Neuf ans après l’introduction du nouveau Code de la famille la «Moudawana», la polygamie a encore la vie dure au Maroc. En témoignent les statistiques fournies par le ministère de la Justice et des libertés, sur l’activité des différentes sections de la justice familiale. En effet, le nombre des demandes enregistrées au cours de l’année 2011-2012 est de 5 621 dont 3 838 inscrits et
1 783 assermentés. Le même document indique en outre que parmi les cas jugés, 1 890 ont été acceptés et 1 976 rejetés soit respectivement 33,62% et 35,15% de l’ensemble tandis que 1755 sont en cours de jugement. Constat : le nombre de polygames au Maroc serait en augmentation constante depuis l’année 2010 où environ
1 000 cas acceptés ont été enregistrés dans les tribunaux.
Même son de cloche chez les avocats, juges et associations des droits de la femme. Pour Loubna Ouazzani, substitut du procureur général à la Cour d’appel de Rabat, après la réforme du Code de la famille, adoptée par le Parlement en 2004, «la polygamie n’est pas abolie, mais elle est soumise à des conditions draconiennes», explique-t-elle. En effet, un très grand nombre de modifications ont été introduites, émanant en majeure partie des revendications des associations de femmes et des ONG des droits humains. La Moudawana impose ainsi au mari qui désire prendre une seconde épouse d’avoir une permission écrite de sa première femme et l’autorisation du juge.
Il doit aussi prouver qu’il est capable de subvenir aux besoins des deux femmes, garantir leurs droits, leur pension alimentaire, et leur logement. C’est ainsi que la femme peut conditionner ce mariage à un engagement du mari de ne pas prendre d’autres épouses et elle peut aussi invoquer la polygamie pour demander le divorce pour le préjudice subi.
Ce qui fait qu’avec la nouvelle procédure instituée par la Moudawana, l’autorisation pour prendre une seconde épouse ne s’obtient pas aussi facilement qu’auparavant. Pis encore, en cas de rejet de la demande d’autorisation de la polygamie, «un nombre important d’hommes décident de répudier la première épouse pour pouvoir en prendre une autre qui, généralement, est plus jeune», soutient Saadia Wadah, avocate à Casablanca précisant que ce cas-là est plus fréquent quand il s’agit de l’intransigeance de certains juges. C’est dire que les conditions draconiennes que stipule la Moudawana étaient censées contribuer au recul de la polygamie. Mais en réalité, la bataille semble loin d’être gagnée. Les associations des droits des femmes, elles, appellent même à l’interdiction de la polygamie. À croire Fouzia Assouli, présidente de la Fédération de la ligue démocratique des droits des femmes pour qui permettre encore la polygamie est «une entorse aux engagements pris par le Maroc au niveau international quant à l’égalité entre la femme et l’homme». Et d’ajouter : «Le mariage c’est un homme et une femme, et non pas un homme et deux femmes ou une femme et deux hommes. Sinon la porte aux injustices est ouverte, que ce soit à l’égard des femmes ou à l’égard des enfants».
En revanche, selon l’Ordre national des Adouls du Maroc (ONAM), la polygamie est en parfait accord avec l’esprit de la religion musulmane. À condition qu’il y ait de «l’équité entre les épouses», comme le recommande le Coran. «Si l’islam autorise la polygamie, c’est certainement pour le bien de tous les musulmans», souligne Abdeslam El Bouraini, président de l’ONAM qui qualifie la polygamie d’une consécration religieuse. Pour lui, la nette augmentation de l’âge du célibat, les difficultés de mariage surtout pour les femmes, entre autres, nous poussent à mettre deux poids deux mesures vis-à-vis de la polygamie qui peut être «aussi une solution alternative au célibat». Pourquoi ne pas alléger la procédure de la polygamie pour permettre aux hommes qui ont les moyens d’épouser plus d’une femme ?» s’interroge-t-il.
Ce que dit la loi
Selon l’article 40 du nouveau Code de la famille, la polygamie est interdite lorsqu’une injustice est crainte entre les épouses. Elle est également interdite lorsqu’il existe une condition de l’épouse en vertu de laquelle l’époux s’engage à ne pas lui adjoindre une autre épouse. De son côté, l’article 41 stipule que le tribunal n’autorise pas la polygamie dans les cas suivants : lorsque le motif objectif exceptionnel n’est pas établi, lorsque le demandeur ne dispose pas de ressources suffisantes pour subvenir aux besoins des deux familles et garantir tous les droits tels que l’entretien, le logement et l’égalité dans tous les aspects de la vie.
Et conformément à l’article 42, lorsqu’il n’existe pas de condition par laquelle l’époux s’engage à renoncer à la polygamie, l’homme qui désire prendre une autre épouse présente au tribunal une demande d’autorisation à cet effet.
La demande doit indiquer les motifs objectifs exceptionnels
justifiant la polygamie et doit être assortie d’une déclaration sur
la situation matérielle du
demandeur.
Repères
1 783 assermentés. Le même document indique en outre que parmi les cas jugés, 1 890 ont été acceptés et 1 976 rejetés soit respectivement 33,62% et 35,15% de l’ensemble tandis que 1755 sont en cours de jugement. Constat : le nombre de polygames au Maroc serait en augmentation constante depuis l’année 2010 où environ
1 000 cas acceptés ont été enregistrés dans les tribunaux.
Même son de cloche chez les avocats, juges et associations des droits de la femme. Pour Loubna Ouazzani, substitut du procureur général à la Cour d’appel de Rabat, après la réforme du Code de la famille, adoptée par le Parlement en 2004, «la polygamie n’est pas abolie, mais elle est soumise à des conditions draconiennes», explique-t-elle. En effet, un très grand nombre de modifications ont été introduites, émanant en majeure partie des revendications des associations de femmes et des ONG des droits humains. La Moudawana impose ainsi au mari qui désire prendre une seconde épouse d’avoir une permission écrite de sa première femme et l’autorisation du juge.
Il doit aussi prouver qu’il est capable de subvenir aux besoins des deux femmes, garantir leurs droits, leur pension alimentaire, et leur logement. C’est ainsi que la femme peut conditionner ce mariage à un engagement du mari de ne pas prendre d’autres épouses et elle peut aussi invoquer la polygamie pour demander le divorce pour le préjudice subi.
Ce qui fait qu’avec la nouvelle procédure instituée par la Moudawana, l’autorisation pour prendre une seconde épouse ne s’obtient pas aussi facilement qu’auparavant. Pis encore, en cas de rejet de la demande d’autorisation de la polygamie, «un nombre important d’hommes décident de répudier la première épouse pour pouvoir en prendre une autre qui, généralement, est plus jeune», soutient Saadia Wadah, avocate à Casablanca précisant que ce cas-là est plus fréquent quand il s’agit de l’intransigeance de certains juges. C’est dire que les conditions draconiennes que stipule la Moudawana étaient censées contribuer au recul de la polygamie. Mais en réalité, la bataille semble loin d’être gagnée. Les associations des droits des femmes, elles, appellent même à l’interdiction de la polygamie. À croire Fouzia Assouli, présidente de la Fédération de la ligue démocratique des droits des femmes pour qui permettre encore la polygamie est «une entorse aux engagements pris par le Maroc au niveau international quant à l’égalité entre la femme et l’homme». Et d’ajouter : «Le mariage c’est un homme et une femme, et non pas un homme et deux femmes ou une femme et deux hommes. Sinon la porte aux injustices est ouverte, que ce soit à l’égard des femmes ou à l’égard des enfants».
En revanche, selon l’Ordre national des Adouls du Maroc (ONAM), la polygamie est en parfait accord avec l’esprit de la religion musulmane. À condition qu’il y ait de «l’équité entre les épouses», comme le recommande le Coran. «Si l’islam autorise la polygamie, c’est certainement pour le bien de tous les musulmans», souligne Abdeslam El Bouraini, président de l’ONAM qui qualifie la polygamie d’une consécration religieuse. Pour lui, la nette augmentation de l’âge du célibat, les difficultés de mariage surtout pour les femmes, entre autres, nous poussent à mettre deux poids deux mesures vis-à-vis de la polygamie qui peut être «aussi une solution alternative au célibat». Pourquoi ne pas alléger la procédure de la polygamie pour permettre aux hommes qui ont les moyens d’épouser plus d’une femme ?» s’interroge-t-il.
Ce que dit la loi
Selon l’article 40 du nouveau Code de la famille, la polygamie est interdite lorsqu’une injustice est crainte entre les épouses. Elle est également interdite lorsqu’il existe une condition de l’épouse en vertu de laquelle l’époux s’engage à ne pas lui adjoindre une autre épouse. De son côté, l’article 41 stipule que le tribunal n’autorise pas la polygamie dans les cas suivants : lorsque le motif objectif exceptionnel n’est pas établi, lorsque le demandeur ne dispose pas de ressources suffisantes pour subvenir aux besoins des deux familles et garantir tous les droits tels que l’entretien, le logement et l’égalité dans tous les aspects de la vie.
Et conformément à l’article 42, lorsqu’il n’existe pas de condition par laquelle l’époux s’engage à renoncer à la polygamie, l’homme qui désire prendre une autre épouse présente au tribunal une demande d’autorisation à cet effet.
La demande doit indiquer les motifs objectifs exceptionnels
justifiant la polygamie et doit être assortie d’une déclaration sur
la situation matérielle du
demandeur.
Repères
- Au cours de l’année 2011
- Le nombre des demandes enregistrées est : 5 621
- - Inscrits : 3 838
- - Assermentés : 1 783
- Les cas jugés :
- Acceptés : 1 890 (33,62%)
- Rejetés : 1 976 (35,15%)
- - En cours de jugement :
- 1 755.
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