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3 millions de chômeurs en Algérie

lundi 20 septembre 2004, par Hassiba

Des Algériens vivant avec moins d’un dollar par jour, l’Algérie en compte de larges pans. La pauvreté touche deux fois plus les zones rurales que les zones urbaines et plus les femmes chefs de ménage et les personnes sans instruction.

Ainsi, la pauvreté se porte bien dans une société où trois millions d’Algériens sont touchés par le chômage, soit 28,9% des actifs, selon des statistiques officielles. Elle se porte également bien dans une économie soumise à une restructuration étendue, affectant le monde du travail : le programme d’ajustement structurel, préconisé par le Fonds monétaire international (FMI) au début des années quatre-vingt-dix a conduit à 460 000 suppressions d’emplois et à la fermeture de 1 010 entreprises. Les pouvoirs publics se sont efforcés de remédier à cette situation et de terrasser la pauvreté. Ils ont à cet effet débloqué des sommes d’argent colossales. L’enveloppe dégagée par le gouvernement est estimée à 14 milliards de dinars (1,4 milliard de francs) auxquels s’ajouteront les aides du PNUD (Programme des Nations unies pour le développement) (700 millions de dollars) et celles attendues de la Banque mondiale. Un soutien financier qui n’a cependant pas produit d’effets spectaculaires.

Aussi fallait-il opter pour une autre méthode, celle inscrite dans une logique de croissance de type non monétariste. Elle est basée grossièrement sur la recherche des grands équilibres macroéconomiques, sur la réduction du déficit budgétaire et sur une inflation nulle. Jouissant d’une manne pétrolière conséquente, l’Etat a mis en avant une somme de projets destinés à l’investissement et à l’insertion d’emplois. Plus de sept milliards de dollars ont, en effet, été injectés dans le premier Plan de soutien à la relance économique (PSRE). S’y ajouteront cinquante milliards de dollars en soutien à la croissance économique, sur cinq ans. Une aisance financière ? Un représentant du FMI présent à la conférence sur la pauvreté tenue à Alger en octobre 2000 déclarait : « L’Algérie n’est pas un pays pauvre. »

Des poches de pauvreté
En réalité, en dehors du fait que la croissance hors hydrocarbures est molle, l’Algérie fait face à un problème de répartition inégale du revenu national. Par les chiffres, moins de 20% des habitants détiennent un peu plus de 50% des richesses du pays. Abdelatif Benachenhou a estimé lors d’une conférence de presse à Alger qu’il n’y a pas de pauvreté mais qu’il en existe des poches. Il reconnaît ainsi que les projets d’investissements et les dotations budgétaires qui vont avec sont mal répartis. Le ministre des Finances, contrairement à l’appréciation du représentant du FMI, est de ceux qui estiment que l’Algérie « est un pays pauvre qui se prend pour un pays riche ». La pauvreté a été longtemps considérée comme un sujet tabou, à problèmes, en Algérie. Elle n’a été soumise à débat qu’en 2000, à l’occasion de cette conférence d’Alger. La pauvreté a ainsi été consacrée comme une préoccupation importante pour le pays qui a justifié la tenue de cette première conférence nationale de « lutte contre la pauvreté et l’exclusion ».

Les Nations unies projettent de lutter efficacement contre ce phénomène qui prend de l’ampleur notamment dans certains pays du Sahel en Afrique. Le secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, et l’administrateur du PNUD, Mark Malloch Brown, ont fixé comme objectif pour 2015 la réduction de moitié de la pauvreté dans sa forme extrême. Dans un document élaboré par le PNUD, il est noté qu’en Algérie une connaissance intuitive permet de relever que le phénomène s’est accru au cours des dernières années ; de nombreuses études et analyses sont en cours pour mieux en cerner l’ampleur et les formes d’apparition. De multiples actions sont aussi engagées pour diminuer son impact et enrayer son extension, y est-il écrit.

Et la première conférence nationale de « lutte contre la pauvreté et l’exclusion » a permis d’évaluer l’ampleur de la pauvreté et de dégager des priorités d’actions possibles, en particulier, la définition d’une « stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l’exclusion ». La publication de l’étude élaborée en relation avec la tenue de cette conférence permet de mettre à la disposition des décideurs et des analystes une image fiable de la répartition des poches de pauvreté dans le pays et de connaître la propagation spatiale du phénomène et sa localisation dans les différentes régions. Cette étude est le fruit d’un travail rigoureux réalisé sur plus d’une année par une expertise algérienne de haut niveau et son financement a été assuré par le PNUD. Sa diffusion la plus large possible à l’intérieur du pays et à l’extérieur devrait permettre au plus grand nombre de partenaires potentiels de la lutte contre la pauvreté et l’exclusion en Algérie de mieux appréhender les actions prioritaires, notamment dans le contexte de la définition de la stratégie nationale pour l’avenir. Ce travail devrait également pouvoir être suivi de nouvelles études, analyses et publications susceptibles d’approfondir la connaissance et l’action à même de faire aboutir, en Algérie, comme dans le reste du monde, l’objectif de réduction de la pauvreté et de l’exclusion.

Par Youcef Salami, La Tribune