Bilan, Mohammed VI : 5 ans de règne, de A à Z
En 26 mots-clés, tour d'horizon de ce qui a avancé, de ce qui a reculé… et de ce qui tourne toujours en rond, dans "le plus beau pays du monde".
A comme Amazigh
En 5 ans de Mohammed VI, la cause berbère a beaucoup plus avancé qu'en 38 ans de Hassan II. Le manifeste amazigh, qui a lancé en 2000 la renaissance du mouvement, redessine l'identité marocaine, arbitrairement définie jusque là comme "arabe", d'une manière particulièrement convaincante : substrat
amazigh et multiples greffes dont arabe, sub-saharienne, andalouse… et même européenne. À cette théorie séduisante, le jeune roi a répondu par une ouverture sans précédent sur "la cause". Dans le fameux discours où il annonçait la création de l'Institut royal de la culture amazighe, Mohammed VI a évoqué "notre identité amazighe et arabe". Dans cet ordre. Il fallait du courage, il l'a eu.
B comme Baise-main
Le symbole du baise-main royal n'est minimisé que par ceux qui ont peur de le remettre en question. Il y a de quoi : y toucher, c'est toucher à la sacralité. Hassan II en avait fait une sorte de "sas" obligatoire entre l'incarnation de la divinité (lui) et le genre humain (nous autres). Son fils n'en fait pas une fixation. Il arrive régulièrement que des Marocains osent serrer la main de Mohammed VI, les yeux dans les yeux. Il ne s'en formalise pas outre mesure - mais ne donne pas non plus de consigne pour abolir le baise-main. C'est dommage. Les Marocains n'entameront la révolution culturelle dont ils ont besoin que quand ils comprendront que leur roi n'est pas un demi-dieu. Mais un humain, capable comme tous les humains, de se tromper.
C comme Cour royale
Sous ce règne comme sous le précédent, elle reste, comme l'a écrit un journaliste, "le lieu privilégié des rivalités, intrigues, conspirations, flatteries, hypocrisies, paranoïa et j'en passe". Au début des années Mohammed VI, on a vu le cabinet royal se vider de ses monuments (seul Azoulay a résisté), puis se garnir des anciens camarades de classe du roi, à qui les Marocains ont accordé le bénéfice du doute. Puis un poids lourd s'y est ajouté (Abdelaziz Meziane Belfqih, déjà chargé de mission sous Hassan II), suivi d'un économiste reconnu (Mohamed Kabbaj), d'un arabisant distingué (Mohamed Moâtasim), puis d'une femme (Zoulikha Nasri). Une fois l'équipe au complet, le bal des disgrâces s'est ouvert. Seuls Belfqih et Kabbaj y échappent encore. Inutile de dresser un bilan à ce jour. Les fortunes vont et viennent, en fonction de paramètres qui échappent au commun des mortels. Tout cela est navrant. Le cabinet d'un chef d'Etat est supposé être un outil de travail, pas une cour de récréation. Ça nuit à sa productivité.
D comme dynastie
La dynastie alaouite respire. En la personne du jeune Moulay El Hassan (1 an), elle a assuré sa continuité. Et en la personne de Lalla Salma, anciennement simple Salma Bennani, elle a assuré sa modernité. Un grand pas est franchi depuis Hassan II, on sait, désormais, à quoi ressemble la femme du roi. Mais on n'en sait pas beaucoup plus. Ceux qui fantasmaient sur une first lady à l'américaine en ont été pour leurs frais. Le sérail ne baisse pas les armes si facilement. Au grand regret des Marocains, qui éprouvent une sincère affection envers la jeune princesse de 26 ans, Lalla Salma n'apparaît que très rarement, et pour inaugurer des évènements que pourraient inaugurer les ministres concernés. Pourtant, on parlait de sa fibre sociale… Dommage qu'elle n'ait pas été mise à profit. Aujourd'hui, on ne parle plus que des rumeurs sur la vie de Cour, notamment celle selon laquelle elle attendrait un second enfant.
E comme Élections
Bon, d'accord, elles étaient transparentes. On va oublier ce léger bug de 48 heures et nous faire à l'idée que les législatives de 2002 étaient nettes. Pour mieux passer à l'essentiel : ce qui en est sorti. Rien d'autre que la volonté royale, au bout du compte, puisque c'est un non partisan qui a été nommé Premier ministre. La meilleure, c'est que ce choix était parfaitement justifié ! La "carte politique", au lendemain du scrutin, était tellement balkanisée qu'aucune majorité claire ne se dégageait, forçant le brave Jettou à négocier les coalitions les plus invraisemblables. L'énorme cafouillage des communales de 2003 a confirmé la tragique incohérence de notre classe politique. Alors oui, depuis l'avènement de Mohammed VI, les élections sont transparentes. Mais quel intérêt, si elles ne servent à rien ?
F comme foot
Plus que la religion, le foot est l'opium du peuple. En 5 ans de règne (et même depuis l'indépendance, d'ailleurs), aucun événement n'a fait sortir autant de gens dans la rue qu'une victoire de l'équipe nationale. S'il y a un seul héros authentique dans ce pays, c'est bien Baddou Zaki. Il y avait peut-être méprise, à ce propos. Au Palais - et ça a déteint partout ailleurs - on pensait qu'organiser le Mondial 2010 allait enthousiasmer les Marocains autant que la finale de la Coupe d'Afrique, et ce pendant 6 ans. C'était un peu court, comme projet de société. De toute façon, la FIFA avait ses raisons que la politique marocaine ignorait. Aujourd'hui, nous nous retrouvons devant le vide de notre existence. Cherche idée désespérément…
En 26 mots-clés, tour d'horizon de ce qui a avancé, de ce qui a reculé… et de ce qui tourne toujours en rond, dans "le plus beau pays du monde".
A comme Amazigh
En 5 ans de Mohammed VI, la cause berbère a beaucoup plus avancé qu'en 38 ans de Hassan II. Le manifeste amazigh, qui a lancé en 2000 la renaissance du mouvement, redessine l'identité marocaine, arbitrairement définie jusque là comme "arabe", d'une manière particulièrement convaincante : substrat

B comme Baise-main
Le symbole du baise-main royal n'est minimisé que par ceux qui ont peur de le remettre en question. Il y a de quoi : y toucher, c'est toucher à la sacralité. Hassan II en avait fait une sorte de "sas" obligatoire entre l'incarnation de la divinité (lui) et le genre humain (nous autres). Son fils n'en fait pas une fixation. Il arrive régulièrement que des Marocains osent serrer la main de Mohammed VI, les yeux dans les yeux. Il ne s'en formalise pas outre mesure - mais ne donne pas non plus de consigne pour abolir le baise-main. C'est dommage. Les Marocains n'entameront la révolution culturelle dont ils ont besoin que quand ils comprendront que leur roi n'est pas un demi-dieu. Mais un humain, capable comme tous les humains, de se tromper.
C comme Cour royale
Sous ce règne comme sous le précédent, elle reste, comme l'a écrit un journaliste, "le lieu privilégié des rivalités, intrigues, conspirations, flatteries, hypocrisies, paranoïa et j'en passe". Au début des années Mohammed VI, on a vu le cabinet royal se vider de ses monuments (seul Azoulay a résisté), puis se garnir des anciens camarades de classe du roi, à qui les Marocains ont accordé le bénéfice du doute. Puis un poids lourd s'y est ajouté (Abdelaziz Meziane Belfqih, déjà chargé de mission sous Hassan II), suivi d'un économiste reconnu (Mohamed Kabbaj), d'un arabisant distingué (Mohamed Moâtasim), puis d'une femme (Zoulikha Nasri). Une fois l'équipe au complet, le bal des disgrâces s'est ouvert. Seuls Belfqih et Kabbaj y échappent encore. Inutile de dresser un bilan à ce jour. Les fortunes vont et viennent, en fonction de paramètres qui échappent au commun des mortels. Tout cela est navrant. Le cabinet d'un chef d'Etat est supposé être un outil de travail, pas une cour de récréation. Ça nuit à sa productivité.
D comme dynastie
La dynastie alaouite respire. En la personne du jeune Moulay El Hassan (1 an), elle a assuré sa continuité. Et en la personne de Lalla Salma, anciennement simple Salma Bennani, elle a assuré sa modernité. Un grand pas est franchi depuis Hassan II, on sait, désormais, à quoi ressemble la femme du roi. Mais on n'en sait pas beaucoup plus. Ceux qui fantasmaient sur une first lady à l'américaine en ont été pour leurs frais. Le sérail ne baisse pas les armes si facilement. Au grand regret des Marocains, qui éprouvent une sincère affection envers la jeune princesse de 26 ans, Lalla Salma n'apparaît que très rarement, et pour inaugurer des évènements que pourraient inaugurer les ministres concernés. Pourtant, on parlait de sa fibre sociale… Dommage qu'elle n'ait pas été mise à profit. Aujourd'hui, on ne parle plus que des rumeurs sur la vie de Cour, notamment celle selon laquelle elle attendrait un second enfant.
E comme Élections
Bon, d'accord, elles étaient transparentes. On va oublier ce léger bug de 48 heures et nous faire à l'idée que les législatives de 2002 étaient nettes. Pour mieux passer à l'essentiel : ce qui en est sorti. Rien d'autre que la volonté royale, au bout du compte, puisque c'est un non partisan qui a été nommé Premier ministre. La meilleure, c'est que ce choix était parfaitement justifié ! La "carte politique", au lendemain du scrutin, était tellement balkanisée qu'aucune majorité claire ne se dégageait, forçant le brave Jettou à négocier les coalitions les plus invraisemblables. L'énorme cafouillage des communales de 2003 a confirmé la tragique incohérence de notre classe politique. Alors oui, depuis l'avènement de Mohammed VI, les élections sont transparentes. Mais quel intérêt, si elles ne servent à rien ?
F comme foot
Plus que la religion, le foot est l'opium du peuple. En 5 ans de règne (et même depuis l'indépendance, d'ailleurs), aucun événement n'a fait sortir autant de gens dans la rue qu'une victoire de l'équipe nationale. S'il y a un seul héros authentique dans ce pays, c'est bien Baddou Zaki. Il y avait peut-être méprise, à ce propos. Au Palais - et ça a déteint partout ailleurs - on pensait qu'organiser le Mondial 2010 allait enthousiasmer les Marocains autant que la finale de la Coupe d'Afrique, et ce pendant 6 ans. C'était un peu court, comme projet de société. De toute façon, la FIFA avait ses raisons que la politique marocaine ignorait. Aujourd'hui, nous nous retrouvons devant le vide de notre existence. Cherche idée désespérément…
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