NORDINE AÏT HAMOUDA PARLE DE LA POLÉMIQUE SUSCITÉE PAR LE LIVRE DE SAÏD SADI
La colère du fils d’Amirouche
Par Nordine Aït Hamouda (*)
Je me suis interdit d’intervenir jusque-là dans le flot ininterrompu d’invectives auquel s’est abonné notamment M. Benachenhou depuis la sortie du livre de Saïd Sadi : Amirouche : une vie, deux morts, un testament. Trois évènements mûrement réfléchis m’ont amené à reconsidérer ma position dans cette tornade :
- le recadrage puis la similitude des attaques de M. Benachenhou et de A. Mebroukine ;
- la réaction réservée à ma dénonciation de l’inflation des martyrs et moudjahidine ;
- le traitement fait par un quotidien national du blocage de la première tranche d’un projet du PNUD destiné à la wilaya de Tizi-Ouzou par le ministère des AE.
On peut s’en étonner mais la sortie de M. Kafi n’a joué que marginalement dans ma décision. La brutalité, la mauvaise foi des premières interventions étaient telles que je m’étais résigné à suivre la proposition de certains membres de ma famille s’apprêtant à déposer plainte pour diffamation contre deux aboyeurs qui croyaient avoir trouvé l’arme fatale en s’abritant derrière les valeurs démocratiques que nous avions défendues de tout temps pour essayer de nous les retourner. En découvrant M. Benachenhou et A. Mabroukine détourner les termes de tolérance, de liberté dans les débats et même d’alternance au pouvoir s’il vous plaît, je me revoyais devant le juge de la cour de sûreté de l’État qui nous condamnait pour avoir «attenté à l’État de droit et à la démocratie». Ayant pratiqué la justice algérienne de près, je ne me faisais pas de grandes illusions sur l’issue de la démarche, sans compter les prescriptions qui protégeaient certains individus. Mais face à la grossièreté des attaques, je me suis dit que d’amener un Benachenhou dans un palais de justice serait le plus beau cadeau que l’on pouvait rendre aux dizaines de milliers de citoyens qui suivaient, indignés, cette explosion de haine de la part d’individus convaincus d’être intouchables.
Le slogan comme argument
Au départ, nous avions un Mebroukine, dont on vient d’apprendre qu’il fut condamné il n’y a pas si longtemps par le tribunal militaire d’Oran pour intelligence avec l’ennemi et un bavard coléreux, aigri après son éviction du pouvoir, qui sont montés au créneau mais en rangs dispersés. Le premier, actionné pour faire diversion sur la séquestration des restes d’Amirouche et Haouès afin de relifter Boumediène, prenait même soin de se démarquer de l’autre agent, «malgache», patriote multinational. Il alla même jusqu’à confirmer le fait que les deux colonels avaient été donnés à l’armée française. Les deux intervenants étaient prêts à s’étriper pour sauver le fonds de commerce de leur niche respective. L’auteur leur a répondu, les invitant à débattre du livre, quitte à trouver d’autres occasions pour traiter du bilan de Boumediène, de la tolérance, de l’alternance du pouvoir et de toutes autres vertus démocratiques bafouées et que seules les deux pupilles du parti unique avaient défendues contre une opposition responsable de tous les maux. Les choses en seraient restées là que je me serais toujours tenu en retrait. Puis comme beaucoup de lecteurs du Soir d’Algérie, j’ai été frappé par l’évolution des arguments des deux mercenaires dans leurs dernières sorties. De coqs que tout opposait, ils étaient brusquement devenus des siamois soudés par un combat contre un homme qui avait écrit un livre pour le sortir dans un moment de «grande fragilité nationale» et pour assouvir une ambition visant à imposer une hégémonie politique dont ils allaient nous libérer, comme devait le faire Boumediène juste avant sa mort ! Ce n’est plus ce qu’a écrit Saïd Sadi sur Amirouche qui fait débat mais ce qu’il a derrière la tête et le moment choisi pour sortir son livre… La question n’est pas de débattre avec ces deux automates mais de savoir pourquoi ils ont tant changé d’angles d’attaques et ce qui les a rapprochés au point de se confondre. J’apprends que les deux plumitifs ont été récupérés par un ancien colonel des services, Bouda, habitué d’«analyses» récurrentes, expliquant que l’hégémonie sécuritaire est une donnée intangible et qu’il suffit de diaboliser une opposition «génétiquement incapable de participer à des compétions loyales et régulières» pour garantir le marketing du statu quo. D’où le copié-collé des deux dernières salves. Faisons plaisir à M. Mabroukine : non, Boumediène n’a pas fait de coups d’Etat, non, ce n’est pas lui qui a fait couler le sang des Algériens en 1962 mais les wilayas de l’intérieur prises de folie qui se battaient entre elles ; non son idole n’a pas fait exécuter le colonel Chabani alors que, frappé de dysenterie, il ne pouvait même pas se tenir debout quand il fut traîné au poteau ; non, Krim Belkacem n’a pas été assassiné à Francfort, il s’est étranglé avec sa cravate en faisant sa toilette ; non, Boumediène n’a pas tué Khider à Madrid ; non, il n’a pas donné l’ordre à des aviateurs soviétiques de bombarder des populations civiles à El Afroun en 1967 ; non il n’avait pas des millions de dollars à son nom à la Chaise Manhattan Bank et non il n’avait pas, non plus, fait déposer, par Messaoud Zegagh, des milliards de dollars prélevés sur le Trésor public. Oui la gestion socialiste des entreprises et la mise en œuvre bureaucratique de la Révolution agraire sont des réussites politiques, économiques et sociales ; oui notre école est un modèle de performance. Oui, c’est l’opposition démocratique qui a ruiné le pays ; non il n’y a pas de fraudes électorales, non ses parrains ne détournent pas les moyens de l’État pour les campagnes électorales, non il n’y a pas de censure, non il n’y pas de corruption systémique, non il n’y a pas eu d’assassinats de dizaines de jeunes en Kabylie en 2001 par la gendarmerie… Une fois ceci posé, il peut toujours pousser plus loin le cynisme et dire, comme son complice, que ce sont les autres qui délimitent le débat. Qu’a-t-il bien pu commettre comme acte d’espionnage pour accepter d’être aussi ridicule ? Je ne m’aventurerai pas à suivre M. Benachenhou dans son vomi sur le livre de Saïd Sadi : il a dit toutes les choses et leurs contraires : «Amirouche est un homme d’exception, c’est un criminel de guerre». Après nous avoir ordonné de nous taire, il saluait l’initiative qui a permis d’écrive un livre qui a «dû demander beaucoup de temps ». Mais voilà que notre vigile quotidien avertit dans sa dernière (?) livraison que le moment de la publication est choisi pour porter un coup fatal au pays dans une période de grande fragilité, sans nous dire d’ailleurs d’où vient et qui est à l’origine de cette situation. Faute de critiquer l’ouvrage dans sa substance, Monsieur Benachenhou, qui répond à des questions que personne n’a posées, se rabat sur les desseins antipatriotiques que vise un opposant, a priori suspect, qui a choisi de raconter la vie d’Amirouche «un héros local» pour en tirer des bénéfices régionalistes. Et là on retrouve le fiel qui affleure toujours quels que soient les efforts faits pour voiler sa haine ; pour Monsieur Benachenhou le Kabyle, Amirouche ou un autre, ne saurait être qu’un individu qui, dans le meilleur des cas, doit être toléré à la marge de la nation. Deux régiments, sept bataillons, deux escadrons et trois batteries déployés par le général Massu sur la route des colonels trois jours avant leur arrivée à Djebel Thameur seraient une «opération de routine », les témoins vivants encore qui attestent avoir averti Boussouf que ses messages adressés à Amirouche étaient captés par l’armée française sont des affabulateurs et le P-V faisant état des objectifs que devait défendre Amirouche à Tunis (armée des frontières et MALG) sont des faux et la séquestration des restes des deux colonels, véritable aveu posthume, ne doit pas être abordée.
La haine comme raison d’être
La colère du fils d’Amirouche
Par Nordine Aït Hamouda (*)
Je me suis interdit d’intervenir jusque-là dans le flot ininterrompu d’invectives auquel s’est abonné notamment M. Benachenhou depuis la sortie du livre de Saïd Sadi : Amirouche : une vie, deux morts, un testament. Trois évènements mûrement réfléchis m’ont amené à reconsidérer ma position dans cette tornade :
- le recadrage puis la similitude des attaques de M. Benachenhou et de A. Mebroukine ;
- la réaction réservée à ma dénonciation de l’inflation des martyrs et moudjahidine ;
- le traitement fait par un quotidien national du blocage de la première tranche d’un projet du PNUD destiné à la wilaya de Tizi-Ouzou par le ministère des AE.
On peut s’en étonner mais la sortie de M. Kafi n’a joué que marginalement dans ma décision. La brutalité, la mauvaise foi des premières interventions étaient telles que je m’étais résigné à suivre la proposition de certains membres de ma famille s’apprêtant à déposer plainte pour diffamation contre deux aboyeurs qui croyaient avoir trouvé l’arme fatale en s’abritant derrière les valeurs démocratiques que nous avions défendues de tout temps pour essayer de nous les retourner. En découvrant M. Benachenhou et A. Mabroukine détourner les termes de tolérance, de liberté dans les débats et même d’alternance au pouvoir s’il vous plaît, je me revoyais devant le juge de la cour de sûreté de l’État qui nous condamnait pour avoir «attenté à l’État de droit et à la démocratie». Ayant pratiqué la justice algérienne de près, je ne me faisais pas de grandes illusions sur l’issue de la démarche, sans compter les prescriptions qui protégeaient certains individus. Mais face à la grossièreté des attaques, je me suis dit que d’amener un Benachenhou dans un palais de justice serait le plus beau cadeau que l’on pouvait rendre aux dizaines de milliers de citoyens qui suivaient, indignés, cette explosion de haine de la part d’individus convaincus d’être intouchables.
Le slogan comme argument
Au départ, nous avions un Mebroukine, dont on vient d’apprendre qu’il fut condamné il n’y a pas si longtemps par le tribunal militaire d’Oran pour intelligence avec l’ennemi et un bavard coléreux, aigri après son éviction du pouvoir, qui sont montés au créneau mais en rangs dispersés. Le premier, actionné pour faire diversion sur la séquestration des restes d’Amirouche et Haouès afin de relifter Boumediène, prenait même soin de se démarquer de l’autre agent, «malgache», patriote multinational. Il alla même jusqu’à confirmer le fait que les deux colonels avaient été donnés à l’armée française. Les deux intervenants étaient prêts à s’étriper pour sauver le fonds de commerce de leur niche respective. L’auteur leur a répondu, les invitant à débattre du livre, quitte à trouver d’autres occasions pour traiter du bilan de Boumediène, de la tolérance, de l’alternance du pouvoir et de toutes autres vertus démocratiques bafouées et que seules les deux pupilles du parti unique avaient défendues contre une opposition responsable de tous les maux. Les choses en seraient restées là que je me serais toujours tenu en retrait. Puis comme beaucoup de lecteurs du Soir d’Algérie, j’ai été frappé par l’évolution des arguments des deux mercenaires dans leurs dernières sorties. De coqs que tout opposait, ils étaient brusquement devenus des siamois soudés par un combat contre un homme qui avait écrit un livre pour le sortir dans un moment de «grande fragilité nationale» et pour assouvir une ambition visant à imposer une hégémonie politique dont ils allaient nous libérer, comme devait le faire Boumediène juste avant sa mort ! Ce n’est plus ce qu’a écrit Saïd Sadi sur Amirouche qui fait débat mais ce qu’il a derrière la tête et le moment choisi pour sortir son livre… La question n’est pas de débattre avec ces deux automates mais de savoir pourquoi ils ont tant changé d’angles d’attaques et ce qui les a rapprochés au point de se confondre. J’apprends que les deux plumitifs ont été récupérés par un ancien colonel des services, Bouda, habitué d’«analyses» récurrentes, expliquant que l’hégémonie sécuritaire est une donnée intangible et qu’il suffit de diaboliser une opposition «génétiquement incapable de participer à des compétions loyales et régulières» pour garantir le marketing du statu quo. D’où le copié-collé des deux dernières salves. Faisons plaisir à M. Mabroukine : non, Boumediène n’a pas fait de coups d’Etat, non, ce n’est pas lui qui a fait couler le sang des Algériens en 1962 mais les wilayas de l’intérieur prises de folie qui se battaient entre elles ; non son idole n’a pas fait exécuter le colonel Chabani alors que, frappé de dysenterie, il ne pouvait même pas se tenir debout quand il fut traîné au poteau ; non, Krim Belkacem n’a pas été assassiné à Francfort, il s’est étranglé avec sa cravate en faisant sa toilette ; non, Boumediène n’a pas tué Khider à Madrid ; non, il n’a pas donné l’ordre à des aviateurs soviétiques de bombarder des populations civiles à El Afroun en 1967 ; non il n’avait pas des millions de dollars à son nom à la Chaise Manhattan Bank et non il n’avait pas, non plus, fait déposer, par Messaoud Zegagh, des milliards de dollars prélevés sur le Trésor public. Oui la gestion socialiste des entreprises et la mise en œuvre bureaucratique de la Révolution agraire sont des réussites politiques, économiques et sociales ; oui notre école est un modèle de performance. Oui, c’est l’opposition démocratique qui a ruiné le pays ; non il n’y a pas de fraudes électorales, non ses parrains ne détournent pas les moyens de l’État pour les campagnes électorales, non il n’y a pas de censure, non il n’y pas de corruption systémique, non il n’y a pas eu d’assassinats de dizaines de jeunes en Kabylie en 2001 par la gendarmerie… Une fois ceci posé, il peut toujours pousser plus loin le cynisme et dire, comme son complice, que ce sont les autres qui délimitent le débat. Qu’a-t-il bien pu commettre comme acte d’espionnage pour accepter d’être aussi ridicule ? Je ne m’aventurerai pas à suivre M. Benachenhou dans son vomi sur le livre de Saïd Sadi : il a dit toutes les choses et leurs contraires : «Amirouche est un homme d’exception, c’est un criminel de guerre». Après nous avoir ordonné de nous taire, il saluait l’initiative qui a permis d’écrive un livre qui a «dû demander beaucoup de temps ». Mais voilà que notre vigile quotidien avertit dans sa dernière (?) livraison que le moment de la publication est choisi pour porter un coup fatal au pays dans une période de grande fragilité, sans nous dire d’ailleurs d’où vient et qui est à l’origine de cette situation. Faute de critiquer l’ouvrage dans sa substance, Monsieur Benachenhou, qui répond à des questions que personne n’a posées, se rabat sur les desseins antipatriotiques que vise un opposant, a priori suspect, qui a choisi de raconter la vie d’Amirouche «un héros local» pour en tirer des bénéfices régionalistes. Et là on retrouve le fiel qui affleure toujours quels que soient les efforts faits pour voiler sa haine ; pour Monsieur Benachenhou le Kabyle, Amirouche ou un autre, ne saurait être qu’un individu qui, dans le meilleur des cas, doit être toléré à la marge de la nation. Deux régiments, sept bataillons, deux escadrons et trois batteries déployés par le général Massu sur la route des colonels trois jours avant leur arrivée à Djebel Thameur seraient une «opération de routine », les témoins vivants encore qui attestent avoir averti Boussouf que ses messages adressés à Amirouche étaient captés par l’armée française sont des affabulateurs et le P-V faisant état des objectifs que devait défendre Amirouche à Tunis (armée des frontières et MALG) sont des faux et la séquestration des restes des deux colonels, véritable aveu posthume, ne doit pas être abordée.
La haine comme raison d’être
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