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Femmes d'émigrés: mariées à des fantômes

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  • Femmes d'émigrés: mariées à des fantômes

    Les hommes partis d'Afrique laissent souvent une famille au pays. À Louga, dans le nord du Sénégal,les épouses esseulées, particulièrement nombreuses, vivent parfois un calvaire.

    Deux ans, six ans, voire dix ans que ces femmes n'ont pas vu leurs maris émigrés. Dépourvus de papiers, beaucoup de ces hommes ne peuvent prendre le risque de rentrer chez eux. Ici, un gamin de 3 ans n'a pas encore rencontré son père. Là, une adolescente de 13 ans a été mariée de force, par sa tante, à un modou-modou, un émigré sénégalais. Parce qu'épouser un émigré c'est, croit-elle, des revenus assurés.
    D'autres se sont mariées par amour. Pas de regrets, mais une absence pesante, comblée par les coups de fil quotidiens et les cassettes vidéos envoyées en Europe. D'autres encore ont été choisies sur photos. À Paris, à Milan, un Sénégalais les a trouvées belles sur ce cliché d'un baptême, envoyé à l'oncle, qui habite le même appartement.
    Infanticide
    Presque toutes se sont unies à distance. Pas besoin de la présence des deux époux pour procéder au mariage religieux musulman. S'ensuivent de plus en plus de divorces. « Les trois quarts de ces mariages sont des mariages forcés. À 25 ans, elles se rendent compte que ce n'est pas la vie qu'elles voulaient », explique le capitaine Moustapha Ndour, commandant de la gendarmerie de Louga.

    Dans cette ville, à 200 km au nord de Dakar, la population est composée à 80 % de femmes. Le tiers des hommes est parti « voyager à l'extérieur ». Six jeunes sur dix sont au chômage.
    Se marier à un modou-modou est donc bien vu. « C'est un phénomène social porté par le groupe, explique Fatou Sarr Sow, sociologue. Dans la région du Fouta (nord du Sénégal), les hommes se plaignent de ne pas trouver de femmes car ils ne sont pas des émigrés. »
    Dans les rues de Louga, beaucoup de belles maisons. De grosses voitures, de chics intérieurs aussi. Mais c'est les larmes aux yeux que ces femmes racontent leurs histoires, dans une chambre ou un salon, à l'abri des regards et des rumeurs. Certaines évoquent aussi les pressions de la belle-famille, qui souvent confisque une partie de l'argent envoyé par le mari.
    Dans cette région, on compte beaucoup d'infanticides. Six cas connus de 2008 à aujourd'hui. « Les maris laissent leurs femmes très jeunes, pendant très longtemps. Parfois ces femmes partent s'installer ailleurs, accouchent, tuent leurs bébés puis reviennent », rapporte le capitaine Ndour. Garder un enfant hors mariage est considéré comme une honte par la famille.


    Aurélie FONTAINE. (Ouest - France)
    " Celui qui passe devant une glace sans se reconnaitre, est capable de se calomnier sans s'en apercevoir "
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