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L'aspartame a pris une part importante dans notre alimentation. Entre sucrettes, poudres à cuisiner, yaourts allégés et boissons light, plus de 3,6 millions de Français préfèrent systématiquement l'un des 6 000 produits contenant de l'aspartame à son équivalent naturel. Mais cet édulcorant chimique, au pouvoir deux cents fois plus sucrant que le sucre, est-il mauvais pour la santé ?
Au cours de l'été, l'Autorité européenne de sécurité alimentaire (EFSA) s'est saisi du dossier. Cet organisme s'inquiétait des résultats d'une nouvelle étude du Centre de recherche sur le cancer de la Fondation européenne d'oncologie et de sciences environnementales "B. Ramazzini", installé à Bologne (Italie). Celle-ci montre, en effet, "une augmentation significative d'apparition de leucémies et de lymphomes chez les rats femelles exposées par voie orale à des doses croissantes d'aspartame".
En France, l'Agence de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) a aussitôt réagi, estimant que cette étude "soulevait de nouvelles questions sur les liens potentiels entre l'exposition à l'aspartame et la survenue de cancers". Mais "ces résultats préliminaires (devant) encore être confirmés", l'Autorité européenne pressait, toujours le 29 novembre, les chercheurs italiens de lui fournir avant la fin décembre leurs premières données. "Nous souhaitons disposer des éléments scientifiques ayant conduit à cette conclusion afin d'évaluer les risques", affirme le Dr Carola Sondermann, porte-parole de l'EFSA. Pour les autorités sanitaires, il y a désormais urgence. En effet, en Europe, les consommateurs ingurgitent plus de 2 000 tonnes d'aspartame chaque année.
Depuis sa première mise sur le marché en 1974 aux Etats-Unis, l'aspartame n'a pas cessé de susciter inquiétudes et polémiques. Dont récemment encore dans les colonnes du prestigieux British Medical Journal. "Son innocuité a pourtant été démontrée", affirme son principal fabricant, l'entreprise Merisant, qui a conduit deux cents études spécifiques. De leur côté, les organismes nationaux et internationaux, dont le comité d'experts sur les additifs alimentaires de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), ont jusqu'ici confirmé l'absence d'effets toxiques et secondaires. Tous estiment désormais qu'une contre-expertise est nécessaire.
Comment fonctionne un édulcorant de synthèse ? Ce "faux sucre" chimique, censé nous éviter de grossir tout en répondant aux exigences d'un palais sucré, agit comme un leurre au niveau des capteurs de la bouche. Il envoie au cerveau la sensation du goût sucré, puis il disparaît pour ne plus laisser de trace dans l'estomac. Il n'apporte donc pas de calories et n'attaque pas les dents.
UNE SÉCRÉTION D'INSULINE
Si l'aspartame ne fait pas maigrir, il peut dans certains cas empêcher de grossir. Notamment quand certains enfants en surpoids ne peuvent se passer de boissons gazeuses et en consomment plus de deux litres par jour (un peu plus d'une bouteille). Pour le reste, les substituts chimiques au sucre ont le désavantage de déclencher une sécrétion d'insuline qui favorise le stockage des aliments consommés au même moment et risque de freiner la combustion des graisses quand les édulcorants sont consommés entre les repas. Surtout, "ils perpétuent voire accentuent l'attirance pour le sucré et perturbent les mécanismes naturels du choix des aliments", écrit le docteur Jacques Fricker, médecin nutritionniste à l'hôpital Bichat dans son livre Manger pour bien maigrir (Odile Jacob, 2005, 234 p., 14,25 ¤).
Mieux vaut savoir aussi qu'un produit vendu comme étant "allégé en sucre" n'est pas forcément synonyme de moins de calories. Les industriels de l'alimentaire qui allègent leurs produits sont souvent contraints, pour éviter, par exemple, qu'un biscuit parte en miettes, d'ajouter des graisses à chaque fois qu'ils diminuent le sucre. Ainsi, s'il existe une différence réelle de 60 calories (soit l'équivalent d'un yaourt nature) entre une tablette de chocolat au lait Poulain ("Un amour de lait") et son équivalent ("Ligne gourmande Poulain"), les biscuits P'tit Déj chocolat céréales (Lu) "allégés en sucre" n'ont, eux, que 3 calories de moins (220 calories pour 50 grammes) que leur équivalent "normal" (223 calories pour 50 grammes).
Enfin, reste l'épineuse question de la nocivité des doses. Actuellement, la quantité acceptable de l'aspartame pour l'homme a été fixée par l'Organisation mondiale pour la santé (OMS) à 40 milligrammes par kilogramme de poids corporel par jour. Cette mesure est purement théorique. Aucun consommateur n'est, en effet, à même de mesurer la quantité exacte d'édulcorant qu'il avale quotidiennement puisque cette information n'est pas indiquée sur les emballages des produits alimentaires. Pas plus qu'il n'existe, d'ailleurs, de distinguo entre les quantités utilisées pour les aliments destinés aux enfants et ceux destinés aux adultes...
Florence Amalou
Article paru dans l'édition du 14.12.05 Le Monde
Au cours de l'été, l'Autorité européenne de sécurité alimentaire (EFSA) s'est saisi du dossier. Cet organisme s'inquiétait des résultats d'une nouvelle étude du Centre de recherche sur le cancer de la Fondation européenne d'oncologie et de sciences environnementales "B. Ramazzini", installé à Bologne (Italie). Celle-ci montre, en effet, "une augmentation significative d'apparition de leucémies et de lymphomes chez les rats femelles exposées par voie orale à des doses croissantes d'aspartame".
En France, l'Agence de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) a aussitôt réagi, estimant que cette étude "soulevait de nouvelles questions sur les liens potentiels entre l'exposition à l'aspartame et la survenue de cancers". Mais "ces résultats préliminaires (devant) encore être confirmés", l'Autorité européenne pressait, toujours le 29 novembre, les chercheurs italiens de lui fournir avant la fin décembre leurs premières données. "Nous souhaitons disposer des éléments scientifiques ayant conduit à cette conclusion afin d'évaluer les risques", affirme le Dr Carola Sondermann, porte-parole de l'EFSA. Pour les autorités sanitaires, il y a désormais urgence. En effet, en Europe, les consommateurs ingurgitent plus de 2 000 tonnes d'aspartame chaque année.
Depuis sa première mise sur le marché en 1974 aux Etats-Unis, l'aspartame n'a pas cessé de susciter inquiétudes et polémiques. Dont récemment encore dans les colonnes du prestigieux British Medical Journal. "Son innocuité a pourtant été démontrée", affirme son principal fabricant, l'entreprise Merisant, qui a conduit deux cents études spécifiques. De leur côté, les organismes nationaux et internationaux, dont le comité d'experts sur les additifs alimentaires de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), ont jusqu'ici confirmé l'absence d'effets toxiques et secondaires. Tous estiment désormais qu'une contre-expertise est nécessaire.
Comment fonctionne un édulcorant de synthèse ? Ce "faux sucre" chimique, censé nous éviter de grossir tout en répondant aux exigences d'un palais sucré, agit comme un leurre au niveau des capteurs de la bouche. Il envoie au cerveau la sensation du goût sucré, puis il disparaît pour ne plus laisser de trace dans l'estomac. Il n'apporte donc pas de calories et n'attaque pas les dents.
UNE SÉCRÉTION D'INSULINE
Si l'aspartame ne fait pas maigrir, il peut dans certains cas empêcher de grossir. Notamment quand certains enfants en surpoids ne peuvent se passer de boissons gazeuses et en consomment plus de deux litres par jour (un peu plus d'une bouteille). Pour le reste, les substituts chimiques au sucre ont le désavantage de déclencher une sécrétion d'insuline qui favorise le stockage des aliments consommés au même moment et risque de freiner la combustion des graisses quand les édulcorants sont consommés entre les repas. Surtout, "ils perpétuent voire accentuent l'attirance pour le sucré et perturbent les mécanismes naturels du choix des aliments", écrit le docteur Jacques Fricker, médecin nutritionniste à l'hôpital Bichat dans son livre Manger pour bien maigrir (Odile Jacob, 2005, 234 p., 14,25 ¤).
Mieux vaut savoir aussi qu'un produit vendu comme étant "allégé en sucre" n'est pas forcément synonyme de moins de calories. Les industriels de l'alimentaire qui allègent leurs produits sont souvent contraints, pour éviter, par exemple, qu'un biscuit parte en miettes, d'ajouter des graisses à chaque fois qu'ils diminuent le sucre. Ainsi, s'il existe une différence réelle de 60 calories (soit l'équivalent d'un yaourt nature) entre une tablette de chocolat au lait Poulain ("Un amour de lait") et son équivalent ("Ligne gourmande Poulain"), les biscuits P'tit Déj chocolat céréales (Lu) "allégés en sucre" n'ont, eux, que 3 calories de moins (220 calories pour 50 grammes) que leur équivalent "normal" (223 calories pour 50 grammes).
Enfin, reste l'épineuse question de la nocivité des doses. Actuellement, la quantité acceptable de l'aspartame pour l'homme a été fixée par l'Organisation mondiale pour la santé (OMS) à 40 milligrammes par kilogramme de poids corporel par jour. Cette mesure est purement théorique. Aucun consommateur n'est, en effet, à même de mesurer la quantité exacte d'édulcorant qu'il avale quotidiennement puisque cette information n'est pas indiquée sur les emballages des produits alimentaires. Pas plus qu'il n'existe, d'ailleurs, de distinguo entre les quantités utilisées pour les aliments destinés aux enfants et ceux destinés aux adultes...
Florence Amalou
Article paru dans l'édition du 14.12.05 Le Monde
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