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« C’est le contribuable qui paiera » : le Conseil constitutionnel accorde l’aide juridictionnelle aux clandestins

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  • « C’est le contribuable qui paiera » : le Conseil constitutionnel accorde l’aide juridictionnelle aux clandestins


    TRIBUNE - Par une décision rendue le 28 mai, le Conseil constitutionnel a ouvert l’aide juridictionnelle aux étrangers en situation irrégulière, obligeant l’État à couvrir les frais d’avocat des étrangers qui résident en France au mépris des lois de la République, déplore l’avocat Philippe Fontana.

    *Avocat et essayiste, Philippe Fontana a notamment publié « La Vérité sur le droit d’asile » (Éditions de l’Observatoire, 2023).

    Au nom du principe de fraternité, le Conseil constitutionnel avait déjà censuré, dans une décision du 6 juillet 2018, l’incrimination d’aide à la circulation d’un étranger en séjour irrégulier. La liberté d’aider autrui, dans un but humanitaire, sans considération de la régularité de son séjour sur le territoire national, découlerait de ce principe.

    Six ans après, le Conseil pourfend les différences de traitement fondées sur la durée du séjour (décision du 11 avril déniant aux LR l’organisation d’un référendum d’initiative partagée sur l’accès des étrangers aux aides sociales) et, désormais, sur la régularité du séjour d’un étranger en France.

    Par une décision du 28 mai 2024, le Conseil a en effet estimé qu’en subordonnant l’octroi de l’aide juridictionnelle au caractère régulier du séjour d’un étranger, la loi du 10 juillet 1991 avait violé la Constitution. Ce texte attribue cette aide financière de l’État, totale ou partielle, en fonction des ressources du demandeur, en l’absence d’une assurance de protection juridique. Quatre salariés en situation irrégulière avaient saisi le Conseil de prud’hommes de Paris, pour obtenir la requalification de leurs contrats précaires en contrats à durée indéterminée. Conformément à la loi de 1991, l’aide juridictionnelle leur avait été refusée, leur situation irrégulière y faisant obstacle. Le Conseil de prud’hommes a transmis leur question prioritaire de constitutionnalité (QPC) à la Cour de cassation qui a saisi le Conseil constitutionnel.

    Pour fonder sa décision, le Conseil s’est une nouvelle fois appuyé sur des dispositions dites du « bloc de constitutionnalité », en l’espèce sur deux articles de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : son article 6, qui dispose que la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse » ; et son article 16, aux termes duquel : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ». Interprétant « constructivement » une déclaration des droits qui, historiquement, avait une valeur philosophique et non juridiquement contraignante pour le législateur, le Conseil a estimé qu’en privant les étrangers ne résidant pas régulièrement en France du bénéfice de l’aide juridictionnelle « pour faire valoir en justice les droits que la loi leur reconnaît », les dispositions contestées n’assurent pas à ces derniers des garanties égales à celles dont disposent les autres justiciables. Dès lors, « ces dispositions méconnaissent le principe d’égalité devant la justice ».


    La décision du 28 mai encourage l’immigration irrégulière en déniant à nouveau à l’État toute autorité pour la sanctionner.

    Cette décision laisse perplexe, car l’irrégularité du séjour d’un étranger ne le dépouille pas de droits. D’abord, parce que le code du travail dispose qu’un étranger embauché sans avoir d’autorisation de travail « est assimilé, à compter de la date de son embauche, à un salarié régulièrement engagé au regard des obligations de l’employeur ». Ensuite, parce que ce même salarié peut saisir le Conseil de prud’hommes pour obtenir toutes les indemnités légalement dues. L’irrégularité du séjour d’un étranger n’empêche pas l’accès à une juridiction et lui assure la garantie de ses droits au sens de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Elle ne fait obstacle (et encore pas dans tous les cas) qu’à l’attribution d’une aide sociale.

    La décision du 28 mai encourage l’immigration irrégulière en déniant à nouveau à l’État toute autorité pour la sanctionner. Insistons-y : l’aide juridictionnelle, comme son nom l’indique, est une aide sociale. Elle repose sur la solidarité nationale. Déjà, le législateur, seul compétent en la matière, avait prévu quelques exceptions à la condition de régularité de séjour : étrangers mineurs, étrangers victimes ou même auteurs d’infractions, contentieux des étrangers. Obliger l’État (c’est-à-dire le contribuable) à couvrir les frais d’avocat des étrangers qui résident en France au mépris des lois de la République sape une autorité dont nos concitoyens, dans leur grande majorité, s’accordent aujourd’hui à déplorer la déliquescence.

    En outre, en ces temps de tension budgétaire et d’efforts de limitation de la dépense publique, les conséquences financières de la décision du 28 mai ne sont pas à négliger. Selon un rapport de la Cour des comptes d’octobre 2023, les dépenses en cette matière sont passées de 342 millions d’euros en 2017 à 630 millions en 2022 (+ 13 % par an). Les affaires civiles concentrent 60 % de la dépense, le pénal 29 % et le contentieux administratif 11 %. Le ministère de la Justice anticipait un budget de 863 millions en 2027. Il devra le revoir à la hausse, compte tenu de la chose jugée par un Conseil constitutionnel qui se comporte ici en prescripteur de dépenses publiques.

    Seul un référendum pourrait faire entendre la légitime amertume ressentie par ceux qu’une autorité non élue oblige, sans se soucier de leur consentement, à financer une solidarité subie.
    La décision du 28 mai peut aussi apparaître comme affectée par des a priori moraux, voire idéologiques. D’abord, par les circonstances de la saisine du Conseil. Il suffit de dénombrer les huit associations et syndicats intervenants (GISTI, LDH, CGT, SAF, etc.), pour constater que l’étranger en situation irrégulière n’est pas seul. Il dispose même de plus de garanties d’accès à la justice que beaucoup d’autres justiciables. Les syndicats et les associations habituellement en pointe dans ce combat suppléent largement toute aide étatique. Ensuite, cette décision présuppose une vision de l’étranger en situation irrégulière (figure compassionnelle du « sans-papiers ») dans laquelle le « clandestin » est une victime des malheurs du monde et de l’indifférence d’une société qui le reçoit si mal. Celle-ci, pour se racheter, et par devoir humanitaire, doit impérativement le prendre sous son aile. C’est ignorer que nombre de nationaux sont dans une précarité plus grande qu’un étranger en situation irrégulière. Celui-ci a pu s’installer en France, souvent grâce à des réseaux de passeurs, dégageant des profits de 32 milliards de dollars en 2018 selon les estimations de France terre d’asile (FTDA).

    Dans cette affaire, les Français n’ont pas voix au chapitre. Le « dialogue des juges » entre le Conseil de prud’hommes, la Cour de cassation et le Conseil constitutionnel est fermé au peuple comme à ses représentants élus. Nos concitoyens ne peuvent davantage nourrir l’espoir de corriger la décision du 28 mai 2024, puisque le législateur, en l’état de la Constitution, ne peut aller à l’encontre de la chose jugée rue de Montpensier. Seul un référendum pourrait faire entendre la légitime amertume ressentie par ceux qu’une autorité non élue oblige, sans se soucier de leur consentement, à financer une solidarité subie.
    وألعن من لم يماشي الزمان ،و يقنع بالعيش عيش الحجر

  • #2

    Aide juridictionnelle : les étrangers illégaux sur un pied d’égalité avec les Français

    Prud’hommes, logement, famille... Le Conseil constitutionnel étend la prise en charge des frais d’avocat pour les clandestins.

    Les faits -

    La décision rendue mardi 28 mai par le Conseil constitutionnel, qui censure une loi de 1991, repose sur « le principe d'égalité devant la justice ».

    C’est une décision dont le gouvernement se serait passé à la veille des élections européennes et du débat sur l’immigration. Elle provoque, au sein de l’exécutif, des soupirs agacés sur « ce Conseil constitutionnel déconnecté des réalités ». Elle nourrit des réactions véhémentes chez Les Républicains. « Les Français vont donc payer l’explosion des procédures pour ceux qui violent nos lois et nos frontières », écrit François-Xavier Bellamy sur X. « Cette juridiction s’enfonce toujours un peu plus dans une dangereuse dérive idéologique qui met en danger notre Nation », juge Eric Ciotti. Jordan Bardella et Eric Zemmour ne sont pas en reste.


    Mardi, le Conseil constitutionnel a jugé que les étrangers en situation irrégulière devaient désormais pouvoir bénéficier de l’aide juridictionnelle (AJ) pour tous les types de contentieux. Cette prise en charge par l’Etat des frais d’avocat pour les personnes modestes était déjà ouverte aux étrangers illégaux en matière pénale, pour le contentieux lié au droit des étrangers et pour les clandestins mineurs. Mais, depuis une loi de 1991, l’aide juridictionnelle ne leur était pas accordée pour d’autres procédures. Désormais, c’est tout le champ judiciaire qui est couvert, comme la justice prud’homale, le civil (droit de la famille, droit du logement, etc.). En 1991, c’est Jacques Toubon, alors député RPR de l’opposition, qui avait soutenu l’amendement restreignant l’AJ…


    « Droits fondamentaux ». Le principe d’« égalité devant la justice » est mis en avant par le Conseil constitutionnel. « La possibilité d’aller devant le juge pour défendre ses droits est de l’ordre des droits fondamentaux », explique-t-on dans l’entourage du président de l’institution, Laurent Fabius. Les juges constitutionnels censurent donc « des dispositions [qui] instaurent une différence de traitement entre les étrangers selon qu’ils se trouvent ou non en situation régulière en France ». La question de l’opportunité d’une telle censure de la loi de 1991 y est vite tranchée : « Le Conseil constitutionnel doit-il se déterminer en fonction du risque d’incompréhension de sa décision par l’opinion publique ? », y observe-t-on.

    En l’espèce, la question prioritaire de constitutionnalité était posée par trois hommes, employés comme éboueurs dans le privé et qui, « après avoir enchaîné les intérims et les CDD, voulaient voir leur contrat de travail requalifié », explique leur avocat, Me Xavier Courteille. Un de ses confrères, spécialiste du droit social, dénonce, lui, en revanche, « les stratégies de contournement du droit. Avec des étrangers qui se font embaucher en présentant des faux papiers, exercent un chantage pour se faire régulariser et des entreprises qui sont confrontées à des usurpations d’identité ».

    A l’audience, le gouvernement avait défendu le droit existant et soulevé la question du coût de l’extension de l’AJ pour la collectivité. Son budget a quasi doublé depuis 2017 pour atteindre plus de 630 millions d’euros par an. Mercredi, personne ne se risquait à chiffrer les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel qui est « d’application immédiate ».

    Marie-Amélie Lombard-Latune
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    • #3
      La défense est un droit universel cette décision n'a qu'un seul but que les avocats commis d'office soient enfin payés.

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