Suite: Salah Bey Ben Mostefa (1771 - 1791)
En dépit de ses difficultés financières, il participa avec succès à la défense d'Alger en 1783 contre une nouvelle attaque espagnole, et, au cours de la même année, à l'expédition du pacha d'Alger contre celui de Tunis.
A l'époque de Ali Bey pacha de Tunis, certaines tribus algériennes transhumant entre les deux pays avaient été durement traitées par les autorités tunisiennes. Etant donné les bons rapports qui existaient, on fit la sourde oreille. Mais en novembre 1783 on se rappela soudain cet incident, Salah Bey réclama alors à Hamouda Pacha de Tunis quarante mille sequins au titre de dommages pour les victimes.
Tunis se plaignit à Alger. Mais le dey ne fit rien. Hamouda Pacha comprit que c'était une provocation le conduisant à la guerre. Il s'y prépara. Quelques semaines après, les deux adversaires se trouvèrent face à face aux frontières.
Réflexion faite, Hamouda Pacha préféra régler le litige à l'amiable. Les négociations aboutirent en juin 1784. En plus des obligations antérieures à égard du dey, Salah Bey obtenait 25.000 sequins, de l'huile, du sel et de la farine pour la milice.
Après cet accord, Salah Bey se replia avec ses troupes pour rejoindre Osman Dey qui s'apprêtait à combattre les Espagnols dont l'attaque sur Alger était imminente. Celle ci eut lieu en juillet 1784 dirigée par Don Barcelo. Les Espagnols furent battus et rejetés à la mer. Salah Bey fut, une fois de plus, un des meilleurs artisans de la victoire. Ce qui accrut son prestige et lui conféra une autorité incontestable dans toute sa province. Les Douaouda, les Ferdjioua, les Heracta, les Mokrani et autres feudataires de moindre importance, jusque là plus ou moins distants, vinrent lui rendre hommage.
Il accueillit les Douaouda avec satisfaction, sans leur montrer le moindre signe reflétant ses sentiments d'hostilité et de haine, car il tenait toujours à son désir de les réduire à l'impuissance par la force ou par la ruse. A cet effet, il se rendit trois fois dans le Sud, à la fois pour marquer sa présence et pour surveiller l'évolution du développement de son plan d'action dirigé contre ses ennemis. Ces préoccupations le retinrent en permanence dans sa province, au point de renoncer à présenter lui même le denouche au pacha en 1786.
Au cours de l'année 1787, de nouveaux incidents avec la Tunisie l'obligèrent à préparer une nouvelle expédition. Mais Hamouda Pacha préféra une fois de plus, accepter les conditions algériennes que s'engager dans une guerre incertaine.
Suffisamment doté en hommes et en matériel, sûr de ses agents et du fruit de leur travail au sein de la confédération des Douaouda, confiant en ses feudataires de l'Est et de l'Ouest, Salah Bey décida de monter une expédition punitive contre Touggourt dont le sultan Ferhat Ben Djellab se refusait toujours à reconnaître la suzeraineté turque. Toutefois, avant de s'aventurer dans cette région lointaine, où le succès à atteindre pouvait si facilement se changer en un revers désastreux, il fit entreprendre des démarches de conciliation avec le sultan pour l'amener à payer seulement un tribut symbolique de vassalité.
Les négociations n'ayant pas abouti, il résolut de recourir aux armes.
Le secret en fut bien gardé jusqu'à la fin d'octobre 1788, saison, en principe favorable aux déplacements de troupes dans le Sud.
Salah Bey prit le départ de l'Oued Djedi, point de ralliement de ses auxiliaires. Il avança avec son artillerie jusqu'aux environs de Sidi Khelif où une forte chute de neige subite faillit disséminer ses troupes. Il atteignit difficilement Touggourt après dix huit jours de marche.
Il fit planter ses tentes non loin de la ville protégée par des remparts et un fossé profond rempli d'eau. Pendant que les batteries établies sur des esplanades construites en troncs de palmiers ouvraient le feu contre Bab El Khadra, Sidi Abdeslam, le quartier de Tellis et la Casbah, les fantassins abattaient à coups de haches les arbres fruitiers des jardins environnants. En dépit d'un mauvais temps exceptionnel dans cette région, les combats furent conduits de part et d'autre avec acharnement et violence occasionnant de part et d'autre des dégâts importants. Harcelés à leurs arrières par les goums de Souf, de Ouargla et d'ailleurs les Turcs finirent par desserrer leur étreinte sur la ville. Les vivres et les fourrages devenant rares et impossible à renouveler, ils décidèrent de battre en retraite.
Cet échec déjoua toutes les espérances de Salah Bey. Son amertume et sa haine à l'égard des Touggourtins, se trouvèrent au comble de l'exaspération quand, dans son mouvement de recul, il vit son monde se tirer péniblement des marais où il dut abandonner une partie de son matériel dont deux canons. Il assouvit sa vengeance, en écrasant toutes les petites cités rencontrées sur sa route emportant dans ses bagages un lourd butin de toute nature.
La résistance, animée par des confréries religieuses ne se départit point de son mordant ; elle l'obligea à renoncer à ses prétentions tout au moins dans l'immédiat et quitter rapidement la région. Mais il ne se sentit pas définitivement battu; dès qu'il remit pied à Qacentina, il reprit le fil de ses intrigues en chargeant son bach siyar Hadj Messaoud Ben Zekri, andalous d'origine, riche intelligent, cultivé, affable, ami et parent des principales familles du constantinois et d'Alger, de servir d'intermédiaire auprès de ses ennemis pour trouver une solution de paix honorable autant pour les uns que pour les autres.
Le bey proposa la convention suivante : « Mohamed Debbah Ben Bou Okkaz, le cheikh el Arab viendrait à Biskra faire acte de soumission et recevrait confirmation de son titre et le kaftan d'investiture des mains du bey. Il resterait le chef reconnu de toutes les populations du Sud, et Mohamed Bel Hadj Ben Gana, cheikh el Arab in partibus, reprendrait sa place à Biskra, pendant qu'un autre Ben Gana (son neveu exactement) s'établirait à Touggourt ». Mohamed ne repoussa que cette dernière proposition, il voulait que ce soit son frère Saïd qui fut mis à la tête de cette principauté. Salah Bey réussit à le faire céder, en comblant lui et ses proches de cadeaux somptueux. Mais devinant la manoeuvre du bey, il mit en garde son cousin de Touggourt et lui conseilla de prendre ses dispositions pour toute éventualité.
De toute manière Salah Bey savait que pour qu'un Ben Gana s'établissât à Touggourt il eut fallu que le sultan en place, Ferhat Ben Djellab et ses héritiers fussent éliminés de la scène politique. Et pour cela il fallait user de la force. Pendant que l'agha s'acheminait à la tête de ses troupes vers les lieux, des goumiers mercenaires entretenaient la guérilla autour de la ville. Ferhat Ben Djellab sortit avec toute sa mehalla pour tenter de les châtier. Il alla camper en un lieu choisi pour la bataille. Dès qu'il s'établit dans sa tente, une main inconnue lui tendit un breuvage qui mit fin à ses jours immédiatement, avec la bénédiction de Mohamed Debbah Ben Bou Okkaz, Brahim Ben Djellab fut proclamé sultan.
Salah Bey et les Ben Gana feignirent d'ignorer l’auteur de cette manoeuvre en montrant la même sollicitude vis â vis de Mohamed Debbah Ben Bou Okkaz. Mais ils manoeuvrèrent auprès des Ben Djellab pour y semer la discorde en stimulant les ambitions de chacun.
Au nouveau sultan Brahim, cadet de la famille, ils opposèrent donc ses trois frères auxquels ils firent ressortir à chacun ses droits à la succession et miroiter leur appui. Tous prirent les armes, et chacun se retrancha dans une région jugée favorable à son action. Menacé de toutes parts, le sultan Brahim sollicita l'appui de Mohamed Bel Hadj Ben Gana, en raison de ses attaches avec le bey de Qacentina dont il espérait une aide.
En dépit de ses difficultés financières, il participa avec succès à la défense d'Alger en 1783 contre une nouvelle attaque espagnole, et, au cours de la même année, à l'expédition du pacha d'Alger contre celui de Tunis.
A l'époque de Ali Bey pacha de Tunis, certaines tribus algériennes transhumant entre les deux pays avaient été durement traitées par les autorités tunisiennes. Etant donné les bons rapports qui existaient, on fit la sourde oreille. Mais en novembre 1783 on se rappela soudain cet incident, Salah Bey réclama alors à Hamouda Pacha de Tunis quarante mille sequins au titre de dommages pour les victimes.
Tunis se plaignit à Alger. Mais le dey ne fit rien. Hamouda Pacha comprit que c'était une provocation le conduisant à la guerre. Il s'y prépara. Quelques semaines après, les deux adversaires se trouvèrent face à face aux frontières.
Réflexion faite, Hamouda Pacha préféra régler le litige à l'amiable. Les négociations aboutirent en juin 1784. En plus des obligations antérieures à égard du dey, Salah Bey obtenait 25.000 sequins, de l'huile, du sel et de la farine pour la milice.
Après cet accord, Salah Bey se replia avec ses troupes pour rejoindre Osman Dey qui s'apprêtait à combattre les Espagnols dont l'attaque sur Alger était imminente. Celle ci eut lieu en juillet 1784 dirigée par Don Barcelo. Les Espagnols furent battus et rejetés à la mer. Salah Bey fut, une fois de plus, un des meilleurs artisans de la victoire. Ce qui accrut son prestige et lui conféra une autorité incontestable dans toute sa province. Les Douaouda, les Ferdjioua, les Heracta, les Mokrani et autres feudataires de moindre importance, jusque là plus ou moins distants, vinrent lui rendre hommage.
Il accueillit les Douaouda avec satisfaction, sans leur montrer le moindre signe reflétant ses sentiments d'hostilité et de haine, car il tenait toujours à son désir de les réduire à l'impuissance par la force ou par la ruse. A cet effet, il se rendit trois fois dans le Sud, à la fois pour marquer sa présence et pour surveiller l'évolution du développement de son plan d'action dirigé contre ses ennemis. Ces préoccupations le retinrent en permanence dans sa province, au point de renoncer à présenter lui même le denouche au pacha en 1786.
Au cours de l'année 1787, de nouveaux incidents avec la Tunisie l'obligèrent à préparer une nouvelle expédition. Mais Hamouda Pacha préféra une fois de plus, accepter les conditions algériennes que s'engager dans une guerre incertaine.
Suffisamment doté en hommes et en matériel, sûr de ses agents et du fruit de leur travail au sein de la confédération des Douaouda, confiant en ses feudataires de l'Est et de l'Ouest, Salah Bey décida de monter une expédition punitive contre Touggourt dont le sultan Ferhat Ben Djellab se refusait toujours à reconnaître la suzeraineté turque. Toutefois, avant de s'aventurer dans cette région lointaine, où le succès à atteindre pouvait si facilement se changer en un revers désastreux, il fit entreprendre des démarches de conciliation avec le sultan pour l'amener à payer seulement un tribut symbolique de vassalité.
Les négociations n'ayant pas abouti, il résolut de recourir aux armes.
Le secret en fut bien gardé jusqu'à la fin d'octobre 1788, saison, en principe favorable aux déplacements de troupes dans le Sud.
Salah Bey prit le départ de l'Oued Djedi, point de ralliement de ses auxiliaires. Il avança avec son artillerie jusqu'aux environs de Sidi Khelif où une forte chute de neige subite faillit disséminer ses troupes. Il atteignit difficilement Touggourt après dix huit jours de marche.
Il fit planter ses tentes non loin de la ville protégée par des remparts et un fossé profond rempli d'eau. Pendant que les batteries établies sur des esplanades construites en troncs de palmiers ouvraient le feu contre Bab El Khadra, Sidi Abdeslam, le quartier de Tellis et la Casbah, les fantassins abattaient à coups de haches les arbres fruitiers des jardins environnants. En dépit d'un mauvais temps exceptionnel dans cette région, les combats furent conduits de part et d'autre avec acharnement et violence occasionnant de part et d'autre des dégâts importants. Harcelés à leurs arrières par les goums de Souf, de Ouargla et d'ailleurs les Turcs finirent par desserrer leur étreinte sur la ville. Les vivres et les fourrages devenant rares et impossible à renouveler, ils décidèrent de battre en retraite.
Cet échec déjoua toutes les espérances de Salah Bey. Son amertume et sa haine à l'égard des Touggourtins, se trouvèrent au comble de l'exaspération quand, dans son mouvement de recul, il vit son monde se tirer péniblement des marais où il dut abandonner une partie de son matériel dont deux canons. Il assouvit sa vengeance, en écrasant toutes les petites cités rencontrées sur sa route emportant dans ses bagages un lourd butin de toute nature.
La résistance, animée par des confréries religieuses ne se départit point de son mordant ; elle l'obligea à renoncer à ses prétentions tout au moins dans l'immédiat et quitter rapidement la région. Mais il ne se sentit pas définitivement battu; dès qu'il remit pied à Qacentina, il reprit le fil de ses intrigues en chargeant son bach siyar Hadj Messaoud Ben Zekri, andalous d'origine, riche intelligent, cultivé, affable, ami et parent des principales familles du constantinois et d'Alger, de servir d'intermédiaire auprès de ses ennemis pour trouver une solution de paix honorable autant pour les uns que pour les autres.
Le bey proposa la convention suivante : « Mohamed Debbah Ben Bou Okkaz, le cheikh el Arab viendrait à Biskra faire acte de soumission et recevrait confirmation de son titre et le kaftan d'investiture des mains du bey. Il resterait le chef reconnu de toutes les populations du Sud, et Mohamed Bel Hadj Ben Gana, cheikh el Arab in partibus, reprendrait sa place à Biskra, pendant qu'un autre Ben Gana (son neveu exactement) s'établirait à Touggourt ». Mohamed ne repoussa que cette dernière proposition, il voulait que ce soit son frère Saïd qui fut mis à la tête de cette principauté. Salah Bey réussit à le faire céder, en comblant lui et ses proches de cadeaux somptueux. Mais devinant la manoeuvre du bey, il mit en garde son cousin de Touggourt et lui conseilla de prendre ses dispositions pour toute éventualité.
De toute manière Salah Bey savait que pour qu'un Ben Gana s'établissât à Touggourt il eut fallu que le sultan en place, Ferhat Ben Djellab et ses héritiers fussent éliminés de la scène politique. Et pour cela il fallait user de la force. Pendant que l'agha s'acheminait à la tête de ses troupes vers les lieux, des goumiers mercenaires entretenaient la guérilla autour de la ville. Ferhat Ben Djellab sortit avec toute sa mehalla pour tenter de les châtier. Il alla camper en un lieu choisi pour la bataille. Dès qu'il s'établit dans sa tente, une main inconnue lui tendit un breuvage qui mit fin à ses jours immédiatement, avec la bénédiction de Mohamed Debbah Ben Bou Okkaz, Brahim Ben Djellab fut proclamé sultan.
Salah Bey et les Ben Gana feignirent d'ignorer l’auteur de cette manoeuvre en montrant la même sollicitude vis â vis de Mohamed Debbah Ben Bou Okkaz. Mais ils manoeuvrèrent auprès des Ben Djellab pour y semer la discorde en stimulant les ambitions de chacun.
Au nouveau sultan Brahim, cadet de la famille, ils opposèrent donc ses trois frères auxquels ils firent ressortir à chacun ses droits à la succession et miroiter leur appui. Tous prirent les armes, et chacun se retrancha dans une région jugée favorable à son action. Menacé de toutes parts, le sultan Brahim sollicita l'appui de Mohamed Bel Hadj Ben Gana, en raison de ses attaches avec le bey de Qacentina dont il espérait une aide.
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