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Histoire de l'Algérie médiévale - le 10e siècle après. J.-C.

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  • #31
    25. La campagne au Maghreb Extrême (979-984) :

    Parti d'Achīr en 979, Bulkīn ne perd pas de temps et fonce tout droit sur Fès, avec à peine 6.000 cavaliers qui formaient l'élite de son armée. La vieille capitale des Idrissides était constituée de deux cités séparée par l'Oued éponyme : 3adwat al-Qarawiyyīn ("Quertier des Kairouanais") est prise en premier et son gouverneur tué ; et 3adwat al-Andalusiyyīn ("Quartier des Andalousiens") tombe peu après lorsque son gouverneur, un certain Abdalkarīm, accepte de se soumettre. L'Emir Zirīde y installe sa base d'opération, et c'est durant son séjour là-bas que la chaire ouvragée (minbar) qui se tient toujours dans la Mosquée des Andaloux à Fès fut offerte.

    En 980, les forces des Zanāta s'étaient regroupées loin au S., à Sijilmāsa. Bulkīn prend l'initiative et marche rapidement sur la ville où il est de nouveau victorieux, tuant le chef des Maghrāwa au passage. Il soumet ensuite tout le Centre du Maroc actuel, tandis que les gouverneurs maghrāouis et ifrānides qui avaient été installés au cours des années précédentes par les Ommeyades fuyaient les uns après les autres vers Ceuta où ils seront rejoints par une importante armée andalouse qui débarque depuis l'autre côté du Détroit, sous le commandement de Ja3far b. Ali ... Būlkin revient alors dans le N. du Maroc, mais dépourvu de flotte et avec des effectifs inférieurs en nombre, il évite prudemment d'attaquer directement l'ennemi. Il prend tout de même la forteresse de Baçra qu'il démantèle et se retire ensuite vers Fès.

    En 982, Bulkīn marche sur le territoire des Barghawāta, cette principauté que des hérétiques Kharrijites avaient fondé sur la façade Atlantique du Maroc central deux siècles auparavant. Bulkīn les taille en pièces et tue leur souverain de l'époque, un certain Sālih b. 3isā b. Abī-l-Ançār. A ce moment, Bādis b. Zīri, un des frères de l'Emir, rentre d'une mission en Egypte et lui délivre un message du Calife al'Azīz qui réclamait au Zirīde de lui envoyer ses principaux parents et 1.000 des meilleurs cavaliers de Sanhāja. Bulkīn l'envoie paître et poursuit ses opérations contre les Barghawāta jusqu'en 983, puis rentre à Fès. Pendant ce temps, l'ambiance dans le camps ommeyyade avait changé : Ja3far b. Ali b. Hamdūn est assassiné sur ordre de Cordoue et sa tête envoyée à Bulkīn comme signe de bonne volonté. Le frère du défunt, Yahyā, fuit alors vers le Caire où il est favorablement acceulli par le Calife Fatimide. Mais, lorsque la nouvelle parvient à Bulkīn, il entre dans une noire colère et se venge en faisant exécuter un fils de Yahyā qu'il détenait depuis un moment. Peu après, les Maghrāwa prennent Sijilmāsa et en chassent le gouverneur ziride. Bulkīn marche alors vers le S. et reprend la ville encore une fois.

    En 984, Bulkīn b. Zīri estime sa campagne achevée au Maghreb Extrême et décide de rentrer directement à Achīr. Toutefois, sur la route entre Sijilmāsa et Tlemcen, il tombe soudainement malade et meurt parmi ses hommes à un endroit mal identifié, apparemment près de Tāza (Maroc). Ainsi s'achève la carrière du premier Émir Ziride au Maghreb, mais avant de mourir, il eut quand même le temps de communiquer ses dernières volonté à son servant le plus intime, un certain Abū-Za3bal b. Hishām, qui se chargea de devancer l'armée pour annoncer la nouvelle à son héritier à Achīr ...

    ... /...
    Dernière modification par Harrachi78, 30 novembre 2022, 15h16.
    "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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    • #32
      Passionnant!
      J'ai remarqué à travers tes récits, qu'il faudrait toujours un étranger pour faire entrer les berbères dans l'histoire
      Ps: pourquoi tu écris pas des livres. ?
      وألعن من لم يماشي الزمان ،و يقنع بالعيش عيش الحجر

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      • #33
        HADJRESS

        ... J'ai remarqué à travers tes récits, qu'il faudrait toujours un étranger pour faire entrer les berbères dans l'histoire ...

        C'est-à-dire ?

        ... Ps: pourquoi tu écris pas des livres. ? ...

        Parceque c'est trop de boulot et que je suis un grand fénéant devant l'Éternel ... Héhéhéhé
        "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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        • #34
          26. Règne d'al-Mançūr (984-996) :

          Abū-l-Fat'h al-Mançūr b. Bulukīn se trouvait à Achīr lorsque parvient la nouvelle de la mort de son père en 984. Il est né dans la fortresse Zirīde à une date inconnue, mais il paraît être un homme adulte au moment de la succession. En tout cas, il n'était qu'un seul parmi une immense fraterie puisque qu'on dit que Bulkīn avait eu une centaine d'enfants de ses épouses et ... 40 concubines ! L'avenement d'al-Mançūr fut fut donc un choix de son père, et la suite des événements va démontrer qu'il n'avait pas mal jugé les capacités de son rejeton.

          Une fois sur le trône, le nouvel Emir envoie son frère Yattufāt à Qayrawān pour sécuriser le pouvoir. Le gouverneur d'Ifrīqiyya était toujours Abdallāh b. Muhammad al-Kātib, l'ancien secrétaire particulier de Zīri et de Bulkīn. Ce dérnier rassemble une députation de 300 notables et hauts-fonctionbaires de Qayrawān et de Mahdiyya et se rend à Achīr pour faire hommage au nouveau souverain. Al-Mançūr les reçoit avec bienveillance, les comble de cadeaux et leur déclare : "Mon père et mon grand-père ont pris les gens par le sabre et la violence, mais, moi, je ne les prendrai que par la bonté. Je ne suis pas de ceux qu'institue une lettre et que destitue une autre lettre, et pour cette royauté qui m'échoie, je ne rends grâce qu'à Dieu et ma poigne, car je la détiens de mes pères et de mes aïeux qui l'ont héritée de leurs pères et de leurs aïeux". Tout un programme ... L'Emir Zirīde entre à Qayrawān en 985. Il reçoit la bay3a dans le palais de Raqqāda, et procède aux premières nominations avec son frère Yattufāt b. Bulkīn dans le Zāb, et son oncle Abū-l-Bahār b. Mannād à Tāhert.

          Pendant ce temps, les Zanāta avaient repris Fès et Sijilmāsa en apprenant la mort de Bulkīn. Al-Mançūr charge Yattufāt de remédier à cela, mais ce dérnier ne parvient pas à déloger Zīri b. 3attiyya al-Maghrāwi, dit al-Fartās (le Chauve), qui le bat sévèrement à Fès et le force à se retirer jusqu'à Tāhert. Al-Mançūr entend dans un premier temps intervenir personnellement et rassemble effectivement une armée de Sanhāja à Achīr. Mais, lorsque son frère se présente devant lui et lui fait son rapport, l'Emir change d'avis et annule la campagne. Il abandonne donc l'O. de l'Algérie et le Maroc aux trois chefs Zenāta : Zīri b. 3attiyya (Maghrāwa), Sa3īd b. Khazrūn (Meknāsa ?) et Yaddū b. Ya3la (Ifrān), qui ne vont pas tarder à s'entre déchirer comme de coutume. En fait, bien moins passionné dans la haine des Zanāta que ne l'étaient son père et son grand-père, al-Mançūr avait un sens politique aîgüe et il entrevoyair des problèmes bien plus dangereux pour le pouvoir Zirīde qui se profilaient à l'E. En effet, début 986, un certain Abū-l-Fahm Hassan al-Kurasāni se présente à Qayrawān. C'est un haut responsable Ismaélien, et il porte une lettre du Calife Fatimide al-Azīz qui le désigne dā3i suprême pour le Maghreb, et le charge d'aller dans le Pays de Kutāma pour y raviver la da3wa des imāms. Le mouvement du gars était suspect, mais le gouverneur Abdallāh al-Kātib fit mine de ne rien voir, offrit à l'émissaire tous les moyens et tout l'argent qu'il demandait, et le fit parvenir chez les Kutāma sans encombres. L'homme ne tarda pas à lever une armée, et se mit même à frapper monnaie, voulant en quelque sorte refaire le coup d'Abū-Abdallāh a-Shīi ... à l'envers.

          Il s'agissait en fait d'un agent du Calife Fatimide qui, dit-on, entendait dégager les Sanhāja du pouvoir au Maghreb dans le secret, car devenus un peu trop puissants à son goût. Al-Mançūr b. Bulkīn n'était pas au courant de ces machinations du Caire, mais il n'était pas né de la dernière pluie non plus. Il quitte donc Achīr pour Qayrawān début 987, inaugure le nouveau palais dont il avait ordonné la construction dans le faubourg de Sabra al-Mançūriyya (et qui aurait coûté l'immense bagatelle de 800.000 dinars/or), puis s'attèle à prendre les affaires en main. Entre-temps, un message était parvenu du Caire pour conférer à Abdallāh al-Kātib le statut de dā3i ismaélien, ce qui le mettait en théorie sous la protection du Calife. Al-Mançūr fit semblant de jouer le jeu, et procéda le plus normalemenr au monde à sa nomination, avec toute la pompe due à l'homme de l'imām. Entre-temps, un cousin de Abdallāh rapporta au Zirīde les petites combines du ministre, et alors qu'il se croyait désormais intouchable, al-Mançūr le convoque à une entrevue, lui crache ses quatre vérités avant de le transpercer de sa propre lance et qu'un de ses frères nommé Abdallāh et son oncle Māksen ne l'achèvent à ses pieds. Le fils du malheureux et tous ses hommes seront ensuite pourchassés et massacrés jusqu'au dérnier. Plus clair comme méssage, tu meurs ...

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          Dernière modification par Harrachi78, 30 novembre 2022, 15h16.
          "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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          • #35
            27. La chute des Kutāma (987-988) :

            Après l'élimination de Abdallāh b. Muhammad al-Kātib, al-Mançūr fait l'ingenu et écrit au Calife, l'informant de la disgrâce du ministre pour trahison, qu'une méchante rébellion venait d'éclater en Pays Kutāma et qu'il entendait y mettre fin rapidement ... pour la gloire de l'Empire bien entendu. Quelques semaines plus tard, une ambassade arrive du Caire, menée par un haut dignitaire nommé Abū-l-3azm al-Kutāmi. Le Calife al-Azīz fait mine de ne rien savoir à propos du ministre zigouillé, mais il interdit au Zirīde de toucher au dā3i Abū-l-Fahm et aux Kutāma. Il s'en fallut de peu qu'al-Mançūr ne crache au visage des émissaires. Au lieu de cela, il les abreuva d'injures en publique, leur interdit de quitter Qayrawān puis, après deux mois de préparatifs début 988, il les obligea à le suivre pour être témoins du traitement qu'il entendait infliger aux rebelles, Kutāma ou pas Kutāma.

            La campagne commence par Mīla qui est prise, son gouverneur éxecuté et sa population déportée. Al-Mançūr ordonne ensuite que les fortifications soient démantelées et il laisse la ville quasiment déserte. Mīla sera repeuplée quelques années plus tard, mais elle ne recouvrit jamais l'importance qu'elle avait dans la région au cours des trois siècles précédents, cédant pour toujours le pas à Constantine. L'armée Ziride se répand ensuite dans le coeur du Pays Kutāma, dévastant terres et villages, et se dirige ensuite vers Sétif où s'étaient rassemblées les forces de Kutāma. La victoire d'al-Mançūr est totale, et Abū-l-Fahm n'est sauvé que par sa fuite chez un clan kutāmien en montagne, les Bani Ibrāhim, qui refusent de le livrer. Al-Mançūr parvient tout de même à le faire enlever et, tenez-vous bien, le jette en pâture aux femmes de son harem qui lui arrachèrent les poils de la barbe et le tabassent presque à mort. Il le soustrait alors à leur fureur, et le livre à un de ses hommes qui l'éventre après l'avoir égorgé, lui enleve le foie que l'on rôtit et qu'on dévore, et c'est tout son cadavre qui est ensuite bouffé par les soldats de Sanhāja et les esclaves de l'Emir ... jusqu'à l'os ! Alors qu'ils étaient encore sous le choc du spectacle morbide, al-Mançūr se tourne vers les émissaires fatimides et leur dit : "Les voilà ceux qui, prétendiez-vous, devaient me ramener la corde au cou à votre maître !", signifiant qu'il avait eu vent de leurs déclarations en privé. Il fait ensuite exécuter tous les dā3i ismaéliens de Kutāma et, ultime humiliation pour les fières guerriers, il nomme l'esclave de son père, Abū-Za3bal b. Hishām, à Constantine pour les gouverner ... Abū-Abdallāh a-Shīi à dû s'en retourner dans sa tombe !

            L'Emir Zirīde se retire après cela à Achīr, et donne enfin congé aux émissaires Fatimides. Rentrés au Caire, ils avaient encore le cœur retourné de ce qu'ils ont vus : "Nous revenons d'auprès des démons (shayāttīn) cannibales qui n'ont rien d'humain !" auraient-ils déclaré au Calife al-Azīz. Ce dérnier encaisse le coup sans broncher et, quelque temps après, il envoit une nouvelle ambassade avec de somptueux cadeaux à al-Mançūr, qu'il félicite de sa victoire sur les méchants rebelles et à qui il donne le titre d'honneur de 3uddat al-Azīz bi-llāh ... Politique ... lol

            ... /...
            Dernière modification par Harrachi78, 30 novembre 2022, 15h17.
            "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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            • #36
              Après l'élimination de Abdallāh b. Muhammad al-Kātib, al-Mançūr fait l'ingenu et écrit au Calife, l'informer de la disgrâce du ministre pour trahison, qu'une méchante rébellion venait d'éclater en Pays Kutāma et qu'il entendait y mettre fin rapidement pour la gloire de l'Empire. Quelques semaines plus tard, une ambassade arrive du Caire, menée par un haut dignitaire nommé Abū-l-3azm al-Kutāmi. Le Calife al-Azīz fait mine de ne rien savoir à propos du ministre, mais il interdit au Zirīde de toucher au dā3i Abū-l-Fahm et aux Kutāma. Il s'en fallut de peu qu'al-Mançūr ne crache pas au visage des émissaires. Au lieu de cela, il les abreuva d'injures en publique, leur interdit de quitter Qayrawān puis, après deux mois de préparatifs début 988, il les obligea à le suivre pour être témoins du traitement qu'il entendait infliger aux rebelles.

              La campagne commence par Mīla qui est prise, son gouverneur éxecuté et sa population déportée. Al-Mançūr ordonne ensuite que les fortifications soient démantelées et il laisse la ville quasiment déserte. Mīla sera repeuplée quelques années plus tard, mais elle ne recouvrit jamais l'importance qu'elle avait dans la région au cours des trois siècles précédents, cédant pour toujours le pas à Constantine. L'armée Ziride se répand ensuite dans le coeur du Pays Kutāma, dévastant terres et villages, et se dirige ensuite vers Sétif où s'était rassemblées les forces de Kutāma. La victoire d'al-Mançūr est totale, et le dā3i Abū-l-Fahm n'est sauvé que par sa fuite chez un clan kutāmien en montagne. Al-Mançūr parvient tout de même à le faire enlever et, tenez-vous bien, le jette en pâture aux femmes de son harem qui lui arrachèrent les poils de la barbe et le tabassent presque à mort. Il le soustrait alors à leur fureur, et le livre à un de ses hommes : il l'éventre après l'avoir égorgé, lui enleva le foie que l'on rôtit et qu'on dévora, et c'est tout son cadavre qui est ensuite bouffé par les soldats de Sanhāja ... jusqu'à l'os. Alors qu'ils se trouvaient encore sous le choc du spectacle morbide, al-Mançūr se tourne vers les émissaires du Fatimide et leur dit : "Les voilà ceux qui, prétendiez-vous, devaient me ramener la corde au cou à votre maître !", signifiant qu'il avait eu vent de leurs déclarations en privé. Al-Mançūr fait ensuite exécuter tous les dā3i Ismaéliens de Kutāma et, ultime humiliation pour les filers guerriers, il nomme l'esclave de son père, Abū-Za3bal b. Hishām, à Constantine pour les gouverner.

              L'Emir Zirīde se retire après cela à Achīr, en donnant enfin congé aux émissaires Fatimides. Rentrés au Caire, il avaient encore le cœur retourné de ce qu'ils ont vus : "Nous revenons d'auprès des démons (shayāttīn) cannibales qui n'ont rien d'humain !" auraient-ils déclaré au Calife al-Azīz. Ce dérnier encaisse le coup sans broncher et envois une nouvelle ambassade avec de somptueux cadeaux à al-Mançūr, qu'il félicite de sa victoire sur les méchants rebelles et à qui il donne le titre d'honneur de 3uddat al-3azīz bi-llāh ... Politique ... lol
              ya latif....
              وقد طوَّفتُ في الآفاق حتى رضيتُ من الغنيمة بالإيابِ

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              • #37
                bouberita

                Héhéhéhéhé ... Ca me rappelle la toute première fois où j'avais croisé ces passages au cours de mes lectures, il y a des années de cela. Je n'en croyais pas mes yeux ... lol


                C'est rapporté par al-Nuweïri si ma mémoire est bonne, ou alors chez Ibn-Khaldūn, je ne sais plus ...

                ...
                "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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                • #38
                  Harrachi, c'est-à-dire qu'ils sont feneants comme toi
                  Ils ont pas une vision du monde ( universalisme) qui pourrait( dans l'absolu) leur donner une ambition de bâtir un empire qui s'étendrait
                  En dehors de leur territoire.
                  Ils se greffent toujours par nécessité ou par adhésion aux empires qui se sont succédés sur cette région du monde.
                  C'est peut-être le sort des peuples issues des civilisations orales. Les mongols : une exception ?.
                  وألعن من لم يماشي الزمان ،و يقنع بالعيش عيش الحجر

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                  • #39
                    HADJRESS

                    Ok, je vois ...lol

                    Et bien, je dirais qu'il y a trop de jugements dans ce que tu dis, et aussi trop de projections sur une une réalité identiaire que tu peut avoir de nos jours mais qui n'avait pas forcément de sens pour quiconque à d'autres époques.

                    Jugement dans l'absolu d'abord : si tu y regardes de près, parmi les milliers de peuples qui ont habité la Terre au cours des centaines de siècles passés, combien ont-ils eu un déstin de type "impérial" ? Pas 1% je dirais. Et parmi cette petite minorité de peuples, que représente la part impériale dans l'ensemble de leur Histoire interne ? Quelques jours à l'échelle du temps je dirais ... Donc, les Berbères ne sont ni ni plus (ou mieux) ni moins (ou pire) que 99% de l'humanité. Ils sont comme la majorité des humains, la majeure partie du temps ... lol

                    Jugement relatif ensuite : Les trois topics fais à ce jour couvrent à peine 300 ans, et ce n'est pas exclusivement l'histoire des Berbères mais de toutes les composantes éthniques qui existaient sur le territoire en question à l'époque puisque il s'agit une histoire du territoire algérien, et à une période bien définie (Moyen-Âge). Or, l'histoire des peuples Berbères n'a pas commencé 3 siècles avant ce topic, mais remonte à bien plus haut. Il faut prendre cet aspect en considération, car la perspective qu'on adopte pour présenter un sujet influe grandement sur l'image qui va en ressortir et, dans tous les cas, cette image sera toujours plus réduite que l'ensemble en grandeur réelle.

                    Par exemple, au siècle qui va suivre celui de ce topic, il va se constituer des entités politiques qui concordent globalement avec ce que tu dis "manquer" jusque-là, c'est-à-dire des "Empires" fondés et gouvernés par des "Berbères" et dont l'influence déborde les territoires peuplés exclusivement de Berbères. Chaque chose en son temps alors ... lol

                    La projection ensuite : dans ton propos, tu appliques les jugements évoqués plus haut à un groupe que tu identifies comme une unité intemporelle (un "peuple") à laquelle tu appliques un nom (les "Berbères") sensé être distinctif, de l'intérieur comme de l'extérieur, depuis toujours. En un mot, tu sembles voire comme un "échec", une "défaillance" ou une "faiblesse" collectifs dans cette absence d'évolution de type impérial chez les Berbères. Or, es-tu certain qu'il y eut jamais une quelque conscience identiaire ou une quelconque idée chez ces gens dans le passé d'une appartenance commune ? D'un tout éthnique conscient nommé "Berbère" (ou autre) ? Il faudrait donc déjà qu'ils répondent à cette question : Etes-vous et considerez-vous former un seul peuple ? Avant de pouvoir leur faire des "reproches" pour n'avoir pas pus/sus arriver à tel ou tel degrés d'évolution politique en tant que "peuple", si tant est qu'on puisse se permettre des jugements de cette nature ... lol
                    Dernière modification par Harrachi78, 29 novembre 2022, 13h34.
                    "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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                    • #40
                      28. La rébellion d'Abū-l-Bahar (989-996) :

                      Après les événements qu'on vient de voir, la puissance des Kutāma fut définitivement brisée au Maghreb et ils cessent dès lors de constituer une menace pour le pouvour Zirīde, ou d'être cette épée de Damoclès que les Fatimides du Caire rêvaient de maintenir sur la tête des Sanhāja pour les garder sous contrôle. Mais, cette affaire montra aussi à al-Mançūr qu'il était également dangereux se se reposer sur des fonctionnaires pour le gouvernement de Qayrawān et de l'Ifrīqiyya à distance depuis Achīr. Le choix était cornélien, parceque l'Algérie centrale constituait le réservoir du pouvoir de Sanhāja en hommes (on dira plus tard "makhzen"), alors que l'espace tunisien était le cœur économique et donc la principale source financière pour le régime, sachant que les Fatimides y gardaient encore une certaine influence via des agents à divers niveau de l'administration comme on vient de le voire. D'un autre côté, Achīr n'était pas seulement le centre de la puissance militaire sanhājaienne, mais aussi -de par sa position- le principal font qui permettait aux Zirīdes de maintenir la pression sur les Zanāta, et donc de maintenir le contrôle sur le reste du Maghreb Central, notamment l'O. de l'Algérie qui restait encore le Pays de Zanāta par excellence. Au final, L'Emir Zirīde se résolut à s'établir de manière permanente à Qayrawān afin de garder le contrôle sur le pays, mais ce déplacement du centre de gravité du pouvoir Zirīde vers l'E. ifrīqiyen ne sera pas sans conséquences sur le plan interne comme nous le verrons plus tard.

                      Les premiers effets de ce glissement ne tardèrent d'ailleurs pas à se manifester. En 989, Abū-l-Bahār b. Mannād, oncle d'al-Mançūr b. Zīri et jusque-là gouverneur de Tāhert, entre en dissidece contre son neveu après un affront dont on ignore le détail. Al-Mançūr marche rapidement contre l'oncle rebelle et reprend Tāhert pendant que Abū-l-Bahār fuyait vers l'O., mais celui-ci va tout de même garder le contrôle du territoire entre l'Ouarsenis et Tlemcen. La situation reste ainsi jusqu'en 991, lorsque Abū-l-Bahār décide de sceller une alliance avec les Omeyyades de Cordoue par le biais de leur agent zenète à Fès, Zīri b. 3attiyya al-Maghrāwi. Mais, par effet de bascule, la mainmise de Zīri sur le N. du Maroc avec l'appui omeyyade mécontenta un autre chef important de Maghrāwa, Fulful b. Khazar, qui va à Achīr et y fait sa soumission au Zirīde. Al-Mançūr lui fait bon acceuil, scelle leur entente en mariant une de ses filles au fils du Zanète, Warrū, et leur confie le gouvernement de Tobna et de la partie S. du Zāb algérien. Une fois n'est pas coutume, cette alliance entre un groupe de Zanāta et le pouvoir de Sanhāja va perdurer longtemps.

                      Par contre, en 992, un nouveau retournement survient à l'O. lorsque Zīri b. 3attiyya de Maghrāwa tire le tapis sous les pieds de Abū-l-Bahār. Ce dérnier fuit Fès vers Ceuta, mais il y est acceuilli avec méfiance par les Ommeyades qui dépêchent même une armée pour l'empêcher de traverser le détroit, et il finit ainso par se barricader dans le Rif marocain. Al-Mançūr, qui venait de quitter pour la dernière fois Achīr, reçoit alors des émissaires de son oncle à Qayrawān, et le reçoit finalement en 993, prononçant officiellement son pardon à son égard et lui rendant le gouvernement de Tāhert. Mais, Abū-l-Bahār ne parvient pas à arrêter les Zanāta, et Zīri b. 3attiyya prend Tlemcen et fonde Wajda (Oujda) en 994.

                      Finalement, l'Emir Abū-l-Fat'h al-Mançūr b. Zīri meurt tranquillement dans son palais de Sabra al-Mançūriyya en 996. Le dérnier de ses actes que les sources ont gardé est la nomination d'un certain Yūsuf b. Abī-Mohamed comme gouverneur de Matīja, c'est-à-dire Alger qui était donc à cette époque un chef-lieu de province.

                      ___________________

                      A ce moment, il ne restait plus que quatre années avant la fin de ce 10e siècle apr. J.-C. Le règne du successeur d'al-Mançūr à la tête de l'Etat ziride appartient donc au siècle suivant, et on le laissera comme ouverture pour un nouveau topic.

                      [Fin]
                      Dernière modification par Harrachi78, 01 décembre 2022, 13h44.
                      "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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                      • #41
                        Harrachi ,ce n'est pas de tout le sens que je voulais donner à mon message.
                        En revanche, ton interprétation pourrait bien s'appiquer sur certains esprits dont la fibre identitaire est un peu exacerbée et être frappés par la même occasion par les affects que tu as soulignés en haut.
                        Mon commentaire relèverait plutôt de la Méta Histoire, c'est à dire , l'Histoire comme phénomène qui porte en lui un dessein ( un but en soi) sur qui on ne peut appliquer la Raison et dont il se joue et se moque des hommes et de tout ce que ces derniers pouvaient accomplir comme gloire et grandeur.
                        C'est un peu rassurant pour les vaincus de l'Histoire et ceux qui regrettent de ne pas avoir un destin impérial .
                        وألعن من لم يماشي الزمان ،و يقنع بالعيش عيش الحجر

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                        • #42
                          HADJRESS

                          D'accord, je vois mieux où tu veux en venir ...

                          Mais bon, je crois que la discussion nous éloignera totalement du sujet de ce topic, sensé se limiter aux événements du 10e siècle et à la situation qui y prévalait. J'essayerai de formuler plus tard la problématique que tu poses dans un topic à part. Le sujet en lui-même est intéressant, mais dépasse l'histoire proprement événementielle d'une époque.
                          "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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                          • #43
                            C'est un peu rassurant pour les vaincus de l'Histoire et ceux qui regrettent de ne pas avoir un destin impérial .
                            c'est hors sujet évidemment ," vaincu de l'histoire " est une notion assez relative dans le temps et dans l'espace l'espace ,il n'ya point ou peu de vainqueurs qui ne devinrent eux mêmes vaincus à un moment donné ..et vice versa..
                            Les maitres devinrent des esclaves et les esclaves s'érigèrent en maitres , les empires naissent ,se consolident ,disparaissent et sont remplacées ,les exemples de ce type dans l'histoire générale de l'humanité sont très courants .
                            le temps de l'histoire n'est pas linéaire ,c'est une succession d'événements différents et uniques suivant les contextes.
                            Dernière modification par xenon, 01 décembre 2022, 13h11.
                            ارحم من في الارض يرحمك من في السماء
                            On se fatigue de voir la bêtise triompher sans combat.(Albert Camus)

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                            • #44
                              Après en avoir terminé avec le fil des événements politiques qui concernent directement l'Algérie et le Maghreb au cours de ce 10e siècle, nous pouvons éclairer divers points d'ensemble sur cette même période, et se faire aussi une idée sur son contexte global.
                              "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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                              • #45
                                A. Évolution du Monde islamique à la même époque :

                                Pour ce qui est de l'aspect civilisationnel, le 10e siècle connaît en quelque sorte l'achèvement de tous les processus d'intégration que nous avions suivi progressivement au cours des 200 ans qui précèdent cette époque.

                                La phase des grandes conquêtes est terminée, et l'espace islamique (Dār al-Islām) se stabillise plus ou moins dans ces limites à ce moment :



                                Cet éspace (appelé Dār al-Islām dans la littérature de l'époque par opposition au monde extérieur qui est Dār al-Harb) forme maintenant un ensemble économique intégré de bout en bout, et toutes les sociétés et les peuples qui le constituent évoluent désormais dans un cadre culturel global homogène, unifié linguistiquement par l'usage d'une langue arabe qui a pris tous les attributs qui la feront "classiques", et partageant un même système de valeurs et les mêmes catégories de pensée. Bien entendu, les variations régionales et la diversité éthnique n'ont pas disparus de cet immense territoire qui va de l'Atlantique à l'Inde, mais l'ensemble cultutel nouveau transcande en quelque sorte ces variations, à l'image de ce que nous appelons de nos jours "l'Occident" par exemple.

                                Sinon, dans la pratique, cette époque marque l'apogée de la civilisation arabo-musulmane et son point culminant, avec une production d'écrits dans tous les domaines imaginables, y compris en géographie et en histoire. C'est d'ailleurs cela qui explique la longueur relative de ce topic par rapport aux deux précédents : les sources sont nombreuses et les informations prolixes, ce qui permet une meilleure connaissance des événements et de leurs acteurs, que ce soit chez-nous ou dans les autres pays d'Islam.

                                ________________

                                A contrario, sur le plan politique, c'est le moment où l'unité impériale crée par le mouvement des Grandes Conquêtes arabes des deux premiers siècles part définitivement en couilles.

                                Nous avions vu que la première grande fissure fut entamée en 909 avec la proclamation d'un contre-Califat par les ismaéliens Fatimides au Maghreb. Craignant pour leur pouvoir en Andalus, les Émirs Ommeyyades font de même et se proclament eux aussi Califes en 923, au nom de l'orthodoxie Sunnite contre le pouvoir des hérétiques ismaéliens. L'Empire de l'Islam est ainsi divisé entre trois califes ennemis : l'Abasside à Bagdad, le Fatimide à Qayrawān et l'Omeyyade à Cordoue.

                                Mais ce n'est pas tout. Même à l'intérieur de ces trois ensembles, des pouvoirs politiques régionaux vont apparaître un peu partout, bien que chacun va théoriquement établir sa dawla au nom d'un de l'un des califats concurrents, et switchant parfois de l'un vers l'autre lorsque l'intérêt du moment l'exigeait. Là encore, nous avons vu la naissance de l'Etat Ziride au Maghreb dans le giron du califat Fatimide en 972, mais il en fut de même dans le domaine Abasside, avec les arabes de la dynastie Hamdānides en Syrie, les perses Buyhides en Irak et dans l'O. de l'Iran en 930, les turcs Ghaznévides dans l'E. de l'Iran en 962, encore ceux des dynasties Tulūnide et Ikhshīdite en Egypte avant la conquête de ce pays par les Fatimides en 969.

                                En somme, cette époque marque la fin de l'exclusivité de l'élément Arabe sur l'exercice du pouvoir politique en pays d'Islam, en même temps que la fin de l'exercice du pouvoir réel par les califes. Au départ, ce fut un simple fait accompli, dans le sens d'une prise du pouvoir réel par les militaires qui, comme nous l'avions vu au cours du siècle précédent, furent de plus en plus recrutés parmi les populations non-arabes de l'Empire par des Califes qui voulaient -justement- en finir avec avec la turbulence contestataire de divers groupes arabes (Alides ... etc.) qui pouvaient théoriquement prétendre au califat contrairement aux non-arabes. Mais, ce fait accompli devait tout de même trouver une justification islamique pour prétendre à la légitimité dans ce nouvel univers culturel, et c'est ainsi que les juristes de l'époque ont formalisé la théorie juridique selon laquelle le Calife, seul détenteur de la légitimité politique en Islam, pouvait déleguer tout ou partie de son pouvoir (sultān), que ça soit partout ou juste dans une partie du territoire de l'Islam, à quiconque il jugeait bon ou nécessaire de le faire.

                                C'est ainsi que se justifia et se légitima l'existence de dynasties et de pouvoirs locaux dans tel ou tel pays, théoriquement sous l'aurorité du Calife, comme nous l'avons vu avec les Zirīdes par exemple. Il s'agissait -en théorie- d'une simple délégation d'un pouvoir qui restait -toujours en théorie- un ressort exclusif du Calife en fonction. Ce Calife étant le succésseur du Prophpète en tant que chef politique de la Communauté musulmane, la légitimité de son pouvoir s'étendait (de droit) à tout le domaine de l'Islam et même à toute la Terre, que son autorité y soit (de fait) reconnue ou pas. Du coup, cette conception des choses impliquait qu'il n'y a pas de "frontières" (au sens de limites de droit) à reconnaître par le Calife (et donc par ses délégués), mais seulement des limites de fait, c'est-à-dire des lieux où tel calife et tel émir n'avaient pas la force d'y imposer leur autorité effective. Cela donne une conception de la territorialité qui est totalement différente de celle qui se développera parallèlement dans d'autres cultures, notamment dans la Chrétienté occidentale. C'est selon les normes qu'on vient de décrire sommairement ivi que va fonctionner l'ensemble du Monde musulman sur le plan politique tout au long de son Histoire ... jusqu'au 19e siècle.

                                ... /...
                                Dernière modification par Harrachi78, 03 décembre 2022, 15h39.
                                "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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