Arrêtés puis relâchés, une Algérienne et ses enfants vivent désormais cachés.
Nadjah, sauvée de l'expulsion grâce à une forte mobilisation
Par Olivier BERTRAND
QUOTIDIEN Libération: Mardi 10 octobre 2006 - 06:00
Il était 6 h 15 lorsque les policiers ont frappé. Francesco leur a ouvert. «Vous savez pourquoi on est là ?» lui ont-ils demandé. Le boulanger s'en doutait. Depuis quatre ans, Francesco vit avec une femme algérienne, à la santé fragile. Une mère de deux enfants qui se trouve en situation irrégulière. Nadjah remplissait pourtant les critères pour être régularisée cet été, dans le cadre de la circulaire Sarkozy. Elle a déposé un dossier, mais il a été rejeté. Et ces trois policiers étaient là, jeudi, pour la cueillir à l'aube, avec ses garçons de 11 et 8 ans.
Dès qu'ils sont repartis, Francesco a prévenu un adjoint au maire de Vaulx-en-Velin (Rhône), où ils habitent, près de Lyon. Celui-ci a alerté les enseignants de l'école des enfants, et une course contre la montre s'est engagée. Un réseau baptisé «Elèves Vaulx papiers» fédère les comités mis en place localement dans les établissements accueillant des enfants menacés.
«Mère indigne». Prévenus par l'adjoint, des enseignants ont rejoint immédiatement l'école Angelina-Courcelles. Une partie des instits sont partis vers l'aéroport Saint-Exupéry, avec des parents, des élus, et un texte rédigé à l'intention des passagers du vol dans lequel Nadjah serait embarquée. Devant la mobilisation, les autorités ont différé, puis tenté d'organiser discrètement l'expulsion. Nadjah et ses fils ont passé la nuit au centre de rétention de Saint-Exupéry. Vers 5 heures, le vendredi, des policiers sont dans la chambre. «On se lève et on s'habille», a lancé l'un d'eux. La mère a refusé, réclamé son avocate, et dit à ses enfants de ne pas s'habiller, afin de retarder le départ. Les policiers ont porté les deux garçons, puis l'un d'eux aurait lancé à la mère : «Maintenant, vous faites comme vous voulez. Si vous ne nous suivez pas, on les expulse seuls.» La famille a été conduite en fourgon vers l'aéroport de Marignane, à côté de Marseille. Nadjah raconte qu'elle a crié d'un bout à l'autre, en montrant ses menottes aux automobilistes. Elle en garde les poignets bleuis. A l'avant, ses garçons restaient silencieux, et l'un des policiers, excédé par ses cris, a lâché : «Regardez vos enfants. Ils sont sages et, vous, vous criez. Vous êtes une mère indigne.»
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Nadjah, sauvée de l'expulsion grâce à une forte mobilisation
Par Olivier BERTRAND
QUOTIDIEN Libération: Mardi 10 octobre 2006 - 06:00
Il était 6 h 15 lorsque les policiers ont frappé. Francesco leur a ouvert. «Vous savez pourquoi on est là ?» lui ont-ils demandé. Le boulanger s'en doutait. Depuis quatre ans, Francesco vit avec une femme algérienne, à la santé fragile. Une mère de deux enfants qui se trouve en situation irrégulière. Nadjah remplissait pourtant les critères pour être régularisée cet été, dans le cadre de la circulaire Sarkozy. Elle a déposé un dossier, mais il a été rejeté. Et ces trois policiers étaient là, jeudi, pour la cueillir à l'aube, avec ses garçons de 11 et 8 ans.
Dès qu'ils sont repartis, Francesco a prévenu un adjoint au maire de Vaulx-en-Velin (Rhône), où ils habitent, près de Lyon. Celui-ci a alerté les enseignants de l'école des enfants, et une course contre la montre s'est engagée. Un réseau baptisé «Elèves Vaulx papiers» fédère les comités mis en place localement dans les établissements accueillant des enfants menacés.
«Mère indigne». Prévenus par l'adjoint, des enseignants ont rejoint immédiatement l'école Angelina-Courcelles. Une partie des instits sont partis vers l'aéroport Saint-Exupéry, avec des parents, des élus, et un texte rédigé à l'intention des passagers du vol dans lequel Nadjah serait embarquée. Devant la mobilisation, les autorités ont différé, puis tenté d'organiser discrètement l'expulsion. Nadjah et ses fils ont passé la nuit au centre de rétention de Saint-Exupéry. Vers 5 heures, le vendredi, des policiers sont dans la chambre. «On se lève et on s'habille», a lancé l'un d'eux. La mère a refusé, réclamé son avocate, et dit à ses enfants de ne pas s'habiller, afin de retarder le départ. Les policiers ont porté les deux garçons, puis l'un d'eux aurait lancé à la mère : «Maintenant, vous faites comme vous voulez. Si vous ne nous suivez pas, on les expulse seuls.» La famille a été conduite en fourgon vers l'aéroport de Marignane, à côté de Marseille. Nadjah raconte qu'elle a crié d'un bout à l'autre, en montrant ses menottes aux automobilistes. Elle en garde les poignets bleuis. A l'avant, ses garçons restaient silencieux, et l'un des policiers, excédé par ses cris, a lâché : «Regardez vos enfants. Ils sont sages et, vous, vous criez. Vous êtes une mère indigne.»
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