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Femmes en lutte et lutte de femmes en Algérie

dimanche 19 septembre 2004, par Hassiba

L’histoire racontée par ces femmes courage a un goût terrible tant les souffrances et les souvenirs étaient encore là.

On frémit devant les images qui défilent sur l’écran, des images alourdies par le silence qui pèse parfois, par les regards profonds qui se cherchent et qui en disent long sur le passé, sur l’histoire d’un pays, sur l’histoire de ces femmes, anciennes moudjahidate, mais surtout celles qu’on appelait les poseuses de bombes, les “bombistes”, chacune racontant Barberousse, mes sœurs. Le documentaire de Hassan Bouabdallah, diffusé la toute première fois à la télévision le 1er novembre 1985, reste un témoignage vivant de ces femmes condamnées et emprisonnées dans les geôles coloniales à la prison Barberousse et qui (certaines d’entre elles) remplissaient la salle d’une présence quasi sacrale.

Elles étaient là à se regarder témoigner d’une époque glorieuse, certes, mais décisive pour l’avenir de la femme qui, en se libérant du joug colonial, s’est libérée définitivement même si, des années plus tard, sa responsabilité, sa maturité, son existence comme être à part entière sont remises en question. Annie Steiner, Djamila Boupacha, la regrettée Baya Hocine, Djamila Bouhired, Malika Koreïchi, Ighilahriz racontaient leur vécu quotidien dans cette prison : les tortures, les privations, les brimades, la résistance par le chant, par l’écrit et par les querelles.

Puis, les images se sont éteintes sur l’écran laissant place aux vers, à la prose, aux lettres écrites en prison, au témoignage, celui de Steiner, d’Ighilahriz qui a souligné la nécessité d’organiser des rencontres entre les moudjahidate et les jeunes, notamment les étudiants, pour leur permettre de mieux connaître l’histoire de leur pays. Il faut souligner aussi la présence et le témoignage qu’a voulu apporter Jacques Charby qui avait appartenu au réseau “Les porteurs de valise”. Ce dernier a connu certaines de ces moudjahidate et partagé avec elles la conviction d’une Algérie indépendante.

Puis, un récital poétique est improvisé et les vers révolutionnaires ont rempli une salle acquise ; c’est vrai que ce n’est pas tous les jours qu’on a la chance de rencontrer celles qui nous ont ouvert la voie... Celles qui ont témoigné par l’écrit, qui rêvaient de leur Algérie libre et indépendante comme Zhor Zerrari qui se souvient du train :

“Mes rêves fous
Se cognent aux barreaux
Se blessent pour retomber
Pantelants dans ma cellule
Le train est déjà loin.”

Cette voix est reprise par Djamila Amrane qui écrit :

“Chaque goutte qui en tombait
Portait le nom d’un frère tué
Et chacune de ces gouttes
M’a brûlée pour toujours.”

Quant à Leïla Djebali, elle tente de se dépouiller de ses cauchemars en écrivant à son lieutenant tortionnaire D. et Anna Gréki dont l’espoir devient source de vie :

“L’avenir est pour demain
L’avenir est pour bientôt
Par-delà les murs clos comme des poings fermés
À travers les barreaux ceinturant le soleil
Nos pensées sont verticales et nos espoirs
L’avenir lové au cœur monte vers le ciel.”

Par Nassira Belloula, Liberté