Il était a peu après 18h30 quand nous arrivâmes a Mayo. La pluie n’avait cessé de tomber depuis Bouira et moi je n’avais cessé de rêver depuis Alger. Je n’avais qu’une obsession, comment repartir le plus rapidement possible d’ici. L’esprit humain veut que quand on cherche pour de l’inspiration, on regarde autour de nous. Mais depuis Bouira, les essuie-glaces semblaient me dire catégoriquement « Non ! » et en deux fois comme quelqu’un qui bégayait. Mon frère était heureux, je ne saurais jamais si c’était l’effet des Marlborough ou le faite que maintenant je n’étais plus en France. Il accompagnait Matoub dans ses chansons et voulait même inviter Omar à boire quelques bières à Tazmalt, comme pour célébrer mon expulsion. Tazmalt, une petite agglomération, avait la réputation d’être simplement un bar. C’était marrant, parceque quand quelqu’un disait qu’il allait a Tazmalt, c’était forcément pour boire. Même s’il y allait pour voir le Docteur ou faire son marché du jeudi, les gens refusaient tout bonnement de croire qu’on pouvait faire autre chose que boire dans cette petite ville. Omar déclina l’invitation de mon frère pour les bières, mais lui avait suggéré de remplir un jerrican en plastique de deux litres avec du vin à emporter.
Je ne sais pas a quoi ressemble la scène du dernier jugement, mais l’entrée de mon village ne serait certainement pas loin de la réalité…si on allait en enfer bien sur. Toujours sous une pluie battante, nous traversâmes la dernière rivière qui menait à mon village. La montée qui y menait ressemblait à un serpentin, l’interminable escalade vers l’enfer ? En entrant au village, nous vîmes une petite lumière sur le bord de la route. C’était ma grand-mère qui nous attendait avec une lampe à pétrole et un âne pour transporter les bagages. Mon village n’avait pas encore d’électricité, même les papillons de nuit le maudissaient, il contribuait a réduire encore plus leur existence.
Si une femme allait me faire oublier Malika, c’était bien ma grand-mère. L’amour qu’elle me portait ne pouvait être égalé par aucune femme, même pas par ma mère. Je pouvais faire toutes les bêtises du monde, et elle trouvait toujours un alibi ou des circonstances atténuantes pour mes actes. Apres m’avoir étouffé dans ses bras et couverts de baisers intermittents, j’aida mon frère a charger les bagages. Tout au long du trajet vers notre modeste demeure, elle abominait la France pour m’avoir dérobé à son amour, et la remercier de m’avoir expulsé. Dans sa naïveté, elle disait :
- « Inaal bou França…je la donne a celui qui la veut. La France c’est pour les Français. Et notre pays, c’est pour nous. » Immédiatement après de telles phrases, elle roulait ses bras autour de moi. Mon frère était parti à l’avant avec l’âne, il était irrité par l’affection excessive de ma grand-mère ou il était pressé de fumer une Marlborough au coin du feu.
En arrivant à notre maison, ma mère ouvrit la porte et me salua furtivement comme a son habitude, tandis que ma petite sœur sauta dans mes bras et se blottit contre ma moumoute trempée, mais cela ne sembla pas la gêner. En déchargeant l’âne, mon frère ordonna à sa jeune femme de faire du café pour accompagner ses cigarettes. Ma belle sœur me salua et me souhaita la bienvenue avant de pousser la porte de la cuisine. Ma famille était en pleine récolte des olives. Ils avaient tous les mains noires et des courbatures dans le dos. Ma mère certainement pensa qu’une paire de mains était la bienvenue et mon frère, la division des corvées de bois. Je dis division, mais mon frère avait horreur des divisions. Le connaissant, il allait faire ses adieux à la hache et aux troncs d’oliviers.
Le bonheur de ma sœur en voyant ses petites robes, et la main de ma grand-mère sur mon avant bras dissipaient peu a peu ma tristesse depuis ce jour maudit a la Préfecture de la cité. Ma mère interrompit mes pensées en me demandant si j’avais faim. Je répondis non, en même temps qu’elle jeta deux grives sur le feu. Je contemplai leur graisse fondre un bois de pin tandis que ma grand-mère me demandait des nouvelles de son fils, mon père. Elle pensa qu’il devait se sentir seul maintenant que j’avais quitté la France.
Les grands yeux noirs de ma petite sœur me rappelaient ceux de Malika pour un moment, et inévitablement, je savais que j’allai devenir le meilleur ami du facteur. Je dis facteur, mais c’était un commerçant qui ramenait le courrier de la poste quand il avait le temps d’y aller. Mon départ de France avait fait le bonheur de deux personnes, mon père et celui de Malika. Et mon arrivée en Algérie, celui de ma grand-mère et de ma petite sœur.
Ma sentence allait commencer par un poème, Kabylité oblige. La réponse des Kabyles a tous les maux que le destin leur a jeté.
Je suis de repos aujourd’hui…mais je dois faire mes courses pour célébrer la vie et la tentative de suicide qui avait échoué…a demain mes amis.
Je ne sais pas a quoi ressemble la scène du dernier jugement, mais l’entrée de mon village ne serait certainement pas loin de la réalité…si on allait en enfer bien sur. Toujours sous une pluie battante, nous traversâmes la dernière rivière qui menait à mon village. La montée qui y menait ressemblait à un serpentin, l’interminable escalade vers l’enfer ? En entrant au village, nous vîmes une petite lumière sur le bord de la route. C’était ma grand-mère qui nous attendait avec une lampe à pétrole et un âne pour transporter les bagages. Mon village n’avait pas encore d’électricité, même les papillons de nuit le maudissaient, il contribuait a réduire encore plus leur existence.
Si une femme allait me faire oublier Malika, c’était bien ma grand-mère. L’amour qu’elle me portait ne pouvait être égalé par aucune femme, même pas par ma mère. Je pouvais faire toutes les bêtises du monde, et elle trouvait toujours un alibi ou des circonstances atténuantes pour mes actes. Apres m’avoir étouffé dans ses bras et couverts de baisers intermittents, j’aida mon frère a charger les bagages. Tout au long du trajet vers notre modeste demeure, elle abominait la France pour m’avoir dérobé à son amour, et la remercier de m’avoir expulsé. Dans sa naïveté, elle disait :
- « Inaal bou França…je la donne a celui qui la veut. La France c’est pour les Français. Et notre pays, c’est pour nous. » Immédiatement après de telles phrases, elle roulait ses bras autour de moi. Mon frère était parti à l’avant avec l’âne, il était irrité par l’affection excessive de ma grand-mère ou il était pressé de fumer une Marlborough au coin du feu.
En arrivant à notre maison, ma mère ouvrit la porte et me salua furtivement comme a son habitude, tandis que ma petite sœur sauta dans mes bras et se blottit contre ma moumoute trempée, mais cela ne sembla pas la gêner. En déchargeant l’âne, mon frère ordonna à sa jeune femme de faire du café pour accompagner ses cigarettes. Ma belle sœur me salua et me souhaita la bienvenue avant de pousser la porte de la cuisine. Ma famille était en pleine récolte des olives. Ils avaient tous les mains noires et des courbatures dans le dos. Ma mère certainement pensa qu’une paire de mains était la bienvenue et mon frère, la division des corvées de bois. Je dis division, mais mon frère avait horreur des divisions. Le connaissant, il allait faire ses adieux à la hache et aux troncs d’oliviers.
Le bonheur de ma sœur en voyant ses petites robes, et la main de ma grand-mère sur mon avant bras dissipaient peu a peu ma tristesse depuis ce jour maudit a la Préfecture de la cité. Ma mère interrompit mes pensées en me demandant si j’avais faim. Je répondis non, en même temps qu’elle jeta deux grives sur le feu. Je contemplai leur graisse fondre un bois de pin tandis que ma grand-mère me demandait des nouvelles de son fils, mon père. Elle pensa qu’il devait se sentir seul maintenant que j’avais quitté la France.
Les grands yeux noirs de ma petite sœur me rappelaient ceux de Malika pour un moment, et inévitablement, je savais que j’allai devenir le meilleur ami du facteur. Je dis facteur, mais c’était un commerçant qui ramenait le courrier de la poste quand il avait le temps d’y aller. Mon départ de France avait fait le bonheur de deux personnes, mon père et celui de Malika. Et mon arrivée en Algérie, celui de ma grand-mère et de ma petite sœur.
Ma sentence allait commencer par un poème, Kabylité oblige. La réponse des Kabyles a tous les maux que le destin leur a jeté.
O mon beau Pays aux prisons sans murs,
Aux chaînes et aux anneaux sans remords,
Aux chaînes et aux anneaux sans remords,
Envenime moi de tes douloureuses morsures,
Allège ma souffrance en m’offrant la mort.
Allège ma souffrance en m’offrant la mort.
Je suis de repos aujourd’hui…mais je dois faire mes courses pour célébrer la vie et la tentative de suicide qui avait échoué…a demain mes amis.
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