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Une fatwa contre Ben Laden

dimanche 13 mars 2005, par nassim

Les musulmans espagnols ont lancé une fatwa contre Ben Laden et décrété le leader fondamentaliste et Al-Qaeda « hors de l’islam ».

Une fatwa lancée contre Oussama ben Laden et des prêches axés sur la « condamnation sans appel du terrorisme » : les musulmans d’Espagne ont souhaité être partie prenante des commémorations des attentats islamistes du 11 mars 2004 à Madrid, où ont péri 191 personnes.

Alors que le roi du Maroc et commandeur des croyants Mohammed VI assistait vendredi aux cérémonies d’hommage aux victimes, la Commission islamique ­ interlocuteur officiel du gouvernement ­ a ainsi décrété jeudi une fatwa, un texte de cinq pages qui décrète « hors de l’islam Oussama ben Laden, Al-Qaeda et tous ceux qui prétendent justifier le terrorisme en se fondant sur le Coran ».

Couteaux. L’initiative est venue des deux secrétaires généraux de cet organe représentatif des quelque 500 000 musulmans d’Espagne : l’imam Riay Tatari, d’origine syrienne, qui contrôle l’Union des communautés islamiques d’Espagne (Ucide), ultramajoritaire ; et Mansour Escudero, un Espagnol converti, à la tête de la Fédération des entités religieuses islamiques (Feeri). A couteaux tirés pendant des années, ces leaders ont été contraints de s’entendre au lendemain des attentats d’Atocha. « Nous, musulmans, devons chaleureusement remercier l’ensemble du peuple espagnol », a déclaré Riay Tatari à la radio Ser, en soulignant que les Espagnols ont su « différencier clairement terrorisme et population musulmane » et voir que ces attentats étaient le fait d’« une minorité animée d’une haine psychopathe ». La fatwa contre Ben Laden remercie aussi « la société et l’administration espagnoles » de s’être montrées « exemplaires » et de s’être abstenues de « mesures disproportionnées » contre leur communauté. Au lendemain du 11 mars 2004, des tensions étaient apparues entre le gouvernement Zapatero, vainqueur des législatives du 14 mars, et certains dirigeants musulmans. La plupart des poseurs de bombe ayant assidûment fréquenté certaines mosquées de Madrid, le ministre de l’Intérieur avait exigé un « contrôle » des imams. L’annonce avait scandalisé la Commission islamique, avant qu’elle n’accepte vite l’idée d’une « vigilance renforcée dans les petites mosquées ».

Honte. Sur le plan diplomatique, Zapatero a orchestré un rapprochement spectaculaire avec le Maroc, avec lequel Madrid, sous Aznar, avait été au bord d’un conflit armé en 2002 pour le contrôle de l’îlot Perejil (Leila, au Maroc). A l’automne dernier, Mohammed VI a exprimé sa « honte que la plupart des responsables [du 11 mars] soient d’origine marocaine ». Depuis un an, hormis quelques cas isolés, aucun acte islamophobe majeur n’est à déplorer en Espagne. Dans le quotidien El País, un Marocain installé depuis quatorze ans à Madrid témoigne. A un commerçant qui refusait de lui louer un local « à cause de la tuerie du 11 mars », Farid Itaiben a répondu : « Je sais bien de quoi tu me parles. Mon frère y est mort. »

Par liberation.fr