Les Catalans se mobilisent pour la Catalogne
Plus d'un million de personnes ont défilé dans les rues de Barcelone, le 10 juillet, protestant contre l'arrêt du Tribunal constitutionnel qui a coupé court au nouveau statut d'autonomie élargie de la Catalogne. Aux cris de "Independència", les catalans demandent à décider de leur sort en tant que "nation catalane".
13.07.2010 | Adrien Chauvin | Courrier international
José Luis Rodríguez Zapatero, le chef du gouvernement espagnol avait pourtant affirmé au début de son mandat, en 2004, que le "concept de nation est contesté et discutable". La voie d’une nouvelle forme d’autonomie était alors ouverte pour les partis progressites catalans. En 2006, le Parlement régional vote un nouveau statut d’autonomie. S’il avait convaincu la plupart des partis régionaux, il n'a pas séduit les indépendantistes de la Gauche républicaine de Catalogne (ERC), ni la droite qui, pour le contrer, a déposé un recours en inconstitutionnalité devant le Tribunal constitutionnel de Madrid.
Quatre ans après, le 9 juillet, la haute juridiction a rendu son arrêt sur le statut d’autonomie élargie de la Catalogne, l’Estatut. Les 881 pages émanant du Tribunal ont provoqué une réaction vive et massive, d’autant plus qu’une manifestation pro-catalane était prévue le lendemain dans les rues de Barcelone sous le slogan de "Nous sommes une nation, nous décidons de nous-même". Et c’est précisément le concept de "nation catalane" présente dans le préambule de l’Estatut, que le Tribunal constitutionnel a remis en cause. L’arrêt précise que "la Constitution [de 1978] ne connaît d’autre Nation que l’Espagne", réaffirmant le principe d’unité et d’indissolubilité de la Nation. Si la Catalogne existe, son autonomie reste subordonnée à l’Etat. Outre le concept de nation catalane et de symbolisme identitaire, le Tribunal constitutionnel est revenu sur l’usage véhiculaire de la langue catalane, sur le pouvoir judiciaire… au total il a annulé 14 articles du statut et réinterpreté 27 autres.
Au lendemain de la publication de l’arrêt, La Vanguardia quotidien de centre droit catalan, titrait Provocation, l’éditorial jugeant la date choisie par le tribunal, la veille de la manifestation, comme un acte de "dédain et de mépris". L’occasion pour le journal de revenir sur les citations de José Montilla, président du gouvernement régional, estimant le rapport du Tribunal constitutionnel comme "une offense à la dignité de la Catalogne". Le leader de Convergence et Union (CiU), parti de centre droit, Artur Mas, parle quant à lui "d’ignorance ou d’authentique mauvaise foi" de la part de la haute juridiction d’Etat.
El Periódico de Catalunya, au lendemain de la manifestation du samedi titrait "La Catalogne crie Assez !". Ajoutant dans l’éditorial que "la manifestation à Barcelone contre l'arrêt du Tribunal a été d’une telle ampleur qu’elle fait déjà partie des grandes mobilisations populaires de Catalogne, comme celle de 1977 qui demandait l’autonomie [elle avait rassemblé 350.000 personnes]". "L’histoire, ajoute l’éditorialiste, retiendra que le 10 juillet 2010, plus d’un million de catalans, d’idéologies différentes, sont sortis dans la rue pour exprimer leur profond malaise face au traitement reçu en tant que nation et pour réclamer une autre forme de relation avec l’Etat".
Ce qui devait être une marche organisée par Òmnium Cultural, association en défense de l’identité catalane, s’est transformé en protestation massive aux cris de "Independència". Dorénavant, comme le souligne El Periódico dans son édito, une question persiste : "Et demain ?". Même s’il ne faut pas attendre de changement radical, précise le quotidien barcelonais, les partis politiques catalans doivent "canaliser et administrer cette massive légitimité populaire". Josep Ramoneda, chroniqueur catalan pour El País, ne partage pas cet avis. Selon lui, "la manifestation de 10 juillet peut avoir un rôle déterminant pour le futur immédiat de la Catalogne". "Il s’agit simplement, selon lui, d’engager les partis politiques à trouver une feuille de route appropriée, pour qu’avec des décisions, et sans tourner autour du pot, la Catalogne, puisse arriver à l’autogouvernement qu’on lui refuse".
La visite de Zapatero à Barcelone le 23 juillet pourrait être un autre moment galvanisateur, sachant que les enjeux actuels sont multiples : sauvetage de l’Estatut, un Estatut bis, ou une transition vers "l’Independència". Quoiqu’il en soit le prochain scrutin régional, prévu en automne, risque de prendre des allures de réferendum sur l’indépandance de la Catalogne.
Plus d'un million de personnes ont défilé dans les rues de Barcelone, le 10 juillet, protestant contre l'arrêt du Tribunal constitutionnel qui a coupé court au nouveau statut d'autonomie élargie de la Catalogne. Aux cris de "Independència", les catalans demandent à décider de leur sort en tant que "nation catalane".
13.07.2010 | Adrien Chauvin | Courrier international
José Luis Rodríguez Zapatero, le chef du gouvernement espagnol avait pourtant affirmé au début de son mandat, en 2004, que le "concept de nation est contesté et discutable". La voie d’une nouvelle forme d’autonomie était alors ouverte pour les partis progressites catalans. En 2006, le Parlement régional vote un nouveau statut d’autonomie. S’il avait convaincu la plupart des partis régionaux, il n'a pas séduit les indépendantistes de la Gauche républicaine de Catalogne (ERC), ni la droite qui, pour le contrer, a déposé un recours en inconstitutionnalité devant le Tribunal constitutionnel de Madrid.
Quatre ans après, le 9 juillet, la haute juridiction a rendu son arrêt sur le statut d’autonomie élargie de la Catalogne, l’Estatut. Les 881 pages émanant du Tribunal ont provoqué une réaction vive et massive, d’autant plus qu’une manifestation pro-catalane était prévue le lendemain dans les rues de Barcelone sous le slogan de "Nous sommes une nation, nous décidons de nous-même". Et c’est précisément le concept de "nation catalane" présente dans le préambule de l’Estatut, que le Tribunal constitutionnel a remis en cause. L’arrêt précise que "la Constitution [de 1978] ne connaît d’autre Nation que l’Espagne", réaffirmant le principe d’unité et d’indissolubilité de la Nation. Si la Catalogne existe, son autonomie reste subordonnée à l’Etat. Outre le concept de nation catalane et de symbolisme identitaire, le Tribunal constitutionnel est revenu sur l’usage véhiculaire de la langue catalane, sur le pouvoir judiciaire… au total il a annulé 14 articles du statut et réinterpreté 27 autres.
Au lendemain de la publication de l’arrêt, La Vanguardia quotidien de centre droit catalan, titrait Provocation, l’éditorial jugeant la date choisie par le tribunal, la veille de la manifestation, comme un acte de "dédain et de mépris". L’occasion pour le journal de revenir sur les citations de José Montilla, président du gouvernement régional, estimant le rapport du Tribunal constitutionnel comme "une offense à la dignité de la Catalogne". Le leader de Convergence et Union (CiU), parti de centre droit, Artur Mas, parle quant à lui "d’ignorance ou d’authentique mauvaise foi" de la part de la haute juridiction d’Etat.
El Periódico de Catalunya, au lendemain de la manifestation du samedi titrait "La Catalogne crie Assez !". Ajoutant dans l’éditorial que "la manifestation à Barcelone contre l'arrêt du Tribunal a été d’une telle ampleur qu’elle fait déjà partie des grandes mobilisations populaires de Catalogne, comme celle de 1977 qui demandait l’autonomie [elle avait rassemblé 350.000 personnes]". "L’histoire, ajoute l’éditorialiste, retiendra que le 10 juillet 2010, plus d’un million de catalans, d’idéologies différentes, sont sortis dans la rue pour exprimer leur profond malaise face au traitement reçu en tant que nation et pour réclamer une autre forme de relation avec l’Etat".
Ce qui devait être une marche organisée par Òmnium Cultural, association en défense de l’identité catalane, s’est transformé en protestation massive aux cris de "Independència". Dorénavant, comme le souligne El Periódico dans son édito, une question persiste : "Et demain ?". Même s’il ne faut pas attendre de changement radical, précise le quotidien barcelonais, les partis politiques catalans doivent "canaliser et administrer cette massive légitimité populaire". Josep Ramoneda, chroniqueur catalan pour El País, ne partage pas cet avis. Selon lui, "la manifestation de 10 juillet peut avoir un rôle déterminant pour le futur immédiat de la Catalogne". "Il s’agit simplement, selon lui, d’engager les partis politiques à trouver une feuille de route appropriée, pour qu’avec des décisions, et sans tourner autour du pot, la Catalogne, puisse arriver à l’autogouvernement qu’on lui refuse".
La visite de Zapatero à Barcelone le 23 juillet pourrait être un autre moment galvanisateur, sachant que les enjeux actuels sont multiples : sauvetage de l’Estatut, un Estatut bis, ou une transition vers "l’Independència". Quoiqu’il en soit le prochain scrutin régional, prévu en automne, risque de prendre des allures de réferendum sur l’indépandance de la Catalogne.
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