Les Israéliens et Américains ont bombardé les trois principaux sites nucléaires iraniens ces 10 derniers jours – et même ceux enterrés profondément, comme celui de Fordo, le week-end dernier. Mais il est encore difficile de savoir si cela empêchera vraiment l'Iran d'obtenir la bombe nucléaire. Surtout qu'un autre site d'enrichissement a été construit ces dernières années : plus profond, et donc plus difficile à détruire. L'Iran dément vouloir se doter de l'arme nucléaire, mais défend son droit de développer un programme nucléaire civil.
24/06/2025
Alors que Donald Trump se félicitait dimanche 22 juin d’avoir « anéanti le programme nucléaire iranien », le site nucléaire de Kuh-e Kolang Gaz La pourrait contredire les déclarations du dirigeant américain. Cette nouvelle installation se trouve juste à côté de l'usine de Natanz, fortement bombardée ces derniers jours. Elle est située sous une montagne de 1 600 mètres de haut, la Kuh-e Kolang Gaz La, appelé aussi mont de la Pioche. Une montagne qui est deux fois plus haute que celle accueillant les installations nucléaires de Fordo.
Sa hauteur permettrait d'enfouir un très grand nombre de centrifugeuses, et ceci à plus de 140 mètres sous terre, c'est-à-dire bien plus profond que pour le site d'enrichissement de Fordo, qui était déjà inatteignable pour les Israéliens et a requis l'intervention américaine à une telle profondeur. À cette profondeur, les experts craignent que même les bombes pénétrantes des États-Unis – telles que la fameuse GBU-57 employée lors des bombardements américains de ce week-end – pourraient être inefficaces.
Périmètre de sécurité
Le site semble dater de 2007. Resté inactif durant plus d’une décennie, d’importants travaux ont eu lieu ces cinq dernières années pour réhabiliter ces installations, selon un rapport de l’Institut pour la science et la sécurité internationale (ISIS) datant de fin avril 2025. Ces six derniers mois, les changements se sont encore accélérés, pointe le rapport.
Selon un rapport de l’Institut pour la science et la sécurité internationale (ISIS), le périmètre de sécurité entourant la base de la montagne s’est renforcé et rejoint celui de Natanz et s'étend jusqu'à la route principale. Les deux entrées du tunnel sont hautement sécurisées par des bâtiments de sécurité, avec des barrages routiers mobiles menant à l'entrée supérieure. « Globalement, les images satellites indiquent que ce site est en passe de devenir hautement sécurisé », conclut le rapport.
Ce qui inquiète encore plus, c'est que les Iraniens ont interdit depuis des mois les inspections de ce site par l'Agence internationale de l'énergie atomique, en violation du Traité de non-prolifération nucléaire. « Il est évident que ce lieu abrite de nombreuses et importantes activités » liées au programme nucléaire iranien, expliquait Rafael Grossi, directeur de l’AIEA à la presse, lors d’une visite à Washington en avril dernier. Une infraction qui aura peu de conséquences, car Téhéran a annoncé ces derniers jours vouloir sortir de ce traité.
David Albright, président de l'Institut pour la science et la sécurité internationale (ISIS), déclarait auprès de Reuters toujours en avril que cela soulevait des interrogations quant à l’utilisation de ce site pour stocker l'uranium iranien hautement enrichi ou de matières nucléaires non déclarées, ainsi que des centrifugeuses avancées capables de purifier rapidement suffisamment d'uranium pour une bombe.
« Un endroit sûr et invulnérable »
Ces informations venant de la presse américaine semblent être confirmées par des déclarations des dirigeants iraniens qui évoquaient, le 12 juin 2025, la création d’un « nouveau site entièrement construit et situé dans un endroit sûr et invulnérable ». « Dès que l’installation et la mise en service des centrifugeuses seront terminées, l’enrichissement commencera » a ajouté Mohammad Eslami, directeur de l'Organisation de l'énergie atomique en Iran.
Après les bombardements américains et israéliens, le conseiller du guide suprême iranien, Ali Shamkhani, a d’ailleurs déclaré que l'Iran détenait toujours des stocks d'uranium enrichi. Ce site servirait-il à les stocker ? Pour sa part, Rafael Grossi, a jugé impossible à ce stade d'évaluer les dégâts sur les installations nucléaires et a réclamé un accès pour « faire le point ».
rfi.fr
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