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Histoire d'un algérien (récit basé sur des faits réels)
Histoire d'un algérien (récit basé sur des faits réels) (première partie)
Je l'ai rencontré au milieu d'une banlieue parisienne, la bouche bavant et les yeux hagards. Sa physionomie reflétait sa souffrance et son habit sa misère. Jeté dans un coin humide tel un canidé délaissé d'où se dégageait une odeur nauséabonde qui pouvait chasser à elle seule le plus charitable des nez. Il demandait l'aumône, pourtant il ne dépassait pas la trentaine. A ma vue, il se jeta sur moi comme se jette un naufragé sur une bouée de sauvetage, il me récita avec un air qui me parut hystérique quelques versets coraniques et me supplia au nom de Sidi Abdelkader de lui venir en aide. J'ai cru que l'argent était un bon remède, qu'il suffit de quelques euros pour que ce débris humain fasse bonne chair cette nuit mais hélas il me répondit qu'il ne veut pas de mon argent et qu'il faut, au nom de l'Algérie et de la fraternité arabo-musulmane, que je l'emmène chez moi diner et dormir tant il a longtemps qu'il n'a pas goûté au plaisir d'une copieuse table et au douceur d'un bon lit. J'arrachai mon pied d'entre ses bras et je le quittai en le souhaitant bonne chance car j'imaginai déjà l'esclandre que je déclencherai lorsque ma mère s'apercevra que j'ai amené un clochard à la maison. Je me rappelai aussi combien de familles étaient volées en donnant gît et couvert à des inconnus. Je continuai mon chemin et au rond-point suivant j'oubliai la scène.
Le soir, moi et quatre amis avions l'habitude de se rencontrer chez Paul, un jeune universitaire plein de talents, où autours d'un bon café nous débattions de tout et de rien.
Nous récitâmes cette soirée là tout le mal du siècle : chômage, guerre, pauvreté, ignorance….Et à force d'énumérer des avatars fatidiques, nous nous ennuyâmes et Ali nous conseilla de se souvenir de quelques anecdotes afin d'aérer nos cortex cérébraux car nous risquons à ce rythme une suffocation spirituelle. Passant de coq-à-l'âne, je trouvai intéressant de leur relater la scène de l'après-midi. Aussitôt, une pluie d'injures s'abattit sur le système capitaliste, sur le gouvernement français et sur son homologue algérien; j'ai eu ma part aussi de cette rixe linguistique car selon eux, un bon musulman ne laisse jamais son frère en détresse et autant d'autres bagatelles. Soudain Paul se leva et nous proposa d'aller le chercher, nous restâmes sidérés. Il insista en alléguant qu'il vivait seul et qu'il pouvait l'héberger quelques nuits jusqu'à ce que nous trouvions une solution adéquate. Nous lui fîmes voir que ce fut de la folie, il nous rappela qu'Erasme en avait fait l'éloge. Chose dite, chose faite, nous descendîmes découvrir mon cadavre mystérieux.
La ruelle était déserte, c'était déjà minuit. Saleh nous avertit que si la police nous saisit nous aurions de graves ennuis. Paul fit la sourde oreille et me demanda de lui servir de guide. Il était au même coin, recroquevillé, fumant un mégot, toujours sale mais cette fois avec un bonnet jamaïcain sur la tête. Ironie du sort, lorsque nous voulûmes l'aider à se mettre sur ses deux pieds, il se figea et nous supplia de ne point le voler. Nous essayâmes de le réconforter avec des exhortations, je lui rappelai que j'étais la personne à qui il a parlé ce matin, il répartit qu'il ne se souvenait pas. Après un quart d'heure de lutte, La Vito (voiture) s'élança dans la nuit vers l'inconnu ; je ne savais pas si cela était permis ou si ce que nous faisions était du bien ou du mal ; je radotai.... et enfin j'ouvrai la fenêtre, tout en maudissant Paul, afin de se dégager de la puanteur et respirer un peu d'air frais.
La première chose à faire était de le laver. La crasse avait formé une couche huileuse sur sa peau et les champignons avaient dévoré quelques fragments de son épiderme. Les vapeurs du cannabis lui montait encore à la tête. Lorsque nous l'installâmes sous la douche, il cria qu'il ne voulait pas mourir.
Propre et bien repu, notre particule retrouva son état d'esprit et son apparence humaine. Ses yeux livides et cernés de bagues vertes laissèrent couler quelques perles sur sa joue, il balbutia quelques phrases de remerciements et nous l'observâmes durant quinze minutes comme on observe un joyau de musée. Saleh murmura à Paul que cela suffit ainsi et qu'il fallut le mettre à la porte avant que la situation ne se dégradât, mais notre aventurier intrépide déclara qu'alea jacta est.
Notre invité répondit sincèrement à toutes nos questions; l'homme n'était pas fou, il avait même une bonne culture ce qui augmenta encore notre curiosité et nous lui demandâmes ce que Géronte demanda à Scapin :"qu'allait-il faire dans cette ruelle?"
Il nous fixa pour un bon moment comme s'il cherchait quelques dates sur nos visages, puis il se décida de nous raconter son histoire et son martyr, il nous relata sa vie comme s'il s'agissait de son dernier souffle et nous étions des polichinelles dans la main d'un savant alchimiste qui testait sur nous toutes les drogues émotionnelles car il suffisait qu'il parle pour que le pathos se taise.
"Mon grand père avait vu le jour en Algérie en mille neuf cent huit. Pendant sa jeunesse, il ne receva aucune éducation et vécut au milieu d'une société rurale qui ne connaissait de la vie que manger et dormir. Il se maria jeune et eut dans si peu de temps six bouches à nourrir chose extraordinaire sous la colonisation. Dés que les évènements de mille neuf cent quarante cinq éclatèrent, Othman, afin de sauvegarder sa famille, s'enfuit à Tunis et décida de s'y installer, laissant en friche toute sa terre en Algérie. Il est vrai que, pendant cette période, la culture de la terre était non seulement une occupation vaine vu la rareté de l'eau ainsi que de la main d'oeuvre mais sans aucun doute assez dangereuse puisque le colon vous demandera un tribut sur la récolte et les fellagas en demanderont aussi leur part légitime et si par malheur on s'avisait que vous êtes le suppôt de n'importe quel camp, la mort était assurée. Aprés plusieurs années de besognes au port de Tunis, il arriva enfin à acheter un petit gourbi. La famille fêta avec joie la nouvelle et la mère Mabrouka n'aura pas désormais à subir le préjudice à dormir dans une église. Et bien que sa souffrance fusse atroce, Othman n'oublia jamais la Providence, il ne regimba d'aucune manière, affaire difficile aujourd'hui car à tout le monde on enseigne Descarte et nous devenons pyrrhoniens précocement.
En octobre mille neuf cent cinquante mon père arriva au monde. Damnation atavique, Il n'eut point de bonne éducation et à peine arrivait-il à déchiffrer le coran. Il essaya plusieurs entreprises sans réussir aucune, il en déduit que l immigration était sa seule chance, mais hélas, il choisit la mauvaise direction, au lieu de partir vers l Europe, il se trouva en Libye, juste avant l embargo américain. Entre temps il se maria et je fus né. Après deux ans sans histoires les libyens chassèrent toute la main d œuvre qui ne portait pas la nationalité locale. Il rentra à Tunis avec une petite bourse et ouvrit une épicerie afin de subvenir honorablement aux besoins du ménage. Je grandis ainsi au milieu d une famille presque pauvre et presque analphabète.
Contrairement à mes aïeux, j m'inoculais en mon enfance une curiosité maladive et une soif insatiable de savoir. Dés mes premières années à l école, mes professeurs remarquèrent mon engouement pour la lecture et je fus sans aucune difficulté maintes fois le premier de la classe. Mon père m en félicita et je reçus mon premier vélo, j étais aux anges.
Les années passèrent et de succes en succès je tombais amoureux de cet adage Augusta per angusta. Le jour ou je fus accepté comme normalien, mes camarades jaloux ou soucieux de mon intérêt, me rappelèrent que je portais la nationalité algérienne, que je me fatiguais pour rien et mieux valait que je cherchasse un métier car de toutes les manières aucun établissement étatique ne m acceptera. Quatre ans révolus, mon diplome à la main, la prophétie se réalisa, aucun centre, aucune entreprise n'accepta de m'employer et je me suis trouvé acculer au plus sombre coin du désespoir.(Fin de la première partie) (à suivre)
Dernière modification par rossinhol, 23 septembre 2009, 23h47.
Histoire d'un algérien (récit basé sur des faits réels) (deuxième partie)
Rym fait irruption dans ma vie au même moment où les mouvements islamistes écartelèrent l'Algérie au quatre coins de l'absurde. Elle était belle, blanche comme de la porcelaine, sa chevelure était une nuit boréale et ses lèvres une cerise broyée. Je succombais à sa vue, elle aussi. Elle me répétait qu'elle trouvait dans la verdure de mes yeux le jardin d'Eden et chaque fois que ma main caressait la sienne je tressaillais. On ne dormait plus, on allait vers la mer et le mugissement des vagues étaient pour nos oreilles moonlight de Beethoven. (à suivre)
Dernière modification par rossinhol, 24 septembre 2009, 00h31.
Elle adorait les étoiles, moi j'adorais ses yeux. C'étaient des jours où le bonheur coulait à flots, l'une de ses périodes qui arrive une ou deux fois dans une vie. Nous nous promettions le mariage mais dés que sa famille sut que je n'avais pas droit au travail en Tunisie, le rêve calme et paisible devint une houle cauchemardesque. Alors puisque tous mes maux ont pour source un bout de papier, j'ai décidé d'en finir avec ce sujet, au moins j'arriverai à temps à récupérer Rym, la seule femme que j'aie aimé. Le lendemain, je me dirigeai vers le palais de justice tunisien plein d'espoirs, peut être....(à suivre)
Comme vous savez, la bureaucratie au tiers monde tue la moitié des peuples, la pauvreté et l'ignorance s'en charge du reste. J'ai passé par tous les bureaux de la maison prétendue de justice et enfin j'ai rencontré son altesse sérénissime, monsieur le juge à qui Dieu a donné par héritage la faculté de juger les hommes. Il s'est avéré qu'il ignorait les lois et que pendant toute sa carrière il jugeait selon la bonne volonté des vents. Le code civile, il le laissa de côté, il inventa un autre qui répondait mieux aux revendications de sa propre république. Lorsque je lui posai mon problème, il chercha au milieu d'un amas de livre, un petit livret qui recelait toutes les lois régissant la nationalité tunisienne.
- Vous êtes né à Tunis ? me demanda-t-il.
- Oui, Répondis-je.
- Et votre père ? Répartit-il.
- Mon père et ma mère ont vu le jour sur le sol tunisien, dis-je.
- Votre grand père donc, il est né à Tunis ? m'interrogea-t-il.
- Non, il est né en Algérie en mille neuf cent huit mais il résidait à Tunis depuis mille neuf cent quarante cinq, pourquoi est-ce que cela est si important ! il est même décidé et enterré à Tunis. répondis-je.
- Selon notre code civile, pour avoir la nationalité, il faut que vous, votre père et votre grand père soyez né sur le territoire Tunisien. Donc, vous ne pouvez opter pour cette procédure puisque vous dérogez à la règle mais il y'a une autre manière de procéder. me déclara-t-il.
-Illuminez-moi s'il vous plaît....me criai-je !
- Il faut avoir un certificat de résidence qui atteste que vous résidez à Tunis depuis plus de cinq ans, un bulletin numéro trois clean, une carte de résidance en cours de validité mais je ne vous promets rien car l'obtention ou le refus de la demande relève d'une autorité supérieure à la mienne ( de la présidence, me chuchota-t-il) répartit-il.
(à suivre)
Dernière modification par rossinhol, 24 septembre 2009, 23h50.
Je quittai le juge à moitié désespéré. A la maison, je récitai à mon père les propos de la justice dans l'espoir qu'il me viendra en aide mais ce dernier m'atomisa en m'annonçant qu'il avait passé par la même procédure il y'a vingt ans et jusqu'à maintenant aucune réponse n'est réçue. A vrai dire je n'avais pas d'alma mater, un bâtard des nations j'étais et ma bâtardise il fallait la cacher à mes collègues universitaires qui m'harcelaient de questions à chaque rencontre. Je pleurais en silence plusieurs semaines, je fumai de l'herbe avec quelques damnés mais il fallait leur cacher aussi mes larmes car selon eux les hommes ne pleurent pas !
Un ami me conseilla de partir se renseigner chez le représentant de mon Etat, le consulat algérien à Tunis. Aprés une illiade et deux odyssées, j'arrivai à rencontrer sa magnanimité, monsieur le consul général. La seule phrase que j'aie pu comprendre était "on ne sait pas quoi faire" et j'ai découvert une vérité atroce que treize mille hommes souffraient de la même douleur. (à suivre)
Dernière modification par rossinhol, 25 septembre 2009, 00h16.
Je me renseignais chez un avocat sur la situation des magrébins souffrant la même lèpre dont je souffrais. Il me déclara que le jus solis n'est pas encore appliqué aux pays du Maghreb, que le jus sanguinis est la seule lois qui procure la nationalité. La France par exemple, il suffit de naître sur son sol pour être français. Mais ici, au sud de la méditerranée, nos lois sont encore archaïques. Je consultais le code civil algérien, je me confrontai au même dilemme, on condamnait là-aussi le neveu à cause du grand-père. Simple corolaire, on était victime des deux cotés de la réciprocité. C'était un impasse ! J'ai failli me suicider mais une voix intérieure me criait chaque matin "cours Forrest, cours Forrest…"
Entre temps, Rym se fiança à un capitaine dans l'armée, elle qui aimait les étoiles était aux anges lorsqu'elle sut que son prétendant en avait deux sur les épaules. Il fallait aussi que Forrest courût encore. N'imaginez pas mon amertume car, dans cet instant, elle était ineffable.
Je décidai alors de passer vers l'Algérie pour postuler à un emploi. A l'ambassade lorsque je leur ai demandé de l'aide en tant qu'algérien en détresse, ils m'ont envoyé tartir et m'ont suggéré de faire le parcours tout seul, puisque ils n'en sont pas concernés. Mais comment faire puisque en Algérie, je n'avais personne ? Je serais presque un étranger sauf que mes papiers prouvent que je suis algérien. (A suivre)
Dernière modification par rossinhol, 25 septembre 2009, 00h17.
Pangloss répétait à Candide que "tout allait vers le bien et que nous sommes dans le meilleur des mondes possibles" je répétais cette phrase mille fois en parcourant le mille kilomètre qui sépare la capitale tunisienne de sa voisine algérienne. Seul au monde, me renseignant sur la procédure à suivre afin d'accéder à des concours nationaux, on m'ordonna d'apporter d'abord l'équivalence de mon diplôme du ministère de l'éducation supérieure. Aprés des hauts et des bas, j'arrivai enfin à décrocher cet autre bout de papier. Enfin, je respirai profondément pour la première fois depuis deux ans. Une immense pancarte couvrait l'immeuble d'en face sur laquelle il est écrit en gras, concorde civile pour une Algérie forte et sécurisée. L'optimisme me porta sur ses ailes vers les nues, je pourrais finalement réaliser mon rêve et conserver mon génie. Mais....(A suivre)
Dernière modification par rossinhol, 25 septembre 2009, 01h12.
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