Des gilets jaunes dans le Pas-de-Calais : «L’attentat, c’est le gouvernement»
Par Sheerazad Chekaik-Chaila, à Lillers (Pas-de-Calais) Libération
12 décembre 2018
Sur le rond-point principal de la petite ville de Lillers, les théories du complot reviennent en boucle après l'attaque de mardi soir.
Des gilets jaunes dans le Pas-de-Calais : «L’attentat, c’est le gouvernement»
Ils sont déterminés. A Lillers, dans le Pas-de-Calais, les gilets jaunes sont toujours mobilisés. Au lendemain de l’attentat de Strasbourg, la question de poursuivre la mobilisation ne se pose même pas sur le rond-point principal de cette ville de 10 200 habitants.
Pour Christian, 38 ans, l’attentat est «un coup monté». «On fait ***** le monde, poursuit-il. Comme par hasard, ça arrive au moment où ça chauffe le plus.» Jean-Marie, 63 ans, n’en pense pas moins : «L’attentat, c’est le gouvernement. Personne ne me l’enlèvera de la tête !» Maxime, 28 ans, voit aussi dans le drame strasbourgeois «une manipulation». «Du temps de Hollande, il y a eu aussi des attentats. Il a réussi à calmer le jeu et sa cote de popularité est remontée», poursuit le jeune ouvrier. «Vous trouvez ça normal que des fichés S soient libres ? On n’a qu’à les enfermer, et puis c’est tout !» s’agace Patrick, 64 ans.
Ici, l’arrestation ratée du principal suspect alimente le complotisme. «Ils devaient le prendre le matin et bizarrement, ils n’ont pas réussi», s’étonne faussement Christian. Jean-Pierre, 69 ans, est plus mesuré : «Je suis sceptique mais je ne suis pas sur place. On ne peut pas trop juger…»
Sur les réseaux sociaux, les accusations de complot envers le gouvernement ont fleuri aussi vite que les gilets jaunes sur les pare-brise des automobilistes. «Perso, l’attentat à Strasbourg, je n’y crois pas. Ils ne sont même plus crédibles», écrit Fabien dans un groupe fermé de gilets jaunes nordistes. Son post suscite neuf commentaires dont celui de Laurence. «Le gars, sérieux, il est trop fort. Il a déjoué les militaires et après les flics, je n’en peux plus de leurs conneries. Ils pensent vraiment qu’on est des lapins de six semaines.» D’autres échanges sont plus nuancés. «Juste une pensée sincère pour les victimes et leurs familles, sans aucune polémique», écrit Jean-Michel, dans l’une des réponses. Mais pour beaucoup, le doute plane.
Au téléphone, Frédéric, 52 ans, mobilisé depuis le 17 novembre, est de ceux-là. «C’est une magouille de Macron, c’est clair et net.» Et les victimes ? Trois personnes sont décédées, treize autres sont plus ou moins gravement blessées. «Ça nous fait mal aussi mais on sait que Macron en est capable. Il ne pense qu’à lui.»
A Lillers, les appels à ne pas manifester ne seront pas suivis. «Ici, c’est apolitique. On n’a pas de chef. Les gens font ce qu’ils veulent», témoigne Jean-Marcel, 63 ans. «Personne n’est à l’abri d’un attentat, estime Jérôme, 42 ans. Mais faut continuer à vivre.» Samedi, tous seront de nouveau dans la rue à Paris, Lille, ou sur leur rond-point. Certains envisagent de porter un brassard noir en plus de leur gilet jaune, en hommage aux victimes de l’attentat.
Sheerazad Chekaik-Chaila à Lillers (Pas-de-Calais)
Libération
Par Sheerazad Chekaik-Chaila, à Lillers (Pas-de-Calais) Libération
12 décembre 2018
Sur le rond-point principal de la petite ville de Lillers, les théories du complot reviennent en boucle après l'attaque de mardi soir.
Des gilets jaunes dans le Pas-de-Calais : «L’attentat, c’est le gouvernement»
Ils sont déterminés. A Lillers, dans le Pas-de-Calais, les gilets jaunes sont toujours mobilisés. Au lendemain de l’attentat de Strasbourg, la question de poursuivre la mobilisation ne se pose même pas sur le rond-point principal de cette ville de 10 200 habitants.
Pour Christian, 38 ans, l’attentat est «un coup monté». «On fait ***** le monde, poursuit-il. Comme par hasard, ça arrive au moment où ça chauffe le plus.» Jean-Marie, 63 ans, n’en pense pas moins : «L’attentat, c’est le gouvernement. Personne ne me l’enlèvera de la tête !» Maxime, 28 ans, voit aussi dans le drame strasbourgeois «une manipulation». «Du temps de Hollande, il y a eu aussi des attentats. Il a réussi à calmer le jeu et sa cote de popularité est remontée», poursuit le jeune ouvrier. «Vous trouvez ça normal que des fichés S soient libres ? On n’a qu’à les enfermer, et puis c’est tout !» s’agace Patrick, 64 ans.
Ici, l’arrestation ratée du principal suspect alimente le complotisme. «Ils devaient le prendre le matin et bizarrement, ils n’ont pas réussi», s’étonne faussement Christian. Jean-Pierre, 69 ans, est plus mesuré : «Je suis sceptique mais je ne suis pas sur place. On ne peut pas trop juger…»
Sur les réseaux sociaux, les accusations de complot envers le gouvernement ont fleuri aussi vite que les gilets jaunes sur les pare-brise des automobilistes. «Perso, l’attentat à Strasbourg, je n’y crois pas. Ils ne sont même plus crédibles», écrit Fabien dans un groupe fermé de gilets jaunes nordistes. Son post suscite neuf commentaires dont celui de Laurence. «Le gars, sérieux, il est trop fort. Il a déjoué les militaires et après les flics, je n’en peux plus de leurs conneries. Ils pensent vraiment qu’on est des lapins de six semaines.» D’autres échanges sont plus nuancés. «Juste une pensée sincère pour les victimes et leurs familles, sans aucune polémique», écrit Jean-Michel, dans l’une des réponses. Mais pour beaucoup, le doute plane.
Au téléphone, Frédéric, 52 ans, mobilisé depuis le 17 novembre, est de ceux-là. «C’est une magouille de Macron, c’est clair et net.» Et les victimes ? Trois personnes sont décédées, treize autres sont plus ou moins gravement blessées. «Ça nous fait mal aussi mais on sait que Macron en est capable. Il ne pense qu’à lui.»
A Lillers, les appels à ne pas manifester ne seront pas suivis. «Ici, c’est apolitique. On n’a pas de chef. Les gens font ce qu’ils veulent», témoigne Jean-Marcel, 63 ans. «Personne n’est à l’abri d’un attentat, estime Jérôme, 42 ans. Mais faut continuer à vivre.» Samedi, tous seront de nouveau dans la rue à Paris, Lille, ou sur leur rond-point. Certains envisagent de porter un brassard noir en plus de leur gilet jaune, en hommage aux victimes de l’attentat.
Sheerazad Chekaik-Chaila à Lillers (Pas-de-Calais)
Libération
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