TRIBUNE - L’universitaire, ancien professeur d’histoire économique contemporaine en prépa HEC et auteur de nombreux ouvrages remarqués, explique pourquoi il doute fortement de la justesse des choix de l’exécutif. Derrière l’argument des emplois non pourvus, singulier compte tenu du chômage de masse qui persiste en France, l’accroissement du nombre de consommateurs reste l’objectif premier des pouvoirs publics, estime l’auteur.
Notre classe dirigeante est comme la mouche qui se cogne aux parois du bocal qui l’enferme ; à ceci près qu’elle a construit son bocal. Nos dirigeants déplorent les effets des politiques conduites avec assiduité depuis le milieu des années soixante-dix. Près de cinquante ans plus tard, le piège s’est refermé: la France n’a plus de réelle souveraineté monétaire et législative -la majorité des lois étant des transcriptions du droit communautaire- depuis Maastricht ; depuis des années, la seule liberté de Parlement consiste à détricoter le code civil de Napoléon par une succession, depuis les années 1970, de lois désormais qualifiées de «sociétales» ; la France a sacrifié son agriculture et la plus grande partie de son industrie -par exemple, en concentrant actuellement les aides agricoles communautaires sur 20% des exploitations agricoles subsistantes, on condamne la plupart des autres à mourir à court ou moyen terme- comme en atteste notre abyssal déficit commercial ; son secteur énergétique est sous pression ; l’énorme secteur public donne des signes inquiétants, au premier chef la santé publique et surtout l’éducation nationale, bien en peine d’apprendre sérieusement à écrire et à compter à ses élèves. Enfin, non seulement la France est le pays le plus fiscalisé et le plus redistributeur du monde, mais les classes populaires sont fragilisées, la pauvreté touchant dix millions de personnes, dont près de trois millions d’enfants.
Les politiques jacobines à sens unique conduites pendant des décennies (comme la destruction de la paysannerie et la modernisation agricole à-tout-va, le tout-diesel, le tout-camion, le tout-autoroute, le tout-TGV, le tout-pavillonnaire et le tout-tertiaire, en attendant le tout-moteur électrique) finissent par poser d’immenses problèmes que l’actualité fait défiler. Évoquons le «syndrome de la bassine», pratique agricole que l’on relie au seul réchauffement climatique. Pourquoi l’eau manque-t-elle tant dans les campagnes de l’Ouest? Après avoir détruit en quarante ans des paysages agricoles façonnés pendant mille ans, par comblement des mares, étangs et ruisseaux, arasage des talus, des arbres, des haies bocagères et des bosquets, la mise à nu d’immenses parcelles en plein vent et sans ombre imposerait le recours à la piscine géante plastifiée de plein champ! La violence absurde de militants n’enlève rien à ce fait.
Il en va de même de la folie délocalisatrice, qui, au nom d’une rationalité à courte vue, fait fabriquer notre ordinaire (médicaments, textiles, matériaux etc.) en Chine, devenue de ce fait le pays le plus pollueur du monde, pendant qu’ici, inactivité de masse et loisirs énergétivores coexistent (nos taux d’utilisation déments de l’Internet sont en passe d’en faire le premier pollueur du monde). Autre vérité douloureuse, l’école devait promouvoir «les pauvres» par le mérite et l’ascenseur social. Or les classes populaires françaises n’ont pas disparu, alors que le travail manuel a été déqualifié et disqualifié par des revenus trop faibles et l’impossibilité de se loger dans les métropoles. Une nombreuse main d’œuvre sous-qualifiée a été importée pour pallier ces dégâts.
Sur ces entrefaites, le gouvernement propose à l’hiver 2022 un vingt-neuvième projet de loi sur l’immigration depuis 1980. Vise-t-il l’expulsion des délinquants sous OQTF, la régularisation du million d’illégaux vivant en métropole selon l’hypothèse la plus plausible (en 2018, un rapport parlementaire les estimait entre 150.000 et 400.000 dans la seule Seine-Saint-Denis), ou l’accroissement de l’immigration du travail à la demande du patronat, sachant que certains employeurs peu scrupuleux «bénéficient» déjà du travail au noir?
Au pays des six millions de chômeurs à temps complet ou partiel, à quoi s’ajoutent sept millions d’adultes d’âge actif assistés ou oisifs, la chose étonne. Rappelons en effet que les six millions de chômeurs officiels des cinq catégories de Pôle emploi appartiennent aux 29,6 millions d’«actifs» ; et qu’à cela s’ajoutent sept millions de Français - dont 3 millions de jeunes dits «ni en emploi, ni en études, ni en formation» (situation désignée par l’acronyme anglais Neet, pour «Not in education, employment or training») - en âge et condition d’être actifs et soustraits au marché de l’emploi.
Le plus vraisemblable est qu’à la suite de ses prédécesseurs, et contre l’avis des citoyens français selon les études d’opinion, le gouvernement pérennise, voire intensifie, l’immigration. Pourquoi?
Un consensus idéologique
Partons de quelques observations: la cohabitation entre nos opulentes métropoles et l’abandon de pans entiers de la France périphérique: il suffit au hasard de visiter la Haute-Marne, l’Aisne ou le Tarn-et-Garonne, sans parler des DOM ; la coexistence des «métiers en tension» et des emplois non pourvus, et de millions d’inactifs et de chômeurs ; l’intensification de l’immigration estudiantine (400.000 étudiants étrangers présents en France en 2021) dans une université sans moyens, alors que certains étudiants peinent à vivre décemment - parfois même à se loger - et donc à étudier ; enfin, le surinvestissement dans le BTP - notre dernière grande industrie - depuis quarante ans, alors que les métropoles sont inabordables, que les classes populaires sont chassées de nombreuses communes par les prix, et que les logements manquent pour une population qui n’augmente presque plus.
Ce cumul d’impasses interroge.
Il résulte a minima des causes et circonstances suivantes: l’indifférence - à tout le moins l’ignorance - des dirigeants nationaux à l’égard des Français des classes populaires et moyennes ; un consensus idéologique chez de nombreux dirigeants, cadres et retraités, autour d’une conscience postnationale, postindustrielle et mondialisée ; la croyance millénariste dans les bienfaits d’une construction européenne passée aux mains de l’Allemagne sans qu’on en prenne la mesure ; l’aveuglement de nos dirigeants sur leur capacité à sauver l’Afrique indépendamment de toute connaissance de ce continent et de ses habitants (l’utopie électrificatrice de Jean-Louis Borloo en fut un symbole, quand notre parc nucléaire national entrait en hibernation programmée).
Quels sont les étages de cette fusée?
La croissance de la consommation
Le premier est celui de la désindustrialisation du pays et de l’utopie du tout-tertiaire. Comme les États-Unis, nous avons divisé par deux en trente ans notre PIB et nos emplois industriels. À ceci près que Clinton a investi dans les «autoroutes de l’information», la plus grande (mais aussi polluante et énergétivore) infrastructure de l’histoire, qui permet à l’industrie électronique américaine et aux Gafa de dominer le monde - en captant à notre détriment des milliers de brillants ingénieurs.
Le deuxième est le tout-consommation. Nos dirigeants ont décidé que l’étalon de notre nouvelle économie ne serait plus l’innovation, la productivité, la sauvegarde de notre production ni l’emploi, mais le pouvoir d’achat. Chaque citoyen, mineur ou étranger vivant en France, est regardé comme une unité économique à cajoler. Nous sommes passés d’un pays de citoyens - dotés d’une solide éducation à la liberté par le savoir et l’indépendance économique - à une société de consommateurs. Depuis les années 1970, citoyens français, étrangers présents en France, travailleurs et retraités se sont fondus dans l’unique catégorie du consommateur. Toute unité étant interchangeable, le travail d’éducation et de formation a cessé d’être essentiel.
Le troisième est l’immigration internationale de masse, qui a la particularité en France, même pour sa part extraeuropéenne, de remonter à la Grande Guerre.
Qu’importe dès lors que les consommateurs soient cultivés, éduqués ou ignares, qu’ils participent ou non à la vie citoyenne et associative, qu’ils soient étrangers ou nationaux, qu’ils travaillent ou pas: la priorité de la nation est leur solvabilité. La croissance de la consommation est le Graal de notre société. Qu’on en juge.
Perte publique, bénéfices privés
La plupart des normes imposées que l’on présente comme liées à la sécurité des personnes, de l’environnement, des travailleurs, ou à toute cause vertueuse, sont le fruit de l’intense lobbying de fournisseurs qui cherchent à écouler leurs produits. Une fois la norme établie, l’État intervient par la contrainte (par exemple en rendant des maisons habitées inlouables) et solvabilise les insolvables (pour l’isolation, le chauffage électrique ou la voiture), ce qui aggrave son déficit et enrichit ses prêteurs. Qu’il le veuille ou non, le consommateur est obligé de dépenser, dût-on le financer à perte. Perte publique, mais bénéfices privés.
Cette spirale de la dépense contrainte, parfois habillée en «investissement» afin de la rendre vertueuse, est appliquée aux consommateurs, aux entreprises, à l’État et aux collectivités locales. Elle est le seul moyen de consolider les bénéfices et les marges des secteurs économiques subsistants: les banques, les télécoms, les transports, l’industrie du BTP et les équipementiers, mais aussi des services marchands (grande distribution) et non marchands (la santé ou la silver économie). Ce système non solvable - car sous-productif - est structurellement en déficit, et l’économie d’endettement est devenue la règle. Dette publique et dette privée cumulées atteignaient, en 2021, 361% du PIB français, selon la Banque des règlements internationaux.
Suivant cette logique de la pente à sens unique, quand la natalité française s’est effondrée, dans les années 1970, à la suite de l’évolution des mœurs et de réformes de société, le déficit des naissances a été compensé par une hausse lente mais ininterrompue de l’immigration, déconnectée du travail, puisque la priorité manifeste est devenue l’accroissement du nombre des consommateurs.
La santé publique et l’économie sociale ont pris le pas sur l’école et la formation de l’esprit: leurs deux vertus sont de maintenir en forme des consommateurs dont l’existence est marchandisée - ou valorisée -, de la procréation (assistée) à l’Ehpad ; et de stabiliser leur pouvoir d’achat. Cette singulière opération fédère des convergences idéologiques et d’intérêts tout à fait inattendues, qui vont du patronat le plus rude aux syndicats de salariés, et du pape à La France insoumise.
Notre classe dirigeante est comme la mouche qui se cogne aux parois du bocal qui l’enferme ; à ceci près qu’elle a construit son bocal. Nos dirigeants déplorent les effets des politiques conduites avec assiduité depuis le milieu des années soixante-dix. Près de cinquante ans plus tard, le piège s’est refermé: la France n’a plus de réelle souveraineté monétaire et législative -la majorité des lois étant des transcriptions du droit communautaire- depuis Maastricht ; depuis des années, la seule liberté de Parlement consiste à détricoter le code civil de Napoléon par une succession, depuis les années 1970, de lois désormais qualifiées de «sociétales» ; la France a sacrifié son agriculture et la plus grande partie de son industrie -par exemple, en concentrant actuellement les aides agricoles communautaires sur 20% des exploitations agricoles subsistantes, on condamne la plupart des autres à mourir à court ou moyen terme- comme en atteste notre abyssal déficit commercial ; son secteur énergétique est sous pression ; l’énorme secteur public donne des signes inquiétants, au premier chef la santé publique et surtout l’éducation nationale, bien en peine d’apprendre sérieusement à écrire et à compter à ses élèves. Enfin, non seulement la France est le pays le plus fiscalisé et le plus redistributeur du monde, mais les classes populaires sont fragilisées, la pauvreté touchant dix millions de personnes, dont près de trois millions d’enfants.
Les politiques jacobines à sens unique conduites pendant des décennies (comme la destruction de la paysannerie et la modernisation agricole à-tout-va, le tout-diesel, le tout-camion, le tout-autoroute, le tout-TGV, le tout-pavillonnaire et le tout-tertiaire, en attendant le tout-moteur électrique) finissent par poser d’immenses problèmes que l’actualité fait défiler. Évoquons le «syndrome de la bassine», pratique agricole que l’on relie au seul réchauffement climatique. Pourquoi l’eau manque-t-elle tant dans les campagnes de l’Ouest? Après avoir détruit en quarante ans des paysages agricoles façonnés pendant mille ans, par comblement des mares, étangs et ruisseaux, arasage des talus, des arbres, des haies bocagères et des bosquets, la mise à nu d’immenses parcelles en plein vent et sans ombre imposerait le recours à la piscine géante plastifiée de plein champ! La violence absurde de militants n’enlève rien à ce fait.
Il en va de même de la folie délocalisatrice, qui, au nom d’une rationalité à courte vue, fait fabriquer notre ordinaire (médicaments, textiles, matériaux etc.) en Chine, devenue de ce fait le pays le plus pollueur du monde, pendant qu’ici, inactivité de masse et loisirs énergétivores coexistent (nos taux d’utilisation déments de l’Internet sont en passe d’en faire le premier pollueur du monde). Autre vérité douloureuse, l’école devait promouvoir «les pauvres» par le mérite et l’ascenseur social. Or les classes populaires françaises n’ont pas disparu, alors que le travail manuel a été déqualifié et disqualifié par des revenus trop faibles et l’impossibilité de se loger dans les métropoles. Une nombreuse main d’œuvre sous-qualifiée a été importée pour pallier ces dégâts.
Sur ces entrefaites, le gouvernement propose à l’hiver 2022 un vingt-neuvième projet de loi sur l’immigration depuis 1980. Vise-t-il l’expulsion des délinquants sous OQTF, la régularisation du million d’illégaux vivant en métropole selon l’hypothèse la plus plausible (en 2018, un rapport parlementaire les estimait entre 150.000 et 400.000 dans la seule Seine-Saint-Denis), ou l’accroissement de l’immigration du travail à la demande du patronat, sachant que certains employeurs peu scrupuleux «bénéficient» déjà du travail au noir?
Au pays des six millions de chômeurs à temps complet ou partiel, à quoi s’ajoutent sept millions d’adultes d’âge actif assistés ou oisifs, la chose étonne. Rappelons en effet que les six millions de chômeurs officiels des cinq catégories de Pôle emploi appartiennent aux 29,6 millions d’«actifs» ; et qu’à cela s’ajoutent sept millions de Français - dont 3 millions de jeunes dits «ni en emploi, ni en études, ni en formation» (situation désignée par l’acronyme anglais Neet, pour «Not in education, employment or training») - en âge et condition d’être actifs et soustraits au marché de l’emploi.
Le plus vraisemblable est qu’à la suite de ses prédécesseurs, et contre l’avis des citoyens français selon les études d’opinion, le gouvernement pérennise, voire intensifie, l’immigration. Pourquoi?
Un consensus idéologique
Partons de quelques observations: la cohabitation entre nos opulentes métropoles et l’abandon de pans entiers de la France périphérique: il suffit au hasard de visiter la Haute-Marne, l’Aisne ou le Tarn-et-Garonne, sans parler des DOM ; la coexistence des «métiers en tension» et des emplois non pourvus, et de millions d’inactifs et de chômeurs ; l’intensification de l’immigration estudiantine (400.000 étudiants étrangers présents en France en 2021) dans une université sans moyens, alors que certains étudiants peinent à vivre décemment - parfois même à se loger - et donc à étudier ; enfin, le surinvestissement dans le BTP - notre dernière grande industrie - depuis quarante ans, alors que les métropoles sont inabordables, que les classes populaires sont chassées de nombreuses communes par les prix, et que les logements manquent pour une population qui n’augmente presque plus.
Ce cumul d’impasses interroge.
Il résulte a minima des causes et circonstances suivantes: l’indifférence - à tout le moins l’ignorance - des dirigeants nationaux à l’égard des Français des classes populaires et moyennes ; un consensus idéologique chez de nombreux dirigeants, cadres et retraités, autour d’une conscience postnationale, postindustrielle et mondialisée ; la croyance millénariste dans les bienfaits d’une construction européenne passée aux mains de l’Allemagne sans qu’on en prenne la mesure ; l’aveuglement de nos dirigeants sur leur capacité à sauver l’Afrique indépendamment de toute connaissance de ce continent et de ses habitants (l’utopie électrificatrice de Jean-Louis Borloo en fut un symbole, quand notre parc nucléaire national entrait en hibernation programmée).
Quels sont les étages de cette fusée?
La croissance de la consommation
Le premier est celui de la désindustrialisation du pays et de l’utopie du tout-tertiaire. Comme les États-Unis, nous avons divisé par deux en trente ans notre PIB et nos emplois industriels. À ceci près que Clinton a investi dans les «autoroutes de l’information», la plus grande (mais aussi polluante et énergétivore) infrastructure de l’histoire, qui permet à l’industrie électronique américaine et aux Gafa de dominer le monde - en captant à notre détriment des milliers de brillants ingénieurs.
Le deuxième est le tout-consommation. Nos dirigeants ont décidé que l’étalon de notre nouvelle économie ne serait plus l’innovation, la productivité, la sauvegarde de notre production ni l’emploi, mais le pouvoir d’achat. Chaque citoyen, mineur ou étranger vivant en France, est regardé comme une unité économique à cajoler. Nous sommes passés d’un pays de citoyens - dotés d’une solide éducation à la liberté par le savoir et l’indépendance économique - à une société de consommateurs. Depuis les années 1970, citoyens français, étrangers présents en France, travailleurs et retraités se sont fondus dans l’unique catégorie du consommateur. Toute unité étant interchangeable, le travail d’éducation et de formation a cessé d’être essentiel.
Le troisième est l’immigration internationale de masse, qui a la particularité en France, même pour sa part extraeuropéenne, de remonter à la Grande Guerre.
Qu’importe dès lors que les consommateurs soient cultivés, éduqués ou ignares, qu’ils participent ou non à la vie citoyenne et associative, qu’ils soient étrangers ou nationaux, qu’ils travaillent ou pas: la priorité de la nation est leur solvabilité. La croissance de la consommation est le Graal de notre société. Qu’on en juge.
Perte publique, bénéfices privés
La plupart des normes imposées que l’on présente comme liées à la sécurité des personnes, de l’environnement, des travailleurs, ou à toute cause vertueuse, sont le fruit de l’intense lobbying de fournisseurs qui cherchent à écouler leurs produits. Une fois la norme établie, l’État intervient par la contrainte (par exemple en rendant des maisons habitées inlouables) et solvabilise les insolvables (pour l’isolation, le chauffage électrique ou la voiture), ce qui aggrave son déficit et enrichit ses prêteurs. Qu’il le veuille ou non, le consommateur est obligé de dépenser, dût-on le financer à perte. Perte publique, mais bénéfices privés.
Cette spirale de la dépense contrainte, parfois habillée en «investissement» afin de la rendre vertueuse, est appliquée aux consommateurs, aux entreprises, à l’État et aux collectivités locales. Elle est le seul moyen de consolider les bénéfices et les marges des secteurs économiques subsistants: les banques, les télécoms, les transports, l’industrie du BTP et les équipementiers, mais aussi des services marchands (grande distribution) et non marchands (la santé ou la silver économie). Ce système non solvable - car sous-productif - est structurellement en déficit, et l’économie d’endettement est devenue la règle. Dette publique et dette privée cumulées atteignaient, en 2021, 361% du PIB français, selon la Banque des règlements internationaux.
Suivant cette logique de la pente à sens unique, quand la natalité française s’est effondrée, dans les années 1970, à la suite de l’évolution des mœurs et de réformes de société, le déficit des naissances a été compensé par une hausse lente mais ininterrompue de l’immigration, déconnectée du travail, puisque la priorité manifeste est devenue l’accroissement du nombre des consommateurs.
La santé publique et l’économie sociale ont pris le pas sur l’école et la formation de l’esprit: leurs deux vertus sont de maintenir en forme des consommateurs dont l’existence est marchandisée - ou valorisée -, de la procréation (assistée) à l’Ehpad ; et de stabiliser leur pouvoir d’achat. Cette singulière opération fédère des convergences idéologiques et d’intérêts tout à fait inattendues, qui vont du patronat le plus rude aux syndicats de salariés, et du pape à La France insoumise.
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