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Les lobbies de la rente et de la corruption sortent leurs griffes

jeudi 21 octobre 2004, par Hassiba

En Algérie, l’histoire se répète. En juin 2001, à la faveur des recettes importantes engrangées par les cours du pétrole, le président de la République, Abdelaziz Bouteflika a annoncé la mise en place d’un plan de soutien à la relance économique.

Celui-ci devait faire démarrer des projets liés aux grands travaux mais aussi à toutes les infrastructures qui faisaient défaut au pays pour qu’il amorce son développement. C’est ainsi que des enveloppes financières ont été dégagées pour chacune des wilayas en fonction de leurs besoins et de l’opportunité de la réalisation de tel ou tel projet. Des emplois avaient été créés, dans leur majorité non permanents, mais qui avaient le mérite d’aider notamment les jeunes à s’intégrer dans le circuit économique.

Les membres du gouvernement et le président de la République ont sillonné le pays dans ce sens tout en précisant que l’argent dégagé ne devait en aucun cas être dévié de sa destination. D’ailleurs, beaucoup de régions du pays, y compris les plus enclavées, ont vu leur situation s’améliorer ne serait-ce qu’un petit peu. Ce sont pas moins de 46 milliards de dollars, selon le chef du gouvernement, qui ont été dépensés pour les différents investissements dans plusieurs secteurs.

Pourtant, cela n’a pas empêché des voix de s’élever pour crier à la dilapidation de l’argent public et son utilisation à des fins électoralistes. Mieux encore, des mouvements de protestation ont surgi comme par enchantement. Qui demandait que l’argent soit réservé pour les importations, qui voulait que la manne financière soit réservée à l’aide à la création de PME/PMI à travers des crédits, bonifiés bien entendu. En somme, les uns et les autres voulaient tout simplement profiter du matelas financier pour leurs propres besoins. Développer son fonds de commerce ou encore obtenir des marchés à des coûts exorbitants. Quand ce n’est pas pour faire fleurir le marché informel chez lequel le formel s’approvisionne sans factures ni déclarations, encourageant par là même la corruption et les pots-de-vin, gangrène de toute économie qui veut se relancer.

Mais l’histoire se répète. Ceux qui l’ont dit ne se sont pas trompés. Il y a à peine quelques semaines, le président de la République a annoncé en plein Conseil des ministres le déblocage de 50 milliards de dollars sur cinq ans dans le cadre d’un deuxième programme de relance économique. D’aucuns des lobbies de la rente ont déjà eu l’eau à la bouche. Cette fois-ci, il n’est pas question qu’une partie du gâteau leur passe sous le nez. Pour cela, il faut agir. En créant d’abord la pénurie pour les produits de première nécessité comme l’huile ou encore faire monter les prix des viandes rouges et blanches comme jamais ils n’ont été augmentés, le but étant de pousser les pouvoirs publics à recourir à un plan anti-pénurie dont on connaît déjà les conséquences, celui du début des années 1980 est encore gravé dans les mémoires.

Quelques secteurs clés de l’économie nationale ont été actionnés pour organiser des mouvements sociaux en jouant sur la fibre sensible des travailleurs, dont les revendications sont plus que légitimes. Des mouvements et des pratiques qui ne sont pas non plus étrangers à la décision de l’Etat de lutter contre la corruption et la création d’une commission chargée de travailler sur la question et remettre son rapport au plus tard dans deux mois. Dès lors, beaucoup réalisent que leurs positions et leurs intérêts se trouvent menacés.

Car non seulement ces prédateurs ne sont pas inscrits sur la liste du programme de soutien à la relance, mais voilà que le premier magistrat du pays qui avait du mal à leur tenir tête durant le premier mandat décide de leur mener la guerre à travers l’installation de la commission. Cela fait un peu trop pour eux qui n’ont pas lésiné sur les moyens d’action dans le but de déstabiliser le marché et même le pays en recourant y compris aux émeutes en manipulant les commerçants. C’est dire que les lobbies ont la peau dure.

Par Faouzia Ababsa, La Tribune