SALAM
Une pluie de difficultés
Bien que la période de boycott, qui dura trois ans, ait représenté de grandes difficultés pour une partie importante de la population mecquoise, elle fut aussi bénéfique à l'islam. D'une part, même si les nouveaux adeptes étaient moins nombreux qu'auparavant, ceux qui rejoignirent les rangs des musulmans durant cette période appartenaient à cette catégorie de personnes qui soutiennent la vérité quelles que puissent en être les conséquences.
D'autre part, la manière dont le boycott prit fin était également à l'avantage de l'islam. Les souffrances des Hachémites poussèrent les plus compatissants des polythéistes à agir en bravant les irréductibles comme Abu Jahl. Les Mecquois ne parlaient donc plus d'une seule voix. En outre, les plus acharnés donnaient une mauvaise image d'eux-mêmes, puisqu'ils s'opposaient à un acte de bonté envers leurs contribules.
Cette période du boycott vit, qui plus est, une relative accalmie du conflit opposant les musulmans aux négateurs. Les contacts étaient rares entre les deux camps. Cela laissa à de nombreux notables de Quraysh le temps de réfléchir à l'islam, le message du Prophète contenu dans le Coran. Le Coran était pour eux quelque chose d'extraordinaire. Son discours était si puissant qu'ils ne pouvaient pas s'en détourner quand ils l'entendaient réciter. Les irréductibles, qui avaient toujours le dessus, s'efforçaient d'empêcher leurs concitoyens d'écouter le Coran, leur recommandant de ne pas l'écouter lorsqu'ils l'entendaient mais d'élever la voix pour en couvrir le son.
Mais le Coran exerçait son attrait même sur les ennemis les plus acharnés de l'islam. Ils savaient que Muhammad passait une partie de la nuit à prier en récitant le Coran. Sous couvert de l'obscurité, plusieurs d'entre eux s'assirent près de sa maison pour écouter ce qu'il récitait à l'intérieur. Chacun était seul et pensait que personne ne saurait ce qu'il avait fait. On peut supposer que leur motivation était soit d'essayer de juger objectivement le message de l'islam, soit de savoir à quoi s'en tenir exactement, soit d'écouter le style magnifique du Coran.
L'aube arrivant, chacun prit le chemin du retour afin que personne ne s'aperçoive de ce qu'il avait fait. Bientôt cependant, Abu Jahl, Abu Sufyân et al-Akhnas se rencontrèrent. Ils n'avaient pas besoin de se demander mutuellement ce qu'ils faisaient là : il ne pouvait y avoir qu'une seule raison à leur présence à cet endroit à une heure pareille. Ils se conseillèrent donc de ne plus revenir ; l'un d'eux dit : « Si vos partisans vous voyaient, cela sèmerait le doute dans leur esprit. »
La nuit suivante tous trois revinrent, et ils se rencontrèrent à nouveau au point du jour. Ils se recommandèrent encore de ne plus se comporter de manière aussi « irresponsable ». Néanmoins, la troisième nuit, ils retournèrent tous les trois écouter le Coran près de la maison du Prophète . Lorsqu'ils se rencontrèrent au petit matin, ils eurent honte d'eux-mêmes. L'un d'eux suggéra qu'ils se jurent solennellement de ne plus revenir : c'est ce qu'ils firent avant de rentrer chez eux.
Plus tard dans la matinée, al-Akhnas ibn Sharîq alla voir Abu Sufyân chez lui. Il lui demanda ce qu'il pensait de ce qu'il avait entendu Muhammad réciter. Abu Sufyân répondit : « J'ai entendu des choses que je sais et que je reconnais comme vraies, mais j'ai aussi entendu d'autres choses dont je ne comprends pas la nature. » Al-Akhnas lui dit qu'il partageait ses sentiments. Il partit ensuite poser la même question à Abu Jahl. La réponse d'Abû Jahl fut totalement différente. Pour une fois, il fut honnête envers lui-même et son interlocuteur et répondit sans détour : « Je vais te dire ce que j'ai entendu ! Nous avons rivalisé pour les honneurs avec le clan de Abd Manâf : ils nourrissaient les pauvres, et nous faisions de même ; ils soutenaient ceux qui en avaient besoin, et nous faisions de même. Alors que nous étions ensemble au même niveau, comme deux chevaux de course galopant côte à côte, ils ont dit que l'un d'eux était un prophète recevant des révélations des cieux ! Quand pourrons-nous parvenir à un tel honneur ? Par Dieu, nous ne croirons jamais en lui. »
Décès de l'oncle protecteur
Peu après, Abu Tâlib, le protecteur du Prophète , tomba malade. Il avait plus de soixante-dix ans, et il était clair que la maladie lui serait fatale. Les chefs de Quraysh discutèrent entre eux de la manière dont la mort d'Abû Tâlib affecterait leurs relations avec son neveu
Muhammad, le Prophète de l'islam. Ils se dirent :
« Depuis que Hamza et 'Umar sont devenus musulmans, la force de l'islam n'a cessé d'augmenter. Maintenant, les partisans de Muhammad viennent de tous les clans de Quraysh. Allons trouver Abu Tâlib pour qu'il trouve un accord entre son neveu et nous. Qui nous garantit qu'ils ne tenteront pas de prendre le pouvoir dans notre cité ? »
Une délégation importante, composée des plus éminents d'entre eux comme 'Utba, Shayba, Abu Jahl, Umayya ibn Khalaf et Abu Sufyân, se rendit chez Abu Tâlib pour prendre des nouvelles de sa santé. Ces notables lui dirent ensuite : « Tu sais quelle haute position tu occupes parmi nous et combien nous te respectons. Dans ta situation présente, nous disons honnêtement que nous craignons le pire pour toi. Tu es conscient que les relations sont tendues entre ton neveu et nous. Nous te proposons de l'appeler afin que lui et nous nous engagions à ce que chaque camp vive en paix avec l'autre sans lui chercher querelle. »
En apparence, c'était là une approche des plus innocentes. Les Quraysh semblaient offrir un pacte juste garantissant la liberté aux deux parties. En fait, ils ne voulaient rien d'autre qu'un arrêt complet de la nouvelle prédication. Le Prophète ne devrait plus parler de l'unicité divine, comme le montre clairement le dialogue qui eut lieu entre les deux parties.
Abu Tâlib appela le Prophète et lui dit : « Voici les chefs de notre peuple. Ils ont demandé à te voir pour un engagement mutuel. » S'adressant à la délégation, le Prophète dit alors : « Je ne vous demande qu'une parole. Si vous me l'accordez, votre autorité sur tous les Arabes en sera renforcée. Les non-Arabes aussi se soumettront à vous. »
Pensant voir là un changement d'attitude de la part du Prophète Abu Jahl dit : « Oui, certes. Nous t'accordons cette parole, et dix autres pareilles. Que nous demandes-tu ? » Abu Jahl offrait-il là un chèque en blanc au Prophète ? C'était ce qu'il semblait, mais Abu Jahl n'était pas homme à faire des compromis. Le Messager de Dieu formula clairement sa requête : « Vous déclarez que vous croyez en l'unicité de Dieu et vous renoncez à adorer toute autre divinité que Lui.
Il ne voulait rien pour lui-même : ni la richesse, ni le rang, ni les honneurs, ni le commandement. Il voulait tout pour son message. Il exigeait qu'ils abandonnent toutes leurs idoles, qu'elles soient en pierre ou en chair et en os. Les délégués de Quraysh comprirent clairement ce que Muhammad voulait d'eux : ils frappèrent des mains pour exprimer leur désapprobation. L'un d'eux dit : « Toi, Muhammad, tu voudrais avoir un seul Dieu à la place de toutes ces divinités ? Voilà qui est bien étrange ! »
Reconnaissant l'impossibilité de parvenir à un compromis, les délégués repartirent déçus. Après leur départ, Abu Tâlib dit au Prophète : « Mon neveu, je ne pense pas que tu leur aies demandé trop. » Encouragé par cette remarque, le Prophète dit : « Alors toi, mon oncle, prononce cette parole. Elle te sera utile le Jour du Jugement. » Abu Tâlib répondit : « Si je ne craignais pas que toi et ton clan soyez insultés quand je ne serai plus là, et si je ne craignais pas que les Quraysh pensent que je l'ai prononcée parce que j'avais peur de la mort, je l'aurais certainement prononcée pour te faire plaisir. »
Le Prophète fut très affecté par la perte de son oncle. Abu Tâlib était l'homme qui avait élevé Muhammad, l'orphelin de huit ans qui avait déjà perdu ses deux parents et son grand-père. Il l'avait pris dans sa famille et traité comme son propre enfant, la pitié le poussant sans doute à lui témoigner encore plus de bonté. Lorsque Muhammad avait grandi, Abu Tâlib avait reconnu les immenses qualités de son neveu, alliant la force de caractère aux plus hautes valeurs morales et aux meilleures manières. De plus, Abu Tâlib avait protégé Muhammad, le Prophète de l'islam, lorsqu'il en avait besoin. Sa perte était donc très grave pour le Prophète. Après la mort d'Abû Tâlib, les irresponsables de Quraysh commencèrent à outrager le Prophète par la parole et l'action.
Décès de Khadija
Peut-être cinq semaines à peine après la mort d'Abû Tâlib, le Prophète subit une autre immense perte : sa chère femme Khadîja mourut elle aussi. Les récits ne permettent pas de déterminer avec certitude lequel des deux mourut en premier, mais les deux morts furent très rapprochées. Khadîja avait été pour Muhammad une épouse tendre et affectueuse, profondément attachée à son époux et à sa mission. Il trouvait auprès d'elle tout le réconfort qu'un homme peut espérer d'une épouse compréhensive. Elle partageait ses sentiments et ses inquiétudes.
Consciente de sa valeur, elle lui avait proposé le mariage. Dès le début de sa mission, elle avait été la première à croire en lui. Elle avait toujours été son principal soutien. Confronté aux pires problèmes à l'extérieur, il ne manquait jamais de trouver le réconfort chez lui. Sa disparition signifiait qu'il ne trouverait plus la compassion avec laquelle elle le réconfortait après les nombreuses déceptions qu'il subissait de la part des Quraysh.
Autrement dit, le Prophète avait, en très peu de temps, perdu à la fois le soutien dont il bénéficiait à l'extérieur et à l'intérieur. Il était maintenant plus vulnérable aux attaques des Quraysh. Plus tard, en se remémorant cette période, le Prophète devait dire : « Les Quraysh ne purent pas me faire beaucoup de mal avant la mort d'Abû Tâlib. »
Abu Tâlib parti, le Prophète dut subir de plus en plus la persécution des Quraysh. Un jour, un sot arrêta le Prophète et lui jeta de la poussière à la tête. Certains notables de Quraysh se montrèrent ravis de voir le Prophète humilié publiquement. Il rentra chez lui la tête pleine de poussière. L'une de ses filles, en larmes, s'avança pour lui nettoyer la tête. Il la réconforta en disant : « Ne pleure pas, petite fille, Dieu protégera ton père. » Dans un hadîth authentique, Muslim rapporte d'après Abdullâh ibn Mas ud :
A SUIVRE...
Une pluie de difficultés
Bien que la période de boycott, qui dura trois ans, ait représenté de grandes difficultés pour une partie importante de la population mecquoise, elle fut aussi bénéfique à l'islam. D'une part, même si les nouveaux adeptes étaient moins nombreux qu'auparavant, ceux qui rejoignirent les rangs des musulmans durant cette période appartenaient à cette catégorie de personnes qui soutiennent la vérité quelles que puissent en être les conséquences.
D'autre part, la manière dont le boycott prit fin était également à l'avantage de l'islam. Les souffrances des Hachémites poussèrent les plus compatissants des polythéistes à agir en bravant les irréductibles comme Abu Jahl. Les Mecquois ne parlaient donc plus d'une seule voix. En outre, les plus acharnés donnaient une mauvaise image d'eux-mêmes, puisqu'ils s'opposaient à un acte de bonté envers leurs contribules.
Cette période du boycott vit, qui plus est, une relative accalmie du conflit opposant les musulmans aux négateurs. Les contacts étaient rares entre les deux camps. Cela laissa à de nombreux notables de Quraysh le temps de réfléchir à l'islam, le message du Prophète contenu dans le Coran. Le Coran était pour eux quelque chose d'extraordinaire. Son discours était si puissant qu'ils ne pouvaient pas s'en détourner quand ils l'entendaient réciter. Les irréductibles, qui avaient toujours le dessus, s'efforçaient d'empêcher leurs concitoyens d'écouter le Coran, leur recommandant de ne pas l'écouter lorsqu'ils l'entendaient mais d'élever la voix pour en couvrir le son.
Mais le Coran exerçait son attrait même sur les ennemis les plus acharnés de l'islam. Ils savaient que Muhammad passait une partie de la nuit à prier en récitant le Coran. Sous couvert de l'obscurité, plusieurs d'entre eux s'assirent près de sa maison pour écouter ce qu'il récitait à l'intérieur. Chacun était seul et pensait que personne ne saurait ce qu'il avait fait. On peut supposer que leur motivation était soit d'essayer de juger objectivement le message de l'islam, soit de savoir à quoi s'en tenir exactement, soit d'écouter le style magnifique du Coran.
L'aube arrivant, chacun prit le chemin du retour afin que personne ne s'aperçoive de ce qu'il avait fait. Bientôt cependant, Abu Jahl, Abu Sufyân et al-Akhnas se rencontrèrent. Ils n'avaient pas besoin de se demander mutuellement ce qu'ils faisaient là : il ne pouvait y avoir qu'une seule raison à leur présence à cet endroit à une heure pareille. Ils se conseillèrent donc de ne plus revenir ; l'un d'eux dit : « Si vos partisans vous voyaient, cela sèmerait le doute dans leur esprit. »
La nuit suivante tous trois revinrent, et ils se rencontrèrent à nouveau au point du jour. Ils se recommandèrent encore de ne plus se comporter de manière aussi « irresponsable ». Néanmoins, la troisième nuit, ils retournèrent tous les trois écouter le Coran près de la maison du Prophète . Lorsqu'ils se rencontrèrent au petit matin, ils eurent honte d'eux-mêmes. L'un d'eux suggéra qu'ils se jurent solennellement de ne plus revenir : c'est ce qu'ils firent avant de rentrer chez eux.
Plus tard dans la matinée, al-Akhnas ibn Sharîq alla voir Abu Sufyân chez lui. Il lui demanda ce qu'il pensait de ce qu'il avait entendu Muhammad réciter. Abu Sufyân répondit : « J'ai entendu des choses que je sais et que je reconnais comme vraies, mais j'ai aussi entendu d'autres choses dont je ne comprends pas la nature. » Al-Akhnas lui dit qu'il partageait ses sentiments. Il partit ensuite poser la même question à Abu Jahl. La réponse d'Abû Jahl fut totalement différente. Pour une fois, il fut honnête envers lui-même et son interlocuteur et répondit sans détour : « Je vais te dire ce que j'ai entendu ! Nous avons rivalisé pour les honneurs avec le clan de Abd Manâf : ils nourrissaient les pauvres, et nous faisions de même ; ils soutenaient ceux qui en avaient besoin, et nous faisions de même. Alors que nous étions ensemble au même niveau, comme deux chevaux de course galopant côte à côte, ils ont dit que l'un d'eux était un prophète recevant des révélations des cieux ! Quand pourrons-nous parvenir à un tel honneur ? Par Dieu, nous ne croirons jamais en lui. »
Décès de l'oncle protecteur
Peu après, Abu Tâlib, le protecteur du Prophète , tomba malade. Il avait plus de soixante-dix ans, et il était clair que la maladie lui serait fatale. Les chefs de Quraysh discutèrent entre eux de la manière dont la mort d'Abû Tâlib affecterait leurs relations avec son neveu
Muhammad, le Prophète de l'islam. Ils se dirent :
« Depuis que Hamza et 'Umar sont devenus musulmans, la force de l'islam n'a cessé d'augmenter. Maintenant, les partisans de Muhammad viennent de tous les clans de Quraysh. Allons trouver Abu Tâlib pour qu'il trouve un accord entre son neveu et nous. Qui nous garantit qu'ils ne tenteront pas de prendre le pouvoir dans notre cité ? »
Une délégation importante, composée des plus éminents d'entre eux comme 'Utba, Shayba, Abu Jahl, Umayya ibn Khalaf et Abu Sufyân, se rendit chez Abu Tâlib pour prendre des nouvelles de sa santé. Ces notables lui dirent ensuite : « Tu sais quelle haute position tu occupes parmi nous et combien nous te respectons. Dans ta situation présente, nous disons honnêtement que nous craignons le pire pour toi. Tu es conscient que les relations sont tendues entre ton neveu et nous. Nous te proposons de l'appeler afin que lui et nous nous engagions à ce que chaque camp vive en paix avec l'autre sans lui chercher querelle. »
En apparence, c'était là une approche des plus innocentes. Les Quraysh semblaient offrir un pacte juste garantissant la liberté aux deux parties. En fait, ils ne voulaient rien d'autre qu'un arrêt complet de la nouvelle prédication. Le Prophète ne devrait plus parler de l'unicité divine, comme le montre clairement le dialogue qui eut lieu entre les deux parties.
Abu Tâlib appela le Prophète et lui dit : « Voici les chefs de notre peuple. Ils ont demandé à te voir pour un engagement mutuel. » S'adressant à la délégation, le Prophète dit alors : « Je ne vous demande qu'une parole. Si vous me l'accordez, votre autorité sur tous les Arabes en sera renforcée. Les non-Arabes aussi se soumettront à vous. »
Pensant voir là un changement d'attitude de la part du Prophète Abu Jahl dit : « Oui, certes. Nous t'accordons cette parole, et dix autres pareilles. Que nous demandes-tu ? » Abu Jahl offrait-il là un chèque en blanc au Prophète ? C'était ce qu'il semblait, mais Abu Jahl n'était pas homme à faire des compromis. Le Messager de Dieu formula clairement sa requête : « Vous déclarez que vous croyez en l'unicité de Dieu et vous renoncez à adorer toute autre divinité que Lui.
Il ne voulait rien pour lui-même : ni la richesse, ni le rang, ni les honneurs, ni le commandement. Il voulait tout pour son message. Il exigeait qu'ils abandonnent toutes leurs idoles, qu'elles soient en pierre ou en chair et en os. Les délégués de Quraysh comprirent clairement ce que Muhammad voulait d'eux : ils frappèrent des mains pour exprimer leur désapprobation. L'un d'eux dit : « Toi, Muhammad, tu voudrais avoir un seul Dieu à la place de toutes ces divinités ? Voilà qui est bien étrange ! »
Reconnaissant l'impossibilité de parvenir à un compromis, les délégués repartirent déçus. Après leur départ, Abu Tâlib dit au Prophète : « Mon neveu, je ne pense pas que tu leur aies demandé trop. » Encouragé par cette remarque, le Prophète dit : « Alors toi, mon oncle, prononce cette parole. Elle te sera utile le Jour du Jugement. » Abu Tâlib répondit : « Si je ne craignais pas que toi et ton clan soyez insultés quand je ne serai plus là, et si je ne craignais pas que les Quraysh pensent que je l'ai prononcée parce que j'avais peur de la mort, je l'aurais certainement prononcée pour te faire plaisir. »
Le Prophète fut très affecté par la perte de son oncle. Abu Tâlib était l'homme qui avait élevé Muhammad, l'orphelin de huit ans qui avait déjà perdu ses deux parents et son grand-père. Il l'avait pris dans sa famille et traité comme son propre enfant, la pitié le poussant sans doute à lui témoigner encore plus de bonté. Lorsque Muhammad avait grandi, Abu Tâlib avait reconnu les immenses qualités de son neveu, alliant la force de caractère aux plus hautes valeurs morales et aux meilleures manières. De plus, Abu Tâlib avait protégé Muhammad, le Prophète de l'islam, lorsqu'il en avait besoin. Sa perte était donc très grave pour le Prophète. Après la mort d'Abû Tâlib, les irresponsables de Quraysh commencèrent à outrager le Prophète par la parole et l'action.
Décès de Khadija
Peut-être cinq semaines à peine après la mort d'Abû Tâlib, le Prophète subit une autre immense perte : sa chère femme Khadîja mourut elle aussi. Les récits ne permettent pas de déterminer avec certitude lequel des deux mourut en premier, mais les deux morts furent très rapprochées. Khadîja avait été pour Muhammad une épouse tendre et affectueuse, profondément attachée à son époux et à sa mission. Il trouvait auprès d'elle tout le réconfort qu'un homme peut espérer d'une épouse compréhensive. Elle partageait ses sentiments et ses inquiétudes.
Consciente de sa valeur, elle lui avait proposé le mariage. Dès le début de sa mission, elle avait été la première à croire en lui. Elle avait toujours été son principal soutien. Confronté aux pires problèmes à l'extérieur, il ne manquait jamais de trouver le réconfort chez lui. Sa disparition signifiait qu'il ne trouverait plus la compassion avec laquelle elle le réconfortait après les nombreuses déceptions qu'il subissait de la part des Quraysh.
Autrement dit, le Prophète avait, en très peu de temps, perdu à la fois le soutien dont il bénéficiait à l'extérieur et à l'intérieur. Il était maintenant plus vulnérable aux attaques des Quraysh. Plus tard, en se remémorant cette période, le Prophète devait dire : « Les Quraysh ne purent pas me faire beaucoup de mal avant la mort d'Abû Tâlib. »
Abu Tâlib parti, le Prophète dut subir de plus en plus la persécution des Quraysh. Un jour, un sot arrêta le Prophète et lui jeta de la poussière à la tête. Certains notables de Quraysh se montrèrent ravis de voir le Prophète humilié publiquement. Il rentra chez lui la tête pleine de poussière. L'une de ses filles, en larmes, s'avança pour lui nettoyer la tête. Il la réconforta en disant : « Ne pleure pas, petite fille, Dieu protégera ton père. » Dans un hadîth authentique, Muslim rapporte d'après Abdullâh ibn Mas ud :
A SUIVRE...
Commentaire