C'est démoralisant à lire car cette anarchie, cette violation, constante des règles et réglements est déprimante mais comment rendre le pays compétitif même riche de ses rentes qui un jour disparaitront si rien ne change? Comment faire évoluer et développer l'entreprise si on ne juge pas un jeune sur ses compétences et son cursus mais sur le patronyme ou le compte en banque et les relations de son père?
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Sombre paysage que celui présenté par le marché de l’emploi des jeunes à Constantine et plus particulièrement ceux ayant accompli un cursus universitaire.
C’est un monde littéralement étrange, impalpable et intemporel que celui dans lequel se meuvent des centaines de diplômés, pour la plupart depuis le début du troisième millénaire, et qui en sont encore à se débattre pour trouver un emploi, pas n’importe lequel… c’est-à-dire celui où ils pourront au minimum, non pas bénéficier d’un salaire conséquent comparativement à l’effort physique et/ou cérébral fourni, mais seulement d’un peu de respect.
Mais sombre en raison du consensus général inquiétant qui entoure et conforte des pratiques dignes de négriers à l’endroit de cohortes de jeunes qui ont cru et continuent à croire en les vertus d’un diplôme universitaire.
C’est d’ailleurs en ce sens que s’insurge R.T, un sexagénaire croisé à hauteur de l’Inspection du travail et venu accompagner son fils, un ingénieur urbaniste issu de la promotion 2002 qui, quatre années plus tard, n’a toujours pas trouvé un emploi stable : «Pour quelle raison la presse ne dénonce-t-elle pas les passe-droits et les abus d’entreprises autant privées que publiques ? Mon fils a travaillé dans une entreprise publique et il a été licencié sans autre forme de procès pour la simple raison qu’il a pris la défense d’un de ses collègues victime d’un harcèlement professionnel arbitraire.» Effectivement, la relation de travail s’est faite en violation de la réglementation et sans qu’aucun document vienne justifier le licenciement.
Plus grave encore, le jeune ingénieur n’obtiendra son solde de tout compte que parce que son père fera le siège de l’administration de l’entreprise concernée et, encore, l’indemnisation à laquelle il aura droit lui sera versée sans aucune justification ou explication… laissant subodorer toutes les malversations possibles et autorisant toutes les spéculations autour de la gestion de ladite entreprise…
L.H est ingénieur spécialisé en électrotechnique. Sa formation est très solide parce qu’il l’a accompagnée en parallèle d'une autre (formation) de TS dans un institut de formation professionnelle. Il a été recruté par l’une des nombreuses entreprises sous-traitantes de l’ex-BRC (Brown and Root Corp) dans le cadre de la réalisation de l’hôpital militaire de Constantine (nouvelle ville Ali Mendjeli). Rémunéré pour un travail dont il s’acquittait avec conscience et par une présence assidue au poste, il a préféré quitter son emploi parce que «la direction de la société où je travaillais a exigé de moi d’authentifier des documents techniques et, partant, la facturation, pour ne pas dire la surfacturation, de travaux qui n’ont pas été faits en réalité.
Authentifier de tels travaux, c’est commettre un faux, d’autant plus que la partie technique visée a un impact stratégique sur le projet et ouvrait facilement la voie à des incidents a posteriori», nous dira-t-il, ajoutant : «Vous savez, en trois années de présence sur place, je peux vous affirmer que 80% des jeunes qui travaillent dans la nouvelle ville, notamment dans le secteur du BTPH, ne sont pas protégés par une couverture sociale. Il arrive qu’une descente de l’Inspection du travail ou des agents contrôleurs de la CNAS est connue par anticipation. Du coup, les entreprises en infraction s’arrangent littéralement pour cacher leurs travailleurs ou les mettre en veille le temps que passe l’orage. Comble de l’ironie… l’arrêt momentané sera déduit de leur salaire.»
Plutôt chômer que contribuer à une forfaiture
L.H. est employé aujourd’hui dans le cadre du pré-emploi dans une entreprise publique, touchant un salaire misérable et travaillant plus qu’un collègue au statut permanent. Paradoxalement, n’accèdent pourtant à ce type d’emploi déshumanisé et dévalorisant à l’extrême que ceux qui peuvent se prévaloir d’un certain entregent. Le président d’une association, qui entretient des relations privilégiées avec un ministre (et pas n’importe lequel) de l’actuel gouvernement, et fait presque du porte-à-porte avec les personnes dont il est appelé à solliciter la contribution (parmi lesquelles des journalistes) à l’occasion des activités de l’association, demeure sur la place de Constantine l’un des meilleurs intermédiaires en matière de placement dans le cadre du pré-emploi. C’est dire, par conséquent, que les centaines de diplômés qui sortent chaque année de l’université ne viennent finalement que grossir les rangs des chômeurs ou cette masse de travailleurs corvéables à merci par des flibustiers.
Ainsi, il n’y a aucun étonnement à éprouver face à un vendeur à la sauvette (chaussettes, parapluies, sous-vêtements, téléphones portables), au tenancier d’une table de cigarettes qui s’évertuerait à vouloir apporter la preuve que, s’il a recours à de tels expédients, c’est uniquement parce qu’il se refuse à tendre la main ou voler.
Que font alors les pouvoirs publics ou leurs représentants moraux ou physiques ? Que cela soit à hauteur de l’ANEM, la DLEJ, l’Inspection du travail, la CNAS, toutes ces institutions jouent un jeu. Celui de justifier leur existence par des statistiques dont il est clairement établi qu’elles sont fabriquées aussi bien pour la consommation publique que pour la hiérarchie et pour des raisons politiques évidentes. Vouloir démontrer les mécanismes unanimistes de cette supercherie suppose non seulement beaucoup d’espace mais aussi la volonté de communiquer des uns et des autres, même si au niveau de l’Inspection du travail, l’un des inspecteurs, qui a requis l’anonymat, nous dira : «Nous en sommes aujourd’hui non pas à la répression, parce que nous n’en avons pas les moyens juridiques, d’une part, et que franchement la partie pour nous est d’avance perdue face à des employeurs, notamment ceux du privé qui ont des moyens de persuasion nettement plus convaincants que les dispositions des lois relatives au travail et à l’emploi.
Donc nous essayons, vaille que vaille, d’arrondir les angles par la sensibilisation de ces employeurs qui, progressivement, prennent conscience et, pour certains, se mettent en conformité avec les textes. Sinon, les plaintes engagées vont aux tribunaux et peuvent y perdurer des années. Ce qui n’arrange pas les plaignants, d’où le peu d’enthousiasme des travailleurs et plus particulièrement les diplômés universitaires bénéficiant d’un premier emploi qui se refusent à engager ce type de procédure quitte pour cela à ce que l’avenir se fasse à leurs dépens».
Par La Tribune
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Sombre paysage que celui présenté par le marché de l’emploi des jeunes à Constantine et plus particulièrement ceux ayant accompli un cursus universitaire.
C’est un monde littéralement étrange, impalpable et intemporel que celui dans lequel se meuvent des centaines de diplômés, pour la plupart depuis le début du troisième millénaire, et qui en sont encore à se débattre pour trouver un emploi, pas n’importe lequel… c’est-à-dire celui où ils pourront au minimum, non pas bénéficier d’un salaire conséquent comparativement à l’effort physique et/ou cérébral fourni, mais seulement d’un peu de respect.
Mais sombre en raison du consensus général inquiétant qui entoure et conforte des pratiques dignes de négriers à l’endroit de cohortes de jeunes qui ont cru et continuent à croire en les vertus d’un diplôme universitaire.
C’est d’ailleurs en ce sens que s’insurge R.T, un sexagénaire croisé à hauteur de l’Inspection du travail et venu accompagner son fils, un ingénieur urbaniste issu de la promotion 2002 qui, quatre années plus tard, n’a toujours pas trouvé un emploi stable : «Pour quelle raison la presse ne dénonce-t-elle pas les passe-droits et les abus d’entreprises autant privées que publiques ? Mon fils a travaillé dans une entreprise publique et il a été licencié sans autre forme de procès pour la simple raison qu’il a pris la défense d’un de ses collègues victime d’un harcèlement professionnel arbitraire.» Effectivement, la relation de travail s’est faite en violation de la réglementation et sans qu’aucun document vienne justifier le licenciement.
Plus grave encore, le jeune ingénieur n’obtiendra son solde de tout compte que parce que son père fera le siège de l’administration de l’entreprise concernée et, encore, l’indemnisation à laquelle il aura droit lui sera versée sans aucune justification ou explication… laissant subodorer toutes les malversations possibles et autorisant toutes les spéculations autour de la gestion de ladite entreprise…
L.H est ingénieur spécialisé en électrotechnique. Sa formation est très solide parce qu’il l’a accompagnée en parallèle d'une autre (formation) de TS dans un institut de formation professionnelle. Il a été recruté par l’une des nombreuses entreprises sous-traitantes de l’ex-BRC (Brown and Root Corp) dans le cadre de la réalisation de l’hôpital militaire de Constantine (nouvelle ville Ali Mendjeli). Rémunéré pour un travail dont il s’acquittait avec conscience et par une présence assidue au poste, il a préféré quitter son emploi parce que «la direction de la société où je travaillais a exigé de moi d’authentifier des documents techniques et, partant, la facturation, pour ne pas dire la surfacturation, de travaux qui n’ont pas été faits en réalité.
Authentifier de tels travaux, c’est commettre un faux, d’autant plus que la partie technique visée a un impact stratégique sur le projet et ouvrait facilement la voie à des incidents a posteriori», nous dira-t-il, ajoutant : «Vous savez, en trois années de présence sur place, je peux vous affirmer que 80% des jeunes qui travaillent dans la nouvelle ville, notamment dans le secteur du BTPH, ne sont pas protégés par une couverture sociale. Il arrive qu’une descente de l’Inspection du travail ou des agents contrôleurs de la CNAS est connue par anticipation. Du coup, les entreprises en infraction s’arrangent littéralement pour cacher leurs travailleurs ou les mettre en veille le temps que passe l’orage. Comble de l’ironie… l’arrêt momentané sera déduit de leur salaire.»
Plutôt chômer que contribuer à une forfaiture
L.H. est employé aujourd’hui dans le cadre du pré-emploi dans une entreprise publique, touchant un salaire misérable et travaillant plus qu’un collègue au statut permanent. Paradoxalement, n’accèdent pourtant à ce type d’emploi déshumanisé et dévalorisant à l’extrême que ceux qui peuvent se prévaloir d’un certain entregent. Le président d’une association, qui entretient des relations privilégiées avec un ministre (et pas n’importe lequel) de l’actuel gouvernement, et fait presque du porte-à-porte avec les personnes dont il est appelé à solliciter la contribution (parmi lesquelles des journalistes) à l’occasion des activités de l’association, demeure sur la place de Constantine l’un des meilleurs intermédiaires en matière de placement dans le cadre du pré-emploi. C’est dire, par conséquent, que les centaines de diplômés qui sortent chaque année de l’université ne viennent finalement que grossir les rangs des chômeurs ou cette masse de travailleurs corvéables à merci par des flibustiers.
Ainsi, il n’y a aucun étonnement à éprouver face à un vendeur à la sauvette (chaussettes, parapluies, sous-vêtements, téléphones portables), au tenancier d’une table de cigarettes qui s’évertuerait à vouloir apporter la preuve que, s’il a recours à de tels expédients, c’est uniquement parce qu’il se refuse à tendre la main ou voler.
Que font alors les pouvoirs publics ou leurs représentants moraux ou physiques ? Que cela soit à hauteur de l’ANEM, la DLEJ, l’Inspection du travail, la CNAS, toutes ces institutions jouent un jeu. Celui de justifier leur existence par des statistiques dont il est clairement établi qu’elles sont fabriquées aussi bien pour la consommation publique que pour la hiérarchie et pour des raisons politiques évidentes. Vouloir démontrer les mécanismes unanimistes de cette supercherie suppose non seulement beaucoup d’espace mais aussi la volonté de communiquer des uns et des autres, même si au niveau de l’Inspection du travail, l’un des inspecteurs, qui a requis l’anonymat, nous dira : «Nous en sommes aujourd’hui non pas à la répression, parce que nous n’en avons pas les moyens juridiques, d’une part, et que franchement la partie pour nous est d’avance perdue face à des employeurs, notamment ceux du privé qui ont des moyens de persuasion nettement plus convaincants que les dispositions des lois relatives au travail et à l’emploi.
Donc nous essayons, vaille que vaille, d’arrondir les angles par la sensibilisation de ces employeurs qui, progressivement, prennent conscience et, pour certains, se mettent en conformité avec les textes. Sinon, les plaintes engagées vont aux tribunaux et peuvent y perdurer des années. Ce qui n’arrange pas les plaignants, d’où le peu d’enthousiasme des travailleurs et plus particulièrement les diplômés universitaires bénéficiant d’un premier emploi qui se refusent à engager ce type de procédure quitte pour cela à ce que l’avenir se fasse à leurs dépens».
Par La Tribune

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