"3ami 3mar" était un homme sérieux et travailleur. Petit de taille, plutôt maigrichon, la quarantaine d’âge, il sort tôt le matin pour ne revenir qu’à l’approche du maghreb. C’est la veille que sa femme, "Nna 3dada" (chez nous, 3dada est la déformation de saâdia ), lui prépare le déjeuner et le café du lendemain. Son travail, c’est dans ses champs. Chaque saison nécessite des travaux particuliers. Je ne m’attarde pas pour les énumérer.
Ainsi, "3ami 3mar" est constamment absent du village. Il ne se repose que le mercredi, parce que c’est le jour du marché hebdomadaire. Se reposer avais-je dit ? Plutôt s’éloigner simplement de ses champs, car pendant ce jour-là, "yets sewiq" c'est-à-dire qu’il va au marché hebdomadaire sur son âne bien entretenu, pour se ravitailler pour la semaine. Beaucoup de villageois le jalousent d’ailleurs pour cet âne si élégant et si bien dressé. "3ami 3mar" n’a pas voulu s’en séparer, même en contrepartie d’une somme d’argent alléchante.
Par ce résumé de son profil, je voulais faire comprendre que "3ami 3mar" appartient à ce genre de "ness mlah", "hadou hed rouhou". Sa femme, "Nna 3dada", aime son mari et, parce qu’elle l’aime, elle pense qu’elle a le devoir de le valoriser. Comment? En lui assurant une notoriété bien particulière, au village. Pour cela, elle propage dans son entourage que "3ami 3mar" est un dur, "wa3er", qu’il ne tolère aucune "d’sara". En moins d’un rien, il peut passer à l’action. "yekkath-yedrab". Je vous laisse le soin d’imaginer le reste.
La pub que faisait "Nna 3dada" a même dépassé les frontières de notre village. Pour l’anecdote, mon camarade de classe, Akli, qui habitait le village voisin, m’a parlé une fois de "3ami 3mar" qu’il n’a, pourtant, jamais vu. On lui a raconté qu’il était très grand, les pas de géant, des moustaches en forme de guidon, des sourcils noirs et très fournis, et et et, bref, un portrait d’un homme comme il n’y en a point dans notre localité.
Les adultes en rient de ces rumeurs, mais nous, enfants que nous étions et certaines femmes, nous les avions crues. A chaque fois que quelqu’un de nous croise "3ami 3mar", il change de direction, baisse la tête ou rentre chez lui, à la dérobade, craignant des représailles. On pensait que "bessah ikhewef"
.
Si je raconte cette anecdote, c’est pour illustrer que beaucoup amplifient la dimension des choses alors qu’elles sont minuscules. Les exemples sont nombreux. On colle des étiquettes, parfois bonnes et parfois mauvaises, à des personnes ou à des groupes de personnes alors qu’il n’en est rien. Un chat nredj3ou8 un tigre. Un nain nredj3ou8 un géant. Une sardine nredj3ou8a une baleine et une carpe un requin… et j’en passe. L’effet inverse est tout aussi vrai.
Chez nous, lorsqu’on veut évoquer quelque chose qui n’existe pas, on parle de "chikh l kanoun" parce que, dans les contes anciens, on dit que le "kanoun" est protégé par un "cheikh".
"3ami 3mar" est ainsi le "cheikh l kanoun" du monde de "Nna 3dada", tout comme chacun peut faire un "cheikh l kanoun" de son (sa) protégé(e) ou de son ennemi(e) ou rival(e), selon ses fantasmes.
Ainsi, "3ami 3mar" est constamment absent du village. Il ne se repose que le mercredi, parce que c’est le jour du marché hebdomadaire. Se reposer avais-je dit ? Plutôt s’éloigner simplement de ses champs, car pendant ce jour-là, "yets sewiq" c'est-à-dire qu’il va au marché hebdomadaire sur son âne bien entretenu, pour se ravitailler pour la semaine. Beaucoup de villageois le jalousent d’ailleurs pour cet âne si élégant et si bien dressé. "3ami 3mar" n’a pas voulu s’en séparer, même en contrepartie d’une somme d’argent alléchante.
Par ce résumé de son profil, je voulais faire comprendre que "3ami 3mar" appartient à ce genre de "ness mlah", "hadou hed rouhou". Sa femme, "Nna 3dada", aime son mari et, parce qu’elle l’aime, elle pense qu’elle a le devoir de le valoriser. Comment? En lui assurant une notoriété bien particulière, au village. Pour cela, elle propage dans son entourage que "3ami 3mar" est un dur, "wa3er", qu’il ne tolère aucune "d’sara". En moins d’un rien, il peut passer à l’action. "yekkath-yedrab". Je vous laisse le soin d’imaginer le reste.
La pub que faisait "Nna 3dada" a même dépassé les frontières de notre village. Pour l’anecdote, mon camarade de classe, Akli, qui habitait le village voisin, m’a parlé une fois de "3ami 3mar" qu’il n’a, pourtant, jamais vu. On lui a raconté qu’il était très grand, les pas de géant, des moustaches en forme de guidon, des sourcils noirs et très fournis, et et et, bref, un portrait d’un homme comme il n’y en a point dans notre localité.
Les adultes en rient de ces rumeurs, mais nous, enfants que nous étions et certaines femmes, nous les avions crues. A chaque fois que quelqu’un de nous croise "3ami 3mar", il change de direction, baisse la tête ou rentre chez lui, à la dérobade, craignant des représailles. On pensait que "bessah ikhewef"
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Si je raconte cette anecdote, c’est pour illustrer que beaucoup amplifient la dimension des choses alors qu’elles sont minuscules. Les exemples sont nombreux. On colle des étiquettes, parfois bonnes et parfois mauvaises, à des personnes ou à des groupes de personnes alors qu’il n’en est rien. Un chat nredj3ou8 un tigre. Un nain nredj3ou8 un géant. Une sardine nredj3ou8a une baleine et une carpe un requin… et j’en passe. L’effet inverse est tout aussi vrai.
Chez nous, lorsqu’on veut évoquer quelque chose qui n’existe pas, on parle de "chikh l kanoun" parce que, dans les contes anciens, on dit que le "kanoun" est protégé par un "cheikh".
"3ami 3mar" est ainsi le "cheikh l kanoun" du monde de "Nna 3dada", tout comme chacun peut faire un "cheikh l kanoun" de son (sa) protégé(e) ou de son ennemi(e) ou rival(e), selon ses fantasmes.

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