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Azazga La baguette de la passion

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  • Azazga La baguette de la passion



    Le mois de Ramadhan est souvent synonyme de fatigue et de ralentissement du rythme de travail. Si dans de nombreux métiers, les travailleurs peuvent se permettre un allégement de leur emploi du temps, certains ouvriers, eux, bravent la fatigue, la faim et la soif pour répondre aux besoins de leur communauté.

    C'est notamment le cas des boulangers qui, pendant ce mois sacré, fournissent des efforts considérables pour offrir à leurs clients un pain chaud et croustillant, une tâche de plus en plus ardue au fur et à mesure que les jours passent. À Azazga, une petite ville située à 37 km à l'est de Tizi Ouzou, la réputation de ses restaurants gastronomiques et de la qualité de leur service n'est plus à faire. Mais cette ville est également célèbre pour ses boulangeries et la qualité de son pain. Parmi les spécialités locales une se distingue tout particulièrement: le pain sur dalle, qui fait la fierté des habitants.

    Les anciens d'Azazga se souviennent encore de la boulangerie de Dda Lhocine Iberoualene, située rue du 20-Août-1956. «Pendant le mois de Ramadhan, on pouvait sentir les effluves du pain chaud dès qu'il sortait du four, à plusieurs dizaines de mètres à la ronde. En attendant son tour dans la file, l'odeur du pain maounise, un pain rond et doré, nous chatouillait les narines et nous donnait le tournis, surtout quand on était à jeûn.

    Il avait une main incroyable pour faire du bon pain, notamment cuit directement sur la dalle du four à briques, avec un feu de bois. Mais ce qui faisait la grande qualité de Dda Lhocine, c'était avant tout sa bonté. Il ne laissait jamais personne partir le ventre vide, qu'on ait de l'argent ou non. C'était l'ami des pauvres de la région», raconte Saïd, un ami de longue date de Dda Lhocine. Aux premières lueurs de l'aube, Aïssa, Seddik et Akli sont déjà à l'oeuvre dans le laboratoire de la boulangerie qu'Aïssa dirige depuis plusieurs années. «On commence à travailler juste après l'Imsak», précise Aïssa. Pour ces boulangers, la journée commence bien avant l'arrivée des premiers clients. «Personnellement, j'aime bien manger des dattes et des figues sèches accompagnées de lait caillé au s'hor, confie Aïssa. Ce petit déjeuner léger mais nourrissant me permet de mieux supporter la fatigue et la pression du travail tout au long de la journée.»

    Le pain doit être prêt
    Le mois de Ramadhan impose un rythme encore plus soutenu pour Aïssa et ses collègues. Si, en temps normal, la boulangerie produit déjà beaucoup de pains, pendant ce mois sacré, la demande ne diminue pas. «On produit moins de pains au Ramadhan par rapport au reste de l'année, mais cela n'est en aucun cas une excuse pour prendre un jour de congé. Nous devons bien servir nos clients, surtout en ce mois particulier», souligne Aïssa, dont la voix trahit une certaine fatigue accumulée. La pression se fait particulièrement sentir lors des dernières heures avant l'Adhan. «Les gens veulent absolument du pain chaud pour la rupture du jeûne. Chaque jour, à partir de 15h30, une longue file se forme devant la boulangerie, et cela dure jusqu'à quelques minutes avant l'Adhan.

    La demande est telle que nous faisons notre possible pour offrir du pain chaud et croustillant, mais parfois cela devient difficile à gérer. D'autant plus que, parfois, les gens perdent patience avec les nerfs à fleur de peau», confie Aïssa. Les trois boulangers courent d'une tâche à l'autre, leur esprit concentré, leurs gestes agiles malgré la fatigue. Mais la pénibilité du travail ne réside pas seulement dans le nombre de clients ou dans la chaleur de la boulangerie.

    Le véritable défi réside dans la façon même de fabriquer ce pain traditionnel qui se distingue par sa croûte dorée et croustillante, ainsi que sa texture moelleuse à l'intérieur. Dans leur four, le pain sur dalle se fait à la main, une technique ancestrale qui nécessite une maîtrise parfaite. Une fois que la pâte est prête, elle est découpée et chaque morceau est pesé. Les petits morceaux sont laissés un moment enfermés dans des tiroirs en bois pour une première fermentation. Ils sont, après un moment, retirés pour être façonnés.

    Les trois boulangers, parfaitement synchronisés, étalent la pâte avec soin et expertise, un geste précis qui demande des mois d'apprentissage. «Le façonnage du pain est une étape très délicate. Pour les débutants, il faut une grande patience et beaucoup de pratique. Moi, au début, j'ai dû travailler pendant cinq mois pour acquérir cette technique, et maintenant, je fais ça presque les yeux fermés», explique Akli, le plus jeune boulanger, dont les mains sont couvertes de farine, signe de son investissement total dans son travail. Une fois que les boules de pâte sont allongées et façonnées à la forme d'une baguette, elles sont mises en apprêt dans des chambres de fermentation. C'est une deuxième période de fermentation entre le façonnage et le début de cuisson. Si le travail est exigeant, il devient encore plus difficile à mesure que la journée avance et que la chaleur du four devient insupportable. La température à l'intérieur de la boulangerie peut atteindre des sommets, alors que dehors le soleil de Ramadhan brille de mille feux. La chaleur combinée à la fatigue du jeûne, qui n'épargne personne, rend chaque mouvement plus difficile. Aïssa, Seddik et Akli ressentent une lassitude croissante dans leurs muscles, mais ils savent que l'on ne peut se permettre de ralentir. C'est le moment qui demande le plus d'efforts et de sacrifice de la part de l'équipe.
    Les clients attendent...

    Le plus épuisant, cependant, reste les heures juste avant l'Adhan, où l'urgence de la situation se mêle à la chaleur, la faim et la soif. La boulangerie est en effervescence, et les trois collègues n'ont pas le temps de souffler. «C'est là que la pression atteint son paroxysme», admet Seddik. «On doit tout faire dans les règles de l'art mais, en même temps, il faut gérer la file, anticiper les besoins des clients et s'assurer que le pain est prêt à temps. C'est un travail de fourmi, mais il est gratifiant à chaque instant.»

    Par moments, les trois se retrouvent dans le magasin à donner un coup de main au vendeur pour servire les nombreux clients, mais l'impératif de retourner au laboratoire les oblige à être très vigilants car une seule erreur de la part des boulangers peut conduire au risque de perte de toute une fournée. À force de travailler dans ce climat de stress constant, la fatigue se transforme en une sensation d'usure physique, mais aussi mentale. La chaleur du four, la répétition des gestes et l'impossibilité de boire ou de se reposer créent une sorte de zone de turbulence dans laquelle les trois boulangers doivent naviguer, mais qui les lie aussi par un profond respect mutuel. Chaque fournée devient une épreuve, mais aussi une petite victoire, et lorsqu'enfin le pain est prêt et que les clients repartent satisfaits, le sentiment de fierté est immense. La journée se termine enfin, après une dernière série de fournées juste avant le coucher du soleil.

    À ce moment, Aïssa, Seddik et Akli s'accordent enfin quelques minutes de répit, les pieds endoloris et les mains encore couvertes de farine. Mais la satisfaction de voir leur pain si apprécié par les habitants d'Azazga efface toute la douleur accumulée. «C'est difficile, très difficile même. Mais c'est notre travail, et on le fait avec coeur», conclut Aïssa, un sourire fatigué aux lèvres. Ainsi, pendant tout le mois de Ramadhan, ces trois boulangers incarnent l'esprit du sacrifice, de l'effort constant et de la solidarité. Malgré la chaleur, la faim et la soif, ils continuent à travailler pour offrir à leur communauté ce pain si précieux, à la fois symbole de leur dévouement et de leur amour pour leur métier.

    Arezki Ibersiene
    Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre.
    (Paul Eluard)

  • #2
    J'aimerais bien trouver une boulangerie à Alger qui fait son pain sur dalle , c'est tellement bon
    Dernière modification par ACAPULCO, 13 mars 2025, 14h51.
    Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre.
    (Paul Eluard)

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