Mahmoud Darwish a su chanter tous les sentiments que pourrait ressentir la victime d’une injustice flagrante : le désespoir, le dépit, la rage, l’espoir, la détermination, la combativité, la résistance…
Il a su, avec d’autres poètes et écrivains, sortir la langue arabe de l’état de décadence qu’elle connaît depuis plusieurs siècles pour l’élever au niveau de la complexité du monde contemporain.
J’ai retrouvé, par hasard, quelques extraits de certains de ses poèmes que j’avais griffonnés sur une feuille toute jaunie aujourd’hui :
Si l’olivier se rappelait celui qui l’a planté
L’huile deviendrait larmes.
لو تذكر الزيتون غارسه
لصار الزيت دمعا
Même de son vivant, quand j’étais amené à traduire des extraits de poèmes de Mahmoud Darwish à l’intention d’amis qui ne lisent pas l’arabe, j’étais rempli d’un fort sentiment de culpabilité. J’avais l’impression de commettre une profanation, une forfaiture. Ne dit-on pas que Qui traduit, trahit ! Mais je me disais que ce délit permettait de faire goûter, même si ma traduction les affadit grandement, de beaux morceaux de poésie, des chants de victoire de la vie sur la mort, à des amis. Je demande, à Mahmoud Darwish et à vous tous, le pardon, même si je récidive aujourd'hui avec des circonstances aggravantes. Voici l'un de ses poèmes :
Un homme
Ils ont mis des chaînes sur sa bouche,
Ils l’ont ligoté sur le rocher de la mort,
Et ils ont dit … Tu es un assassin !
Ils lui ont pris sa nourriture, ses habits et ses étendards
Et ils l’ont jeté dans les oubliettes des morts,
Et ils ont dit … Tu es un voleur !
Ils l’ont chassé de tous les havres,
Ils lui ont pris sa douce aimée,
Puis ils ont dit… Tu es un réfugié !
Toi dont les yeux et les paumes sont en sang,
La nuit finira par s’en aller,
Ni la salle d’arrêt ne durera,
Ni les anneaux des chaînes !
Néron est mort et Rome est toujours debout,
Ses yeux sont ses armes !
Les grains d’un épi qui meurt,
Rempliront la vallée d’épis.
عن إنسان
وضعوا على فمه السلاسل
و ربطوه بصخرة الموتى،
و قالوا... أنت قاتل !
أخذوا منه طعامه، و الملابس، و البيارق
و رموه في زنزانة الموتى
و قالوا... أنت سارق !
طردوه من كلّ المرافئ
أخذوا حبيبته الصغيرة،
ثم قالوا... أنت لاجئ !
يا دامي العينين و الكفين !
إن الليل زائل
لا غرفة التوقيف باقية
و لا زرد السلاسل !
نيرون مات، و لم تمت روما،
بعينيها تقاتل !
و حبوب سنبلة تموت
ستملأ الوادي سنابل !
Repose en paix, chantre de la résistance et de la vie.
Il a su, avec d’autres poètes et écrivains, sortir la langue arabe de l’état de décadence qu’elle connaît depuis plusieurs siècles pour l’élever au niveau de la complexité du monde contemporain.
J’ai retrouvé, par hasard, quelques extraits de certains de ses poèmes que j’avais griffonnés sur une feuille toute jaunie aujourd’hui :
Si l’olivier se rappelait celui qui l’a planté
L’huile deviendrait larmes.
لو تذكر الزيتون غارسه
لصار الزيت دمعا
Même de son vivant, quand j’étais amené à traduire des extraits de poèmes de Mahmoud Darwish à l’intention d’amis qui ne lisent pas l’arabe, j’étais rempli d’un fort sentiment de culpabilité. J’avais l’impression de commettre une profanation, une forfaiture. Ne dit-on pas que Qui traduit, trahit ! Mais je me disais que ce délit permettait de faire goûter, même si ma traduction les affadit grandement, de beaux morceaux de poésie, des chants de victoire de la vie sur la mort, à des amis. Je demande, à Mahmoud Darwish et à vous tous, le pardon, même si je récidive aujourd'hui avec des circonstances aggravantes. Voici l'un de ses poèmes :
Un homme
Ils ont mis des chaînes sur sa bouche,
Ils l’ont ligoté sur le rocher de la mort,
Et ils ont dit … Tu es un assassin !
Ils lui ont pris sa nourriture, ses habits et ses étendards
Et ils l’ont jeté dans les oubliettes des morts,
Et ils ont dit … Tu es un voleur !
Ils l’ont chassé de tous les havres,
Ils lui ont pris sa douce aimée,
Puis ils ont dit… Tu es un réfugié !
Toi dont les yeux et les paumes sont en sang,
La nuit finira par s’en aller,
Ni la salle d’arrêt ne durera,
Ni les anneaux des chaînes !
Néron est mort et Rome est toujours debout,
Ses yeux sont ses armes !
Les grains d’un épi qui meurt,
Rempliront la vallée d’épis.
عن إنسان
وضعوا على فمه السلاسل
و ربطوه بصخرة الموتى،
و قالوا... أنت قاتل !
أخذوا منه طعامه، و الملابس، و البيارق
و رموه في زنزانة الموتى
و قالوا... أنت سارق !
طردوه من كلّ المرافئ
أخذوا حبيبته الصغيرة،
ثم قالوا... أنت لاجئ !
يا دامي العينين و الكفين !
إن الليل زائل
لا غرفة التوقيف باقية
و لا زرد السلاسل !
نيرون مات، و لم تمت روما،
بعينيها تقاتل !
و حبوب سنبلة تموت
ستملأ الوادي سنابل !
Repose en paix, chantre de la résistance et de la vie.

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