Le secret des parades amoureuses

Tel qu’elle est présentée au Muséum (1), cette exposition appelle pourtant les explications d’un guide, au moins pour les plus jeunes. Parallèlement, des visites guidées sont prévues à la Ménagerie sur ce thème (2).

Toutes les bêtes se rendent intéressantes au moment de la séduction. Les colibris descendent en piqué jusqu’à 150 km à l’heure. Le paon ouvre la queue, le pigeon ramier, l’alouette ou le rossignol chantent. L’autruche danse, l’oiseau-lyre imite toutes sortes de bruit, sonnerie de téléphone, alarme de voiture ou tronçonneuse. Le paradisier écarte et replie vivement les ailes. Promesse de faire grimper sa partenaire au feuillage ? Non. Le plaisir, chez les animaux, n’est pas prouvé sauf, peut-être, chez les bonobos.

Si les animaux font les beaux, c’est plutôt manière de dire à la femelle qu’ils sont plus vigoureux que leurs rivaux. Et qu’ils lui donneront une plus belle progéniture. Deux principes de base régissent le monde animal : l’honnêteté des signaux et le handicap. La traîne du paon en est l’exemple type. Pour que les signaux soient honnêtes, ils doivent représenter un handicap. Si l’animal supporte ce handicap, cela veut dire qu’il est en bonne santé. Chez les oiseaux, l’intensité du signal coloré est un bon critère de sélection. Les caroténoïdes à l’origine des couleurs sont utilisés dans le fonctionnement du système immunitaire. Et un système immunitaire en bon état assure une bonne descendance. Des pinsons américains, le merle et la mésange utilisent la couleur du bec pour repérer le bon mâle.

« Proche du paradisier, l’oiseau satin reste encore le plus impressionnant en matière de parade », indique Marc Théry (CNRS-Muséum), qui a participé au suivi scientifique de l’exposition. Chez cet oiseau, la femelle choisit son partenaire en fonction de ses constructions. Malgré sa petite taille, il va jusqu’à édifier de véritables huttes sur le sol, puis les orne d’objets bleus, le bleu étant une couleur rare à l’état naturel. Les manakins à barbe blanche ne changent pas de costume en période de séduction, ils utilisent la lumière. Dans les forêts, en début de matinée et en fin de journée, l’éclairage permet de se montrer à son avantage. Les oiseaux ne sont pas seuls à parader en couleur, les pieuvres et les calmars y excellent eux aussi.

D’autres emploient différents arguments de séduction. Le bombyx du mûrier produit des phéromones (substances chimiques volatiles) détectables à 10 kilomètres à la ronde. L’escargot de Bourgogne propose sa bave odorante à sa partenaire. La truie adopte la posture d’accouplement à la seule odeur du mâle quand elle est réceptive. La séduction est partout dans la nature. Elle est aussi matière à vibrations pour l’araignée sur sa toile, ou dans l’eau, pour certains poissons. Ces vibrations sont des signaux sonores pour les poissons des profondeurs. Le béluga communique à longue distance par des ultrasons, comme les baleines et des chauves-souris sur terre.

Mais attention, l’amour peut aussi se révéler pervers. Le chant d’amour du mâle d’une grenouille exotique est capté par une chauve-souris qui la mange. De même, une araignée imite la phéromone d’un papillon de nuit pour le dévorer. Une espèce de luciole utilise le code d’une autre femelle pour manger son mâle. Un jeune prédateur d’une espèce de poisson d’eau douce singe sa femelle pour mieux le surprendre. L’exemple le plus sophistiqué reste encore celui de l’orchidée, qui imite les phéromones d’une abeille et sa forme. Peut-on rapprocher un seul de ces comportements à ceux de l’homme ? Un petit film sans parole propose aux visiteurs de trouver la réponse.

Par Isabelle Brisson, lefigaro.fr

(1) Du 30 mars au 16 janvier 2006.
(2) Le mercredi à 15 heures sur réservation au 01.40.79.36.00.