Le prix Nobel de chimie 2005 a été décerné mercredi au français Yves Chauvin ainsi qu'aux américains Robert H. Grubbs et Richard R. Schrock pour leurs travaux sur «le développement de la métathèse en synthèse organique».
Cela faisait huit ans qu’un scientifique français n’avait pas reçu un prix Nobel. Le dernier lauréat en date était Claude Cohen-Tannoudji, prix Nobel de physique en 1997 conjointement avec Steven Chu et Williams Phillips.
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«Je suis plutôt embarrassé, parce que je n'ai pas le vrai profil.» Comme l'ont confirmé depuis plusieurs de ses anciens collaborateurs, Yves Chauvin, le nouveau Nobel de Chimie (partagé en parts égales avec les américains Robert Grubbs et Richard Shrock) est un homme modeste. Interrogé hier par la radio suédoise SR, le chimiste a rappelé son âge, 75 ans, et insisté sur le fait que ses travaux couronnés «remontent à quarante années».
Une fois n'est pas coutume, en tous cas pour les lauréats français du Nobel, Yves Chauvin ne vient pas des pépinières scientifiques habituelles. Car il a fait l'essentiel de sa carrière à l'Institut Français du pétrole (IFP), d'obédience plutôt industrielle. Il a pourtant jeté les bases théoriques de la «metathèse», une technique de synthèse de produits dérivés du pétrole connue depuis les années 50, mais qui n'a pris son essor qu'après ses travaux, mis ensuite en musique par ses co-lauréats Grubbs et Shrock, qui ont élaboré 20 ans plus tard toute une famille de catalyseurs (1) pour ces réactions chimiques. «Une fois le pétrole craqué et distillé, les industriels récupèrent toute une famille de molécules en proportions qui ne correspondent pas forcément à la demande du marché, explique Daniel Cruypelinck, de l'IFP, qui travailla 23 ans aux côtés d'Yves Chauvin. La metathèse permet de corriger cela, par exemple en produisant du propylène à partir de butène et d'éthylène. Elle est utilisée aussi pour la production de plastique, dans l'industrie chimique et parmaceutique.» Un dernier point qui a largement été souligné par le jury du Nobel de chimie.
Sur l'homme aujourd'hui couronné, on ne saura pas grand chose. Ses anciens collaborateurs sont aussi discrets que leur ancien patron. «Ce que je peux vous dire c'est qu'il vouait une véritable passion à la recherche fondamentale, résume Cruypelinck. Il a toujours refusé les honneurs de postes à responsabilité pour poursuivre ses recherches. Il est resté dans le même bureau pendant plus de quarante ans…».
Yves Chauvin a toujours su, selon son ancien technicien devenu responsable de la sécurité et des risques à l'IFP, faire ce qu'il fallait pour donner des résultats qui satisfaisaient la direction, tout en se ménageant des plages pour poursuivre ses propres recherches, théoriques, dès qu'il en avait la possibilité. Comme Cruypelinck, Hélène Olivier-Bourbigou, qui a repris le groupe de Chauvin à l'IFP, et qui fut aussi l'une de ses thésardes, de 1985 à 1988, décrit un Yves Chauvin «d'une rigueur scientifique extrême, d'un grand enthousiasme et toujours prêt à aider». Elle ajoute qu'«il cherchait toujours à susciter la critique, même de la part de ses étudiants, pour mieux remettre en question ses idées.» Un trait de caractère qui n'est pas si courant chez les patrons de labos. «J'étais plus heureux quand j'ai fait la découverte qu'aujourd'hui pour l'annonce du prix», a déclaré hier Yves Chauvin. Il a déjà fait savoir qu'il ne se rendrait pas le huit décembre à Stockholm pour y recevoir son prix. Quand on vous dit qu'il est discret…
(1) le catalyseur accélère les réactions chimiques. On utilise ainsi du platine, du palladium et du rhodium dans les pots d'échappement pour transformer des gaz toxiques en produits qui le sont moins.
Source: Liberation
Définition de la métathèse
Cela faisait huit ans qu’un scientifique français n’avait pas reçu un prix Nobel. Le dernier lauréat en date était Claude Cohen-Tannoudji, prix Nobel de physique en 1997 conjointement avec Steven Chu et Williams Phillips.
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«Je suis plutôt embarrassé, parce que je n'ai pas le vrai profil.» Comme l'ont confirmé depuis plusieurs de ses anciens collaborateurs, Yves Chauvin, le nouveau Nobel de Chimie (partagé en parts égales avec les américains Robert Grubbs et Richard Shrock) est un homme modeste. Interrogé hier par la radio suédoise SR, le chimiste a rappelé son âge, 75 ans, et insisté sur le fait que ses travaux couronnés «remontent à quarante années».
Une fois n'est pas coutume, en tous cas pour les lauréats français du Nobel, Yves Chauvin ne vient pas des pépinières scientifiques habituelles. Car il a fait l'essentiel de sa carrière à l'Institut Français du pétrole (IFP), d'obédience plutôt industrielle. Il a pourtant jeté les bases théoriques de la «metathèse», une technique de synthèse de produits dérivés du pétrole connue depuis les années 50, mais qui n'a pris son essor qu'après ses travaux, mis ensuite en musique par ses co-lauréats Grubbs et Shrock, qui ont élaboré 20 ans plus tard toute une famille de catalyseurs (1) pour ces réactions chimiques. «Une fois le pétrole craqué et distillé, les industriels récupèrent toute une famille de molécules en proportions qui ne correspondent pas forcément à la demande du marché, explique Daniel Cruypelinck, de l'IFP, qui travailla 23 ans aux côtés d'Yves Chauvin. La metathèse permet de corriger cela, par exemple en produisant du propylène à partir de butène et d'éthylène. Elle est utilisée aussi pour la production de plastique, dans l'industrie chimique et parmaceutique.» Un dernier point qui a largement été souligné par le jury du Nobel de chimie.
Sur l'homme aujourd'hui couronné, on ne saura pas grand chose. Ses anciens collaborateurs sont aussi discrets que leur ancien patron. «Ce que je peux vous dire c'est qu'il vouait une véritable passion à la recherche fondamentale, résume Cruypelinck. Il a toujours refusé les honneurs de postes à responsabilité pour poursuivre ses recherches. Il est resté dans le même bureau pendant plus de quarante ans…».
Yves Chauvin a toujours su, selon son ancien technicien devenu responsable de la sécurité et des risques à l'IFP, faire ce qu'il fallait pour donner des résultats qui satisfaisaient la direction, tout en se ménageant des plages pour poursuivre ses propres recherches, théoriques, dès qu'il en avait la possibilité. Comme Cruypelinck, Hélène Olivier-Bourbigou, qui a repris le groupe de Chauvin à l'IFP, et qui fut aussi l'une de ses thésardes, de 1985 à 1988, décrit un Yves Chauvin «d'une rigueur scientifique extrême, d'un grand enthousiasme et toujours prêt à aider». Elle ajoute qu'«il cherchait toujours à susciter la critique, même de la part de ses étudiants, pour mieux remettre en question ses idées.» Un trait de caractère qui n'est pas si courant chez les patrons de labos. «J'étais plus heureux quand j'ai fait la découverte qu'aujourd'hui pour l'annonce du prix», a déclaré hier Yves Chauvin. Il a déjà fait savoir qu'il ne se rendrait pas le huit décembre à Stockholm pour y recevoir son prix. Quand on vous dit qu'il est discret…
(1) le catalyseur accélère les réactions chimiques. On utilise ainsi du platine, du palladium et du rhodium dans les pots d'échappement pour transformer des gaz toxiques en produits qui le sont moins.
Source: Liberation
Définition de la métathèse

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