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Amnesty et le CICR accusent Bush et Blair

mardi 11 mai 2004, par nassim

Amnesty International révèle qu’elle a informé Blair et Bush en mai 2003 sur des abus, y compris des « systèmes de torture », commis par ses soldats et ceux de Washington.

L’organisation internationale de défense des droits de l’homme affirme avoir informé des responsables du Foreign Office et de la Défense de la mort d’au moins un prisonnier détenu par les forces britanniques.

« Ils nous ont dit qu’ils examineraient ce dossier et qu’ils nous contacteraient », affirme Nicole Choueiry, le porte-parole de l’ONG pour le Moyen-Orient, ajoutant que « depuis, personne ne nous a contactés ». Amnesty regrette que Londres et Washington n’aient pas opté pour « une enquête impartiale et civile menant à la vérité » mais pour « des enquêtes secrètes de la police militaire qui ne bénéficient pas de l’indépendance requise par les lois internationales ». Renouvellement de l’appel à une enquête indépendante ? Probable. Amnesty a, dans une lettre ouverte adressée au président américain George W. Bush et rendue publique vendredi dernier, appelé Washington à faire toute la lumière sur les « crimes de guerre » en Irak et à juger les responsables jusqu’« au plus haut niveau ».

Amnesty ne cloue pas au pilori les Américains et les Britanniques sur les « actes » de leurs soldats en Irak seulement. Elle dénonce dans un autre rapport la responsabilité des troupes occidentales dans la croissance de l’industrie de l’esclavage sexuel au Kosovo et en Bosnie. Deux mille femmes, en majorité des mineures, selon Amnesty, ont été amenées de Moldavie, Ukraine, Russie et Roumanie par la mafia locale pour être « vendues jusqu’à 2 000 livres
britanniques » à leurs « propriétaires ». « Violées à titre d’intimidation, battues, menacées avec des armes à feu, enchaînées, enfermées dans le noir, ces filles, ajoutent Amnesty, sont interdites de sortie.

L’ONG affirme n’avoir pu « trouver trace d’aucune procédure intentée par des pays de l’OTAN contre leurs soldats impliqués dans le racket ». Le pavé d’Amnesty et celui du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), qui affirment avoir communiqué en février un rapport à Londres et Washington faisant état de « problèmes dans tous les lieux de détention », mettent Tony Blair et George W. Bush en mauvaise posture. D’autant que les responsables britanniques et américains multiplient les déclarations et les contradictions. Le 4 mai, le secrétaire d’Etat aux Forces armées, Adam Ingram, a déclaré à la Chambre des communes n’avoir reçu aucune information « négative » de qui que ce soit sur de mauvais traitements des prisonniers irakiens.

Dimanche 9 mai, Geoff Hoon, le ministre de la Défense, celui-là même qui a été montré du doigt après la mort « suspecte » de l’expert en armements irakiens, David Kelly, a reconnu que le gouvernement « enquêtait » sur certains cas « depuis plusieurs mois ». Pour mettre au pied du mur la Maison-Blanche, le Wall Street Journal publie le rapport confidentiel de 24 pages établi par une équipe du Comité international de la Croix-Rouge, après les visites dans les prisons irakiennes de fin mars à octobre 2003. Ce rapport a été adressé par le CICR à l’administrateur américain en Irak, Paul Bremer, et au commandant militaire des forces de la coalition en Irak, le général Sanchez, sur le traitement des prisonniers irakiens. Un constat : les excuses présentées par Bush et Blair « pour les sévices infligés aux prisonniers en Irak par leurs soldats respectifs » ne semblent pas « convaincre » grand-monde. A Washington et Londres, l’indignation est réelle. Les Américains et Britanniques, qui découvrent l’absence des armes de destruction massive en Irak, plus d’une année après la chute de Saddam Hussein, demandent des comptes et des têtes.

Djamel Boukrine, Le Matin