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Des femmes aux commandes des entreprises en Algérie

lundi 11 avril 2005, par Hassiba

En Algérie, des femmes décidées à se battre et à ne pas céder à la fatalité du chômage. Elles ont exploité l’aide apportée par le crédit ANSEJ pour créer leur entreprise. Des exemples de réussite.

Son passage au Laboratoire des travaux publics et d’analyses du béton, agence de Tiaret, a fait naître chez Mme Abdesselem Malika, diplômée en informatique, un ambitieux projet. Celui de créer sa propre entreprise.C’est à force de côtoyer des entrepreneurs qui venaient faire expertiser leur béton que Mme Abdesselem a eu l’idée de créer sa propre entreprise. Après avoir mûrement réfléchi à ce projet, elle prend contact avec l’Agence nationale de soutien à l’emploi des jeunes (ANSEJ), en 2002, et demande seulement les 20% d’apport financier de l’ANSEJ, préférant éviter le prêt bancaire, ce qui a permis le traitement rapide de son dossier. Au départ, elle fait appel à l’expérience du beau-frère, un ex-entrepreneur jouissant d’une assez grande expérience dans le domaine. « Il m’a appris les rudiments du métier non sans m’avertir des aléas que je pourrais rencontrer, mais cela ne m’a nullement découragée », affirme-t-elle. Quant à son entrée effective dans l’arène des marchés publics, Mme Abdesselem a commencé avec l’achat d’une bétonnière et un camion de tonnage lourd grâce à l’aide financière de son père et d’autres membres de sa famille. « Acheter une niveleuse ou un autre engin de travaux publics n’était nullement à ma portée. Il me restait plus qu’à louer comme le font tant d’autres entrepreneurs. » Elle affirmera, par ailleurs, qu’il lui a été déconseillé d’acheter du matériel roulant très coûteux pour une nouvelle entreprise. Elle évoque alors avec un brin de fierté son premier contrat passé avec la direction des services agricoles (DSA) pour le routage de 100 hectares de terre arable. Après, les choses ont commencé à évoluer dans le bon sens, nous dira notre interlocutrice, ajoutant que, depuis, son entreprise a été retenue pour six marchés dans la wilaya de Tiaret et ses environs immédiats. Actuellement, l’entreprise de Mme Abdesselem est sur un chantier à Tidjelabine (Boumerdès) pour des travaux de finition d’un ensemble d’habitations réalisées par Cosider.

L’opiniâtreté d’une électronicienne
Electricité générale, voilà un secteur industriel connu comme étant exclusif à la gent masculine. L’avis n’est pas partagé pas Mme Hadjer qui vient de créer sa propre entreprise dans ce domaine d’activité non sans admettre que la réussite passe par des sacrifices. Détentrice d’un diplôme en électronique industrielle délivré par l’université de Tizi Ouzou, Mme Hadjer a travaillé durant quelques années dans une entreprise publique locale. Avec la fermeture de cette entreprise locale, c’est le chômage qui la poussera à réfléchir à la création de sa propre entreprise et ce, grâce notamment aux encouragements de son mari, électromécanicien de formation et travaillant actuellement dans une EPE de la wilaya de Tizi Ouzou. Le dossier ficelé, elle obtient l’accord de prêt de l’ANSEJ en 2003. Un crédit de 1 080 000 DA. L’entreprise créée a pour spécialité l’électricité générale, la maintenance industrielle, les travaux d’installation d’électricité bâtiment et enfin l’installation et l’entretien de groupes électrogènes. C’est en janvier 2004 que l’entreprise de Mme Hadjer a commencé à activer avec pour premier marché, obtenu suite à la signature d’une convention avec la CNEP pour la mise en place d’installations électriques, à savoir l’éclairage public et son entretien, et la mise en service de groupes électrogènes dans la commune d’Aghribs. Par la suite, c’est une société française qui a sollicité l’entreprise de Mme Hadjer pour le montage de câbles d’une centrale électrique. Actuellement, cette jeune entreprise, gérée d’une main de maître par cette dame, espère être retenue dans l’avis d’appel d’offres pour un projet d’éclairage extérieur et intérieur d’une salle omnisports sise dans une localité de la commune de Ouaguenoun. « Nous avons déposé nos offres technique et financière et il ne reste plus qu’à la commission de prononcer le soumissionnaire retenu. Nous avons de fortes chances d’être sélectionnés », affirme avec assurance Mme Hadjer. Son entreprise est aussi sollicitée par la direction de l’administration locale de la wilaya de Tizi Ouzou en vue d’assurer la maintenance des groupes électrogènes de toutes les directions de la wilaya.

Elevage de caille domestique
Un chirurgien-dentiste qui se lance dans l’élevage de la caille domestique. Voilà de quoi surprendre plus d’un. Mais à vrai dire, cela n’a rien d’étonnant car Mme Boukri est issue d’une famille d’éleveurs de bovins. L’élevage donc est une affaire de famille. Après avoir obtenu son diplôme de chirurgien, Mme Boukri a chômé pendant trois ans avant de réussir à obtenir un emploi dans des cabinets dentaires privés. Elle s’est vite rendu compte qu’il fallait opter pour une autre activité. Et c’est ainsi que l’idée de se lancer dans un type d’élevage de ferme peu connu a germée. Le projet en question a été bien accueilli par sa famille qui ne tardera pas à l’encourager et à l’aider en mettant à sa disposition l’espace nécessaire, un terrain agricole à Boudouaou (Boumerdès), ce qui, évidemment, a influé positivement dans l’accord obtenu auprès de l’ANSEJ. Dès lors, Mme Boukri s’est attelée à créer sa société sous la dénomination : SNC Caille de ferme. Premier acte, elle importe trois mille poussins qui, au bout de 40 jours d’engraissement, sont prêts à l’abattage. Les cailles sont ensuite conditionnées dans des barquettes. L’entreprise est une réussite totale. Pour preuve, trois ans après, elle n’arrive plus à satisfaire sa clientèle : les grands hôtels, les restaurants, les supérettes et les grandes boucheries. Une forte demande qui s’explique par la qualité de la chair de cette espèce d’oiseau qui appartient à l’ordre des gallinacés et à la famille des percidés. D’autant plus, faut-il le préciser, que Mme Boukri élève cette caille domestique à l’air libre, ce qui rend encore sa chair plus savoureuse. Le problème auquel est confrontée cette ex-chirurgien-dentiste est celui de l’espace d’élevage qui commence à devenir exigu, ce qui l’empêche de développer son activité et d’augmenter ses capacités de production. Un besoin d’espace supplémentaire se fait cruellement sentir.

Chroma-mode n’a pas peur de la concurrence
D’autant que Mme Boukri a d’autres projets en vue dont l’élevage du canard de barberie, du faisan fermier, de la perdrix et du poulet fermier. Des projets qu’elle tient résolument à concrétiser. Deux amies au chômage. L’une est technicienne supérieure en maintenance industrielle et l’autre modéliste, avec un même penchant pour la couture. Les deux décident de s’associer pour se lancer dans la création d’effets vestimentaires pour femmes. Elles s’appellent Djoudi Fouzia et Saadouni Mounira et habitent Beaulieu (Alger). Elles créent la SARL Chroma-mode en souscrivant un crédit bancaire accordé dans le cadre de l’ANSEJ. Contraintes de respecter les échéances de remboursement alors qu’elles n’ont pas réceptionné leur machine industrielle, elles se résignent à travailler avec les moyens du bord.Deux machines à coudre domestiques. Il faut surpasser les inconvénients engendrés par le manque de matériel adéquat à leur activité au moyen d’une ferme volonté de réussite. Ce sont alors des nuits entières consacrées au labeur. Mais la satisfaction, heureusement, est au rendez-vous. Et c’est avec fierté que Fouzia et Mounira se rappellent leur première création : un tablier de classe qui a fait sensation chez un revendeur au point qu’il en a commandé une centaine. Autre grosse commande, celle de l’hôpital Mustapha Bacha pour la fourniture d’ensembles pour grands brûlés. Aujourd’hui, leur création qui marche le mieux reste bien sûr une lingerie pour femme en quatre pièces. Un produit qui est le résultat d’un défi : « Faire mieux que la lingerie féminine importée de Syrie. » Mounira et Fouzia ont une devise : ne pas céder au découragement malgré la dure concurrence du conteneur en optant pour la création. Elles en ont les capacités, les échantillons exposés le prouvent. Elles partagent un même vœu : créer une école de haute couture.

Par Ziad Abdelhadi , latribune-online.com