De la vision
par El-Guellil
C'est l'histoire d'un jeune homme qui a acheté sa première voiture. Bien sûr, il se voyait obligé d'assurer les déplacements de sa petite famille, d'accompagner les enfants à l'école... par El-Guellil
Sa mère et son épouse commençaient, depuis l'acquisition du véhicule, à découvrir que la famille était nombreuse et qu'au moindre petit pépin de l'un ou de l'autre, il fallait marquer sa présence. «Iloumouna, mon fils. Iloumouna. Ils nous en voudraient. Avant, on avait la «sebba», le «because». «Il fallait dire que nos déplacements n'étaient pas simples, que ma santé ne me permettait pas de prendre un bus et que ton épouse était obligée de rester avec moi. Mais maintenant, l'automobile nous a supprimé toutes ces échappatoires».
Donc, pour un oui ou pour un non, il fallait prendre sa mère et son épouse pour une ziara. C'est la tradition. Il ne peut pas en faire l'impasse. C'est sa mère qui s'installait près du chauffeur et son épouse sur le siège arrière. La tradition voulait que la maman arrive la première sur tous les lieux. Donc s'installer devant répondait à ce besoin culturel. La mère devant, l'épouse derrière. L'épouse derrière, la mère devant, c'est comme ça qu'ils ont fait les vingt kilomètres qui les séparaient du hammam. Il les a attendues. La bagnole garée pile, face au bain maure.
Dans le hammam, son épouse a été travaillée au corps à corps. Des vérités nues. « S'il te met toujours derrière, c'est qu'il n'a aucune considération pour toi». «C'est toi qui devrais t'imposer, c'est toi la mère de ses enfants». J'en passe et des meilleures. Fin de bain. Sortie du hammam, sa femme se précipite sur la portière avant et prend place à ses côtés. Il la regarde sans mot dire. Sa mère s'installe derrière, sans maudire. Problème, grand problème ! Les vingt kilomètres du retour, il le pressentait, allaient se transformer en enfer. Que faire ?
Comme tout Algérien ressemblant à ses dirigeants, il décide de faire les 20 kilomètres du retour en «marche arrière». Ainsi, tout le monde est content, sauf le bon sens.
Le Quotidien d'Oran .
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