4. Origine du système solaire et de la Terre
Le problème de l'origine de la Terre n'est pas distinct de celui de l'origine des planètes et du système solaire. Mais, alors que la cosmogonie s'est longtemps réduite aux théories sur la formation du système solaire, il n'est plus possible aujourd'hui d'ignorer les informations que donne l'astrophysique. La cosmogonie consistait en l'étude de la formation des objets du système solaire : le Soleil, les planètes et leurs satellites, les petites planètes, les météorites, les comètes ; mais, s'agissant d'objets tout formés, cette cosmogonie ne pouvait être que spéculative. L'observation des étoiles et de la matière interstellaire et les découvertes des dernières décennies du XXe siècle en ce domaine (composition chimique des étoiles, étoiles jeunes, étoiles possédant un disque circumstellaire, molécules interstellaires, etc.) ont fait progressivement entrer la cosmogonie du système solaire dans sa phase scientifique.
Historique
Les théories de l'origine du système solaire ont évolué en fonction même de nos connaissances. Dans la période la plus ancienne, il s'agit d'expliquer les propriétés mécaniques du système solaire : révolution dans le même sens de toutes les planètes autour du Soleil, révolution dans le même sens de la majorité des satellites, distribution des orbites dans l'espace au voisinage du même plan, rotation axiale des planètes et du Soleil dans le même sens (à l'exception, on le sait aujourd'hui, de Vénus, d'Uranus et de Pluton ; mais, sur une durée aussi longue que l'âge du système solaire, ce phénomène apparaît maintenant comme pouvant être dû à une instabilité - dynamique - ayant produit il y a longtemps un changement d'orientation de l'axe de rotation de ces planètes).
Deux groupes de théories se partagent la scène : monistes et dualistes. Dans les premières, le Soleil et les planètes ont une même origine (Descartes, Kant, Laplace) ; dans les secondes, une catastrophe produite par un corps étranger engendre le système solaire en arrachant du Soleil la matière nécessaire (Buffon, Jeans, Jeffreys).
Une grandeur joue un rôle essentiel dans la discussion : le moment cinétique. Dans le mouvement circulaire uniforme, le produit mvr de la masse par la vitesse et par la distance à l'axe de rotation est le moment de la quantité de mouvement ou moment cinétique ; cette grandeur est invariante. Or, dans le système solaire, 97% du moment cinétique sont dans les planètes et 3% seulement dans le Soleil. Toute théorie cosmogonique doit expliquer pourquoi le corps central tourne aussi lentement.
Les théories monistes décrivent la formation du Soleil et des planètes à partir d'une nébuleuse unique qui se contracte et au sein de laquelle se condensent le Soleil au centre et les planètes dans un disque nébulaire qui l'entoure, ce qui implique nécessairement que le Soleil est en rotation rapide au moment de sa formation : or le Soleil tourne lentement. Ces considérations ont mené, au milieu du XIXe siècle, à l'abandon de la théorie nébulaire.
La théorie catastrophique, sous sa forme moderne, suppose que la collision d'une étoile avec le Soleil arrache de celui-ci un filament qui se condense ensuite en planètes. Cette théorie est discutable (H. N. Russell, 1935), si l'on tient compte de la structure interne du Soleil. Étant donné les vitesses stellaires (environ 20 km ( s-1), une collision se faisant à une distance suffisante pour que le filament arraché possède le moment cinétique des planètes est incapable en réalité de produire une telle catastrophe et ne peut soulever qu'une petite vague à la surface du Soleil. Par ailleurs, une collision rasante peut effectivement arracher un peu de matière au Soleil, mais celle-ci ne possède pas le moment cinétique nécessaire. Un argument supplémentaire sur l'instabilité physique du filament (L. Spitzer, 1938) entraîna l'abandon de l'hypothèse catastrophique.
Depuis 1935, un net mouvement de retour s'est fait vers les théories nébulaires (C. F. von Weizsäcker, 1944 ; O. Schmidt, 1957), la difficulté essentielle concernant le moment cinétique s'étant trouvée résolue par la découverte (O. Struve, 1950) que toutes les étoiles analogues au Soleil, sauf si elles sont jeunes ou très jeunes, tournent lentement. La rotation lente du Soleil est donc une propriété commune des étoiles de type solaire ; elle résulte des circonstances de leur formation et de leur évolution et n'est pas particulière au Soleil.
Les développements modernes
Les théories actuelles ne se préoccupent pas uniquement des propriétés mécaniques du système solaire. Elles cherchent aussi à expliquer la composition chimique de la Terre, de la Lune et des météorites et, plus globalement, des planètes telluriques (Mercure, Vénus, la Terre et Mars) et des planètes géantes (Jupiter, Saturne, Uranus, Neptune) ; le cas de Pluton, mal connu en raison de sa distance, est à part. Ensuite, les théories actuelles se penchent particulièrement sur les défauts ou les excès d'abondance de certains éléments par rapport à la composition solaire. Elles s'efforcent enfin d'interpréter les structures cristallines visibles dans les météorites et dans les roches lunaires, ainsi que les abondances des noyaux radiogéniques.
L'ensemble constitue un domaine d'une grande complexité, où l'on cherche dans l'observation des confirmations de tel ou tel modèle. Malgré les interrogations qui subsistent encore sur les circonstances exactes de la formation du système solaire, on peut ainsi dégager un certain nombre de certitudes.
L'âge de la Terre et la formation du Soleil
L'âge de la Terre, des météorites et de la Lune a été trouvé par la mesure de l'abondance des descendants des éléments radioactifs naturels. Il est égal à 4,56 milliards d'années. L'erreur sur la détermination de cet âge est de ± 20 millions d'années.
Le Soleil et la nébuleuse primitive se sont formés par condensation et contraction d'une masse gazeuse en rotation. On en a trouvé une confirmation dans la découverte, dans les amas d'étoiles très jeunes, d'étoiles obscurcies par des nuages de matière absorbante et dont la distribution statistique fait penser à l'orientation au hasard de disques nébulaires.
Amas stellaire très jeune : propriétés
Ce diagramme, classique en physique des étoiles, présente les propriétés caractéristiques de l'amas stellaire très jeune (environ 2 millions d'années d'âge) NGC 2 264 (d'après : M. F. Walker). B est la magnitude apparente d'un astre dans le domaine spectral correspondant à la couleur bleue et V sa magnitude apparente dans le visible.Les étoiles ayant atteint le régime thermonucléaire se trouvent...
Depuis le milieu des années 1980, l'observation de disques protoplanétaires a apporté un support observationnel aux théories cosmogoniques. Mentionnons particulièrement le cas de Bêta Pictoris, étoile située à 52 années de lumière, autour de laquelle on a mis en évidence, grâce notamment à des observations à 10 micromètres au moyen du télescope de 3,6 m d'ouverture de l'E.S.O., une condensation qui pourrait résulter de la présence d'une planète analogue en taille à Saturne, planète qui se manifesterait par des éclipses.
La répartition des distances des planètes dans le système solaire (loi de Bode-Titius) et les relations analogues pour les satellites réguliers des planètes géantes semblent s'expliquer par la répartition compétitive du moment cinétique entre les protoplanètes en formation. La loi des distances est faiblement dépendante de la masse en fonction de la distance à l'objet central.
Le problème de l'origine de la Terre n'est pas distinct de celui de l'origine des planètes et du système solaire. Mais, alors que la cosmogonie s'est longtemps réduite aux théories sur la formation du système solaire, il n'est plus possible aujourd'hui d'ignorer les informations que donne l'astrophysique. La cosmogonie consistait en l'étude de la formation des objets du système solaire : le Soleil, les planètes et leurs satellites, les petites planètes, les météorites, les comètes ; mais, s'agissant d'objets tout formés, cette cosmogonie ne pouvait être que spéculative. L'observation des étoiles et de la matière interstellaire et les découvertes des dernières décennies du XXe siècle en ce domaine (composition chimique des étoiles, étoiles jeunes, étoiles possédant un disque circumstellaire, molécules interstellaires, etc.) ont fait progressivement entrer la cosmogonie du système solaire dans sa phase scientifique.
Historique
Les théories de l'origine du système solaire ont évolué en fonction même de nos connaissances. Dans la période la plus ancienne, il s'agit d'expliquer les propriétés mécaniques du système solaire : révolution dans le même sens de toutes les planètes autour du Soleil, révolution dans le même sens de la majorité des satellites, distribution des orbites dans l'espace au voisinage du même plan, rotation axiale des planètes et du Soleil dans le même sens (à l'exception, on le sait aujourd'hui, de Vénus, d'Uranus et de Pluton ; mais, sur une durée aussi longue que l'âge du système solaire, ce phénomène apparaît maintenant comme pouvant être dû à une instabilité - dynamique - ayant produit il y a longtemps un changement d'orientation de l'axe de rotation de ces planètes).
Deux groupes de théories se partagent la scène : monistes et dualistes. Dans les premières, le Soleil et les planètes ont une même origine (Descartes, Kant, Laplace) ; dans les secondes, une catastrophe produite par un corps étranger engendre le système solaire en arrachant du Soleil la matière nécessaire (Buffon, Jeans, Jeffreys).
Une grandeur joue un rôle essentiel dans la discussion : le moment cinétique. Dans le mouvement circulaire uniforme, le produit mvr de la masse par la vitesse et par la distance à l'axe de rotation est le moment de la quantité de mouvement ou moment cinétique ; cette grandeur est invariante. Or, dans le système solaire, 97% du moment cinétique sont dans les planètes et 3% seulement dans le Soleil. Toute théorie cosmogonique doit expliquer pourquoi le corps central tourne aussi lentement.
Les théories monistes décrivent la formation du Soleil et des planètes à partir d'une nébuleuse unique qui se contracte et au sein de laquelle se condensent le Soleil au centre et les planètes dans un disque nébulaire qui l'entoure, ce qui implique nécessairement que le Soleil est en rotation rapide au moment de sa formation : or le Soleil tourne lentement. Ces considérations ont mené, au milieu du XIXe siècle, à l'abandon de la théorie nébulaire.
La théorie catastrophique, sous sa forme moderne, suppose que la collision d'une étoile avec le Soleil arrache de celui-ci un filament qui se condense ensuite en planètes. Cette théorie est discutable (H. N. Russell, 1935), si l'on tient compte de la structure interne du Soleil. Étant donné les vitesses stellaires (environ 20 km ( s-1), une collision se faisant à une distance suffisante pour que le filament arraché possède le moment cinétique des planètes est incapable en réalité de produire une telle catastrophe et ne peut soulever qu'une petite vague à la surface du Soleil. Par ailleurs, une collision rasante peut effectivement arracher un peu de matière au Soleil, mais celle-ci ne possède pas le moment cinétique nécessaire. Un argument supplémentaire sur l'instabilité physique du filament (L. Spitzer, 1938) entraîna l'abandon de l'hypothèse catastrophique.
Depuis 1935, un net mouvement de retour s'est fait vers les théories nébulaires (C. F. von Weizsäcker, 1944 ; O. Schmidt, 1957), la difficulté essentielle concernant le moment cinétique s'étant trouvée résolue par la découverte (O. Struve, 1950) que toutes les étoiles analogues au Soleil, sauf si elles sont jeunes ou très jeunes, tournent lentement. La rotation lente du Soleil est donc une propriété commune des étoiles de type solaire ; elle résulte des circonstances de leur formation et de leur évolution et n'est pas particulière au Soleil.
Les développements modernes
Les théories actuelles ne se préoccupent pas uniquement des propriétés mécaniques du système solaire. Elles cherchent aussi à expliquer la composition chimique de la Terre, de la Lune et des météorites et, plus globalement, des planètes telluriques (Mercure, Vénus, la Terre et Mars) et des planètes géantes (Jupiter, Saturne, Uranus, Neptune) ; le cas de Pluton, mal connu en raison de sa distance, est à part. Ensuite, les théories actuelles se penchent particulièrement sur les défauts ou les excès d'abondance de certains éléments par rapport à la composition solaire. Elles s'efforcent enfin d'interpréter les structures cristallines visibles dans les météorites et dans les roches lunaires, ainsi que les abondances des noyaux radiogéniques.
L'ensemble constitue un domaine d'une grande complexité, où l'on cherche dans l'observation des confirmations de tel ou tel modèle. Malgré les interrogations qui subsistent encore sur les circonstances exactes de la formation du système solaire, on peut ainsi dégager un certain nombre de certitudes.
L'âge de la Terre et la formation du Soleil
L'âge de la Terre, des météorites et de la Lune a été trouvé par la mesure de l'abondance des descendants des éléments radioactifs naturels. Il est égal à 4,56 milliards d'années. L'erreur sur la détermination de cet âge est de ± 20 millions d'années.
Le Soleil et la nébuleuse primitive se sont formés par condensation et contraction d'une masse gazeuse en rotation. On en a trouvé une confirmation dans la découverte, dans les amas d'étoiles très jeunes, d'étoiles obscurcies par des nuages de matière absorbante et dont la distribution statistique fait penser à l'orientation au hasard de disques nébulaires.
Amas stellaire très jeune : propriétés
Ce diagramme, classique en physique des étoiles, présente les propriétés caractéristiques de l'amas stellaire très jeune (environ 2 millions d'années d'âge) NGC 2 264 (d'après : M. F. Walker). B est la magnitude apparente d'un astre dans le domaine spectral correspondant à la couleur bleue et V sa magnitude apparente dans le visible.Les étoiles ayant atteint le régime thermonucléaire se trouvent...
Depuis le milieu des années 1980, l'observation de disques protoplanétaires a apporté un support observationnel aux théories cosmogoniques. Mentionnons particulièrement le cas de Bêta Pictoris, étoile située à 52 années de lumière, autour de laquelle on a mis en évidence, grâce notamment à des observations à 10 micromètres au moyen du télescope de 3,6 m d'ouverture de l'E.S.O., une condensation qui pourrait résulter de la présence d'une planète analogue en taille à Saturne, planète qui se manifesterait par des éclipses.
La répartition des distances des planètes dans le système solaire (loi de Bode-Titius) et les relations analogues pour les satellites réguliers des planètes géantes semblent s'expliquer par la répartition compétitive du moment cinétique entre les protoplanètes en formation. La loi des distances est faiblement dépendante de la masse en fonction de la distance à l'objet central.
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