et « s’il persiste dans son mauvais comportement, le boycott durera. »
Bien que les États boycotteurs aient annoncé par les biais de leurs médias officiels et officieux qu’ils œuvreront à faciliter la vie de leurs citoyens résidant au Qatar et traiteront les problèmes avec humanité, Human Rights Watch a estimé dans un communiqué que le boycott du Qatar par les pays du Golfe « a entraîné des atteintes graves aux droits humains (…). Il a empiété sur le droit à la liberté d’expression et provoqué une séparation de familles (…), l’interruption de la scolarité et laissé les travailleurs migrants sans eau ni nourriture. » Ce même communiquérapporte les propos de Sarah Leah Whitson, directrice de la division Proche-Orient et Afrique du Nord à Human Rights : « Les conflits politiques entre les autocrates du Golfe portent atteinte aux droits des habitants de la région qui vivent en paix et s’occupent de leurs familles. Des centaines de Saoudiens, Bahreïnis et Émiratis ont été contraints de choisir entre obéir aux ordres de leurs pays ou abandonner leurs familles et leurs emplois. »
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