La Food and Drug Administration vient d'interdire, aux Etats-Unis, 19 principes actifs présents dans une vaste majorité de savons antibactériens. En France, pourtant, certains de ces produits sont encore commercialisés sans que des analyses aient été menées
Incapables de prouver leur efficacité et leur innocuité sur le long terme, dix-neuf principes actifs employés dans les savons antibactériens ont été interdits de commercialisation aux Etats-Unis. La vente de près de 2 000 produits serait ainsi affectée par la décision de l’agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux, la Food and Drug Administration (FDA). Parmi les principes actifs pris pour cible, le triclosan, qui est soupçonné d’être un perturbateur endocrinien, mais que l’on retrouve pourtant dans 51 produits pharmaceutiques en France. D'autres sont également en vente sur notre territoire sans qu’une analyse de leurs risques potentiels n’ait été menée au préalable.
Sur le marché sans avoir été testés
Il existe de nombreux types de biocides (littéralement, des “tueurs de vie”) et ils peuvent être employés à des fins très diverses, allant de la désinfection des blessures à l’embaumement des animaux. Parmi les substances qui les composent, certaines inquiètent. C’est notamment le cas du triclosan, que l’on soupçonne d’être un perturbateur endocrinien, un agent à l’origine de dérèglements physiologiques et qui peut altérer les facultés de reproduction. Ce produit se retrouve pourtant parmi 51 articles commercialisés en France, d’après la base de recherche publique Simmbad du ministère de l'environnement. On le retrouve notamment dans les gels hydroalcooliques qui ne sont pas concernés par la réglementation américaine, qui va entreprendre des analyses plus poussées à leur sujet. Si des agences de contrôle françaises sont chargées de mener des études quant aux dangers du triclosan, la réglementation, elle, est européenne. En 2014, la Commission européenne a produit une réglementation visant à limiter l’usage de ce biocide. De fait, les risques potentiels d’un certain nombre de biocides actuellement sur le marché n’ont pas encore été évalués à l’échelle nationale, nous affirme Judith Najar, de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (ANSES). Le triclosan est donc autorisé dans les pays de l’Union Européenne à hauteur de 0,3% pour les dentifrices, savons pour les mains et le corps, et produits pour le visage notamment, et jusqu’à 0,2% pour les bains de bouche.
Plus de mal que de bien sur le long terme
A compter de l’annonce divulguée le 2 septembre 2016 par la FDA, les industriels ont un an pour retirer du marché américain - ou modifier - les produits qui ne correspondent plus aux normes. Depuis le projet de réglementation émis en 2013, ils sont toutefois un certain nombre à avoir déjà suspendu la production d'articles contenant les principes actifs en question. Le triclosan est présent dans 93% des savons vendus antibactériens aux Etats-Unis, d'après la FDA. En réponse à des commentaires de représentants de l’industrie, la FDA a repoussé son jugement d’un an pour trois autres principes actifs, pour qui de nouveaux tests seront nécessaires. Cette interdiction, toutefois, ne concerne pour l’instant que les savons vendus sans prescription aux consommateurs, et pas les désinfectants pour mains (ni d’autres produits antibactériens) utilisés dans les hôpitaux ou centres médicaux.
Depuis l’initiation du projet de légifération, en 2013, divers principes actifs contenus dans des antiseptiques ont été analysés. Cependant, les producteurs d’antiseptiques n’ont pas réussi à prouver - de manière assez satisfaisante en tout cas - que les produits sont sans effet néfaste pour la santé sur le long terme, et ne peuvent donc pas rentrer dans la catégorie “Généralement Reconnu comme Sûr et Efficace” (GRAS/GRAE en anglais). Le risque potentiel serait, outre les perturbations hormonales sus-citées, une résistance bactérienne aux principes actifs dont on abuse. Encore faut-il que ces derniers soient efficaces. Et jusqu'alors rien n’est parvenu à prouver que les savons antibactériens étaient plus efficaces qu’un savon traditionnel et de l’eau, qu’ils ont pourtant eu tendance à remplacer aux Etats-Unis. Les études sur le sujet suggèrent d’ailleurs plutôt l’inverse : c’est ce qu’avaient démontré des chercheurs coréens en 2015. “Des millions de consommateurs aux Etats-Unis utilisent des savons antibactériens pour se laver les mains ou le corps”, commentaient-ils alors. Janet Woodcock, directeur du centre recherche et d’évaluation de la FDA (CDER), fait à présent écho à ces conclusions : “Les consommateurs peuvent croire que les savons antibactériens sont plus efficaces pour prévenir la propagation des germes, mais nous n’avons aucune preuve scientifique qu’ils soient meilleurs” que les produits traditionnels. “En fait, on pense que les ingrédients antibactériens font plus de mal que de bien sur le long terme”.
En conclusion de son communiqué, la Food and Drug Administration rappelait, encore une fois, que la clef du combat contre la propagation des bactéries réside dans un changement de comportement : laver, souvent, avec un savon, et rincer à l’eau. Dans le cas - extrême - où vous n’ayez pas de savon (ou d’eau) sous la main, le Centre américain pour le Contrôle et la Prévention des Maladies (CDC) recommande d’utiliser une solution contenant au moins 60% d’alcool.
Sciences et Avenir
Incapables de prouver leur efficacité et leur innocuité sur le long terme, dix-neuf principes actifs employés dans les savons antibactériens ont été interdits de commercialisation aux Etats-Unis. La vente de près de 2 000 produits serait ainsi affectée par la décision de l’agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux, la Food and Drug Administration (FDA). Parmi les principes actifs pris pour cible, le triclosan, qui est soupçonné d’être un perturbateur endocrinien, mais que l’on retrouve pourtant dans 51 produits pharmaceutiques en France. D'autres sont également en vente sur notre territoire sans qu’une analyse de leurs risques potentiels n’ait été menée au préalable.
Sur le marché sans avoir été testés
Il existe de nombreux types de biocides (littéralement, des “tueurs de vie”) et ils peuvent être employés à des fins très diverses, allant de la désinfection des blessures à l’embaumement des animaux. Parmi les substances qui les composent, certaines inquiètent. C’est notamment le cas du triclosan, que l’on soupçonne d’être un perturbateur endocrinien, un agent à l’origine de dérèglements physiologiques et qui peut altérer les facultés de reproduction. Ce produit se retrouve pourtant parmi 51 articles commercialisés en France, d’après la base de recherche publique Simmbad du ministère de l'environnement. On le retrouve notamment dans les gels hydroalcooliques qui ne sont pas concernés par la réglementation américaine, qui va entreprendre des analyses plus poussées à leur sujet. Si des agences de contrôle françaises sont chargées de mener des études quant aux dangers du triclosan, la réglementation, elle, est européenne. En 2014, la Commission européenne a produit une réglementation visant à limiter l’usage de ce biocide. De fait, les risques potentiels d’un certain nombre de biocides actuellement sur le marché n’ont pas encore été évalués à l’échelle nationale, nous affirme Judith Najar, de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (ANSES). Le triclosan est donc autorisé dans les pays de l’Union Européenne à hauteur de 0,3% pour les dentifrices, savons pour les mains et le corps, et produits pour le visage notamment, et jusqu’à 0,2% pour les bains de bouche.
Plus de mal que de bien sur le long terme
A compter de l’annonce divulguée le 2 septembre 2016 par la FDA, les industriels ont un an pour retirer du marché américain - ou modifier - les produits qui ne correspondent plus aux normes. Depuis le projet de réglementation émis en 2013, ils sont toutefois un certain nombre à avoir déjà suspendu la production d'articles contenant les principes actifs en question. Le triclosan est présent dans 93% des savons vendus antibactériens aux Etats-Unis, d'après la FDA. En réponse à des commentaires de représentants de l’industrie, la FDA a repoussé son jugement d’un an pour trois autres principes actifs, pour qui de nouveaux tests seront nécessaires. Cette interdiction, toutefois, ne concerne pour l’instant que les savons vendus sans prescription aux consommateurs, et pas les désinfectants pour mains (ni d’autres produits antibactériens) utilisés dans les hôpitaux ou centres médicaux.
Depuis l’initiation du projet de légifération, en 2013, divers principes actifs contenus dans des antiseptiques ont été analysés. Cependant, les producteurs d’antiseptiques n’ont pas réussi à prouver - de manière assez satisfaisante en tout cas - que les produits sont sans effet néfaste pour la santé sur le long terme, et ne peuvent donc pas rentrer dans la catégorie “Généralement Reconnu comme Sûr et Efficace” (GRAS/GRAE en anglais). Le risque potentiel serait, outre les perturbations hormonales sus-citées, une résistance bactérienne aux principes actifs dont on abuse. Encore faut-il que ces derniers soient efficaces. Et jusqu'alors rien n’est parvenu à prouver que les savons antibactériens étaient plus efficaces qu’un savon traditionnel et de l’eau, qu’ils ont pourtant eu tendance à remplacer aux Etats-Unis. Les études sur le sujet suggèrent d’ailleurs plutôt l’inverse : c’est ce qu’avaient démontré des chercheurs coréens en 2015. “Des millions de consommateurs aux Etats-Unis utilisent des savons antibactériens pour se laver les mains ou le corps”, commentaient-ils alors. Janet Woodcock, directeur du centre recherche et d’évaluation de la FDA (CDER), fait à présent écho à ces conclusions : “Les consommateurs peuvent croire que les savons antibactériens sont plus efficaces pour prévenir la propagation des germes, mais nous n’avons aucune preuve scientifique qu’ils soient meilleurs” que les produits traditionnels. “En fait, on pense que les ingrédients antibactériens font plus de mal que de bien sur le long terme”.
En conclusion de son communiqué, la Food and Drug Administration rappelait, encore une fois, que la clef du combat contre la propagation des bactéries réside dans un changement de comportement : laver, souvent, avec un savon, et rincer à l’eau. Dans le cas - extrême - où vous n’ayez pas de savon (ou d’eau) sous la main, le Centre américain pour le Contrôle et la Prévention des Maladies (CDC) recommande d’utiliser une solution contenant au moins 60% d’alcool.
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