Par Elisabeth Pierson lefigaro.fr
ENQUÊTE - En avril et mai, 16.000 Subsahariens ont été expulsés par l’Algérie vers le désert au nord du Niger. Derrière cette politique de rafles discrètes, Alger resserre ses liens avec la Tunisie, qui adopte les mêmes méthodes, loin des regards.
Dans la chaleur torride du désert entre le Niger et l’Algérie, des files de camions se dirigent vers la frontière. À leurs bords, des dizaines et des dizaines de migrants - jusqu’à plus de 1000 en une journée. Les forces de l’ordre algériennes les laissent sans eau ni nourriture, sous des températures avoisinant les 50°C. Le cri d’alarme est venu d’abord d’ONG. Dans une déclaration commune publiée le 20 mai, plusieurs collectifs africains, notamment Alarme Phone Sahara et le Réseau Maghreb Sahel sur les migrations, ont alerté sur les méthodes «brutales», «inhumaines» parfois mortelles de ces véritables «rafles», opérées dans la plus grande discrétion.
Puis, les autorités nigériennes elles-mêmes ont brisé le tabou. À la télévision publique en mai, le général Ibrah Boulama Issa, gouverneur d’Agadez, ville carrefour pour les migrants venus de Côte d’Ivoire, du Mali, du Niger, du Burkina, a alerté sur une «vague de refoulement sans précédent de migrants en provenance d’Algérie». Dans la localité frontalière d’Assamaka, les centres de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), l’organisme onusien, sont en situation de «surpopulation», a indiqué le gouverneur. Avec ce chiffre record : 16.000 personnes, selon le décompte du site d’information InfoMigrants, expulsées en mars et avril d’Algérie vers le Niger. Soit, en deux mois, l’équivalent de l’année précédente en six mois.Tabou en Algérie
Dans ce carrefour migratoire, porte vers l’Europe pour les Subsahariens en quête d’une vie meilleure, hommes, femmes et enfants arrivent par milliers pour traverser la Méditerranée ou s’installer dans le pays dit «de transit». Mais l’Algérie n’a aucune politique d’accueil. Malgré son statut d’État parti à la Convention sur les réfugiés, elle ne s’est jamais dotée d’un cadre juridique pour un processus de demande d’asile ou un statut des réfugiés. La présence de ces étrangers, souvent tolérée, n’a jamais été légalisée. «Les migrants arrivent en Algérie, travaillent pour se faire un peu d‘argent et payer les passeurs, notamment sur des chantiers à Oran. Ils se font exploiter, parfois comme des esclaves», rapporte Daoud Imoulayen, ancien rédacteur en chef d’un site francophone algérien vivant en France.
La pratique dure depuis des années. En 2018 déjà, Human Rights Watch la documentait par des récits glaçants de migrants laissés sans nourriture, parfois sans eau, sans argent également, passés à tabac, rackettés par les gardes-frontières. L’ancien ambassadeur de France à Alger Xavier Driencourt a lui-même été témoin de convois de migrants aperçus sur la route vers le Sud algérien, passant par Ghardaïa et El Golea. Près d’une «trentaine de cars à la file» encadrés par la gendarmerie, avec à leur bord «80 personnes» chacun selon ses estimations. Les autorités opèrent dans la plus grande discrétion.
Aux yeux des autorités, pas de sujet. Dans les médias d’État algériens, pas un mot. «Ces expulsions de subsahariens sont organisées par l’armée et tout ce qui concerne l’armée est tabou en Algérie», relève Daoud Imoulayen. Sur les réseaux sociaux, des images percent le tabou. Sur Facebook, une vidéo qui totalise 11.000 vues montre par exemple un migrant nageant dans une rivière, traqué depuis la rive par la gendarmerie algérienne. Ou à Tamanrasset, au sud du pays, des migrants se sont filmés après une «attaque» par des habitants locaux. En Algérie où règne un «racisme» assumé, l’origine de ces migrants constitue une double peine. «Une chose est sûre, on ne dira jamais rien des Irakiens, des Libyens, des Syriens en Algérie. Mais ceux qu’on appelle "kahlouches", "nègres", sont maltraités. Dès que c’est de couleur, on expulse», souligne le journaliste Daoud Imoulayen.
L’Algérie cache sa politique brutale aux regards extérieurs, la presse algérienne qui n’a rien de libre n’en fait aucun écho. Cela n’empêche pas, sans honte, Alger de vouloir nous donner des leçons de défense des droits de l’homme
Didier Leschi, directeur de l’OFII
Omerta politique
«Ce qui est indigne, c’est que personne n’en parle en Europe», pointe l’ex-diplomate Xavier Driencourt. «Les ONG des droits des migrants sur notre continent n’évoquent jamais le sujet». Le régime algérien, lui, verrouille l’information. En avril, chose rare, le président Abdelmadjid Tebboune s’est exprimé sur le sujet. En marge d’une visite à la préfecture de Béchar, dans le sud-ouest, le chef de l’État a affirmé ne voir «pas de problème à ce que les migrants subsahariens travaillent en Algérie», se disant même prêt à légaliser la présence des travailleurs subsahariens sans papier, à condition qu’elle soit «organisée» et régulée de manière concertée avec les pays de départ. «Les chantiers sont là et les gens ont besoin de main-d’œuvre, notamment dans le BTP et l’agriculture», a affirmé le président. Le quotidien algérien El Watan a souligné le caractère inédit de ces propos : «C’est la première fois, en tout cas, que cette question est évoquée officiellement et par le premier magistrat du pays».
Le régime envisagerait donc une régularisation du processus d’accueil ? Le chef d’État n’a toutefois pas manqué de rappeler la nécessité d’une «vigilance accrue» face au risque de «terrorisme» que présente ce phénomène migratoire. «Sans une préparation minutieuse, nous risquons d’accueillir un travailleur qui pourrait, par la suite, se révéler lié à des réseaux terroristes ou à des trafics de drogue», a-t-il précisé. Une prudence au regard de sa sécurité intérieure qui tranche avec les reproches d’Alger vis-à-vis de Paris.
Lorsqu’au nom de sa propre sécurité, la France cherche à expulser des ressortissants algériens jugés dangereux, Alger reproche volontiers à l’ancien allié de ne pas respecter les droits des migrants et les procédures administratives. Pour exemple, le 17 mars dernier, le ministère algérien des Affaires étrangères rejetait une «liste» entière de ressortissants algériens sous Obligation de quitter le territoire français (OQTF), rappelant son attachement aux procédures devant se faire via les «canaux d’usage» entre préfectures françaises et consulats algériens. Le communiqué du ministère des Affaires étrangères rappelait combien importait à ses yeux le «respect des droits des personnes faisant l’objet de mesures d’éloignement».
«Ils viennent nous faire la morale mais c’est un comble, alors qu’eux-mêmes ne s’embarrassent pas de l’État de droit», tance Xavier Driencourt. En janvier également, après le renvoi vers Alger de l’influenceur algérien Doualemn, le régime algérien a refusé de le reprendre, dénonçant un acte « précipité, arbitraire et abusif » inspiré par « l’extrême‑droite revancharde, en violation des droits fondamentaux de son ressortissant». Peu soucieuse du motif de l’expulsion - une vidéo sur TikTok dans laquelle l’activiste algérien appelait à infliger une «sévère correction» à un opposant au pouvoir en Algérie sur le territoire français - Alger rappelait à Paris les droits de défense de l’intéressé tels qu’énoncés dans la Convention consulaire de 1974.
Opacité totale
Tandis que le régime subtilise sur les règles du droit français en matière d’expulsion, sur son territoire, le taux des reconduites aux frontières ne fait qu’augmenter. Entre 2015 et 2018, les autorités évoquaient 27.000 migrants expulsés en trois ans. Ils étaient 26.000 en 2023, 31.000 en 2024. Les ONG africaines déplorent le silence général des instances africaines sur ce phénomène. De l’Union africaine à la Cédéao en passant par la Cemac, silence général sur ces ressortissants des pays membres violemment refoulés. Contactée, l’OIM elle-même n’a pas donné suite à nos demandes. «Elle a peur de perdre son siège algérien, à juste titre», indique Mathieu Tardis, ancien responsable du Centre migrations et citoyennetés de l’Ifri. «Quant aux États africains, il s’agit de leurs ressortissants, cela les mettrait face à leurs responsabilités». L’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) confirme une grande opacité du régime sur la question migratoire. Alors que l’organisme d’État dispose de bureaux au Maroc et en Tunisie, en Algérie, «toutes les tentatives pour ouvrir un bureau se sont heurtées à un mur», confie au Figaro son directeur Didier Leschi.
«L’Algérie cache sa politique brutale aux regards extérieurs, la presse algérienne qui n’a rien de libre n’en fait aucun écho. Cela n’empêche pas, sans honte, Alger de vouloir nous donner des leçons de défense des droits de l’homme», tance le directeur, estimant, au regard de ses informations et des récits de migrants, qu’il y a «très certainement plus de décès dans le désert qu’en Méditerranée sans que cela émeuve beaucoup».
Ce silence politique permet à l’Algérie de passer sous les projecteurs, souvent braqués sur ses voisins. En Libye, les rapports de l’ONU, Amnesty International, Human Rights Watch ou encore Médecins Sans Frontières ont largement documenté les trafics humains, viols de femmes et d’enfants, esclavages, rançonnages. La Tunisie, elle, assume ouvertement sa politique de refoulement par la voix de son président Kaïs Saïed, qui en 2023 accusait d’un complot autour de ces «vagues d’immigration clandestine», qui visaient selon lui à «changer la composition démographique» de son pays. Le Maroc, plus discret, procède aussi à des «rafles» quelque peu aléatoires, selon les témoignages recueillis, y compris sur des réfugiés ou des demandeurs d’asile. En 2024, près de 59.000 migrants auraient été interpellés sur le territoire par les forces de sécurité d’après un décompte officiel.
ENQUÊTE - En avril et mai, 16.000 Subsahariens ont été expulsés par l’Algérie vers le désert au nord du Niger. Derrière cette politique de rafles discrètes, Alger resserre ses liens avec la Tunisie, qui adopte les mêmes méthodes, loin des regards.
Dans la chaleur torride du désert entre le Niger et l’Algérie, des files de camions se dirigent vers la frontière. À leurs bords, des dizaines et des dizaines de migrants - jusqu’à plus de 1000 en une journée. Les forces de l’ordre algériennes les laissent sans eau ni nourriture, sous des températures avoisinant les 50°C. Le cri d’alarme est venu d’abord d’ONG. Dans une déclaration commune publiée le 20 mai, plusieurs collectifs africains, notamment Alarme Phone Sahara et le Réseau Maghreb Sahel sur les migrations, ont alerté sur les méthodes «brutales», «inhumaines» parfois mortelles de ces véritables «rafles», opérées dans la plus grande discrétion.
Puis, les autorités nigériennes elles-mêmes ont brisé le tabou. À la télévision publique en mai, le général Ibrah Boulama Issa, gouverneur d’Agadez, ville carrefour pour les migrants venus de Côte d’Ivoire, du Mali, du Niger, du Burkina, a alerté sur une «vague de refoulement sans précédent de migrants en provenance d’Algérie». Dans la localité frontalière d’Assamaka, les centres de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), l’organisme onusien, sont en situation de «surpopulation», a indiqué le gouverneur. Avec ce chiffre record : 16.000 personnes, selon le décompte du site d’information InfoMigrants, expulsées en mars et avril d’Algérie vers le Niger. Soit, en deux mois, l’équivalent de l’année précédente en six mois.Tabou en Algérie
Dans ce carrefour migratoire, porte vers l’Europe pour les Subsahariens en quête d’une vie meilleure, hommes, femmes et enfants arrivent par milliers pour traverser la Méditerranée ou s’installer dans le pays dit «de transit». Mais l’Algérie n’a aucune politique d’accueil. Malgré son statut d’État parti à la Convention sur les réfugiés, elle ne s’est jamais dotée d’un cadre juridique pour un processus de demande d’asile ou un statut des réfugiés. La présence de ces étrangers, souvent tolérée, n’a jamais été légalisée. «Les migrants arrivent en Algérie, travaillent pour se faire un peu d‘argent et payer les passeurs, notamment sur des chantiers à Oran. Ils se font exploiter, parfois comme des esclaves», rapporte Daoud Imoulayen, ancien rédacteur en chef d’un site francophone algérien vivant en France.
La pratique dure depuis des années. En 2018 déjà, Human Rights Watch la documentait par des récits glaçants de migrants laissés sans nourriture, parfois sans eau, sans argent également, passés à tabac, rackettés par les gardes-frontières. L’ancien ambassadeur de France à Alger Xavier Driencourt a lui-même été témoin de convois de migrants aperçus sur la route vers le Sud algérien, passant par Ghardaïa et El Golea. Près d’une «trentaine de cars à la file» encadrés par la gendarmerie, avec à leur bord «80 personnes» chacun selon ses estimations. Les autorités opèrent dans la plus grande discrétion.
Aux yeux des autorités, pas de sujet. Dans les médias d’État algériens, pas un mot. «Ces expulsions de subsahariens sont organisées par l’armée et tout ce qui concerne l’armée est tabou en Algérie», relève Daoud Imoulayen. Sur les réseaux sociaux, des images percent le tabou. Sur Facebook, une vidéo qui totalise 11.000 vues montre par exemple un migrant nageant dans une rivière, traqué depuis la rive par la gendarmerie algérienne. Ou à Tamanrasset, au sud du pays, des migrants se sont filmés après une «attaque» par des habitants locaux. En Algérie où règne un «racisme» assumé, l’origine de ces migrants constitue une double peine. «Une chose est sûre, on ne dira jamais rien des Irakiens, des Libyens, des Syriens en Algérie. Mais ceux qu’on appelle "kahlouches", "nègres", sont maltraités. Dès que c’est de couleur, on expulse», souligne le journaliste Daoud Imoulayen.
L’Algérie cache sa politique brutale aux regards extérieurs, la presse algérienne qui n’a rien de libre n’en fait aucun écho. Cela n’empêche pas, sans honte, Alger de vouloir nous donner des leçons de défense des droits de l’homme
Didier Leschi, directeur de l’OFII
Omerta politique
«Ce qui est indigne, c’est que personne n’en parle en Europe», pointe l’ex-diplomate Xavier Driencourt. «Les ONG des droits des migrants sur notre continent n’évoquent jamais le sujet». Le régime algérien, lui, verrouille l’information. En avril, chose rare, le président Abdelmadjid Tebboune s’est exprimé sur le sujet. En marge d’une visite à la préfecture de Béchar, dans le sud-ouest, le chef de l’État a affirmé ne voir «pas de problème à ce que les migrants subsahariens travaillent en Algérie», se disant même prêt à légaliser la présence des travailleurs subsahariens sans papier, à condition qu’elle soit «organisée» et régulée de manière concertée avec les pays de départ. «Les chantiers sont là et les gens ont besoin de main-d’œuvre, notamment dans le BTP et l’agriculture», a affirmé le président. Le quotidien algérien El Watan a souligné le caractère inédit de ces propos : «C’est la première fois, en tout cas, que cette question est évoquée officiellement et par le premier magistrat du pays».
Le régime envisagerait donc une régularisation du processus d’accueil ? Le chef d’État n’a toutefois pas manqué de rappeler la nécessité d’une «vigilance accrue» face au risque de «terrorisme» que présente ce phénomène migratoire. «Sans une préparation minutieuse, nous risquons d’accueillir un travailleur qui pourrait, par la suite, se révéler lié à des réseaux terroristes ou à des trafics de drogue», a-t-il précisé. Une prudence au regard de sa sécurité intérieure qui tranche avec les reproches d’Alger vis-à-vis de Paris.
Lorsqu’au nom de sa propre sécurité, la France cherche à expulser des ressortissants algériens jugés dangereux, Alger reproche volontiers à l’ancien allié de ne pas respecter les droits des migrants et les procédures administratives. Pour exemple, le 17 mars dernier, le ministère algérien des Affaires étrangères rejetait une «liste» entière de ressortissants algériens sous Obligation de quitter le territoire français (OQTF), rappelant son attachement aux procédures devant se faire via les «canaux d’usage» entre préfectures françaises et consulats algériens. Le communiqué du ministère des Affaires étrangères rappelait combien importait à ses yeux le «respect des droits des personnes faisant l’objet de mesures d’éloignement».
«Ils viennent nous faire la morale mais c’est un comble, alors qu’eux-mêmes ne s’embarrassent pas de l’État de droit», tance Xavier Driencourt. En janvier également, après le renvoi vers Alger de l’influenceur algérien Doualemn, le régime algérien a refusé de le reprendre, dénonçant un acte « précipité, arbitraire et abusif » inspiré par « l’extrême‑droite revancharde, en violation des droits fondamentaux de son ressortissant». Peu soucieuse du motif de l’expulsion - une vidéo sur TikTok dans laquelle l’activiste algérien appelait à infliger une «sévère correction» à un opposant au pouvoir en Algérie sur le territoire français - Alger rappelait à Paris les droits de défense de l’intéressé tels qu’énoncés dans la Convention consulaire de 1974.
Opacité totale
Tandis que le régime subtilise sur les règles du droit français en matière d’expulsion, sur son territoire, le taux des reconduites aux frontières ne fait qu’augmenter. Entre 2015 et 2018, les autorités évoquaient 27.000 migrants expulsés en trois ans. Ils étaient 26.000 en 2023, 31.000 en 2024. Les ONG africaines déplorent le silence général des instances africaines sur ce phénomène. De l’Union africaine à la Cédéao en passant par la Cemac, silence général sur ces ressortissants des pays membres violemment refoulés. Contactée, l’OIM elle-même n’a pas donné suite à nos demandes. «Elle a peur de perdre son siège algérien, à juste titre», indique Mathieu Tardis, ancien responsable du Centre migrations et citoyennetés de l’Ifri. «Quant aux États africains, il s’agit de leurs ressortissants, cela les mettrait face à leurs responsabilités». L’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) confirme une grande opacité du régime sur la question migratoire. Alors que l’organisme d’État dispose de bureaux au Maroc et en Tunisie, en Algérie, «toutes les tentatives pour ouvrir un bureau se sont heurtées à un mur», confie au Figaro son directeur Didier Leschi.
«L’Algérie cache sa politique brutale aux regards extérieurs, la presse algérienne qui n’a rien de libre n’en fait aucun écho. Cela n’empêche pas, sans honte, Alger de vouloir nous donner des leçons de défense des droits de l’homme», tance le directeur, estimant, au regard de ses informations et des récits de migrants, qu’il y a «très certainement plus de décès dans le désert qu’en Méditerranée sans que cela émeuve beaucoup».
Ce silence politique permet à l’Algérie de passer sous les projecteurs, souvent braqués sur ses voisins. En Libye, les rapports de l’ONU, Amnesty International, Human Rights Watch ou encore Médecins Sans Frontières ont largement documenté les trafics humains, viols de femmes et d’enfants, esclavages, rançonnages. La Tunisie, elle, assume ouvertement sa politique de refoulement par la voix de son président Kaïs Saïed, qui en 2023 accusait d’un complot autour de ces «vagues d’immigration clandestine», qui visaient selon lui à «changer la composition démographique» de son pays. Le Maroc, plus discret, procède aussi à des «rafles» quelque peu aléatoires, selon les témoignages recueillis, y compris sur des réfugiés ou des demandeurs d’asile. En 2024, près de 59.000 migrants auraient été interpellés sur le territoire par les forces de sécurité d’après un décompte officiel.
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