ENTV: l'entreprise nationale qui n'a rien vu
par Kamel Daoud
par Kamel Daoud

Effet pervers de ce verrouillage de l'ENTV sur elle-même, le basculement des attentes des Algériens soit vers la presse écrite qui a atteint des tirages exceptionnels, soit vers les chaînes françaises à l'accès sélectif, soit vers les chaînes égyptiennes. Et effet non contrôlable encore une fois, et par leur excès, ces chaînes ont créé dans l'opinion algérienne un sentiment d'écoeurement qui s'est vite mué en colère face au grotesque de cette propagande nombriliste d'un pays qui se déclare frère aîné de tous les Arabes. Autre effet de cette auto-censure de l'ENTV et de son amateurisme technique et éditorial, un second basculement de l'opinion vers la toile Internet, source mondiale de l'information non contrôlée et de l'image sans droits ni devoirs. Et c'est donc par excès de verrouillage que l'ENTV et ses éditeurs ont provoqué l'effet inverse de ce qui était visé et qui était de calmer le jeu et ne pas participer à l'effet de boucle ascendant des fanatismes réciproques. Pour tous les Algériens, le prétexte du contrôle étatique sur l'audiovisuel, par souci de verrouillage politique, n'est donc plus valable : en Egypte, autre régime fermé, les TV privées ont leur marge et fonctionnent avec liberté dans le cadre stricte de l'allégeance politique. Si cela n'aide pas à la démocratie et au pluralisme, cela a démontré sa force pour mobiliser les opinions et violer les réalités par excès de propagande. Verdict sévère : on savait que l'ENTV n'était pas neutre ni «publique», elle donne aujourd'hui l'impression d'être si peu nationaliste.
Le Quotidien d'Oran
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