Pas un seul mot, fût-il en chinois. Y'est où le président les boys ? Y'est où Boutef. Il a rien à dire à propos d'Alger. Ben, nous autres du forum-algérie, on va lui dire deux mots à propos d'alger. Mais d'abord notre Algérie qu'il nous a bricolé. Et qui est aussi son Algérie. L'algérie est une république étonnante où, grâce à la réconciliation nationale, les ennemis se croisent dans les mêmes ruelles, pour aller prier en même temps, dans les mêmes lieux, le même Dieu, de leur accorder une république différente. Islamique pour les uns. Démocratique pour les autres.
Alger monsieur le président, c'est l'Algérie à petite échelle. Alger est une ville bouleversante. Beaucoup de nos frères et soeurs y furent tués par des bombes. C'est à Alger qu'est née votre concorde civile. Est née avec elle l'espérance. Depuis 1999, votre palais, vos partis politiques, les militaires, les mosquées, wa haloumma jâr, et les pauvres citoyens s'adossent les uns aux autres dans la commune espérance que la paix soit sur la l'Algérie.
Et qu'est-ce qu'on a 8 ans plus tard ? Des bombes monsieur le président.
Et où ça ? À Alger justement.
Alger est une ville où l'on ne peut pas se promener innocemment. À tous les pas, quelque chose nous dit que 8 ans plus tard, l'espérance est un rêve fatigué.
Et les algérois ? Que ressentent-ils ? Ouuff, je ne sais pas monsieur le président, je suis comme la plupart des gens du forum, à 10000 km de là. Mais on peut imaginer... Mettons qu'on est jeudi soir, une journée après les explosions. Vous voyez ces jeunes-là, assis sur les marches, à l'entrée de ce batiment ? Voulez savoir ce qu'ils ressentent ? Posons leur quelques questions.
- Bonsoir les boys, vous habitez ici ?
- Oui.
- Vous habitrez très proche du palais de Boutef, vous êtes ok ?
- Hier, tout les étages ont levé. Les vitres ont volé en éclats. Et nous, on n'est pas en très bon état non plus. Personne n'a été blessé ici, mais c'est en dedans. Le choc. On ne dors pas. On est comme des zombies...
- Y'a personne dans la rue. Et il est à peine 21h. Vous, les habitants de cette rue, avez-vous peur de vous promener ?
- Non, pas peur kho, ça n'empêche pas l'angoisse de monter...
Ils sont 5 jeunes monsieur le président. Celui qui semble le plus intellectuel du goupe, ajoute : " Le truc avec la peur, c'est de la remplacer par une autre peur, plus petite, plus négociable. Par exemple, à l'instant même, j'ai très peur que l' USMA perde demain face à la JSK. Très très peur. J'ai mis tout mon argent sur l'USMA "... Non, c'est pas drôle monsieur le président. On est dans le coeur d'Alger, l'usma et la jsk, c'est pour aller aussi dans le coeur des gens d'Alger. C'est facile, remarquez. Les algérois, particulièrement les jeunes algérois ( 70 pour cent ), sont des gens très ouverts sur l'horizon, même s'il est bouché, l'horizon. Ils adorent parler, s'engueuler. Ils ont l'esprit très vif, sont aussi très scolarisés. Et ils ont perdu confiance en votre gouvernement, monsieur le président. Et alors, qui vaincra ces terroristes ? Celui qui semble le moins intellectuel du groupe, répond : Dieu !
Non, je ne suis pas d'accord. Pas Dieu ! Dites-moi pas des affaires comme ça, les boys !... Si Dieu nous aime seulement la moitié de ce qu'on raconte qu'il nous aime, il doit avoir froid jusque dans le fond de ses os en ce moment...
Non, c'est pas drôle, monsieur le président. Les algérois ne disent pas qu'il ont peur. Les algérois croient qu'ils y sont mieux protégés devant chez eux, en groupe. Ils s'y sentent en plus nombreuse compagnie. Partager sa peur c'est en avoir moins, enfin, je le crois aussi... Non, il y'a pas de jeunes algéroises nulle part à 21h, j'aurais aimé vous promener dans leur coeur aussi, savez, nos petites soeurs en hidjab, cette espèce de voile qui leur cadre le visage en leur donnant l'air de madones, mais je ne suis pas sûr qu'elles nous auraient raconté des choses, leur papa veut pas... Il est jeudi 21h à Alger, monsieur le président, 1ère journée après les bombes, la rue est vide. Totalement. Pas personne. Pas une seule voiture. Les feux de circulation changent pour personne. Sorti de nulle part, un chien traverse sur le feu rouge... Ce soir, toute la ville attend. Elle ne dort pas, je le sais. Je l'entends bouger. Se tourner. Et se retourner. Elle a tiré sur elle la couverture noire de l'angoisse...
Toute la ville attend. Gros coquillage recroquevillé sur lui-même au bord de la mer. Mais elle attend quoi, la ville ? Vous, monsieur le président. Son brave homme de président, je crois. Tout petit. Tout doux. Un peu dépassé ? Ah peut-être, sinon, pourquoi pas un seul mot, fût-il en chinois ? Y'est où le président, monsieur le président ? Silence total. Secret d'État. Peut-être pas, le peuple spécule, peut-être qu'il a même pas entendu les bombes, cloitré dans un club privé, pour un party de 48 heures, où, cheb Mami chante tellement fort qu'il n'a rien entendu...
So, je continue ma marche dans Alger, avec vous. Une grande ville comme je les aime, Alger la blanche, exubérante, bordélique, un peu sale. Une ville qui parle, qui rit, s'appelle, s'engueule, s'engueule tout le temps, s'obstine sur tout, à l'image du pays, ce foutu pays, mon pays, votre pays monsieur le président, qui me fait craquer dans la tête. M'excite. Me contrarie. J'aime ses gens. Salam, salam. Kabyles, Chaouis, M'zabs, Arabes, Touaregs. Salam, salam. J'aime toutes ses villes. Mais je n'aime pas son odeur de mort en suspension dans l'air. Je ne parle pas de la mort qu'apportent les bombes. Je ne parle même pas d'une odeur organique. Je parle d'une odeur kamisse, Une odeur longue barbe noire, aussi noir que la haine qui l'habite, islamiste et fanatique. Je parle de l'envers de l'amour.
Pas un seul mot, fût-il en chinois ? Pourtant si. On repassait encore hier soir, à la télé déalna, cette courte entrevue dans le palais, je crois, de votre premier ministre, mes excuses Far-Solitaire, je veux dire votre premier sinistre, qui disait : «Euh non, tout va bien, soyons calmes mes amis, nous maîtrisons la situation, ce ne sont que des résidus et gnagnagna...». C'est du chinois. Traduits en arabe et en kabyle, ces propos font dire aux algériens qu'il y a pire qu'avoir des terroristes pour ennemis, il y'a avoir le premier ministre pour ami.
Je suis triste, monsieur le président. Mais ça ne m'empêche pas d'avoir faim. So, je me dirige right now, au petit resto grec. Un Souvlaki pour ce soir... À plus tard.
Alger monsieur le président, c'est l'Algérie à petite échelle. Alger est une ville bouleversante. Beaucoup de nos frères et soeurs y furent tués par des bombes. C'est à Alger qu'est née votre concorde civile. Est née avec elle l'espérance. Depuis 1999, votre palais, vos partis politiques, les militaires, les mosquées, wa haloumma jâr, et les pauvres citoyens s'adossent les uns aux autres dans la commune espérance que la paix soit sur la l'Algérie.
Et qu'est-ce qu'on a 8 ans plus tard ? Des bombes monsieur le président.
Et où ça ? À Alger justement.
Alger est une ville où l'on ne peut pas se promener innocemment. À tous les pas, quelque chose nous dit que 8 ans plus tard, l'espérance est un rêve fatigué.
Et les algérois ? Que ressentent-ils ? Ouuff, je ne sais pas monsieur le président, je suis comme la plupart des gens du forum, à 10000 km de là. Mais on peut imaginer... Mettons qu'on est jeudi soir, une journée après les explosions. Vous voyez ces jeunes-là, assis sur les marches, à l'entrée de ce batiment ? Voulez savoir ce qu'ils ressentent ? Posons leur quelques questions.
- Bonsoir les boys, vous habitez ici ?
- Oui.
- Vous habitrez très proche du palais de Boutef, vous êtes ok ?
- Hier, tout les étages ont levé. Les vitres ont volé en éclats. Et nous, on n'est pas en très bon état non plus. Personne n'a été blessé ici, mais c'est en dedans. Le choc. On ne dors pas. On est comme des zombies...
- Y'a personne dans la rue. Et il est à peine 21h. Vous, les habitants de cette rue, avez-vous peur de vous promener ?
- Non, pas peur kho, ça n'empêche pas l'angoisse de monter...
Ils sont 5 jeunes monsieur le président. Celui qui semble le plus intellectuel du goupe, ajoute : " Le truc avec la peur, c'est de la remplacer par une autre peur, plus petite, plus négociable. Par exemple, à l'instant même, j'ai très peur que l' USMA perde demain face à la JSK. Très très peur. J'ai mis tout mon argent sur l'USMA "... Non, c'est pas drôle monsieur le président. On est dans le coeur d'Alger, l'usma et la jsk, c'est pour aller aussi dans le coeur des gens d'Alger. C'est facile, remarquez. Les algérois, particulièrement les jeunes algérois ( 70 pour cent ), sont des gens très ouverts sur l'horizon, même s'il est bouché, l'horizon. Ils adorent parler, s'engueuler. Ils ont l'esprit très vif, sont aussi très scolarisés. Et ils ont perdu confiance en votre gouvernement, monsieur le président. Et alors, qui vaincra ces terroristes ? Celui qui semble le moins intellectuel du groupe, répond : Dieu !
Non, je ne suis pas d'accord. Pas Dieu ! Dites-moi pas des affaires comme ça, les boys !... Si Dieu nous aime seulement la moitié de ce qu'on raconte qu'il nous aime, il doit avoir froid jusque dans le fond de ses os en ce moment...
Non, c'est pas drôle, monsieur le président. Les algérois ne disent pas qu'il ont peur. Les algérois croient qu'ils y sont mieux protégés devant chez eux, en groupe. Ils s'y sentent en plus nombreuse compagnie. Partager sa peur c'est en avoir moins, enfin, je le crois aussi... Non, il y'a pas de jeunes algéroises nulle part à 21h, j'aurais aimé vous promener dans leur coeur aussi, savez, nos petites soeurs en hidjab, cette espèce de voile qui leur cadre le visage en leur donnant l'air de madones, mais je ne suis pas sûr qu'elles nous auraient raconté des choses, leur papa veut pas... Il est jeudi 21h à Alger, monsieur le président, 1ère journée après les bombes, la rue est vide. Totalement. Pas personne. Pas une seule voiture. Les feux de circulation changent pour personne. Sorti de nulle part, un chien traverse sur le feu rouge... Ce soir, toute la ville attend. Elle ne dort pas, je le sais. Je l'entends bouger. Se tourner. Et se retourner. Elle a tiré sur elle la couverture noire de l'angoisse...
Toute la ville attend. Gros coquillage recroquevillé sur lui-même au bord de la mer. Mais elle attend quoi, la ville ? Vous, monsieur le président. Son brave homme de président, je crois. Tout petit. Tout doux. Un peu dépassé ? Ah peut-être, sinon, pourquoi pas un seul mot, fût-il en chinois ? Y'est où le président, monsieur le président ? Silence total. Secret d'État. Peut-être pas, le peuple spécule, peut-être qu'il a même pas entendu les bombes, cloitré dans un club privé, pour un party de 48 heures, où, cheb Mami chante tellement fort qu'il n'a rien entendu...
So, je continue ma marche dans Alger, avec vous. Une grande ville comme je les aime, Alger la blanche, exubérante, bordélique, un peu sale. Une ville qui parle, qui rit, s'appelle, s'engueule, s'engueule tout le temps, s'obstine sur tout, à l'image du pays, ce foutu pays, mon pays, votre pays monsieur le président, qui me fait craquer dans la tête. M'excite. Me contrarie. J'aime ses gens. Salam, salam. Kabyles, Chaouis, M'zabs, Arabes, Touaregs. Salam, salam. J'aime toutes ses villes. Mais je n'aime pas son odeur de mort en suspension dans l'air. Je ne parle pas de la mort qu'apportent les bombes. Je ne parle même pas d'une odeur organique. Je parle d'une odeur kamisse, Une odeur longue barbe noire, aussi noir que la haine qui l'habite, islamiste et fanatique. Je parle de l'envers de l'amour.
Pas un seul mot, fût-il en chinois ? Pourtant si. On repassait encore hier soir, à la télé déalna, cette courte entrevue dans le palais, je crois, de votre premier ministre, mes excuses Far-Solitaire, je veux dire votre premier sinistre, qui disait : «Euh non, tout va bien, soyons calmes mes amis, nous maîtrisons la situation, ce ne sont que des résidus et gnagnagna...». C'est du chinois. Traduits en arabe et en kabyle, ces propos font dire aux algériens qu'il y a pire qu'avoir des terroristes pour ennemis, il y'a avoir le premier ministre pour ami.
Je suis triste, monsieur le président. Mais ça ne m'empêche pas d'avoir faim. So, je me dirige right now, au petit resto grec. Un Souvlaki pour ce soir... À plus tard.
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