Mes yeux, j’admire que vous puissiez dormir
Ame égarée, songe à la nuit de ton départ,
En un séjour ténébreux tu seras emprisonnée;
Contrainte d’avoir la terre pour lit et pour couverture,
Dépréciée, méprisée, tu seras la proie des vers;
Une demeure exiguë et la solitude t’attendent :
On peut dormir lorsqu’on n’a pas de tels soucis.
Songe à la tombe et aux supplices qui t’y sont réservés;
J’admire, ô mes yeux, que le sommeil puisse vous visiter
Vous en avez du courage à pouvoir dormir,
D’un sommeil qui ne profite guère;
Ne pas veiller, n’être point préoccupés
Par les cauchemars qui vous attendent dans l’autre monde!
Sérieusement, réveillez-vous!
Dieu peut-être vous pardonnera-t-il alors;
Il suffit, âme malheureuse, prends tes dispositions.
Le tonnerre gronde, il n’y a plus aucun doute,
Je te conseille, si tu es mienne,
De prendre tes dispositions afin de détourner les flots qui t’assaillent.
J’admire, ô mes yeux, que vous puissiez dormir!
La lumière éclatante est sur le point de disparaître,
Et son rayonnement s’affaiblit.
Mon temps est bien passé maintenant,
Voici l’heure de la vieillesse.
Celui qui n’a ni semé le bon grain, ni pris ses dispositions
N’en verra pas les fruits, n’en profitera pas…
Hélas! le grand âge m’atteint.
Mes forces m’ont abandonné, c’est la décrépitude.
A chaque instant, je tombe un peu plus bas;
Les hommes de mon âge disparaissent. Je vous admire, ô mes yeux!
Seule ma langue est restée valide, et me tourmente :
Chaque jour, à tout instant, comme une lame affilée…
J’admire, ô mes yeux, que vous puissiez dormir!
Tes ennemis foncent sur toi, prends garde!
Leurs cavaliers ne cessent de donner l’assaut;
Tu es là, distrait, insouciant, ne regrettant rien,
Jusqu’au moment où Elle vient te prendre au collet.
Qu’il lâche prise, celui dont la maison est en ruines!
L’univers et l’éternité appartiennent à Dieu l’Immortel.
Et tu trouves encore tes joies et ton bonheur dans les vanités de ce monde!
Ceux qui t’aiment sont tous partis; comment être sans inquiétude?
Allons, fais tes adieux à ceux qui s’en vont sans retour!
Repense à tous ceux qui vivaient autour de toi,
Dans cette demeure bien bâtie et pourtant éphémère!
Songe à ta mère, à tes frères, à ton généreux père,
Lui, si tendre, n’a pu que dire : Pauvre enfant que j’abandonne!
Où est le printemps, où sont ses fleurs?
Il n’a fleuri qu’un instant, et son temps est passé.
C’est l’été qui surgit, avec ses vagues étouffantes
Dès son apparition, la terre reste blême.
Où est le jeune homme, où est sa vue perçante?
Il est bien affaibli, bien malade!
Malheur! Comme mes jeunes années m’énivraient!
Comme je me divertissais en ces premières heures,
A l’assaut sur un beau coursier!. Et que de projets!
Maintenant décharné, le fringant destrier ressemble au vieux carcan de Dbâk.
Amaigri, délaissé, détestable…
La peur s’impose à toi maintenant, en permanence.
Tu es abandonné à ton triste sort.
J’admire, ô mes yeux, que vous puissiez dormir!
La clémence ne peut venir que du Tout-Puissant,
Ainsi que de l’intercession du Prophète Mohammed,
Lui que nous trouverons présent au jour difficile,
Et qui réalisera des prouesses en ce jour d’épreuves,
Mon Seigneur qui me protègera.
Nous le trouverons et nous placerons sous son égide le jour du grand combat,
En ce jour où les dettes doivent être payées,
Jour de marchandages difficiles où chacun recevra son dû.
Il me dira : Toi, tu n’as rien à craindre,
C’est moi, El Hachemi, je suis devant toi et derrière toi!
J’admire, ô mes yeux, que vous puissiez dormir!
Extrait de " La poésie arabe populaire de l’Algérie" de Mohammed Belhalfaoui
Ame égarée, songe à la nuit de ton départ,
En un séjour ténébreux tu seras emprisonnée;
Contrainte d’avoir la terre pour lit et pour couverture,
Dépréciée, méprisée, tu seras la proie des vers;
Une demeure exiguë et la solitude t’attendent :
On peut dormir lorsqu’on n’a pas de tels soucis.
Songe à la tombe et aux supplices qui t’y sont réservés;
J’admire, ô mes yeux, que le sommeil puisse vous visiter
Vous en avez du courage à pouvoir dormir,
D’un sommeil qui ne profite guère;
Ne pas veiller, n’être point préoccupés
Par les cauchemars qui vous attendent dans l’autre monde!
Sérieusement, réveillez-vous!
Dieu peut-être vous pardonnera-t-il alors;
Il suffit, âme malheureuse, prends tes dispositions.
Le tonnerre gronde, il n’y a plus aucun doute,
Je te conseille, si tu es mienne,
De prendre tes dispositions afin de détourner les flots qui t’assaillent.
J’admire, ô mes yeux, que vous puissiez dormir!
La lumière éclatante est sur le point de disparaître,
Et son rayonnement s’affaiblit.
Mon temps est bien passé maintenant,
Voici l’heure de la vieillesse.
Celui qui n’a ni semé le bon grain, ni pris ses dispositions
N’en verra pas les fruits, n’en profitera pas…
Hélas! le grand âge m’atteint.
Mes forces m’ont abandonné, c’est la décrépitude.
A chaque instant, je tombe un peu plus bas;
Les hommes de mon âge disparaissent. Je vous admire, ô mes yeux!
Seule ma langue est restée valide, et me tourmente :
Chaque jour, à tout instant, comme une lame affilée…
J’admire, ô mes yeux, que vous puissiez dormir!
Tes ennemis foncent sur toi, prends garde!
Leurs cavaliers ne cessent de donner l’assaut;
Tu es là, distrait, insouciant, ne regrettant rien,
Jusqu’au moment où Elle vient te prendre au collet.
Qu’il lâche prise, celui dont la maison est en ruines!
L’univers et l’éternité appartiennent à Dieu l’Immortel.
Et tu trouves encore tes joies et ton bonheur dans les vanités de ce monde!
Ceux qui t’aiment sont tous partis; comment être sans inquiétude?
Allons, fais tes adieux à ceux qui s’en vont sans retour!
Repense à tous ceux qui vivaient autour de toi,
Dans cette demeure bien bâtie et pourtant éphémère!
Songe à ta mère, à tes frères, à ton généreux père,
Lui, si tendre, n’a pu que dire : Pauvre enfant que j’abandonne!
Où est le printemps, où sont ses fleurs?
Il n’a fleuri qu’un instant, et son temps est passé.
C’est l’été qui surgit, avec ses vagues étouffantes
Dès son apparition, la terre reste blême.
Où est le jeune homme, où est sa vue perçante?
Il est bien affaibli, bien malade!
Malheur! Comme mes jeunes années m’énivraient!
Comme je me divertissais en ces premières heures,
A l’assaut sur un beau coursier!. Et que de projets!
Maintenant décharné, le fringant destrier ressemble au vieux carcan de Dbâk.
Amaigri, délaissé, détestable…
La peur s’impose à toi maintenant, en permanence.
Tu es abandonné à ton triste sort.
J’admire, ô mes yeux, que vous puissiez dormir!
La clémence ne peut venir que du Tout-Puissant,
Ainsi que de l’intercession du Prophète Mohammed,
Lui que nous trouverons présent au jour difficile,
Et qui réalisera des prouesses en ce jour d’épreuves,
Mon Seigneur qui me protègera.
Nous le trouverons et nous placerons sous son égide le jour du grand combat,
En ce jour où les dettes doivent être payées,
Jour de marchandages difficiles où chacun recevra son dû.
Il me dira : Toi, tu n’as rien à craindre,
C’est moi, El Hachemi, je suis devant toi et derrière toi!
J’admire, ô mes yeux, que vous puissiez dormir!
Extrait de " La poésie arabe populaire de l’Algérie" de Mohammed Belhalfaoui
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