Après de premières paroles aigres-douces pour justifier la présence de Nicolas Sarkozy aux «commémorations» du 11 Septembre, la virée américaine du ministre de l'Intérieur a bel et bien fini par provoquer la colère de Jacques Chirac. Le chef de l'Etat, qui s'envole en fin de matinée pour l'assemblée générale de l'ONU à New York, y a vu la confirmation de ce qu'il redoutait : s'il était amené à lui succéder, le président de l'UMP mettrait un terme à la spécificité française à l'égard des Etats-Unis, au profit d'une vision atlantiste. «Irresponsable», a lancé Chirac mardi à l'un de ses plus anciens collaborateurs, en lui expliquant le «danger pour la France» de la relation transatlantique que Sarkozy a affirmé à Washington vouloir «rebâtir».
«Arrogance». Le Président et le ministre de l'Intérieur avaient pourtant eu un tête-à-tête dans la semaine précédant le départ de Sarkozy. Mais ce dernier s'était bien gardé de transmettre à l'Elysée le discours qu'il devait prononcer devant la Fondation franco-américaine, dans lequel il a dénoncé «l'arrogance française» et fait la leçon au duo Chirac-Villepin : «Il n'est pas convenable de chercher à mettre ses alliés dans l'embarras ou de donner l'impression de se réjouir de leurs difficultés.» Avant de compléter le réquisitoire contre l'attitude de Paris lors du déclenchement de la guerre en Irak : «Plus jamais nous ne devons faire de nos désaccords une crise.» Des propos que Chirac a qualifié mardi en privé de «lamentables» et de «faute», après avoir, dans un premier temps, déclaré qu'il l'avait «chargé d'être le représentant de la France».
C'est bien deux visions, deux doctrines, qui opposent l'Elysée et Sarkozy sur cette question sensible. «Sans prononcer le mot de rupture, pour ne vexer personne, c'est une musique totalement différente que Nicolas Sarkozy a fait entendre aux Américains. Inutile d'agresser Jacques Chirac. Mais, si on gagne la présidentielle le 6 mai, il sera temps de changer de politique étrangère le 7», assure le député Pierre Lellouche, spécialiste de relations internationales, qui assistait au rendez-vous entre le ministre de l'Intérieur et George Bush. «Ce discours a été très difficile à écrire, car il ne fallait heurter personne, mais ne pas s'autocensurer non plus. Il suffit de le lire pour s'apercevoir qu'il comporte maintes ruptures avec la ligne actuelle», confirme un des collaborateurs du ministre issu du Quai d'Orsay.
Foudres. Prudent pour ne pas s'attirer les foudres immédiates de Chirac, Sarkozy prépare donc les esprits à un changement de cap radical à l'égard des Etats-Unis. Pour Dominique Moïsi, expert à l'Institut français des relations internationales (Ifri), «Nicolas Sarkozy parle avec un accent nouveau à l'Amérique. Il n'y a pas chez lui ce classique réflexe antiaméricain de la plupart des hommes politiques français. A l'inverse de Villepin, il dit qu'on ne se bâtit pas contre les Etats-Unis, mais à côté d'eux.»
Sur le fond, le président de l'UMP considère que «[la France] ne peut pas se fâcher avec la première puissance du monde, d'autant plus qu'elle partage les mêmes valeurs que nous. Est-ce qu'on continue à se poser en rivaux ou est-ce qu'on s'additionne pour mieux coopérer ?» explique un proche. Le ministre de l'Intérieur déteste, par-dessus tout, la «grandiloquence, les postures et les mises en scène», poursuit le même. Dans son collimateur, le fameux discours de Villepin à l'ONU sur l'Irak de février 2003 et, surtout, la menace de Chirac d'utiliser le droit de veto de la France. «Sarko l'Américain, on l'assume... et puis ***** !» tranche Pierre Lellouche.
Pour ne surtout pas polémiquer et étaler ces divergences à quelques jours du discours de Chirac à l'ONU, les diplomates de l'Elysée se sont évertués à minimiser la portée des propos de Sarkozy. A rabaisser, comme l'a fait le ministre des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, le voyage de Sarkozy au rang de simple présence d'un membre du gouvernement à la «commémoration du 11 Septembre». Et tous de souligner, à l'instar de Douste-Blazy, que la rencontre de Sarkozy avec Bush ne traduit «aucune inflexion» de la politique française envers les Etats-Unis. En clair, «seul compte la voix du chef de l'Etat» pour parler à l'Amérique. «Au regard des résultats de notre diplomatie sur le Liban ou de ce que nous avions annoncé sur l'Irak, il n'y a aucune raison de refonder notre relation équilibrée avec Washington», note un diplomate de l'Elysée qui estime que la ligne tenue par l'Elysée depuis 2003 a porté ses fruits.
«Chiot». Alors que l'opposition frontale avec les Etats-Unis a été un événement fondateur de la carrière de Dominique de Villepin et que la décision de ne pas participer à la guerre en Irak reste la séquence la plus plébiscitée du bilan de Chirac, Sarkozy a «pris un risque réel en refusant de jouer sur les penchants antiaméricains de l'opinion publique», remarque Dominique Moïsi.
L'opposition l'a bien senti. «Nous n'avons pas besoin à la tête de l'Etat de quelqu'un qui se fixe comme programme d'être le futur caniche du président des Etats-Unis», a déclaré Laurent Fabius samedi à Lens, en usant d'une métaphore canine déjà utilisée à l'égard de Tony Blair. Dès jeudi, le député PS des Landes, Henri Emmanuelli, avait, lui, fustigé «Sarkozy couché comme un chiot devant son maître» Bush. Chirac ne doit pas être loin de penser la même chose.
«Arrogance». Le Président et le ministre de l'Intérieur avaient pourtant eu un tête-à-tête dans la semaine précédant le départ de Sarkozy. Mais ce dernier s'était bien gardé de transmettre à l'Elysée le discours qu'il devait prononcer devant la Fondation franco-américaine, dans lequel il a dénoncé «l'arrogance française» et fait la leçon au duo Chirac-Villepin : «Il n'est pas convenable de chercher à mettre ses alliés dans l'embarras ou de donner l'impression de se réjouir de leurs difficultés.» Avant de compléter le réquisitoire contre l'attitude de Paris lors du déclenchement de la guerre en Irak : «Plus jamais nous ne devons faire de nos désaccords une crise.» Des propos que Chirac a qualifié mardi en privé de «lamentables» et de «faute», après avoir, dans un premier temps, déclaré qu'il l'avait «chargé d'être le représentant de la France».
C'est bien deux visions, deux doctrines, qui opposent l'Elysée et Sarkozy sur cette question sensible. «Sans prononcer le mot de rupture, pour ne vexer personne, c'est une musique totalement différente que Nicolas Sarkozy a fait entendre aux Américains. Inutile d'agresser Jacques Chirac. Mais, si on gagne la présidentielle le 6 mai, il sera temps de changer de politique étrangère le 7», assure le député Pierre Lellouche, spécialiste de relations internationales, qui assistait au rendez-vous entre le ministre de l'Intérieur et George Bush. «Ce discours a été très difficile à écrire, car il ne fallait heurter personne, mais ne pas s'autocensurer non plus. Il suffit de le lire pour s'apercevoir qu'il comporte maintes ruptures avec la ligne actuelle», confirme un des collaborateurs du ministre issu du Quai d'Orsay.
Foudres. Prudent pour ne pas s'attirer les foudres immédiates de Chirac, Sarkozy prépare donc les esprits à un changement de cap radical à l'égard des Etats-Unis. Pour Dominique Moïsi, expert à l'Institut français des relations internationales (Ifri), «Nicolas Sarkozy parle avec un accent nouveau à l'Amérique. Il n'y a pas chez lui ce classique réflexe antiaméricain de la plupart des hommes politiques français. A l'inverse de Villepin, il dit qu'on ne se bâtit pas contre les Etats-Unis, mais à côté d'eux.»
Sur le fond, le président de l'UMP considère que «[la France] ne peut pas se fâcher avec la première puissance du monde, d'autant plus qu'elle partage les mêmes valeurs que nous. Est-ce qu'on continue à se poser en rivaux ou est-ce qu'on s'additionne pour mieux coopérer ?» explique un proche. Le ministre de l'Intérieur déteste, par-dessus tout, la «grandiloquence, les postures et les mises en scène», poursuit le même. Dans son collimateur, le fameux discours de Villepin à l'ONU sur l'Irak de février 2003 et, surtout, la menace de Chirac d'utiliser le droit de veto de la France. «Sarko l'Américain, on l'assume... et puis ***** !» tranche Pierre Lellouche.
Pour ne surtout pas polémiquer et étaler ces divergences à quelques jours du discours de Chirac à l'ONU, les diplomates de l'Elysée se sont évertués à minimiser la portée des propos de Sarkozy. A rabaisser, comme l'a fait le ministre des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, le voyage de Sarkozy au rang de simple présence d'un membre du gouvernement à la «commémoration du 11 Septembre». Et tous de souligner, à l'instar de Douste-Blazy, que la rencontre de Sarkozy avec Bush ne traduit «aucune inflexion» de la politique française envers les Etats-Unis. En clair, «seul compte la voix du chef de l'Etat» pour parler à l'Amérique. «Au regard des résultats de notre diplomatie sur le Liban ou de ce que nous avions annoncé sur l'Irak, il n'y a aucune raison de refonder notre relation équilibrée avec Washington», note un diplomate de l'Elysée qui estime que la ligne tenue par l'Elysée depuis 2003 a porté ses fruits.
«Chiot». Alors que l'opposition frontale avec les Etats-Unis a été un événement fondateur de la carrière de Dominique de Villepin et que la décision de ne pas participer à la guerre en Irak reste la séquence la plus plébiscitée du bilan de Chirac, Sarkozy a «pris un risque réel en refusant de jouer sur les penchants antiaméricains de l'opinion publique», remarque Dominique Moïsi.
L'opposition l'a bien senti. «Nous n'avons pas besoin à la tête de l'Etat de quelqu'un qui se fixe comme programme d'être le futur caniche du président des Etats-Unis», a déclaré Laurent Fabius samedi à Lens, en usant d'une métaphore canine déjà utilisée à l'égard de Tony Blair. Dès jeudi, le député PS des Landes, Henri Emmanuelli, avait, lui, fustigé «Sarkozy couché comme un chiot devant son maître» Bush. Chirac ne doit pas être loin de penser la même chose.
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