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Sétif d’autrefois et d’aujourd’hui

lundi 22 mars 2004, par nassim

Dans un passé très récent, Sétif jouissait de l’enviable statut de la ville la plus propre à travers tout le territoire national.

C’est là l’avis de toutes les personnes qui y transitaient. Au jour d’aujourd’hui, c’est loin d’être le cas, et cet avis ne fait plus l’unanimité. Les Sétifiens constatent avec désespoir la dégradation et la décrépitude de leur cité où le cadre de vie et l’environnement subissent les contrecoups d’une “urbanisation” sauvage et effrénée. La forêt de Zenadia qui borde l’université est devenue un lieu de débauche à ciel ouvert aggravant le sentiment d’insécurité.

Même chose pour celle de Boussellam où le parking et les aires de jeux abandonnés sont devenus un lieu de rencontres prohibées. Que dire alors des cités-dortoirs qui ceinturent la ville, dénommées froidement et impersonnellement 1 000, 400, 500, 600, 1 006, 1 014... logements et où les habitants n’existent que sous forme de quotas... L’insalubrité y règne en maîtresse absolue, les transformant en véritables dépotoirs.

Des détritus de toutes sortes jonchent le sol : sachets en plastique, bouteilles, ordures ménagères, dégagent des odeurs insupportables, faisant le bonheur des rats vecteurs de maladies contagieuses surtout à l’approche des grandes chaleurs de l’été. Même le centre-ville n’a pas échappé à la dégénérescence : trottoirs sales, squattés par des vendeurs de cigarettes et d’objets de toutes sortes allant des effets vestimentaires aux meubles, en passant par la quincaillerie et les ustensiles de ménage.

La nuit tombée, les arcades de la rue principale se transforment en refuge pour les mendiants et les SDF (sans domicile fixe), chaque jour davantage plus nombreux et abandonnés à leur triste sort. Le marché Abbacha-Amar, sujet à de nombreuses controverses, demeure telle une plaie béante en plein cœur de la cité. Toutes les ruelles adjacentes sont inaccessibles, envahies qu’elles sont par des “commerçants” qui étalent diverses marchandises et où les produits alimentaires périssables sont exposés aux caprices du temps, à la poussière et où les règles les plus élémentaires d’hygiène sont ignorées, au détriment de la santé des citoyens.

Un peu plus bas, au Sud, la fameuse cité Kerouani est devenue un enfer pour ses résidents qui subissent le diktat des grossistes de l’alimentation générale depuis des années, malgré leurs innombrables démarches auprès de toutes les autorités concernées. Aujourd’hui, las et usés par tant d’efforts inutiles, ils se sont résignés, acceptant leur sort et perdant tout espoir de voir un jour leur problème résolu.

Durant la journée, ils observent, impuissants, le ballet incessant des camions chargeant et déchargeant leurs cargaisons dans l’espace réservé à leurs enfants cloîtrés entre quatre murs, dans un tintamarre assourdissant, tout en dégageant les gaz d’échappement nocifs.
En fin de journée ce site se transforme en une véritable poubelle. Ainsi, Sétif, à l’instar des autres grandes villes du pays, s’est laissée défigurer telle une belle femme abusée de ne pas être entretenue à sa juste valeur.

Elle n’a pu résister longtemps aux assauts violents d’un exode rural des plus massifs et dont les dommages collatéraux sont multiples, générant un affairisme de bazar, une caste de nouveaux riches affichant sans vergogne et avec ostentation leurs biens souvent mal acquis, précipitant par là la déliquescence civique et la perte de tout réflexe urbain. La petite ville de province raffinée, ombragée, paisible, mais travailleuse, abritant des maisons cossues sans prétention et des citadins sobres et discrets, bref une ville ayant une âme, n’est plus qu’un lointain souvenir que les nostalgiques évoquent dès qu’ils sont confrontés à des situations où l’incivisme, hélas ! prend souvent le dessus, pour devenir un comportement banalisé.

La gestion d’une ville ne relève certainement pas uniquement des seuls pouvoirs publics, et il serait trop facile de les pointer du doigt et les accuser de toutes les carences. La ville se gère par une politique du même nom, axée essentiellement sur le mouvement citoyen pour ne pas être en reste avec la modernité.

source : Liberté